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Paul et l’Éternel Féminin (2) | Le Lien Urantien — Numéro 57 — Hiver 2011 — Table des matières | Quiz Maxien n°8 Les questions |
Quel merveilleux témoignage ne nous laisse-t-elle pas comme épouse et comme mère ! Quel courage pour avoir su affronter et surmonter bien des difficultés ! En cela, Marie mérite notre admiration. Marie n’était pas un être à part, dotée dès sa naissance de facultés hors du commun des mortels ; elle faisait partie des humains avec toutes leurs faiblesses, mais aussi toutes leurs forces.
L’apparition de l’ange Gabriel et surtout ses promesses ont marqué profondément Marie qui a montré une fidélité et une constance remarquables dans les prédictions concernant son fils aîné. Cette conviction forte et soutenue a aussi été renforcée par la rencontre avec sa cousine Élisabeth. Ce que Marie retint surtout des paroles de Gabriel, ce fut le mot « libérateur » oubliant un peu trop vite que le libérateur en question se situerait sur un plan « spirituel ». LU 122:2.3 Marie demeura obstinément attachée à cet espoir fou et insensé que son fils s’imposerait comme le « Libérateur » LU 137:4.6 et qu’elle-même occuperait la place glorieuse de « reine mère ». LU 137:3.7 C’est ainsi que Marie passa tant d’années à se méprendre totalement sur la vocation de Jésus et à souffrir que l’orientation prise par celui-ci soit si éloignée de celle qu’elle avait si farouchement espérée. Il fallut les événements douloureux de la Passion pour que Marie commence enfin à comprendre et que ses « yeux spirituels » finissent par s’ouvrir.
De tous les couples vivant en Palestine au moment où Micaël prépara son effusion, Joseph et Marie formaient la combinaison idéale de vastes parentés raciales et de dons de personnalité supérieurs à la moyenne. (LU 122:1.3) Parmi les aïeux de Marie il y avait beaucoup de femmes parmi les plus remarquables de l’histoire d’Urantia. Quoique Marie fût une femme ordinaire de son temps et de sa génération, d’un tempérament assez normal, elle comptait, parmi ses ancêtres, des femmes aussi illustres que Annon, Tamar (fille de Juda, l’un des fils de Jacob), Ruth (la Moabite qui épousa Boaz), Bethsabée (épouse de David, mère de Salomon), Ansie, Cloa, Eve, Anta et Ratta. Nulle femme juive de l’époque ne possédait un lignage ayant en commun des ancêtres plus illustres ou remontant à des origines plus prometteuses. (LU 122:1.2) Les ancêtres de Marie comme ceux de Joseph étaient caractérisés par la prédominance d’individus vigoureux mais de niveau moyen, sporadiquement rehaussés par de nombreuses personnalités hors ligne, s’affirmant dans la marche de la civilisation et de l’évolution progressive de la religion.
Ce qui caractérisait Marie, c’était sa gaieté : « elle était très rarement abattue et possédait un naturel toujours rayonnant » (LU 122:5.2) Ce ne fut qu’à la mort de Joseph, le 25 septembre de l’an 8 , que Marie laissa libre cours à l’étendue de sa peine et de son chagrin. Mais son caractère optimiste et déterminé se répercuta positivement sur la personnalité de Jésus. Contrairement à Joseph qui était d’une droiture impeccable, Marie n’avait pas les mêmes scrupules. Marie fit pression sur Joseph pour permettre à Jésus de modeler de l’argile à la maison, pourvu qu’il promette de ne poursuivre à l’école aucune de ces activités contestables. (LU 124:1.5) On retient de Marie son indiscutable allant et son courage remarquable pour faire face aux difficultés de la vie, en un mot, sa personnalité rayonnante, même si, contrairement à Joseph qui « inclinait plus vers le concept spirituel du Messie attendu » (LU 122:5.10), elle resta enfermée dans une vision partagée par la majorité des Juifs : … le Messie qui serait rapidement reconnu comme le juste et légitime souverain du monde entier. (LU 135:5.4)
