© 2009 Max Masotti
© 2009 Association Francophone des Lecteurs du Livre d'Urantia
Tolérance : Du latin tolerare, supporter. Disposition à admettre chez les autres des manières de penser, d’agir, des sentiments différents des nôtres. Dans la vie sociale, la vertu la plus utile est la tolérance.
Intolérance : Attitude haineuse, agressive à l’égard de ceux avec lesquels on diffère d’opinion, de croyance.
La tolérance fait partie des fruits de l’esprit, un bien grand mot, qui, pris à la lettre peut faire de nous des personnes dénuées du sens de jugement. Mais, une question se pose : doit-on pousser la tolérance jusqu’à tolérer l’intolérance? Que deviendrait un monde possédant une tolérance sans limite ?
Le philosophe américain John Rawls, dans son ouvrage de philosophie morale A Theory of Justice (Une Théorie de la justice), établit que la tolérance est une vertu nécessaire à l’établissement d’une société juste. Mais il pose la question « Doit-on tolérer les intolérants ? ». Rawls y répond positivement, indiquant que de ne pas les tolérer serait intolérant et donc une injustice. Par contre il établit qu’une société tolérante a le droit, et le devoir, de se protéger et que ceci impose une limite à la tolérance : une société n’a aucune obligation de tolérer des actes ou des membres voués à son extermination.
Cela devient un cercle vicieux; devons-nous tout tolérer ou non et dans quelle mesure devrions-nous tolérer? Un homme qui pratiquerait la tolérance à outrance peut devenir un imbécile et tomber dans cette imbécillité qui lui fait perdre le sens des réalités. La tolérance peut être la porte ouverte à tous les excès, car sous le couvert de ce mot, tout le monde pourrait se permettre n’importe quoi.
Il faut donc joindre à cette tolérance un juste jugement de ce qui est faisable ou non : ce que Jésus savait si bien faire. Le Maître était un être tolérant mais, lorsqu’il a chassé les marchands du temple qui eux, s’étaient bien tolérés de faire de la maison du Père un lieu qui leur permettait de s’enrichir, il était normal, à moins qu’il tomba dans l’imbécillité, que Jésus arrêta cette tolérance et qu’il appliqua la justice dans un lieu sacré, (ce que certains pourraient interpréter comme étant de l’intolérance).
Nous sommes conscients qu’il est juste d’essayer de pratiquer la tolérance envers les autres mais, avec un sens des réalités et un jugement équilibré car, face à une autre personne, la tolérance ouvre des portes, l’intolérance les ferme cependant, là où s’arrête la tolérance, l’intolérance débute.
Mais surtout ne défendons pas le point de vue du Marquis de Sade qui disait : « La tolérance est la vertu des faibles ». Je préfèrerais citer Jules Lemaître qui déclarait que : « La tolérance est la charité de l’intelligence », ou celle d’Horace qui relatait que : « La patience rend tolérable ce qu’on ne peut empêcher ». Ils avaient tous les deux raison.
Historiquement, la première notion de tolérance est celle défendue par John Locke dans sa Lettre sur la tolérance, qui est définie par la formule « cessez de combattre ce qu’on ne peut changer », pourtant, Johann Wolfgang von Goethe énonçait : « Si je suis un sot, on me tolère ; si j’ai raison, on m’injurie ».
Mais alors qu’est ce que la tolérance? Vladimir Jankélévitch nous dit que la tolérance est un moment provisoire et qu’elle permet à ceux qui ne s’aiment pas de se supporter mutuellement, en attendant de pouvoir s’aimer. Certains couples vont se reconnaître dans cette citation mais, je préfère celle de Pauline Vaillancourt qui nous informe que l’esprit de tolérance est l’art d’être heureux en compagnie des autres ou, celle de Gilles Perrault qui nous dit que la tolérance, c’est la civilisation par excellence cependant, mon choix se porte plutôt sur un proverbe Persan qui mentionne que la tranquillité de deux mondes repose sur ces deux mots : bienveillance envers les amis, tolérance à l’égard des ennemis, et je retrouve dans cette citation ce qu’aurait pu exprimer le Maître.
Il est vrai que vivre en société, dans les sociétés modernes, c’est apprendre à cohabiter dans ses différences, à aménager les libertés et le respect d’autrui mais pour nous, Gaulois, serait-il possible de pratiquer la tolérance comme celle des Danois qui acceptent qu’une radio néo-nazie émet en parfaite légalité 6 h par semaine et qui pensent qu’il vaut mieux les laisser s’exprimer, comme cela tout le monde voit à quel point ils sont stupides et ridicules ?
