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C’est devenu un lieu commun littéraire que – pour reprendre les mots du professeur Max Müller dans l’une de ses récentes conférences – l’histoire, au sens ordinaire du terme, soit presque inconnue dans la littérature indienne [1]. Et c’est certainement une remarquable ironie du sort que nous soyons obligés de faire cette remarque au seuil même d’une introduction à la Bhagavadgîtâ ; car selon l’éminent philosophe français Cousin [2], cette grande lacune de la littérature sanskrite est due, dans une large mesure, aux doctrines énoncées dans la Bhagavadgîtâ elle-même. Mais quoi qu’il en soit, une chose est sûre : l’étudiant de la Bhagavadgîtâ doit, pour l’instant, se passer de ces informations historiques fiables concernant l’auteur de l’œuvre, l’époque à laquelle elle a été composée, et même la place qu’elle occupe dans la littérature, que l’on désire naturellement lorsqu’on aborde l’étude de toute œuvre. Plus particulièrement, dans un essai comme celui-ci, destiné principalement aux étudiants en histoire des religions, j’aurais préféré, dans cette introduction, me concentrer uniquement sur les résultats historiques bien établis, sur lesquels il existe une sorte de consensus parmi les personnes qualifiées pour juger. Mais il n’est pas exagéré de dire qu’il est presque impossible d’énoncer ne serait-ce qu’une seule proposition concernant un sujet important lié à la Bhagavadgîtâ, sur lequel un tel consensus puisse être affirmé. Les conclusions de cette introduction doivent donc être clairement [ p. 2 ] interprétées comme n’exprimant que des opinions individuelles et doivent donc être prises à leur juste valeur.
Le nom complet de l’ouvrage est Bhagavadgîtâ. Dans le langage courant, on abrège souvent le nom en Gîtâ, et dans la littérature sanskrite, on le retrouve sous les deux formes. Dans les œuvres de Sankarâkârya, des citations de la Gîtâ sont introduites, parfois par les mots « Dans la Gîtâ » ou « Dans la Bhagavadgîtâ », parfois par des mots qui peuvent être rendus par « Dans les Gîtâs », le pluriel étant utilisé [3]. Dans les colophons des manuscrits de l’ouvrage, la forme courante, apparemment dans toute l’Inde, est « Dans les Upanishads chantées (Gîtâs) par la Déité ». Sankarâkârya, en effet, l’appelle parfois l’Îsvara Gîtâ [4], ce qui, je crois, est le titre spécifique d’un ouvrage tout à fait différent. La signification des deux noms est cependant identique, à savoir le chant chanté par la Déité, ou, comme le traduit Wilkins, le Laïc Divin.
Ce Lai divin fait partie du Bhîshma Parvan du Mahâbhârata, l’une des deux épopées nationales les plus célèbres de l’Inde. La Gîtâ donne son nom à une subdivision du Bhîshma Parvan, appelée Bhagavadgîtâ Parvan, qui comprend, outre les dix-huit chapitres qui la composent, douze autres. La question s’est donc naturellement posée : la Gîtâ est-elle une partie authentique du Mahâbhârata, ou s’agit-il d’un ajout ultérieur ? La question est d’une difficulté considérable. Mais je ne peux m’empêcher de dire que la manière dont elle a été généralement traitée ne me satisfait pas entièrement. Avant d’approfondir cette question, il convient toutefois d’exposer certains faits sur lesquels la décision doit se fonder. Il apparaît donc que la famille royale d’Hastinâpura était divisée en deux branches : les Kauravas, et les Pândavas. Le premier souhaitait empêcher le second d’accéder à la part du royaume qu’ils revendiquaient ; et ainsi, après que de nombreuses tentatives d’arrangement à l’amiable se soient avérées infructueuses, il fut décidé de régler les différends entre les deux parties par l’arbitrage des armes. Chaque parti rassembla donc ses partisans, et les armées hostiles se rencontrèrent sur le « champ sacré de Kurukshetra », mentionné dans les premiers vers de notre poème. À ce moment, Kndshna Dvaipâyana, alias Vyâsa, un parent des deux parties et doté de pouvoirs plus qu’humains, se présente devant Dhndtarâshtra, le père des Kauravas, que l’on dit être complètement aveugle. Vyâsa demande à Dhndtarâshtra s’il souhaite observer de ses propres yeux le déroulement de la bataille ; et, comme Dhndtarâshtra exprime sa réticence, Vyâsa charge un Sañgaya de lui raconter tous les événements de la bataille, lui fournissant, grâce à ses pouvoirs surhumains, toutes les aides nécessaires à l’accomplissement de sa tâche. La bataille commence alors et, après dix jours de lutte, le premier grand général des Kauravas, Bhîshma, tombe [5]. À ce moment, Sañgaya s’approche de Dhndtarâshtra et lui annonce le triste résultat, qui est bien sûr un coup dur pour son parti. Dhndtarâshtra pose alors de nombreuses questions à Sañgaya concernant le déroulement du conflit, auxquelles Sañgaya répond dûment. Et parmi ses premières réponses figure le récit de la conversation entre Kndshna et Arguna au début de la bataille, qui constitue la Bhagavadgîtâ.Après avoir raconté à Dhndtarâshtra ce « dialogue merveilleux et sacré », et après avoir rendu compte de ce qui s’est passé dans les intervalles de la conversation, Sañgaya procède au récit des événements réels de la bataille.
Français Avec cette esquisse du cadre de l’histoire qui nous est présentée, nous sommes maintenant en mesure d’examiner les arguments opposés sur le point mentionné ci-dessus. M. Talboys Wheeler écrit à ce sujet comme suit [6]. « Mais il reste une autre caractéristique anormale de l’histoire de la grande guerre, telle qu’elle est rapportée dans le Mahâbhârata, qui ne peut être passée sous silence ; et c’est l’extraordinaire brusquerie et l’infortune avec lesquelles les discours brahmaniques, tels que les essais sur la loi, sur la morale, les sermons sur les choses divines, et même l’instruction dans les soi-disant sciences, sont imprudemment greffés sur le récit principal… Krishna et Arguna, le matin du premier jour de la guerre, lorsque les deux armées sont déployées en bataille et que les hostilités sont sur le point de commencer, entrent dans un long dialogue philosophique concernant les diverses formes de dévotion qui conduisent à l’émancipation de l’âme ; et on ne peut nier que, aussi incongru et hors de propos qu’un tel dialogue puisse paraître à la veille de la bataille, le discours de Krishna, tout en agissant comme cocher d’Arguna, contient l’essence des phases les plus spirituelles de l’enseignement brahmanique, et est exprimé dans un langage d’une telle profondeur et d’une telle sublimité qu’il est devenu à juste titre connu sous le nom de Bhagavad-gîtâ ou Chant divin. . . . En effet, aucun effort n’a été épargné par les compilateurs brahmaniques pour convertir l’histoire de la grande guerre en un véhicule pour l’enseignement brahmanique ; et si habilement beaucoup de ces interpolations sont entrelacées avec l’histoire, qu’il est souvent impossible de raconter l’une sans se référer à l’autre, aussi peu pertinente que puisse être la question par rapport au sujet principal en question. Il me paraît, je l’avoue, très difficile d’accepter cet argument comme satisfaisant, puisqu’il se résume à ceci : les « interpolations », auxquelles il faut nécessairement faire référence dans le récit de l’histoire principale, même pour la rendre intelligible, doivent néanmoins être considérées comme « évidemment le produit d’une époque brahmanique » [^6], et vraisemblablement d’une époque ultérieure, car, à vrai dire, elles sont hors de propos et incongrues selon les « goûts et idées » [^6], non pas de l’époque, rappelons-le, où l’« histoire principale » est censée avoir été écrite, mais de ce XIXe siècle éclairé. L’appui que l’on peut supposer tirer de cet argument provient également de l’allégation selon laquelle il y aurait eu une tentative de brahmanisation, pour ainsi dire, de la [ p. 5 ] l’histoire de la Grande Guerre, me paraît extrêmement faible, en ce qui concerne la Gîtâ. Mais c’est un point qui devra être examiné plus en détail dans la suite [7].
