Grand Catéchisme — Brève Préface Du Dr. Martin Luther. | Page de titre | Grand Catéchisme — Le Deuxième Commandement. |
Tu n’auras pas d’autres dieux devant ma face.
C’est-à-dire : Tu m’auras et m’adoreras, moi seul, comme ton Dieu. Quelle est la portée de cela, et comment faut-il le comprendre ? Que signifie avoir un dieu ? Ou qu’est-ce que Dieu ? Réponse : Un dieu signifie celui de qui nous devons attendre tout bien et vers qui nous devons nous réfugier en toute détresse, de sorte qu’avoir un Dieu n’est rien d’autre que de lui faire confiance et de croire en lui de tout notre cœur ; comme je l’ai souvent dit, la confiance et la foi du cœur seules font à la fois Dieu et une idole. Si votre foi et votre confiance sont justes, alors votre dieu est aussi vrai ; et, d’un autre côté, si votre confiance est fausse et erronée, alors vous n’avez pas le vrai Dieu ; car ces deux choses vont ensemble : la foi et Dieu. Or, je le dis, celui en qui vous placez votre cœur et votre confiance est proprement votre dieu.
C’est pourquoi ce commandement vise à exiger une foi et une confiance véritables du cœur, qui s’attachent au seul vrai Dieu et à Lui seul. Cela revient à dire : « Veille à me laisser seul être ton Dieu et à ne jamais en chercher un autre. » Autrement dit : « Quel que soit le bien qui te manque, attends-le de moi et compte sur moi. » Et chaque fois que tu souffres, rampe et t’accroche à moi. Moi, oui, moi, je te donnerai tout ce qu’il te faut et je t’aiderai dans tous tes besoins ; seulement, que ton cœur ne s’attache à rien d’autre.
Il me faut expliquer cela plus clairement, afin que l’on puisse le comprendre et le percevoir par des exemples ordinaires du contraire. Nombreux sont ceux qui pensent avoir Dieu et tout en abondance lorsqu’ils possèdent de l’argent et des biens ; ils y ont confiance et s’en vantent avec une telle fermeté et une telle assurance qu’ils ne se soucient de personne. Voici, un tel homme a aussi un dieu, Mammon, c’est-à-dire l’argent et les biens, en lequel il place tout son cœur, et qui est aussi l’idole la plus répandue sur terre. Celui qui possède de l’argent et des biens se sent en sécurité, joyeux et serein, comme s’il était assis au milieu du paradis. À l’inverse, celui qui n’a aucun doute est découragé, comme s’il ne connaissait pas de Dieu. Car rares sont ceux qui sont de bonne humeur, qui ne se lamentent ni ne se plaignent s’ils n’ont pas de Mammon. Ce souci et ce désir de l’argent s’attachent à notre nature, jusqu’au tombeau.
De même, quiconque se vante de posséder une grande habileté, de la prudence, du pouvoir, de la faveur, de l’amitié et de l’honneur, a aussi un dieu, mais pas ce Dieu unique et véritable. Cela apparaît encore une fois lorsqu’on constate combien les gens sont présomptueux, sûrs d’eux-mêmes et orgueilleux à cause de ces possessions, et combien ils sont découragés lorsqu’elles disparaissent ou disparaissent. C’est pourquoi je répète que l’explication principale de ce point est qu’avoir un dieu, c’est avoir une chose en laquelle le cœur a entièrement confiance.
D’ailleurs, considérez ce que, dans notre aveuglement, nous avons pratiqué et fait jusqu’ici sous la papauté. Si quelqu’un avait mal aux dents, il jeûnait et honorait sainte Apollonie ; s’il avait peur du feu, il choisissait saint Laurent comme secours ; s’il redoutait la peste, il faisait vœu à saint Sébastien ou à saint Roch, et une infinité d’abominations de ce genre, où chacun choisissait son saint, l’adorait et l’appelait à l’aide dans la détresse. C’est également le cas de ceux, par exemple, les sorciers et les magiciens, dont l’idolâtrie est des plus grossières, qui concluent une alliance avec le diable afin qu’il leur donne beaucoup d’argent ou les aide dans leurs relations amoureuses, préserve leur bétail, leur restitue leurs biens perdus, etc. Car tous ceux-là placent leur cœur et leur confiance ailleurs qu’en Dieu véritable, n’attendent rien de bon de lui et ne le recherchent pas de lui.