Comme c’était la coutume juive, Joseph et Marie durent patienter deux ans de fiançailles avant de pouvoir enfin vivre ensemble ; le mariage eut lieu à la fin mars de l’an 8 avant l’ère chrétienne. (LU 122:2.2) De cet amour naquirent neuf enfants (six fils — Jésus étant l’aîné — et trois filles). Leurs dix-huit ans de vie commune, interrompue à la mort de Joseph, furent marqués par la qualité exemplaire de leur amour. Joseph et Marie expérimentèrent, par leur mariage, « la compréhension intime et la coopération efficace, qui sont les meilleures choses pour le bonheur des parents, le bien-être des enfants et l’utilité sociale ». (LU 83:6.8) Ce fut une « association pour toute une vie d’abnégation, de compromis, de dévouement et de consécration généreuse à la culture des enfants » (LU 83:7.6)
Par les paroles de l’ange Gabriel, Marie se voyait investie d’une mission grandiose : mettre au monde « l’enfant de la destinée » qui inaugurerait « le royaume des cieux sur la terre et parmi les hommes »… Une hiérarchie très nette était établie entre les annonciations de Gabriel à Élisabeth et à Marie : le fils d’ Élisabeth serait uniquement « le précurseur » du fils de Marie, et il aurait pour mission de devoir « annoncer la venue du guérisseur de l’âme du peuple juif et du libérateur spirituel de toute l’humanité » (LU 122:2.3). Ce fut Élisabeth — et non Marie — qui fit preuve de la plus grande foi dans les paroles de Gabriel : Elisabeth contribua beaucoup à consolider la confiance de Marie dans la vision de Gabriel, de sorte que Marie retourna chez elle plus amplement vouée à la vocation d’être la mère de l’enfant de la destinée. (LU 122:2.6)
L’annonce de Gabriel à Marie fut faite le jour qui suivit la conception de Jésus, et ce fut le seul événement surnaturel lié à l’entière expérience de Marie consistant à porter et à mettre au monde l’enfant de la promesse. (LU 122:3.4) Marie avait un caractère intrépide et dynamique ; elle ne tenait pas à ce que la naissance imminente de son enfant se fasse en l’absence de son mari. Elle sut convaincre Joseph de l’accompagner… Le Livre d’Urantia fournit de nombreux exemples de ce que fut l’amour de Marie pour Jésus. Nulle mère ne fut jamais plus dévouée à son enfant. (LU 123:0.2) A Alexandrie, « Marie fut tentée de garder Jésus à ses côtés. Elle craignait que quelque chose lui arrivât si l’on permettait à Jésus de jouer dans le jardin avec les autres enfants ». (LU 123:0.2) Il fallut toute l’insistance de Joseph, avec l’appui de sa parenté, pour convaincre Marie que cette ligne de conduite priverait Jésus de la précieuse expérience d’apprendre à s’adapter aux enfants de son âge. Seule une mère aimante peut savoir le poids que Marie eut à porter dans son cceur pour la sécuritéde sonfils durantces années de sa petite enfance et de sa prime enfance. (LU 123:0.2)
Marie était douée d’un grand sens pratique et avait de remarquables aptitudes dans l’exécution des tâches de la vie courante ; elle était « d’une habileté au-dessus de la moyenne dans la plupart des arts ménagers de l’époque ». (LU 122:5.7) C’est grâce à sa mère et dès son plus jeune âge que Jésus apprit toutes les connaissances et le savoir-faire dans les travaux de la ferme (jardinage, plantes et fleurs) ; il sut très vite « traire la vache de la famille et prendre soin des autres animaux » (LU 123:5.15); il apprit à faire du fromage et à tisser, car « Marie était une tisseuse experte ». (LU 122:5.7) Ce fut Marie qui accompagna d’abord Jésus dans son apprentissage scolaire ; elle l’aida même à « parler couramment le dialecte galiléen de la langue araméenne ». (LU 123:3.1) Ce fut une expérience éprouvante pour Joseph et Marie que d’élever un enfant présentant cette combinaison sans précédent de divinité et d’humanité. Il faut leur reconnaître de grands mérites pour avoir accompli avec tant de fidélité et de succès leur devoir de parents. (LU 124:4.4)
Pour Marie, la mort de Joseph était d’autant plus insupportable et douloureuse que celuici « avait été un mari et un père exceptionnels et il manquait à tous ». (LU 126:2.8) La qualité d’amour de Joseph et de Marie avait été remarquable ; ils avaient été unis par des liens très tendres et une communion de cœurs, malheureusement trop rares chez les humains. De plus,
Marie était enceinte depuis deux mois de son dernier enfant, qui serait une fille du nom de Ruth.