J’en doute fort et pourtant la tolérance se définit en effet comme la capacité de prendre sur soi afin de supporter et laisser exister ce qui nous est désagréable.
Le fait de tolérer quelque chose, d’admettre avec une certaine passivité, avec condescendance parfois, ce que l’on aurait le pouvoir d’interdire, le droit d’empêcher, c’est aussi l’état d’esprit de quelqu’un ouvert à autrui et admettant des manières de penser et d’agir différentes des siennes.
En réalité La tolérance est circonscrite par deux limites, le refus de la réglementation uniforme, d’une part, de l’intolérable, de l’autre mais, fort de cela, Benoît XVI se tromperait-il en obligeant les peuples à ne pas utiliser de préservatifs pour essayer d’endiguer le sida?
Cette exigence fait-elle partie de la tolérance religieuse?
La tolérance religieuse ne devrait-elle pas se cloisonner à une attitude adoptée devant des confessions de foi différentes ou devant des manifestations publiques de religions différentes? Exemple, l’édit de Tolérance de 1787 (France) autorise la construction de lieux de cultes pour les protestants à condition que leur clocher soit moins haut que celui des églises catholiques.
Tolérer des croyances autres que la nôtre signifie qu’on admette une sorte d’égalité entre les différents groupes humains et qu’on accorde à chacun le droit de chercher et de formuler soi-même son idéal.
Peut-on, simultanément, persister dans sa propre foi, croire donc qu’on est du côté de la vérité et du bien, et, néanmoins, respecter la foi des autres?
Oui, si l’on accepte de pratiquer la tolérance.
On oublie souvent qu’à ses débuts, le peuple hébreu était non pas monothéiste, mais monolâtre, (qui n’adore qu’un seul dieu) et qu’il n’ambitionnait nullement d’imposer son Dieu à ses voisins qui avaient les leurs.
La véritable Église ne siège pas en tel ou tel endroit précis de ce monde mais bien dans le cœur de chaque homme ou femme de bonne volonté. Quelqu’un de connu n’a-t-il pas déjà dit quelque chose de ce genre?
Combien de fois me suis-je demandé, par quel étrange phénomène « la parole de Dieu » pouvait résonner aussi différemment lorsqu’elle se diffusait parmi les hommes?
Cherchant une explication, j’ai songé à ces flûtes de verre qui, lorsqu’on les frappe, sonnent chacune une note qui leur est propre ; la tonalité obtenue dépendant de la matière qui les constitue (âme ? personnalité?), de leur forme (éducation? Culture? ), ainsi que du niveau du liquide qu’elles contiennent ( la foi ? la parole? ), le plus joli son n’étant d’ailleurs pas toujours rendu par la coupe la plus remplie…
Il serait intolérable de ma part si je ne citais pas Voltaire et son plaidoyer sur la tolérance, qu’il a produit pour réparer l’erreur judiciaire à la suite de la mort injuste de Jean Calas (1763).
Chapitre XXIII : « Prière à Dieu »
Ce n’est donc plus aux hommes que je m’adresse ; c’est à toi, Dieu de tous les êtres, de tous les mondes et de tous les temps : s’il est permis à de faibles créatures perdues dans l’immensité, et imperceptibles au reste de l’univers, d’oser te demander quelque chose, à toi qui as tout donné, à toi dont les décrets sont immuables comme éternels, daigne regarder en pitié les erreurs attachées à notre nature ; que ces erreurs ne fassent point nos calamités. Tu ne nous as point donné un cœur pour nous haïr, et des mains pour nous égorger ; etc.etc.
Ce qui est important dans le LU, ce n’est pas tant la découverte des valeurs que l’on peut y lire, mais bien ce que l’on peut découvrir en soi, en réfléchissant à ce qu’on y lit.
Et que lisons-nous au sujet de la tolérance ?
LU 139:6.8 — LU 100:4.4 — LU 140:8.13 — LU 146:2.13 12 — LU 156:5.18 — LU 193:2.2 -
Que la paix soit sur vous. Et voici les fruits de l’esprit divin produits dans la vie des mortels nés d’esprit et connaissant Dieu : service expression de l’amour, dévouement désintéressé, fidélité courageuse, équité sincère, honnêteté éclairée, espoir vivace, confiance sans soupçons, ministère miséricordieux, bonté inaltérable, tolérance indulgente et paix durable. LU 193:2.2
Max Masotti