Bien que je ne sois pas prêt à admettre la pertinence des arguments de M. Wheeler, je ne dois pas, en revanche, être compris comme soutenant que la Gîtâ doit être acceptée comme une partie authentique du Mahâbhârata originel. J’avoue que mon sentiment sur le sujet s’apparente à celui du grand historien grec concernant la question homérique, un sentiment de douloureuse défiance quant à la solidité de quelque conclusion que ce soit. S’il est impossible de ne pas éprouver de sérieux doutes quant à l’état critique du Mahâbhârata en général ; si, en effet, nous pouvons être presque certains que l’ouvrage a été falsifié de temps à autre [8] ; il est difficile de parvenir à une conclusion satisfaisante concernant une section donnée de celui-ci. Il faut également se rappeler que les alternatives qui s’offrent à nous dans ces cas ne sont pas seulement ces deux éléments, à savoir que la section en question peut être une partie authentique de l’œuvre, ou qu’il peut s’agir d’une interpolation ultérieure ; mais aussi, comme l’a suggéré récemment, mais pas pour la première fois, M. Freeman [9] à propos de la question homérique, que la section puisse avoir existé à la date de l’épopée originale, et avoir été intégrée par l’auteur de l’épopée dans sa propre production. Car cette absence de crainte, « que ce soit de la loi ou du sentiment du droit d’auteur », sur laquelle M. Freeman s’appuie à l’égard d’un poète grec primitif, n’était en aucun cas limitée au peuple grec, mais peut être retrouvée parmi nous également. Le commentateur Madhusûdana Sarasvatî compare la Gîtâ à ces dialogues que l’on retrouve dans diverses œuvres védiques, en particulier les Upanishads [10]. Français Il est possible — je n’utiliserai pas de mot plus fort — que la Gîtâ ait existé sous forme de dialogue avant le Mahâbhârata, et qu’elle ait été appropriée par l’auteur du Mahâbhârata à ses propres fins [11]. Mais dans l’ensemble, compte tenu du fait que ces idées d’unité auxquelles M. Wheeler et d’autres accordent tant d’importance ne conviennent guère à notre ancienne littérature ; du fait que la Gîtâ s’intègre assez bien dans le cadre qui lui est donné dans le Bhîshma Parvan ; du fait que le sentiment d’Arguna, qui lui donne lieu, n’est pas du tout incompatible, mais est tout à fait conforme à la justice poétique ; au fait qu’il n’y a pas dans la Gîtâ, à mon avis, la moindre trace d’un esprit sectaire ou « brahmanisant » [12], tel que M. Wheeler et aussi le regretté professeur Goldstücker [13] considèrent avoir animé les arrangeurs du Mahâbhârata ; eu égard, dis-je, à tous ces faits, je suis prêt à adhérer, je ne dirai pas sans méfiance, à la théorie de l’authenticité de la Bhagavadgîtâ comme une partie du Mahâbhârata originel.
Le point suivant à considérer concerne la paternité de la Gîtâ. L’opinion populaire à ce sujet est assez bien connue. L’ensemble du Mahâbhârata est, selon nos traditions, attribué à Vyâsa, que nous avons déjà mentionné comme parent des Kauravas et des Pândavas ; la Bhagavadgîtâ est donc naturellement affiliée au même auteur. Le plus ancien témoignage écrit de cette paternité, que je puisse retrouver, se trouve dans le commentaire de Sankarâkârya sur la Gîtâ [14] elle-même et sur le Bndhadârandakopanishad [15]. Dans une certaine mesure, la mention de Vyâsa dans le corps de la Gîtâ semble, d’un point de vue historique, aller à l’encontre de cette tradition. Mais je n’ai vu dans aucun des commentaires auxquels j’ai eu accès, une quelconque considération de ce point, comme il y en a de la mention dans certains [ p. 7 ] Smndtis et Sûtras des noms de ceux à qui ces Smndtis et Sûtras sont respectivement attribués [16].
Nous devons maintenant laisser ces questions préliminaires, malheureusement loin d’être satisfaisantes, et aborder le sujet le plus important : la date de composition de la Gîtâ et sa place dans la littérature sanskrite. Nous devons examiner ici les preuves externes, d’une rareté déconcertante, et les preuves internes, peut-être plus complètes. Prenant d’abord ces preuves internes, les différents éléments qui relèvent de cette catégorie peuvent être classés en quatre groupes. Premièrement, nous devons considérer le caractère général de la Gîtâ et sa manière de traiter le sujet. Deuxièmement, il y a la nature de son style et de sa langue. Troisièmement, nous devons considérer la nature de la versification de la Gîtâ. Et quatrièmement et enfin, nous devons prendre note de divers points de détail, tels que l’attitude de la Gîtâ envers les Védas et les castes, ses allusions à d’autres systèmes de spéculation, et d’autres questions de même nature. Sur chacun de ces groupes, dans l’ordre indiqué ici, nous allons maintenant faire quelques observations.
Et d’abord, concernant la manière dont la Gîtâ traite son sujet. Il me semble que l’ouvrage porte à première vue des marques très claires indiquant qu’il appartient à une époque antérieure à l’ère de la création de systèmes dans la philosophie sanskrite. En 1875, j’écrivais ce qui suit à ce sujet : « Mon point de vue est que dans la Gîtâ et les Upanishads, la partie philosophique n’a pas été élaborée de manière cohérente et complète. Nous y trouvons les résultats d’une libre pensée, exercée sur différents sujets de grande importance, libre des exigences de conclusions préétablies ou de théories pleinement développées. C’est ensuite, à un stade ultérieur du progrès philosophique, que la création de systèmes apparaît. À ce stade, certains penseurs interprètent des œuvres entières à la lumière de doctrines ou d’expressions particulières. Et le résultat est le développement d’une multitude de sectes philosophiques, suivant l’exemple de ces penseurs, et toutes professant tirer leurs [ p. 8 ] doctrine de la Gîtâ ou des Upanishads, mais chacune différant remarquablement de l’autre [17].’ Depuis que ceci a été écrit, les conférences Hibbert du professeur Max Müller ont été publiées. Et je suis heureux de constater qu’en ce qui concerne les Upanishads, son point de vue coïncide exactement avec celui que j’ai exprimé dans les mots maintenant cités. Le professeur Max Müller dit : « Il n’y a pas ce que l’on peut appeler un système philosophique dans ces Upanishads. Ce sont, au vrai sens du terme, des suppositions de la vérité, se contredisant fréquemment les unes les autres, mais tendant toutes dans la même direction [18].’ D’autres corroborations du même point de vue sont également à venir. Français Le professeur Fitz-Edward Hall, dans un passage que je n’avais pas remarqué auparavant, dit [19] : « Dans les Upanishads, la Bhagavadgîtâ et d’autres anciens livres hindous, nous rencontrons, combinées, les doctrines qui, après avoir subi des modifications qui les ont rendues irréconciliables dans leur ensemble, ont été distinguées, à une époque incertaine, en ce que l’on a appelé pendant de nombreux siècles le Sânkhya et le Vedânta. » Nous disposons donc d’une autorité très importante pour adhérer au point de vue déjà exprimé sur cet important sujet. Mais comme le professeur Weber semble avoir exprimé une opinion [20] destinée peut-être à jeter le doute sur la justesse de ce point de vue, il est souhaitable d’entrer un peu plus dans les détails pour le renforcer par une référence concrète au contenu de la Gîtâ, d’autant plus que nous pouvons ainsi élucider le véritable caractère de cet ouvrage. Avant de le faire, il convient toutefois de souligner que la proposition que nous avons formulée est une proposition dont le test réside davantage dans un examen complet de l’ensemble de la Gîtâ que dans l’étude de petits détails sur lesquels il y a nécessairement beaucoup de place pour une divergence d’opinion.