Ainsi, vous comprenez aisément ce que ce commandement exige et combien il exige : que l’homme place tout son cœur et toute sa confiance en Dieu seul, et en nul autre. Car posséder Dieu, vous le comprenez aisément, ne signifie pas le saisir avec les mains, ni le mettre dans un sac, ni l’enfermer dans un coffre. Mais le saisir, c’est le saisir avec le cœur et s’attacher à lui. Or, s’attacher à lui avec le cœur n’est rien d’autre que lui faire entièrement confiance. C’est pourquoi il veut nous détourner de tout ce qui existe en dehors de lui et nous attirer à lui, car il est le seul bien éternel. Comme s’il disait : « Tout ce que vous avez cherché jusqu’ici auprès des saints, ou tout ce pour quoi vous avez mis votre confiance en Mammon ou en quoi que ce soit d’autre, attendez-le tout de moi, et considérez-moi comme celui qui vous secourra et répandra sur vous avec abondance tous vos biens. »
Voilà le sens du véritable honneur et du véritable culte de Dieu, qui lui plaît et qu’il commande sous peine de colère éternelle : le cœur ne doit trouver d’autre réconfort ni d’autre confiance qu’en lui, et ne doit pas se laisser arracher à lui, mais, pour lui, risquer et négliger tout ce qui existe sur terre. D’autre part, vous pouvez facilement constater et juger que le monde ne pratique que le faux culte et l’idolâtrie. Car aucun peuple n’a jamais été assez réprouvé pour ne pas instituer et observer un culte divin ; chacun a érigé en dieu particulier celui en qui il comptait pour ses bénédictions, son secours et son réconfort.
Ainsi, par exemple, les païens qui mettaient leur confiance dans le pouvoir et la domination élevaient Jupiter comme dieu suprême ; les autres, avides de richesses, de bonheur ou de plaisir, et d’une vie aisée, Hercule, Mercure, Vénus ou d’autres ; les femmes enceintes, Diane ou Lucine, etc. ; ainsi chacun faisait de celui vers qui son cœur était incliné son dieu, de sorte que même dans l’esprit des païens, avoir un dieu signifie faire confiance et croire. Mais leur erreur est que leur confiance est fausse et erronée, car elle ne repose pas sur le seul Dieu, en dehors duquel il n’y a véritablement aucun Dieu au ciel ou sur terre. Par conséquent, les païens font en réalité de leurs notions et rêves de Dieu une idole, et placent leur confiance dans ce qui n’est absolument rien. Il en est de même de toute idolâtrie ; car elle ne consiste pas seulement à ériger une image et à l’adorer, mais plutôt dans le cœur, qui reste bouche bée devant autre chose, et cherche aide et consolation auprès des créatures saintes ou démoniaques, et ne se soucie pas de Dieu, ni ne compte sur Lui pour tant de bien qu’il croie qu’Il est disposé à aider, ni ne croit que tout bien qu’il éprouve vient de Dieu.
De plus, il existe un faux culte et une idolâtrie extrême, que nous avons pratiqués jusqu’ici et qui prévalent encore dans le monde, sur lesquels reposent également tous les ordres ecclésiastiques. Ces pratiques ne concernent que la conscience qui, cherchant dans ses propres œuvres secours, consolation et salut, prétend arracher le ciel à Dieu et compte combien de dons elle a faits, combien de fois elle a jeûné, célébré la messe, etc. Elle s’appuie sur ces choses et s’en vante, comme si elle ne voulait rien recevoir de Dieu en don, mais désire les gagner ou les mériter surabondamment, comme s’il devait nous servir et être notre débiteur, et nous ses seigneurs. Qu’est-ce que cela, sinon réduire Dieu à une idole, voire à une image de figue ou à un dieu-pomme, et nous élever et nous considérer comme Dieu ? Mais c’est un peu trop subtil, et ce n’est pas pour les jeunes élèves.
Mais que ceci soit dit aux simples, afin qu’ils comprennent et se souviennent bien du sens de ce commandement : nous devons nous confier en Dieu seul, nous tourner vers lui et n’attendre de lui que le bien, comme de celui qui nous donne le corps, la vie, la nourriture, le breuvage, la santé, la protection, la paix et tout ce qui est nécessaire aux choses temporelles et éternelles. Il nous préserve aussi du malheur et, si quelque malheur nous atteint, nous délivre et nous sauve, de sorte que c’est Dieu seul (comme on l’a suffisamment dit) de qui nous recevons tout bien et par qui nous sommes délivrés de tout mal. C’est pourquoi, je pense, nous autres Allemands, depuis l’Antiquité, appelons Dieu (plus élégamment et plus justement que dans toute autre langue) de ce nom, du mot « bien », comme étant une source éternelle qui ne jaillit abondamment que du bien, et d’où jaillit tout ce qui est et est appelé bien.
