[133] « Je viens de l’eau », etc. — Cette histoire fut racontée par le Maître, alors qu’il résidait dans la Bambouseraie, à propos de la tentative de Devadatta pour tuer le Bouddha. L’incident qui a donné naissance à cette histoire a déjà été décrit en détail.
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Il était une fois, alors que Brahmadatta régnait à Bénarès, le Bodhisatta naquit sous la forme d’un jeune singe dans l’Himalaya. Devenu adulte, il vécut sur les rives du Gange. Or, une femelle crocodile du Gange conçut le désir de la chair du cœur du Bodhisatta et le confia à son mari. Il pensa : « Je vais tuer le Bodhisatta en le plongeant dans l’eau, puis je prendrai la chair de son cœur et la donnerai à ma femme. » Alors il dit au Bodhisatta : « Viens, mon ami, nous allons manger des fruits sauvages sur une île. »
« Comment vais-je y arriver ? » demanda-t-il.
« Je te mettrai sur mon dos et je t’amènerai là-bas », répondit le crocodile.
Innocent, il sauta sur le dos du crocodile et s’y assit. Après avoir nagé un peu, le crocodile commença à plonger. Le singe demanda alors : « Pourquoi, Monsieur, me plongez-vous dans l’eau ? »
« Je vais te tuer », dit le crocodile, « et donner la chair de ton cœur à ma femme. »
« Insensé », dit-il, « crois-tu que mon cœur est en moi ? » « Alors, où l’as-tu mis ? »
« Ne le voyez-vous pas accroché là-bas sur ce figuier ? »
« Je le vois », dit le crocodile. « Mais veux-tu me le donner ? »
« Oui, je le ferai », dit le singe.
Alors le crocodile, si stupide qu’il fût, le prit et nagea jusqu’au pied du figuier, au bord de la rivière. Le Bodhisatta, sautant du dos du crocodile, se percha sur le figuier et répéta ces stances :
Suis-je passé de l’eau, du poisson, à la terre ferme
Seulement pour finalement tomber en ton pouvoir ?
Je suis malade de fruits à pain et de pommes roses,
Et plutôt des figues que des mangues là-bas, cueillez-les.
Celui qui ne parvient pas à se lever pour une grande occasion
Sous les pieds de l’ennemi gît prosterné dans la douleur :
[134] On se rend compte d’une crise dans son destin
Il n’a jamais besoin de craindre l’oppression de son ennemi.
Ainsi, le Bodhisatta expliqua dans ces quatre strophes comment réussir dans les affaires du monde, et disparut aussitôt dans le fourré d’arbres.
Le Maître, ayant terminé sa leçon, identifia la Naissance : « À cette époque, Devadatta était le crocodile, et moi-même j’étais le singe. »
87:1 No. 523, Vol. v. ↩︎