Et d’abord, comparons cet ouvrage indiscutablement systématisé, les Yoga-sûtras actuels [21], avec la Bhagavadgîtâ sur un ou deux sujets, où ils abordent tous deux un terrain commun. Dans la Gîtâ, chapitre VI, strophes 33 et 34 (p. 71), Arguna pose ce qui est, en substance, une question à Krishna, quant à la façon de maîtriser l’esprit, qui est certes « inconstant, turbulent, fort et obstiné », un tel contrôle ayant été déclaré par Krishna nécessaire pour atteindre la dévotion (yoga) ? Krishna répond en disant que l’esprit peut être maîtrisé par la « pratique » (abhyâsa) et l’indifférence aux objets du monde (vairâgya). » Il poursuit en disant que la dévotion ne peut être atteinte sans maîtrise de soi, mais que celui qui fait preuve de maîtrise de soi et s’efforce d’atteindre la dévotion peut y parvenir. Ici, le sujet est abandonné. Il n’y a aucune autre explication de la « pratique » ou de l’« indifférence aux objets du monde », aucune exposition de leur mode d’action, etc. Comparons maintenant les Yoga-sûtras. Le sujet y est abordé dès le début de l’ouvrage. Comme d’habitude, l’auteur commence par « Maintenant donc, le Yoga doit être enseigné. » Il explique ensuite le Yoga par la définition bien connue : « Le Yoga est la maîtrise des mouvements de l’esprit. » Et puis, après avoir souligné ce que sont les mouvements de l’esprit, il poursuit : « Leur retenue se fait par la pratique et l’indifférence aux objets du monde [22] », termes mêmes, soit dit en passant, qui sont utilisés dans la Bhagavadgîtâ. Mais arrivé jusqu’ici, l’auteur des Sûtras n’abandonne pas le sujet comme le fait l’auteur de la Gîtâ. Il poursuit ainsi : « La pratique est l’effort pour la maintenir stable. » « Et celle-ci devient fermement ancrée lorsqu’on y recourt pendant une longue période, sans interruption, et avec une conduite correcte. » Nous avons jusqu’ici discuté de la première condition requise spécifiée, à savoir la pratique. Patañgali passe ensuite à sa deuxième condition requise pour la retenue mentale. « L’indifférence aux objets du monde est la conscience d’avoir maîtrisé les désirs, etc. (Vasikâra sañgñâ) qui appartient à celui qui n’a aucun désir pour les objets visibles et ceux dont on entend parler (des Sâstras &c., tels que le ciel et ainsi de suite). [ p. 10 ] Il distingue ensuite une autre espèce plus élevée d’« indifférence », puis il souligne les résultats de cette maîtrise de soi qui doit être acquise de la manière qu’il a exposée. C’est un exemple. Prenons-en maintenant un autre. Au chapitre VI, strophe 10 et suivantes, la Gîtâ expose en détail le mode d’accomplissement pratique.l’abstraction mentale appelée Yoga. Il n’est pas nécessaire de la reproduire ici. Le lecteur peut facilement découvrir comment diverses instructions y sont données dans le but spécifié, mais sans aucune tentative de systématisation. Comparons les Yoga-sûtras. Dans le Sâdhanapâda, la section traitant de l’acquisition du Yoga, Patañgali énonce, dans le vingt-neuvième aphorisme, les huit éléments bien connus du Yoga. Il subdivise ensuite ces éléments et s’étend distinctement sur chacun d’eux, les définissant, indiquant le mode d’acquisition et faisant allusion aux résultats qui en découlent. « Cet amour immodéré de la subdivision », que le Dr F.E. Hall [23] a quelque part attribué aux Hindous, apparaît clairement dans ces aphorismes, alors qu’on n’en trouve aucune trace dans le passage correspondant de la Bhagavadgîtâ. À mon avis, ces comparaisons corroborent donc fortement la proposition que nous avons formulée concernant le caractère non systématique, ou plutôt non systématique, de l’ouvrage. Dans l’une, nous avons définition, classification, division et subdivision. Dans l’autre, nous avons un ensemble de directives pratiques, sans aucune tentative de les organiser selon un ordre scientifique. Dans l’une, vous avez un ensemble de termes techniques avec des significations spécifiques. Dans l’autre, aucune précision de ce genre n’est encore manifeste. En un mot, vous avez dans la Gîtâ les germes, et des germes remarquables aussi, d’un système [24], et vous avez la plupart des matériaux bruts d’un système, mais vous n’avez pas de système tout fait.
Examinons maintenant la question sous un angle légèrement différent. La Bhagavadgîtâ utilise divers mots dont les significations ne sont pas tout à fait identiques [ p. 11 ] tout au long de l’ouvrage. Prenons, par exemple, le mot « yoga », que nous avons traduit par « dévotion ». Dans la Gîtâ, chapitre II, strophe 48 (p. 49), une définition est donnée de ce mot. Au chapitre VI, sa signification est entièrement différente. Et de nouveau, au chapitre IX, strophe 5, il est utilisé dans un autre sens [25]. Le mot « Brahman » apparaît lui aussi dans des significations très diverses. Et l’une de ses significations est en effet tout à fait singulière : « Nature » (voir chapitre XIV, strophe 3). Des observations similaires, dans une plus ou moins grande mesure, s’appliquent aux mots Buddhi, Âtman et Svabhâva [26]. Or, ces mots désignent des idées non négligeables dans la philosophie de la Bhagavadgîtâ. Et l’absence de précision scientifique dans leur emploi me semble indiquer le caractère non systématique dont nous avons déjà parlé.