Car, même si par ailleurs nous recevons beaucoup de biens des hommes, tout ce que nous recevons par son commandement ou son ordonnance vient tout entier de Dieu. Car nos parents, tous les dirigeants, et chacun, par son égard pour son prochain, ont reçu de Dieu le commandement de nous faire tout bien, de sorte que nous recevons ces bienfaits non d’eux, mais, par leur intermédiaire, de Dieu. Car les créatures ne sont que les mains, les canaux et les moyens par lesquels Dieu donne toutes choses, comme il donne à la mère les seins et le lait pour l’offrir à son enfant, et le blé et toutes sortes de produits de la terre pour la nourrir, autant de bienfaits qu’aucune créature ne pourrait produire d’elle-même.
C’est pourquoi nul ne doit oser prendre ou donner quoi que ce soit, si ce n’est selon ce que Dieu a ordonné, afin que cela soit reconnu comme un don de Dieu et qu’on lui en rende grâces, comme l’exige ce commandement. C’est pourquoi il ne faut pas rejeter ces moyens de recevoir des dons précieux des créatures, et il ne faut pas non plus, par présomption, chercher d’autres voies et moyens que ceux prescrits par Dieu. Car ce ne serait pas recevoir de Dieu, mais chercher par soi-même.
Que chacun donc veille à considérer ce commandement comme grand et élevé au-dessus de tout, et ne le considère pas comme une plaisanterie. Interroge et examine attentivement ton cœur, et tu verras s’il s’attache ou non à Dieu seul. Si ton cœur n’attend de lui que le bien, surtout dans le besoin et la détresse, et qu’en outre il renonce à tout ce qui n’est pas Dieu, alors tu as le seul vrai Dieu. Si, au contraire, il s’attache à autre chose, dont il attend plus de bien et de secours que de Dieu, et ne se réfugie pas en lui, mais le fuit dans l’adversité, alors tu as une idole, un autre dieu.
Afin qu’il soit clair que Dieu ne veut pas que ce commandement soit jeté aux orties, mais qu’il l’applique avec la plus grande rigueur, il y a attaché d’abord une terrible menace, puis une belle et réconfortante promesse qui doit également être insistée et inculquée aux jeunes, afin qu’ils la prennent à cœur et la retiennent :
[Exposition de l’Appendice au Premier Commandement.]
Car je suis l’Éternel, ton Dieu, fort et jaloux, qui punis l’iniquité des pères sur les enfants jusqu’à la troisième et la quatrième génération de ceux qui me haïssent, et qui fais miséricorde jusqu’en mille générations à ceux qui m’aiment et qui gardent mes commandements.
Bien que ces paroles se rapportent à tous les commandements (comme nous l’apprendrons plus tard), elles sont néanmoins liées à ce commandement principal, car il est primordial que les hommes aient une tête droite ; car là où la tête est droite, toute la vie doit être droite, et vice versa. Apprenez donc par ces paroles combien Dieu est en colère contre ceux qui se confient en autre chose qu’en lui, et combien il est bon et bienveillant envers ceux qui se confient et croient en lui seul de tout leur cœur ; de sorte que sa colère ne cesse qu’à la quatrième génération, tandis que, d’un autre côté, sa bénédiction et sa bonté s’étendent à des milliers de personnes, de peur que vous ne viviez dans une telle sécurité et ne vous abandonniez au hasard, comme des hommes au cœur brutal, qui pensent que cela ne fait pas grande différence [leur façon de vivre]. C’est un Dieu qui ne laissera pas impuni si les hommes se détournent de lui, et sa colère ne cessera pas jusqu’à la quatrième génération, voire jusqu’à leur extermination totale. C’est pourquoi il faut le craindre et ne pas l’abandonner.
Il l’a démontré tout au long de l’histoire, comme les Écritures le montrent abondamment et comme l’expérience quotidienne l’enseigne encore. Car dès le commencement, il a extirpé toute idolâtrie, et à cause d’elle, tant les païens que les Juifs ; de même qu’aujourd’hui, il renverse tout faux culte, de sorte que tous ceux qui y persistent doivent finalement périr. C’est pourquoi, bien que l’on trouve aujourd’hui des mondains orgueilleux, puissants et riches [Sardanapale et Phalaride, qui surpassent même les Perses en richesse], qui se vantent avec défiance de leur Mammon, sans se soucier de savoir si Dieu est en colère ou s’il leur sourit, et qui osent résister à sa colère, ils ne réussiront pas, mais avant même de s’en rendre compte, ils seront anéantis, avec tout ce en quoi ils avaient mis leur confiance ; comme ont péri tous ceux qui se croyaient plus en sécurité ou plus puissants.