« Rébecca, la fille aînée d’Ezra, un riche marchant et négociant de Nazareth, découvrît qu’elle devenait lentement amoureuse de ce fils de Joseph ». (LU 127:5.1) … Marie décida de tout mettre en œuvre pour dissuader Rébecca d’épouser Jésus. Ce furent des raisons d’intérêt personnel, tenant compte certes des besoins matériels et financiers procurés par Jésus, mais ne prenant absolument pas en considération la position de celui-ci. Si Jésus s’engageait par le mariage avec Rébecca, quels seraient alors les moyens de subsistance ? Sans en informer Jésus, Marie, accompagnée de Miriam, alla « directement trouver Rébecca pour l’informer honnêtement de leur croyance que Jésus était un fils de la destinée et qu’il allait devenir un grand guide religieux, peut-être le Messie. » (LU 127:5.1)
Pour Marie, le succès spectaculaire de Jean le Baptiste était la confirmation que les annonces de Gabriel à Élisabeth comme à elle-même étaient sur le point de se concrétiser. C’est pourquoi, au retour de Jésus après sa rencontre avec le Baptiste, Marie était convaincue que l’heure de son Fils était arrivée. Marie frémissait d’espérance. Elle croyait que la promesse de Gabriel était près de se réaliser. Elle s’attendait à voir bientôt toute la Palestine saisie et frappée de stupeur par la révélation miraculeuse de son fils en tant que roi surnaturel des Juifs. (LU 137:3.5) Marie n’avait pas été aussi joyeuse depuis des années. Elle se rendit à Cana dans l’état d’esprit d’une reine-mère allant assister au couronnement de son fils. (LU 137:3.7) Le jour de la noce, Marie fut profondément déçue d’apprendre que Jésus n’accéderait pas à sa demande. Elle dit à Jacques : « Je ne puis le comprendre. Que signifie tout cela? N’y aura-t-il pas de fin à son étrange conduite ?» Jacques et Jude tentèrent de consoler leur mère. (LU 137:4.5) Dans les jours qui suivirent, rien ne se produisit comme l’espérait Marie : le royaume de gloire temporel pour son fils tel qu’elle l’avait tant espéré ne correspondait pas à ce que Jésus avait décidé. Sa foi, qui s’était élevée à de telles hauteurs à Cana, sombra maintenant dans une nouvelle dépression. Elle en revenait toujours à son exclamation maintes fois répétée : « Je ne parviens pas à le comprendre. Je ne parviens pas à m’expliquer ce que tout cela signifie ». (LU 137:7.1) Marie passa par des moments d’espoir insensé en croyant que Jésus allait s’affirmer aux yeux de tous comme le Messie et par des moments de profond découragement. « Mais la femme de Jacques contribua grandement à soutenir le courage de Marie » (LU 137:7.1)
Les pharisiens avaient fait d’énormes efforts pour convaincre Marie que Jésus était un grand risque de déshonneur et d’opprobre pour toute la famille ; il fallait, par conséquent, tout mettre en œuvre pour que Jésus abandonne la mission qu’il avait entreprise. Marie disait : « Je sais que je pourrai influencer mon fils si seulement il voulait venir à la maison et m’écouter. » (LU 154:6.2) Quand Marie arriva dans la maison de Zébédée, Jésus était en pleine allocution et il n’était pas possible d’entrer. Marie ne se rendait pas compte de l’importance du message de séparation de Jésus à ses disciples et ne savait pas non plus que son fils pourrait être arrêté à tout moment. Elle croyait réellement que Jésus s’arrêterait de parler et viendrait les saluer dès qu’il serait averti de leur présence. (LU 154:6.4) Aussi fut-elle anéantie au point de s’évanouir quand elle entendit, notamment, ces paroles de Jésus : « Qui est ma mère et qui sont mes frères ?.. Je n’ai pas de mère, je n’ai pas de frères… Quiconque fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, celui-là est ma mère, mon frère et ma sour ». (LU 154:6.5) Et, à une femme qui faisait l’éloge de Marie: « Béni soit le ventre qui t’a porté et bénis soient les seins qui t’ont allaité » Jésus devait répondre : « Non, béni soit plutôt celui qui entend la parole de Dieu et ose lui obéir. » (LU 154:6.7) Marie et les frères de Jésus croyaient qu’il ne les comprenait pas et qu’il s’était désintéressé d’eux ; ils ne se rendaient pas compte que c’était eux qui ne réussissaient pas à le comprendre. Ce ne fut pas Jésus qui abandonna les membres de sa famille terrestre pour accomplir l’œuvre de son Père — ce furent eux qui l’abandonnèrent. (LU 154:6.8-9)