Il existe un autre argument qui mène, je pense, à la même conclusion. La Gîtâ contient plusieurs passages difficiles à concilier, et aucune tentative n’est faite pour les harmoniser. Ainsi, par exemple, dans la strophe 16 du chapitre VII, Krishna divise ses fidèles en quatre classes, dont l’une est constituée des « hommes de connaissance », que Krishna dit considérer « comme son propre moi ». Il serait probablement difficile d’imaginer une expression qui puisse indiquer une estime supérieure. Pourtant, dans la strophe 46 du chapitre VI, il est établi que le fidèle est supérieur non seulement à celui qui accomplit des pénitences, mais même aux hommes de connaissance. Les commentateurs trahissent leur parti pris gnostique en interprétant, dans ce dernier passage, « hommes de connaissance » comme désignant ceux qui ont acquis une érudition dans les Sâstras et leurs significations. Cette interprétation n’est pas à rejeter. Mais elle comporte une certaine déformation des mots que, dans les circonstances actuelles, je ne suis pas enclin à accepter. D’autre part, il ne faut pas oublier que l’implication, déductible du chapitre IV, strophe 38 (pp. 62, 63), semble plutôt être que la connaissance est supérieure à la dévotion – qu’elle est le stade supérieur à atteindre par la dévotion comme tremplin. Dans un autre passage de la Gîtâ, chapitre XII, strophe 12, la concentration est préférée à la connaissance, ce qui me semble également incompatible avec le chapitre VII, strophe 16. Prenons encore un autre exemple. Dans la Gîtâ, chapitre V, strophe 15, il est dit que « le Seigneur ne reçoit le péché ni le mérite de personne ». Pourtant, au chapitre V, strophe 29, et de nouveau au chapitre IX, strophe 24, Krishna se qualifie lui-même de « Seigneur et bénéficiaire » de tous les sacrifices et de toutes les pénitences. Comment, pourrait-on se demander, l’Être suprême peut-il « jouir » de ce qu’il ne reçoit même pas ? Une fois de plus, au chapitre X, strophe 29, Krishna déclare que « personne ne m’est haïssable, aucun ne m’est cher ». Et pourtant, les remarquables versets de la fin du chapitre XII semblent en contradiction flagrante avec cette déclaration. Là, à travers une série de strophes très élaborées, le message éloquent de Krishna est le suivant : « Un tel être m’est cher. » Et encore, dans ces beaux vers, où Krishna conclut son Lai divin, il dit de la même manière à Arguna que lui, Arguna, lui est « cher ». Et Krishna parle aussi de ce dévot comme lui étant « cher », celui qui peut publier le Mystère de la Gîtâ parmi ceux qui révèrent l’Être suprême [27]. Et encore une fois,Comment concilier le même passage, selon lequel personne n’est « haïssable ni cher » à Krishna, avec ses propres mots au chapitre XVI, strophe 18 et suivantes ? Le langage utilisé pour décrire les personnes « démoniaques » mentionnées ici ne se distingue pas par sa douceur à leur égard, tandis que Krishna affirme positivement : « Je précipite ces personnes dans des matrices démoniaques, où elles sombrent dans la misère et la condition la plus vile. » Ces personnes sont rarement décrites avec précision comme « ni haïssables ni chères » à Krishna. Il me semble que toutes ces contradictions dans la Gîtâ sont bien réelles, non pas de nature à ne pas pouvoir être expliquées, mais, à mon avis, elles indiquent un esprit qui devine la vérité, comme le dit le professeur Max Müller, plutôt qu’un esprit élaborant un système philosophique complet et organisé. L’auteur n’a pas la moindre conscience de l’existence de ces contradictions. Et les contextes des différents passages indiquent, à mon avis, qu’une demi-vérité est supprimée ici, et une autre là, en référence particulière au sujet particulier alors en discussion ; mais aucune tentative n’est faite pour organiser les diverses demi-vérités, apparemment incompatibles, en un tout symétrique, où les contradictions apparentes pourraient éventuellement disparaître complètement dans la synthèse supérieure. Et compte tenu de ces différents points, et du point supplémentaire selon lequel la séquence des idées dans les versets de la Gîtâ n’est pas toujours facile à suivre, nous sommes, je pense, en sécurité en adhérant à l’opinion exprimée ci-dessus, selon laquelle la Gîtâ est un ouvrage non systématique, et à cet égard appartient à la même classe que les Upanishads plus anciennes.Et les contextes des différents passages indiquent, à mon avis, qu’une demi-vérité est supprimée ici, et une autre là, en référence particulière au sujet traité ; mais aucune tentative n’est faite pour organiser les diverses demi-vérités, apparemment incompatibles, en un tout symétrique, où les incohérences apparentes pourraient éventuellement disparaître complètement lors de la synthèse supérieure. Et compte tenu de ces différents points, et de celui, supplémentaire, que l’enchaînement des idées dans les versets de la Gîtâ n’est pas toujours aisé à suivre, nous pouvons, je pense, adhérer sans risque à l’opinion exprimée ci-dessus, selon laquelle la Gîtâ est une œuvre non systématique et, à cet égard, appartient à la même catégorie que les Upanishads plus anciennes.Et les contextes des différents passages indiquent, à mon avis, qu’une demi-vérité est supprimée ici, et une autre là, en référence particulière au sujet traité ; mais aucune tentative n’est faite pour organiser les diverses demi-vérités, apparemment incompatibles, en un tout symétrique, où les incohérences apparentes pourraient éventuellement disparaître complètement lors de la synthèse supérieure. Et compte tenu de ces différents points, et de celui, supplémentaire, que l’enchaînement des idées dans les versets de la Gîtâ n’est pas toujours aisé à suivre, nous pouvons, je pense, adhérer sans risque à l’opinion exprimée ci-dessus, selon laquelle la Gîtâ est une œuvre non systématique et, à cet égard, appartient à la même catégorie que les Upanishads plus anciennes.
Nous en venons ensuite à l’examen du style et de la langue de la Bhagavadgîtâ. Cela, je pense, fournit un argument de poids pour affirmer qu’elle appartient à une époque bien antérieure à l’époque de la branche artificielle de la littérature sanskrite – l’époque, notamment, des drames et des poèmes. Dans son caractère général, le style me paraît tout à fait archaïque dans sa simplicité. Les composés proprement dits ne sont pas nombreux ; s’il en existe, ils ne sont pas longs et posent très rarement, voire jamais, de problème à l’analyse. Le contraste qui y est présenté avec ce qu’on appelle la littérature classique, représentée par Bâna ou Dandin, ou même Kâlidâsa, est frappant. Chez Kâlidâsa, sans aucun doute, l’amour des composés est assez modéré, bien que je pense que ses œuvres en contiennent une proportion sensiblement plus importante que la Gîtâ. Mais après Kâlidâsa, l’amour des composés connaît un développement remarquable, au point que, dans les écrits ultérieurs, on peut dire qu’il est presque devenu fou. Même dans Bâna et Dandin, Subandhu et Bhavabhûti, la pléthore de composés est souvent lassante. Et la même remarque s’applique à de nombreuses inscriptions sur cuivre et autres qui ont été récemment déchiffrées, et dont certaines datent des premiers siècles [ p. 14 ] de l’ère chrétienne. Reprenons l’exubérance des figures et des tropes si marquée dans le style classique. Il n’y en a guère, voire rien, dans la Gîtâ, où l’on trouve un style simple et direct, d’une simplicité naturelle, et pourtant un style qui n’est en aucun cas dénué de mérite esthétique comme le style de la littérature des Sûtras. On y trouve également une absence presque totale de constructions syntaxiques complexes ; Aucune tentative pour obtenir ce tintement de sons semblables, qui semble s’être avéré une tentation trop forte, même pour que la muse de Kâlidâsa puisse y résister entièrement. Mais au contraire, nous avons ces répétitions de mots et de phrases, qui sont caractéristiques, et pas seulement en sanskrit, du style d’une période archaïque [28]. S’adressant spécifiquement à la langue par opposition au style de la Gîtâ, nous trouvons des mots tels que Anta, Bhâshâ, Brahman, dont certains sont rassemblés dans l’Index sanskrit de ce volume, qui sont tombés en désuétude dans la littérature classique dans les significations qu’ils portent respectivement dans la Gîtâ. Le mot « ha », qui n’apparaît qu’une fois, mérite une attention particulière. C’est l’équivalent de « gha », qui apparaît dans les Samhitâs védiques. Sous la forme « ha », il apparaît dans les Brâhmanes. Mais il n’apparaît jamais, je pense, dans ce qu’on appelle proprement la littérature classique. On le trouve en effet dans les Purânas. Mais il s’agit d’une catégorie d’ouvrages qui occupe une place tout à fait unique. Il y a dans les Purânas une bonne partie de ce qui, je crois, doit être reconnu comme très ancien [29] ; et il y a aussi sans aucun doute beaucoup de choses très modernes.Il est donc impossible de considérer l’emploi de « ha » dans cette catégorie d’ouvrages comme infirmant l’ancienneté d’un livre où ce mot apparaît ; alors que son emploi dans les ouvrages védiques et son absence totale dans les ouvrages modernes indiquent assez fortement une telle ancienneté. Nous pouvons donc résumer le résultat de cette partie de la discussion par la proposition selon laquelle la Gîtâ est très éloignée, tant linguistiquement que chronologiquement, de la littérature sanskrite classique. Et, dans cette mesure, cette proposition concorde avec le résultat de notre enquête sur la première branche des preuves internes.
