© 2001 Jean-François Drouet
© 2001 Association Francophone des Lecteurs du Livre d'Urantia
Dans une province chinoise vivait un maçon.
Il avait travaillé pour plusieurs entrepreneurs et il leur avait donné entière satisfaction.
Un jour, il fit la connaissance d’une jeune femme qui travaillait avec le plus grand architecte de la région. Ils se plurent, s’aimèrent et se marièrent.
Quelques mois plus tard, un heureux événement s’annonça et cela donna l’idée au maçon de bâtir sa propre maison, au lieu de continuer à loger en location.
Il en parla à sa femme qui se réjouit du projet et lui suggéra de faire appel à son patron. Lui-même le connaissait de réputation et sa femme confirma que c’était un grand maître en Feng Shui pour le choix du terrain, de l’emplacement et de l’orientation de la maison, l’aménagement de l’environnement et les dispositions intérieures.
Mais il savait qu’il fallait attendre longtemps, d’abord pour qu’il soit disponible pour chacune des étapes de choix.
— Écoute dit-il à sa femme, jusqu’à maintenant j’ai travaillé pour les autres, il est temps que je travaille pour moi. J’ai quand même acquis une bonne expérience et je suis bien capable de me débrouiller tout seul. J’ai déjà repéré un terrain qui est juste à côté de l’ensemble que ton architecte est en train d’aménager.
Ils prirent la voiture pour aller voir le propriétaire du terrain. Il était énervé car il sentait les réticences de sa femme et en sortant, il accrocha la borne et érafla la voiture. Puis en route, ils se trompèrent de chemin.
— Tu vois, tu t’énerves, c’est tout. D’abords, j’ai mes idées sur ma maison et il n’y a pas de raison pour que ton grand architecte m’impose les siennes.
— Tu es injuste, parce que si mon architecte, comme tu dis, respecte les grandes lois de la nature, il tient compte aussi des aspirations de chaque personne.
Enfin, ils arrivèrent chez le propriétaire et, après discussion, conclurent l’achat. Très rapidement, après avoir fait le relevé du terrain, il commença les plans et le soir il avait pratiquement terminé.
Le lendemain matin, il s’éveilla avec un fort mal de tête.
— Je ne sais si c’est ce qu’on a mangé hier au soir, mais j’ai un de ces mal au crâne !
— Ça m’étonne, j’ai mangé comme toi et je n’ai rien.
—Ou alors, je subis une influence néfaste. Je vais aller voir notre médecin.
Celui-ci après lui voir pris le pouls, puis soigneusement ausculté et interrogé lui dit : « Ma foi, je ne trouve pas grand chose; les circuits de Chi sont bons, tout au moins au niveau du corps. Mais, croyez-en ma vieille expérience, la douleur est toujours le signe d’une coupure de circulation d’énergie, et il n’y a pas que les énergies corporelles. Il est possible que sans le vouloir et sans le savoir vous ayez rompu votre harmonie avec le grand Tout. Je vais quand même essayer de vous soulager.
Effectivement, après une séance d’acupuncture, il se sentit mieux.
Les jours suivants, il avait presque fini la tranchée de détournement, lorsqu’il sentit une douleur dans les reins. La journée étant presque finie, il s’arrêta et rentra chez lui.
Mais le lendemain matin lorsqu’il se réveilla, la douleur était beaucoup plus vive, surtout quand il voulut se lever. Pressentant que sa femme allait encore lui parler de signe, il prit les devants.
— Cette fois, la cause de ma douleur est bien claire et tout à fait physique. Tu ne vas pas pouvoir parler de signe de destin ou je ne sais quoi !
— Pas si sûr ; d’abord parce que la cause initiale, dans ce genre de cas est à rechercher dans l’état général qui ne dépend pas seulement de la nourriture mais aussi du mental.
— Tu sais bien que notre moral agit sur la santé. L’invisible est bien souvent à l’origine de la manifestation visible. La foudre est due à la lente et invisible accumulation des charges électriques.
Mais excuse-moi, il faut que je me dépêche, si tu veux que je passe voir le médecin pour qu’il vienne te voir. D’autant plus que l’architecte m’a demandé d’aller directement à son bureau ce matin. Je me demande si ce n’est pas pour parler de tes projets.
Effectivement l’architecte avait eu connaissance des travaux entrepris par le maçon.
— Ce que ton mari entreprend est incorrect à bien des égards. L’emplacement et l’orientation de sa construction contreviennent aux règles de l’art. Même s’il ne voulait pas faire appel à nos services, intervenant en prolongement de l’espace que nous aménageons, la moindre correction eut été de prendre contact. Nous l’aurions fait bénéficier de nos conseils. Le pire c’est le détournement de la source, alors que nous comptons favoriser cette zone de la présence d’eau vive. Faute de réviser son projet, il va au procès. Néanmoins qu’il réfléchisse, pour son bien comme pour celui de son entourage. Donne lui le livre de Feng Shui et dis-lui bien que ma porte est toujours ouverte.
La suite de l’histoire ?
Elle n’est pas écrite car elle dépend du libre arbitre du maçon.
Jean-François Drouet