Et justement à cause de ces têtes endurcies qui s’imaginent que Dieu, par sa connivence et sa sécurité, est totalement ignorant ou indifférent à ces choses, il doit les frapper d’un coup dur et les punir, afin qu’il ne puisse l’oublier pour les enfants de ses enfants ; afin que chacun puisse prendre conscience et voir que ce n’est pas une plaisanterie pour lui. Car ce sont ceux qu’il désigne lorsqu’il dit : « Ceux qui me haïssent », c’est-à-dire ceux qui persistent dans leur défiance et leur orgueil ; quoi qu’on leur prêche ou qu’on leur dise, ils n’écoutent pas ; lorsqu’on les reprend, afin qu’ils apprennent à se connaître et à s’amender avant le début du châtiment, ils deviennent fous et insensés au point de mériter la colère, comme nous le voyons aujourd’hui quotidiennement chez les évêques et les princes.
Mais si terribles que soient ces menaces, la consolation est d’autant plus grande que ceux qui s’attachent à Dieu seul sont assurés qu’il leur témoignera miséricorde, c’est-à-dire une pure bonté et bénédiction, non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs enfants et leurs petits-enfants, jusqu’à la millième génération et au-delà. Cela devrait certainement nous inciter à risquer notre cœur en toute confiance en Dieu, si nous désirons tous les biens temporels et éternels, puisque la Majesté suprême fait des offres si sublimes, présente des encouragements si chaleureux et des promesses si riches.
Que chacun prenne donc cela à cœur, de peur qu’on ne le prenne pour un homme. Car il s’agit pour vous soit de bénédiction, de bonheur et de salut éternels, soit de colère, de misère et de malheur éternels. Que désirez-vous de plus que la promesse bienveillante qu’il vous accorde toutes sortes de bénédictions, et qu’il vous protège et vous aide dans tous vos besoins ?
Mais, hélas ! le monde n’y croit pas et ne le considère pas comme la Parole de Dieu. Il voit que ceux qui se confient en Dieu et non en Mammon souffrent et manquent de tout, et que le diable leur résiste. Ils n’ont ni argent, ni faveur, ni honneur, et, de plus, peinent à subvenir à leurs besoins. Tandis que ceux qui servent Mammon ont, aux yeux du monde, pouvoir, faveur, honneur, biens et tout le confort. C’est pourquoi ces paroles doivent être interprétées comme s’adressant à de telles apparences ; et nous devons considérer qu’elles ne mentent ni ne trompent, mais doivent se réaliser.
Réfléchissez par vous-même ou interrogez-vous et dites-moi : ceux qui ont consacré toute leur attention et leur diligence à accumuler de grandes richesses, qu’ont-ils finalement obtenu ? Vous constaterez qu’ils ont gaspillé leur travail et leur peine, ou bien qu’ils aient amassé de grands trésors, ils ont été dispersés et dispersés, de sorte qu’ils n’ont jamais trouvé le bonheur dans leur richesse et n’ont jamais atteint la troisième génération.
On en trouve de nombreux exemples dans l’histoire, y compris dans la mémoire des personnes âgées et expérimentées. Il suffit de les observer et de les méditer.
Saül était un grand roi, choisi par Dieu et un homme pieux ; mais lorsqu’il fut établi sur son trône, et que son cœur se détourna de Dieu, et mit sa confiance dans sa couronne et sa puissance, il dut périr avec tout ce qu’il avait, de sorte qu’aucun de ses enfants ne resta.
David, au contraire, était un homme pauvre et méprisé, traqué et poursuivi, de sorte qu’il ne se sentait nulle part en sécurité ; pourtant, il dut rester malgré Saül et devenir roi. Car ces paroles devaient demeurer et se réaliser, car Dieu ne peut mentir ni tromper. Seulement, ne vous laissez pas tromper par le diable et le monde par leurs apparences, qui, certes, subsistent un temps, mais qui finalement ne sont plus rien.
Apprenons donc bien le premier commandement, afin de voir comment Dieu ne tolère ni présomption ni confiance en quoi que ce soit d’autre, et comment il n’exige de nous rien de plus que la confiance du cœur pour tout bien, afin que nous puissions agir avec droiture et droiture, et utiliser tous les biens que Dieu nous donne, comme un cordonnier utilise son aiguille, son poinçon et son fil pour son travail, puis les abandonne, ou comme un voyageur utilise son auberge, sa nourriture et son lit uniquement pour ses besoins temporels, chacun à sa place, selon l’ordre de Dieu, et sans qu’aucune de ces choses ne soit notre nourriture ou notre idole. Ceci suffit pour le premier commandement, que nous avons dû expliquer longuement, car il est d’une importance capitale, car, comme nous l’avons déjà dit, lorsque le cœur est bien disposé envers Dieu et que ce commandement est observé, tous les autres suivent.
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