L’aspect suivant de ces données nous amène à la nature de la versification de la Gîtâ. Là encore, un examen des vers sanskrits en général, et des vers de la Gîtâ en particulier, nous amène à une conclusion concernant la place de la Gîtâ dans la littérature sanskrite, qui concorde parfaitement avec les conclusions que nous avons déjà tirées. Dans les vers des Samhitâs védiques, il n’existe pratiquement aucun schéma de versification rigide ; aucune association particulière de syllabes longues et brèves n’est absolument nécessaire. Si nous tentons de les chanter à la manière des vers sanskrits classiques, nous rencontrons invariablement des vers dont le chant ne peut être fluide. Si nous abordons ensuite la versification des Upanishads, nous observons des progrès vers la fixité du schéma évoquée plus haut. Bien que de nombreux vers ne puissent encore être chantés fluidement, il en existe, en revanche, un nombre non négligeable qui le peuvent. Dans la Bhagavadgîtâ, on peut encore constater une avancée, quoique légère, à mon avis. Une proportion nettement plus importante de strophes de la Gîtâ se conforment aux schémas métriques établis par les auteurs de la prosodie, bien que certains vers ne s’y conforment pas et ne puissent donc être chantés selon les règles. Enfin, nous arrivons aux Kâvyas et aux Nâtakas – la littérature classique. Et là, en pratique, on retrouve partout une rigidité de schéma des plus inflexibles, tandis que la théorie est consacrée par une règle qui dit que « même mâsha peut être changé en masha, mais il faut éviter toute rupture de mesure ». Cet aperçu de la poésie sanskrite peut, je pense, être considéré à juste titre comme montrant que l’adhésion aux schémas métriques est un test de la position chronologique d’une œuvre – plus l’œuvre est récente, plus cette adhésion est constante. Je n’ai pas besoin de m’attarder ici pour souligner comment cette opinion est corroborée par les règles données à ce sujet dans l’ouvrage de référence [ p. 16 ] de Pingala sur les Khandas Sâstra. Je conclurai simplement ce point en disant que l’argument tiré de la versification de la Gîtâ, dans la mesure où il va, indique sa position comme antérieure à la littérature classique et presque contemporaine de la littérature des Upanishads.
Nous allons maintenant examiner le dernier groupe de faits relevant de la catégorie des preuves internes, comme mentionné précédemment. Tout d’abord, l’attitude de la Gîtâ envers les Védas. Si nous examinons tous les passages de la Gîtâ qui font référence aux Védas, le résultat global semble être que l’auteur de la Gîtâ ne rejette pas complètement les Védas par-dessus bord. Il éprouve et exprime une révérence pour eux, mais cette révérence revêt un caractère quelque peu particulier. Il affirme en effet que les préceptes des Védas conviennent à une certaine catégorie de personnes, d’un certain statut intellectuel et spirituel, pour ainsi dire. Jusqu’ici, leur autorité est incontestée. Mais si les partisans imprudents de l’autorité des Védas prétendent davantage, alors l’auteur de la Gîtâ les tient pour faux. Il soutient, au contraire, qu’agir selon les prescriptions des Védas constitue un obstacle à l’atteinte du summum bonum [30]. Comparez cela avec la doctrine des Upanishads. La coïncidence me semble des plus remarquables. Dans l’une de ses récentes conférences, le professeur Max Müller utilise le langage éloquent suivant à propos des Upanishads [31] : « Enfin viennent les Upanishads ; et quel est leur objectif ? Montrer l’inutilité totale, voire la malveillance de toutes les performances rituelles (comparer notre Gîtâ, pp. 47, 48, 84 [32]) ; condamner tout acte sacrificiel qui a pour motif le désir ou l’espoir d’une récompense (comp. Gîtâ, p. 119 [33]) ; de nier, sinon l’existence, du moins le caractère exceptionnel et exalté des Devas (comp. Gîtâ, pp. 76-84 [34]) ; et d’enseigner qu’il n’y a d’espoir de salut et de délivrance que par le soi individuel reconnaissant le soi véritable et universel, et trouvant le repos là, où seul le repos peut être trouvé [35]’ (comp. notre traduction de la Gîtâ, pp. 78-83).
[ p. 17 ]
Les passages auxquels j’ai donné des références entre parenthèses montreront que les mots du professeur Max Müller pourraient tous être utilisés avec une stricte exactitude concernant l’enseignement essentiel de la Bhagavadgîtâ. Nous avons donc ici un autre argument de poids en faveur du regroupement de la Gîtâ avec les Upanishads. Un autre point mérite d’être souligné. Chaque fois que la Gîtâ se réfère aux Védas de la manière quelque peu désobligeante que j’ai notée, aucune distinction n’est faite entre la partie relative au rituel et celle qui se rapporte à cette science supérieure, à savoir la science de l’âme, dont Sanatkumâri parle dans son célèbre dialogue avec Nârada [36]. Dans la Gîtâ, chapitre II, strophe 45, il est dit à Arguna que les Védas ne se rapportent qu’aux effets des trois qualités, effets qu’Arguna est chargé de surmonter. Dans la Gîtâ, chapitre VI, strophe 44, il est dit à Arguna que celui qui a acquis un peu de dévotion, puis s’efforce de progresser, s’élève au-dessus de la parole divine – les Védas. On trouve également un ou deux autres passages de même nature. Ils traitent tous des Védas comme s’occupant uniquement de rituel. Ils ne font aucune référence à une quelconque partie des Védas traitant de la connaissance supérieure. Si le mot Vedânta, dans la Gîtâ, chapitre XV, strophe 15 (p. 113), désigne, comme il semble le faire, cette dernière partie des Védas, alors c’est la seule allusion qui y soit faite. Mais, de tous les passages de la Gîtâ qui se réfèrent aux Védas, je suis enclin à conclure que les Upanishads des Védas ont été composées à une époque proche de celle de la Gîtâ, et qu’à cette époque, les Upanishads n’avaient pas encore atteint la position de haute importance qu’elles ont occupée par la suite. Dans le passage mentionné au chapitre XV, le mot Vedântas signifie probablement les Âranyakas, ce qui peut être considéré comme marquant le début de l’époque que la composition des Upanishads a clôturée. Et c’est à la fin de cette époque que je situerais la naissance de la Gîtâ, qui est probablement l’un des plus récents membres du groupe auquel elle appartient.
Il me semble que cette conclusion est corroborée par le fait que quelques strophes de la Gîtâ sont identiques à certaines strophes de certaines Upanishads. Concernant l’époque épique de la Grèce, M. EA Freeman a déclaré qu’en remontant à cette époque, « nous devons rejeter toutes les notions qui nous sont familières à notre époque sur la propriété, légale ou morale, des compositions littéraires. Il est clair qu’il existait des phrases, des épithètes, des vers entiers, qui étaient le lot commun de toute l’école poétique épique [37]. » Il me semble que nous devons accepter cette proposition comme également applicable aux premiers temps de la littérature sanskrite, compte tenu des passages courants que l’on rencontre dans diverses œuvres védiques, et aussi parfois, je crois, dans les différents Purân. Si ce point de vue est correct, alors le fait que la Gîtâ contienne des strophes dans les mots mêmes que nous rencontrons dans certaines des Upanishads, indique, à mon avis, que la conclusion déjà tirée d’autres données sur la position de la Gîtâ par rapport aux Upanishads, n’est en aucun cas injustifiée, mais une conclusion vers laquelle les faits qui nous sont présentés semblent plutôt pointer.
