« Nos gorges sont fatiguées » — Cette histoire fut racontée par le Maître à Jetavana, à propos de plusieurs Frères âgés. Alors qu’ils étaient encore du monde, ils étaient de riches et riches écuyers de Sāvatthi, tous amis les uns des autres ; et la tradition raconte que, tandis qu’ils accomplissaient de bonnes œuvres, ils entendirent le Maître prêcher. Aussitôt, ils s’écrièrent : « Nous sommes vieux ; que nous importent la maison et le foyer ? Rejoignons la Confrérie et, suivant la belle doctrine du Bouddha, mettons fin à la tristesse. »
Ils partagèrent donc tous leurs biens entre leurs enfants et leurs familles, et, quittant leurs proches en larmes, ils vinrent demander au Maître de les accueillir dans la Confrérie. Mais une fois admis, ils ne vécurent pas la vie de Frères ; [ p. 311 ] et, en raison de leur âge, ils ne parvinrent pas à maîtriser la Vérité [^206]. Comme dans leur vie de chefs de famille, de même, lorsqu’ils étaient Frères, ils vivaient ensemble, construisant un groupe de huttes voisines aux abords du monastère. Même lorsqu’ils allaient demander l’aumône, ils se rendaient généralement chez leurs femmes et leurs enfants et y mangeaient. En particulier, tous ces vieillards étaient soutenus par la générosité de la femme de l’un d’eux, chez qui chacun apportait ce qu’il avait reçu et le mangeait, accompagné de sauces et de currys qu’elle fournissait. Une maladie l’ayant souvent emportée, Les Frères âgés retournèrent au monastère et, se jetant au cou des autres, déplorèrent la mort de leur bienfaitrice, la dispensatrice de sauces. Le bruit de leurs lamentations les attira sur place pour savoir ce qui les affligeait. Les vieillards racontèrent la mort de leur bienfaitrice, et qu’ils pleuraient de l’avoir perdue et de ne plus jamais la revoir comme elle. Choqués par une telle inconvenance, les Frères discutèrent ensemble dans la Salle de la Vérité de la cause du chagrin des vieillards, et ils en parlèrent également au Maître, lorsqu’il entra dans la Salle et leur demanda de quoi ils parlaient. « Ah ! Frères », dit-il, « autrefois aussi, la mort de cette même femme les faisait pleurer et gémir ; en ce temps-là, elle était un corbeau et fut noyée dans la mer, et ceux-ci peinaient à vider toute l’eau de la mer afin de la sortir, lorsque les sages de l’époque les sauvèrent. »
Et en disant cela, il raconta cette histoire du passé.
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Un jour, alors que Brahmadatta régnait à Bénarès, le Bodhisatta était un esprit marin. Un corbeau et sa compagne descendirent au bord de la mer, en quête de nourriture, où, peu avant, des personnes avaient offert aux Nāgas un sacrifice de lait, de riz, de poisson, de viande, de boissons fortes, etc. Le corbeau remonta et, avec sa compagne, mangea abondamment les éléments du sacrifice et but une grande quantité des spiritueux. Ils s’enivrèrent alors profondément. Ils voulurent alors s’amuser dans la mer et tentèrent de nager sur les vagues, lorsqu’une vague emporta la poule-corbeau vers le large et un poisson vint l’engloutir.
« Oh, ma pauvre femme est morte ! » s’écria le corbeau en éclatant en sanglots et en lamentations. Ses gémissements attirèrent alors une foule de corbeaux sur place pour savoir ce qui lui arrivait. Et lorsqu’il leur raconta comment sa femme avait été emportée par la mer, ils commencèrent tous à se lamenter d’une seule voix. Soudain, l’idée leur vint qu’ils étaient plus forts que la mer et qu’il ne leur restait plus qu’à la vider pour sauver leur camarade ! Ils se mirent donc à l’œuvre pour vider la mer à pleines bouchées, se rendant sur la terre ferme pour se reposer dès que leurs gorges étaient irritées par l’eau salée. Ils travaillèrent ainsi jusqu’à ce que leurs bouches et leurs mâchoires soient sèches et enflammées, leurs yeux injectés de sang, et qu’ils soient prêts à s’effondrer de fatigue. Alors, désespérés, ils se tournèrent les uns vers les autres et dirent que c’était en vain qu’ils avaient peiné à vider la mer, [ p. 312 ] car à peine avaient-ils éliminé l’eau d’un endroit que davantage affluait, et il leur restait tout le travail à refaire ; ils ne parviendraient jamais à évacuer l’eau de la mer. Et, disant cela, ils prononcèrent cette strophe :
Nos gorges sont fatiguées, nos bouches sont douloureuses ;
La mer se remplit sans cesse.
Alors tous les corbeaux se mirent à louer la beauté de son bec et de ses yeux, son teint, sa silhouette et sa douce voix, disant que c’étaient ses Excellences qui avaient provoqué la mer pour la leur ravir. Mais, tandis qu’ils débitaient ces absurdités, l’esprit marin fit surgir un fantôme de la mer et les mit tous en fuite. Ainsi, ils furent sauvés.
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Sa leçon terminée, le Maître identifia la Naissance en disant : « La femme du Frère âgé était la poule-corbeau de ces jours-là, et son mari le corbeau mâle ; les autres Frères âgés étaient le reste des corbeaux, et moi l’esprit de la mer. »