« Ce qui peut boire, etc. — Cette histoire que le Maître raconta pendant son séjour à Jetavana, à propos de la sagesse parfaite.
Un jour, les Frères étaient réunis dans la Salle de la Vérité et parlaient de la sagesse du Bouddha. « Ami, la sagesse du Bouddha Suprême est vaste, large, tranchante, vive, acérée, pénétrante et pleine de ressources. » Le Maître entra et leur demanda de quoi ils parlaient assis là. Ils lui répondirent : « Non seulement maintenant, dit-il, le Bouddha est sage et ingénieux ; il l’était autrefois. » Puis il leur raconta une histoire.
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Un jour, alors que Brahmadatta était roi de Bénarès, le Bodhisatta vint au monde comme fils du chapelain de la cour. Grandi, il étudia à Takkasilā ; à la mort de son père, il reçut la charge de chapelain et devint le conseiller du roi pour les questions humaines et divines.
Le roi, après avoir prêté l’oreille aux brebis galeuses, ordonna au Bodhisatta, pris de colère, de ne plus demeurer devant lui et le renvoya de Bénarès. Il emmena donc sa femme et sa famille avec lui et s’installa dans un village de Kāsi. Le roi se souvint alors de sa bonté et se dit :
[ p. 122 ]
Il ne convient pas que j’envoie un messager chercher mon maître. Je composerai un vers poétique, [174] et l’écrirai sur une feuille ; je ferai cuire de la chair de corbeau ; et après avoir enveloppé la lettre et la viande dans un linge blanc, je la scellerai du sceau du roi et la lui enverrai. S’il est sage, lorsqu’il aura lu la lettre et constaté qu’il s’agit de chair de corbeau, il viendra ; sinon, il ne viendra pas. Il écrivit donc sur la feuille cette strophe :
« Celui qui peut boire quand les rivières sont en crue ;
Ce que le blé couvrira hors de vue ;
Ce qui présage un voyageur sur la route—
Ô sage, mange ! Mon énigme est bien lue [1].
Le roi écrivit ce verset sur une feuille et l’envoya au Bodhisatta. Il lut la lettre et, pensant : « Le roi désire me voir », il répéta le deuxième verset : [175]
« Le roi n’oublie pas de m’envoyer un corbeau :
Oies, hérons, paons, il y a d’autres oiseaux :
S’il en donne un, il donnera le reste, je le sais ;
S’il n’en envoyait aucun, ce serait bien pire [2].
Il fit alors préparer sa voiture, alla voir le roi. Le roi, satisfait, le rétablit dans sa fonction de chapelain.
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Ce discours terminé, le Maître identifia la Naissance : « Ananda était le roi à cette époque, et j’étais son chapelain. »
122:1 Kākapeyya, en skr. et en pali, est un proverbe désignant les rivières en crue. Pour le skr., voir Pāṇini, 2. 1. 33, où certains comm. disent « profond », d’autres « peu profond ». Le scholiaste dit ici : « Ils appellent les rivières K. lorsqu’un corbeau debout sur la rive peut allonger son cou et boire. » Buddhaghosha, cité par Rh. D. dans une note aux Buddhist Suttas, S. BE, p. 178, dit la même chose. — Kākaguyha est un maïs assez haut pour cacher un corbeau ; voir Pāṇ. 3. 2. 5 et le commentaire de la Kāçikā, avec la note du scholiaste ici. — Dans le dictionnaire de Vacaspati, vol. 2, p. 1846, col. 1, il est dit : « Quand le corbeau crie Khare Khare, un voyageur arrive. » L’érudit dit ici : « Si l’on veut savoir si un ami absent revient, on dit : « Croque, corbeau, si un tel revient ! » Et si les corbeaux croassent, on sait qu’il viendra. » — Ce verset s’interroge sur ces trois proverbes et croyances. [Je dois une partie de cette note au professeur Cowell.] ↩︎
122:2 Je ne suis pas sûr du sens de ces lignes obscures, mais c’est le meilleur que j’en puisse tirer. L’érudit dit : « Lorsqu’il reçoit de la chair de corbeau, il pense à m’en envoyer ; il s’en souviendra sûrement lorsqu’il recevra des oies, etc. » L’expression « Oies, hérons, paons » rappelle le verset cité au n° 202 ci-dessus. ↩︎