Nous pouvons ici attirer l’attention sur un autre fait lié à la relation entre la Gîtâ et les Védas. Dans la strophe 17 du neuvième chapitre de la Gîtâ, seuls Rik, Sâman et Yagus sont mentionnés. L’Atharva-Veda n’y est pas du tout mentionné. Cette omission paraît certes remarquable. Car elle se situe dans un passage où l’Être suprême s’identifie à toute chose, et où, par conséquent, on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que le quatrième Véda soit mentionné. J’ajoute qu’en commentant les remarques de Sankarâkârya sur ce passage, Ânandagiri (et Madhusûdana Sarasvatî également) semble avoir été manifestement conscient de la portée possible de cette omission de l’Atharva-Veda. Il dit donc qu’en raison du mot « et » dans le verset en question, l’Atharvângirasas, ou Atharva-veda, doit également être inclus. Pouvons-nous en déduire que l’Atharva-veda n’existait pas à l’époque où la Gîtâ a été composée ? L’explication généralement donnée à l’omission de ce Véda, lorsqu’une telle omission se produit, à savoir qu’il n’est d’aucune utilité dans les affaires sacrificielles ordinaires, est une explication qui ne peut guère avoir de valeur dans le cas présent ; bien qu’elle suffise peut-être à expliquer les mots « ceux qui connaissent les trois branches de la connaissance », qui apparaissent quelques lignes seulement après le verset en question. Les commentateurs n’apportent aucune autre aide que celle déjà indiquée. Dans l’ensemble, cependant, bien que je ne sois pas encore tout à fait prêt à affirmer que la priorité de la Gîtâ, allant même jusqu’à la reconnaissance de l’Atharva-Veda comme véritable Véda, puisse être raisonnablement déduite du passage en question, je pense que ce passage est remarquable car il va dans ce sens. Il faudra cependant attendre des données complémentaires pour expliquer l’omission mentionnée.
Français Si les conclusions indiquées ici sur les positions relatives de la Gîtâ et de certains ouvrages védiques sont correctes, nous pouvons raisonnablement considérer le deuxième siècle avant J.-C. comme un terminus avant lequel la Gîtâ a dû être composée. Car les Upanishads sont mentionnées dans le Mahâbhâshya de Patañgali, que nous pouvons probablement attribuer sans risque au milieu de ce siècle. L’époque des Upanishads plus anciennes, auxquelles il a été si souvent fait référence ici, peut donc bien être placée à une période antérieure au début du deuxième siècle avant J.-C. L’Atharva-veda est également mentionné par Patañgali [38], et comme « neuf fois », rappelons-le aussi ; de sorte que si nous sommes en droit de tirer la conclusion mentionnée ci-dessus du chapitre IX, strophe 17, nous arrivons à la même période pour la date de la Gîtâ. Français Un autre point à noter à ce propos est la référence au Sâma-veda comme étant le meilleur des Védas (voir p. 88). C’est un fait qui semble pouvoir fournir des informations chronologiques. Car l’estimation de ce Véda semble avoir varié selon les époques. Ainsi, dans l’Aitareya-brâhmana [39], la gloire [ p. 20 ] du Sâman est déclaré supérieur à celui du Rik. Dans le Khândogya-upanishad [40], le Sâman est considéré comme l’essence du Rik, ce que Sankara interprète en disant que le Sâman est plus lourd. Dans le Prasna-upanishad [41], également, l’implication du passage V, 5 (dans lequel le Sâman est présenté comme le guide du Brahmaloka, tandis que le Yagus est censé guider vers le monde lunaire, et le Rik vers le monde humain) est dans le même sens. On peut également citer, du même côté, le Nrisimha Tâpinî-upanishad et le passage védique cité dans le commentaire de Sankara sur la dernière phrase du premier kharia de cette Upanishad [42]. De l’autre côté, nous avons l’affirmation du Manu selon laquelle le son du Sâma-veda est impur ; et la directive qui en découle que là où on l’entend, le Rik et le Yagus ne doivent pas être récités [43]. Nous avons également les passages de certains Purân, notés par le Dr Muir dans son excellent ouvrage, Original Sanskrit Texts, qui vont dans le même sens [44]. Le Dharma-sûtra d’Âpastamba recommande également de ne pas réciter les hymnes Sâman en même temps que les autres Védas [45], et de regrouper le son du Sâman avec diverses catégories de bruits répréhensibles et impurs, comme ceux des chiens et des ânes. Il est évident que la théorie d’Âpastamba repose sur la même théorie que celle de Manu. Or, si l’on considère les deux catégories d’autorités ainsi réunies,Français il est clair que la Gîtâ se range parmi celles qui sont incontestablement les plus anciennes. Et parmi les œuvres moins anciennes, antérieures auxquelles nous pouvons placer la Gîtâ en raison des faits examinés ici, figurent Manu et Âpastamba. Or, la date de Manu n’est pas établie, bien que, je crois, on considère généralement qu’il appartient aux alentours du deuxième ou troisième siècle avant J.-C. [46]. Mais . Je [ p. 21 ] Le Dr Bühler, dans la préface de son Âpastamba dans la présente série, a avancé de bonnes raisons pour soutenir qu’Âpastamba est antérieur au troisième siècle avant J.-C. [47], et nous obtenons donc cela comme une date antérieure à laquelle la Gîtâ a dû être composée.
L’élément important suivant de preuve interne que nous devons noter est la conception de la caste adoptée dans la Bhagavadgîtâ. Ici encore, une comparaison de la doctrine de la Gîtâ avec la conception de la caste chez Manu et Âpastamba est intéressante et instructive. J’ai déjà comparé la conception de Manu à celle de la Gîtâ en un autre endroit [48]. Je ne me propose pas de m’attarder sur ce point ici, car la date de Manu est loin d’être établie de manière satisfaisante. Je préfère maintenant m’intéresser uniquement à Âpastamba, dont la date, comme je viens de le dire, est assez bien fixée par le Dr Bühler. La division des castes est donc mentionnée à deux reprises dans la Bhagavadgîtâ. Dans le premier passage (p. 59), il est affirmé que la division repose sur des différences de qualités et de devoirs ; Français dans le second (pp. 126, 127) les divers devoirs sont clairement énoncés selon les différences de qualités. Maintenant, en premier lieu, notant au fur et à mesure que nous avançons, qu’il n’y a rien dans la Gîtâ qui indique si la caste était héréditaire, selon son point de vue, alors qu’Âpastamba le déclare clairement comme tel, comparons le deuxième passage de la Gîtâ avec les Sûtras d’Âpastamba portant sur ce point. Le point de vue énoncé dans la Gîtâ me semble clairement appartenir à une époque plus ancienne - à une époque de développement social et religieux considérablement moindre. Dans la Gîtâ, par exemple, les devoirs d’un Brâhmana sont dits être la tranquillité, la maîtrise de soi, etc. Dans Âpastamba, il s’agit des six fameux devoirs, à savoir l’étude, l’instruction, le sacrifice, l’office des sacrifices d’autrui, les dons et la réception de dons ; et trois autres, à savoir l’héritage, l’occupation et le glanage des épis de blé, qui, on peut le remarquer en passant, ne sont pas mentionnés dans Manu. Les premiers me semblent indiquer [ p. 22 ] l’époque où les qualités qui, dans les premiers temps, conféraient au Brâhmana sa prééminence dans la société hindoue étaient encore une réalité vivante [49]. On notera également que rien dans cette liste de devoirs n’a de lien nécessaire ou naturel avec un quelconque privilège appartenant à la caste. La Loi établit ces devoirs, au vrai sens du terme. Dans Âpastamba, au contraire, nous constatons une avancée vers la conception ultérieure sur ces deux points. Vous n’avez plus aucune référence aux qualités morales et religieuses. Vous vous occupez de cérémonies et d’actes. Sous le terme « devoirs », vous avez non pas de simples obligations, mais des droits. Car le devoir de