XXXIV. Kien Kwan ou Traité des points subsidiaires dans les usages du deuil | Page de titre | XXXVI. Shanî ou la longue robe en une seule pièce |
LIVRE XXXV. SAN NIEN WAN OU QUESTIONS SUR LE DEUIL DEPUIS TROIS ANS[1].
1. À quoi servent les rites de deuil pendant trois ans ?
Les différentes règles des rites de deuil ont été établies en harmonie avec les sentiments (des hommes). Elles illustrent les différences dans les relations sociales, les distinctions entre les parents, proches ou éloignés, et les rangs, nobles ou inférieurs. Elles ne peuvent être ni diminuées ni augmentées ; c’est pourquoi on les appelle « les règles immuables ».
2. Plus une blessure est profonde, plus elle dure longtemps ; et plus elle fait mal, plus elle guérit lentement. Le deuil de trois ans, dont les différentes formes s’harmonisaient avec les sentiments suscités par son occasion, était destiné à marquer le plus grand degré de chagrin. Le sac aux bords dentelés, la couleur sombre du sac et du bâton, l’abri contre le mur, le gruau, le fait de dormir sur la paille et la motte de terre en guise d’oreiller : tout cela était destiné à illustrer l’extrême douleur.
3. Le deuil de trois ans prit fin avec la fin du vingt-cinquième mois. Le chagrin et la douleur n’étaient pas encore apaisés, et les pensées d’amour et de nostalgie n’étaient pas encore oubliées ; mais cette fin du deuil ne montrait-elle pas que les devoirs envers les morts prenaient fin et que le temps était venu de reprendre leurs devoirs envers les vivants ?
4. Toutes les créatures vivantes entre le ciel et la terre, dotées de sang et de souffle, possèdent un certain savoir. Possédant ce savoir, il n’en est pas une qui ne sache aimer son espèce. Prenez les grands oiseaux et les grandes bêtes : lorsque l’un d’eux a perdu sa compagne, après un mois ou une saison, il est certain qu’il revient et retourne à ses anciens lieux. Il tourne sans cesse, pousse des cris, tantôt bouge, tantôt s’arrête, et semble embarrassé et incertain dans ses mouvements, avant de pouvoir quitter les lieux. Même les plus petits oiseaux, comme les hirondelles et les moineaux, jacassent et pleurent un peu avant de pouvoir quitter les lieux. Mais parmi toutes les créatures qui ont du sang et du souffle, aucune n’a une intelligence égale à celle de l’homme ; c’est pourquoi le sentiment de l’homme face à la mort de ses proches reste inépuisable jusqu’à la mort.
5. Quelqu’un suivra-t-il l’exemple de ces hommes sous l’emprise de leurs passions dépravées ? Dans ce cas, lorsqu’un parent meurt au matin, il l’oubliera le soir. Mais si nous suivons la conduite de tels hommes, nous découvrirons qu’ils ne sont pas comparables aux oiseaux et aux bêtes. Comment peuvent-ils vivre avec leurs proches sans tomber dans tous les désordres ?
6. Suivra-t-il plutôt l’exemple de l’homme supérieur qui s’intéresse à tous les moyens par lesquels le sentiment de chagrin est exprimé ? Dans ce cas, les vingt-cinq mois, après lesquels le deuil de trois ans prend fin, sembleront passer aussi vite qu’une voiture tirée par quatre chevaux passe dans une crevasse. Et si nous continuons à céder à ce sentiment, il se révélera inépuisable.
7. C’est pourquoi les anciens rois déterminaient le mode de deuil approprié et en fixaient les modalités. Dès qu’il suffisait à exprimer avec élégance les divers sentiments, il devait être abandonné.
8. Cela étant, comment se fait-il que (dans certains cas) le deuil ne dure qu’un an ? La réponse est que, dans le cas du plus proche parent, il y a une interruption au bout d’un an.
9. Comment cela ? La réponse est : l’interaction entre le ciel et la terre a fait son chemin ; les quatre saisons ont connu leurs changements. Tout ce qui se trouve entre le ciel et la terre recommence son processus. Les règles du deuil sont censées ressembler à cela.
10. Alors comment se fait-il qu’il y ait trois ans de deuil (pour un parent) ? La réponse est : — Par désir de le rendre plus grand et plus impressionnant, on double la durée du deuil, et on l’étend ainsi sur deux années entières.
11. Qu’en est-il du deuil de neuf mois et des périodes plus courtes ? La réponse est : il vise à empêcher que ce deuil n’atteigne les périodes plus longues.
12. Par conséquent, les trois années doivent être considérées comme l’expression la plus élevée du deuil ; les trois mois et les cinq mois, comme la plus basse ; tandis que l’année et les neuf mois se situent entre les deux. Le ciel, en haut, donne un exemple ; la terre, en bas, une loi ; et l’homme, entre les deux, un modèle. L’harmonie et l’unité qui devraient caractériser les hommes vivant dans leurs familles sont ainsi pleinement démontrées.
13. C’est ainsi que, durant trois ans de deuil, se déploient les plus hautes formes qui diversifient et embellissent les manières des hommes. Oui, c’est ce qu’on appelle la plus riche manifestation (des sentiments humains).
14. Sur ce point, les cent rois (de toutes les dynasties) s’accordent, et les coutumes anciennes et modernes sont identiques. Mais on ne sait pas d’où cela vient.
XXXIV. Kien Kwan ou Traité des points subsidiaires dans les usages du deuil | Page de titre | XXXVI. Shanî ou la longue robe en une seule pièce |
Voir la notice introductive, vol. xxvii, pp. 49, 50. ↩︎