On ne peut pas reprocher à Marie de ne pas avoir cru dans les paroles de l’ange Gabriel : « Ton fils inaugurera le royaume des cieux sur la terre et parmi les hommes » (LU 122:3.1) car, toute sa vie durant, elle resta accrochée à cette promesse, mais elle n’en comprit pas du tout le sens. C’est pourquoi elle s’efforça, en vain, de convaincre Jésus d’adhérer au groupe des zélotes venus de Jérusalem à Nazareth pour recruter de nouveaux adhérents. Ce fut un affrontement avec Jésus, Marie allant jusqu’à lui signifier que son refus d’épouser la cause nationaliste, comme elle le lui ordonnait, était de l’insubordination. Durant tout le ministère du Maître, Marie fut incapable de saisir le moins du monde que Jésus était appelé à promouvoir une œuvre et une action qui n’avaient rien à voir avec les espoirs insensés de gloire et de puissance terrestres partagés par la majorité du peuple juif. Ce ne fut qu’à partir des événements tragiques de la Passion et de l’apparition de Jésus ressuscité à sa famille que Marie enfin commença à comprendre. Le Maître se rendit visible aux membres de sa famille terrestre et à leurs amis, vingt personnes en tout. Il leur dit : « Que la paix soit sur vous. Salutations à ceux qui furent proches de moi dans la chair et communion pour mes frères et soeurs dans le royaume des cieux. Comment avez-vous pu douter ? Pourquoi avez-vous attendu si longtemps avant de choisir de suivre de tout cœur la lumière de la vérité? » (LU 190:2.6) Malgré tous les efforts de Jésus pour convaincre que sa mission était d’ordre spirituel et non de gloire temporelle, le Maître échoua auprès de sa mère. Marie et sa famille, et surtout son père, tenaient à l’idée du Messie en tant que libérateur temporel et chef politique. (LU 122:5.10)
Au Golgotha, Jésus chargea Jean d’une mission capitale : « Va vers ma mère et ramène-la pour qu’elle me voie avant que je ne meure. » (LU 186:0.1) Nul ne peut réaliser à quel point le cœur de Marie saigna lorsqu’elle vit son fils aîné dont les souffrances sur la croix devenaient de plus en plus insupportables.
La quatrième apparition de Jésus ressuscité a dû réjouir grandement le cœur de Marie : Le Maître se rendit visible aux membres de sa famille terrestre et à leurs amis. (LU 190:2.6) Cette fois Marie pouvait enfin prendre conscience de ce qu’avait été la vocation véritable de son fils, vocation qu’elle avait si mal comprise jusque là.
Après la Pâque, Marie retourna à Bethsaide où elle vécut chez Jean durant le reste de sa vie terrestre. (LU 187:4.7)
Selon les instructions de Jésus sur la croix, Marie devait finir sa vie, chez Jean, le fidèle et dévoué ami de Jésus. Nul autre que cet apôtre ne pouvait aussi bien révéler toute la richesse de la mission de Jésus à cette femme qui avait si mal compris son fils. Nul autre que lui ne pouvait convaincre Marie que Jésus lui avait toujours porté un amour filial très vif, alors que bien souvent elle en avait douté. Mais Marie ne devait pas prolonger trop longtemps sa vie dans la demeure de Jean, car « elle survécut à peine une année à la mort de Jésus » (LU 187:4.7) Nul doute qu’elle vécut les derniers moments de son vivant dans la paix, assistée de la présence dévouée de Jean.
Yves Guillot-Goguet
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