recevoir des dons est un droit, tout comme celui d’enseigner et d’officier lors de leurs sacrifices ; comme nous le savons non seulement par la suite, mais aussi par la comparaison des devoirs des Brâhmanes d’une part, et des Kshatriyas, Vaishnas et Sidras d’autre part.telles qu’établies par Manu et Âpastamba eux-mêmes. Les règles d’Âpastamba semblent donc appartenir à l’époque où les Brâhmanes étaient depuis longtemps un pouvoir établi et s’arrogeaient les précieux privilèges qu’ils ont toujours revendiqués par la suite. Les règles de la Gîtâ, en revanche, renvoient à une époque bien antérieure, où les Brâhmanes, par leurs qualités morales et intellectuelles, posaient les bases de cette prééminence dans la société hindoue qui leur permit ensuite de dominer toutes les castes. Ces observations s’appliquent mutatis mutandis également aux règles concernant les autres castes. Là encore, alors que la Gîtâ insiste encore sur les qualités intérieures qui constituent proprement la profession militaire, par exemple, les règles d’Âpastamba témoignent de la puissante influence des Brâhmanes [50]. Français Car, comme indiqué précédemment, officier aux sacrifices d’autrui, instruire autrui et recevoir des présents sont ici expressément interdits aux Kshatriyas comme aux Vaîsyas. Il en résulte que les Brâhmanes deviennent indispensables aux Kshatriyas et aux Vaîsyas, car [ p. 23 ] les devoirs d’étude, d’offrande de sacrifices et de cadeaux sont inculqués à tous deux. Dans son ouvrage sur l’Histoire des religions anciennes, le professeur Tiele, parlant de « l’influence croissante des Brâhmanes », écrit : « D’abord soumis aux princes et aux nobles, et dépendants d’eux, ils commencèrent par s’insinuer dans leurs faveurs et se présentèrent comme un devoir religieux de leur témoigner protection et libéralité. » Entre-temps, ils s’efforcèrent de se rendre indispensables à eux, acquirent progressivement le droit exclusif de diriger le culte public et se firent maîtres d’instruction [51]. Après avoir souligné la position élevée ainsi atteinte par les brahmanes et la position inférieure des Kândâlas et autres membres des castes inférieures, il ajoute : « Une telle position ne pouvait être longtemps supportée ; et cela sert à expliquer non seulement l’essor du bouddhisme, mais aussi sa diffusion rapide et la révolution radicale qu’il a provoquée [52]. » Poursuivons cependant notre comparaison entre la Gîtâ et l’Âpastamba. La supériorité clairement revendiquée par cette dernière pour le brahmane n’est pas clairement mise en évidence dans la Gîtâ. « Les saints brahmanes et les saints royaux dévoués » sont regroupés à la [p. 86] (Bhagavadgita_9#p86) ; Les Kshatriyas sont considérés comme le canal de communication entre la Déité et l’humanité concernant la grande doctrine de dévotion énoncée par la Bhagavadgîtâ. Cela indique une position des Kshatriyas bien plus proche de celle révélée par les Upanishads [53] que celle que leur attribue Âpastamba. Ce fait est d’autant plus remarquable :que dans la Gîtâ, chaque caste a son propre ensemble de devoirs, entièrement distincts. Il n’y a pas de chevauchement, pour ainsi dire. Et c’est une circonstance indiquant un stade très précoce du développement de l’institution [54]. En outre, comme déjà indiqué, [ p. 24 ] les devoirs définis par Âpastamba et Manu comme communs aux Kshatriyas et aux Vaisyas sont les devoirs mêmes qui rendent ces castes dépendantes dans une très large mesure des Brâhmanas. Enfin, il n’est pas tout à fait indigne de noter que dans la spécification élaborée du meilleur de chaque espèce que nous trouvons au chapitre X, le Brâhmana n’est pas mentionné comme le meilleur des castes, il n’y a rien qui indique la notion contenue dans le verset ultérieur bien connu, « Le Brâhmana est le chef des castes. » Au contraire, le dirigeant des hommes est spécifié comme le plus élevé parmi les hommes [55], indiquant, peut-être, un état de société tel que celui décrit au début de l’extrait de l’ouvrage du professeur Tiele cité ci-dessus.
Nous en venons maintenant à un autre point. Quelle est la position de la Gîtâ par rapport à la grande réforme de Sâkya Muni ? La question est d’un grand intérêt, compte tenu notamment des remarquables coïncidences entre les doctrines bouddhiques et celles de la Gîtâ, sur lesquelles nous avons attiré l’attention dans les notes de bas de page de notre traduction. Mais les éléments permettant de trancher la question font malheureusement défaut. Le professeur Wilson pensait en effet qu’il y avait une allusion au bouddhisme dans la Gîtâ [56]. Mais son idée reposait sur une confusion entre les bouddhistes et les kârvâkas ou matérialistes [57]. En l’absence de cette allusion, nous n’avons rien de bien tangible, si ce n’est l’insatisfaction d’un « argument négatif » fondé sur la simple absence de mention du bouddhisme dans la Gîtâ. Cet argument ne me satisfait pas entièrement, bien que, comme je l’ai souligné ailleurs [58], une partie du terrain occupé par la Gîtâ lui soit commune avec le bouddhisme, et bien que divers penseurs antérieurs soient mentionnés directement ou indirectement dans la Gîtâ. Il existe cependant une vision des faits de cette question, qui me paraît corroborer la conclusion déductible au moyen de l’argument négatif ici mentionné. Les points principaux sur lesquels repose la protestation du Bouddha contre le brahmanisme semblent être la véritable autorité des Védas et la véritable vision des différences de caste. Sur la plupart des points de spéculation doctrinale, le bouddhisme n’est encore qu’un aspect de l’ancien brahmanisme [59]. Les diverses coïncidences sur lesquelles nous avons attiré l’attention le montrent, s’il en est besoin. Or, sur ces deux points, la Gîtâ, bien qu’elle ne parvienne pas jusqu’au bout à la démarche du Bouddha, incarne elle-même une protestation contre les opinions en vigueur à l’époque de sa rédaction. Contrairement au bouddhisme, la Gîtâ ne rejette pas catégoriquement les Védas, mais elle les abandonne. Elle n’éradique pas totalement les castes. Elle les place sur une base moins intenable. Deux hypothèses se présentent donc comme une théorie rationnelle de ces faits. Soit la Gîtâ et le bouddhisme étaient la manifestation extérieure d’un même bouleversement spirituel qui a ébranlé la religion dominante, la Gîtâ en étant la forme la plus ancienne et la moins radicale ; soit le bouddhisme ayant déjà commencé à influencer le brahmanisme, la Gîtâ était une tentative de le renforcer, pour ainsi dire, dans ses points les moins faibles, les plus faibles étant totalement abandonnés. Je n’accepte pas cette dernière hypothèse, car je ne vois dans la Gîtâ aucune trace d’une tentative de compromis avec une attaque virulente contre l’ancien système hindou ; tandis que le fait que, bien que strictement orthodoxe, l’auteur de la Gîtâ sape encore l’autorité, comme imprudemment vénérée, de la révélation védique ; et le fait supplémentaire qu’en faisant cela, il fait ce que d’autres avaient également fait avant lui ou à son époque ; vont, à mon avis,un moyen considérable de renforcer les résultats de l’argument négatif déjà exposé. Pour moi, le bouddhisme est parfaitement intelligible comme l’un des résultats de ce jeu de pensée sur des sujets spirituels élevés, dont d’autres manifestations, moins profondes, se trouvent dans les Upanishads et la Gîtâ [60]. Mais supposons que le bouddhisme ait été [ p. 26 ] une protestation contre le brahmanisme avant sa purification et son élévation par la théosophie des Upanishads, et ces productions remarquables de la pensée indienne ancienne deviennent difficiles à expliquer. Comparons nos petits événements modernes à ces grands événements anciens. Supposons que nos ancêtres aient été attachés à la loi cérémonielle des Védas, comme nous le sommes aujourd’hui à un ritualisme sans vie. Les Upanishads et la Gîtâ pourraient être, d’une certaine manière, comparables à des mouvements comme celui du regretté Raja Rammohun Roy. S’appuyant autant que possible sur les traditions antiques, ils tentent, comme Raja Rammohun l’a fait ces derniers temps, de mettre en avant et d’approfondir les aspects les plus nobles et les plus élevés des anciennes croyances. Le bouddhisme serait comparable à l’éloignement des anciennes traditions mené par Babu Keshub Chander Sen. Les points de désaccord d’autrefois étaient à peu près les mêmes qu’aujourd’hui. La force motrice ultime était également identique dans les deux cas : un sentiment d’insatisfaction quant à l’intégrité de ce qui nous était parvenu, imprégné des corruptions du temps. De ce point de vue, l’ancien système, la philosophie des Upanishads et de la Gîtâ, et la philosophie du Bouddha, constituent une progression intelligible et régulière. Mais supposons que la tournure des événements soit différente, comme le suppose la théorie alternative indiquée ci-dessus. Supposons que le mouvement de Babu Keshub soit chronologiquement antérieur et ait commencé à influencer la société orthodoxe. Est-il alors probable qu’un membre du parti orthodoxe adopte la position de Rammohun Roy ? S’appuierait-il encore sur les autorités anciennes, mais avec des réserves diverses, tout en attaquant avec ferveur les formes actuelles de l’orthodoxie ? Je ne le pense pas. Je pense que la véritable vision est, comme je l’ai déjà dit, très différente. Les Upanishads, avec la Gîtâ et les préceptes du Bouddha [ p. 27 ] me semblent être les incarnations successives [61] de la pensée spirituelle de l’époque, de plus en plus insatisfaite du système purement cérémonial alors dominant.26] une protestation contre le brahmanisme avant sa purification et son élévation par la théosophie des Upanishads, et ces productions remarquables de la pensée indienne ancienne deviennent difficiles à expliquer. Comparons nos petits événements modernes à ces grands événements anciens. Supposons que nos ancêtres aient été attachés à la loi cérémonielle des Védas, comme nous le sommes aujourd’hui à un ritualisme sans vie, les Upanishads et la Gîtâ pourraient être, d’une certaine manière, comparables à des mouvements comme celui du regretté Raja Rammohun Roy. S’appuyant, autant que possible, sur les traditions antiques, ils tentent, comme Raja Rammohun l’a fait ces derniers temps, de mettre en avant et d’élaborer les aspects les plus élevés et les plus nobles des anciennes croyances. Le bouddhisme serait comparable à l’éloignement supplémentaire des anciennes traditions mené par Babu Keshub Chander Sen. Les points de dissidence d’autrefois étaient à peu près les mêmes qu’aujourd’hui. La force motrice ultime était également identique dans les deux cas : un sentiment d’insatisfaction quant à l’intégrité de ce qui nous était parvenu des temps anciens, imprégné des corruptions dues aux années. De ce point de vue, l’ancien système, la philosophie des Upanishads et de la Gîtâ, ainsi que la philosophie de Bouddha, constituent une progression régulière et intelligible. Mais supposons que la tournure des événements soit différente, comme le suppose la théorie alternative évoquée ci-dessus. Supposons que le mouvement de Babu Keshub soit chronologiquement antérieur et ait commencé à influencer la société orthodoxe. Est-il alors probable qu’un membre du parti orthodoxe adopte la position de Rammohun Roy ? S’appuierait-il encore sur les autorités anciennes, mais avec des réserves diverses, tout en attaquant avec ferveur les formes actuelles de l’orthodoxie ? Je ne le pense pas. Je pense que la véritable vision est, comme déjà indiqué, très différente. Les Upanishads, avec la Gîtâ et les préceptes de Bouddha [ p. 27 ] me semblent être les [61:1] incarnations successives de la pensée spirituelle de l’époque, à mesure qu’elle devenait de plus en plus insatisfaite du système purement cérémonial alors dominant.26] une protestation contre le brahmanisme avant sa purification et son élévation par la théosophie des Upanishads, et ces productions remarquables de la pensée indienne ancienne deviennent difficiles à expliquer. Comparons nos petits événements modernes à ces grands événements anciens. Supposons que nos ancêtres aient été attachés à la loi cérémonielle des Védas, comme nous le sommes aujourd’hui à un ritualisme sans vie, les Upanishads et la Gîtâ pourraient être, d’une certaine manière, comparables à des mouvements comme celui du regretté Raja Rammohun Roy. S’appuyant, autant que possible, sur les traditions antiques, ils tentent, comme Raja Rammohun l’a fait ces derniers temps, de mettre en avant et d’élaborer les aspects les plus élevés et les plus nobles des anciennes croyances. Le bouddhisme serait comparable à l’éloignement supplémentaire des anciennes traditions mené par Babu Keshub Chander Sen. Les points de dissidence d’autrefois étaient à peu près les mêmes qu’aujourd’hui. La force motrice ultime était également identique dans les deux cas : un sentiment d’insatisfaction quant à l’intégrité de ce qui nous était parvenu des temps anciens, imprégné des corruptions dues aux années. De ce point de vue, l’ancien système, la philosophie des Upanishads et de la Gîtâ, ainsi que la philosophie de Bouddha, constituent une progression régulière et intelligible. Mais supposons que la tournure des événements soit différente, comme le suppose la théorie alternative évoquée ci-dessus. Supposons que le mouvement de Babu Keshub soit chronologiquement antérieur et ait commencé à influencer la société orthodoxe. Est-il alors probable qu’un membre du parti orthodoxe adopte la position de Rammohun Roy ? S’appuierait-il encore sur les autorités anciennes, mais avec des réserves diverses, tout en attaquant avec ferveur les formes actuelles de l’orthodoxie ? Je ne le pense pas. Je pense que la véritable vision est, comme déjà indiqué, très différente. Les Upanishads, avec la Gîtâ et les préceptes de Bouddha [ p. 27 ] me semblent être les [61:2] incarnations successives de la pensée spirituelle de l’époque, à mesure qu’elle devenait de plus en plus insatisfaite du système purement cérémonial alors dominant.Le bouddhisme serait comparable à l’éloignement des anciennes traditions mené par Babu Keshub Chander Sen. Les points de dissidence d’autrefois étaient quasiment les mêmes qu’aujourd’hui. La motivation profonde était également identique dans les deux cas : un sentiment d’insatisfaction quant à l’intégrité de ce qui nous était parvenu, imprégné des corruptions du passé. De ce point de vue, l’ancien système, la philosophie des Upanishads et de la Gîtâ, ainsi que la philosophie du Bouddha, constituent une progression régulière et intelligible. Mais supposons que la tournure des événements soit différente, comme le suppose la théorie alternative évoquée ci-dessus. Supposons que le mouvement de Babu Keshub soit chronologiquement antérieur et ait commencé à influencer la société orthodoxe. Est-il alors probable qu’un membre du parti orthodoxe adopte la position de Rammohun Roy ? S’appuierait-il encore sur les autorités anciennes, mais avec des réserves diverses, tout en attaquant avec ferveur les formes actuelles de l’orthodoxie ? Je ne le pense pas. Je pense que la véritable vision est, comme je l’ai déjà dit, très différente. Les Upanishads, avec la Gîtâ et les préceptes du Bouddha [ p. 27 ] me semblent être les incarnations successives [61:3] de la pensée spirituelle de l’époque, à mesure qu’elle devenait de plus en plus insatisfaite du système purement cérémonial alors dominant.Le bouddhisme serait comparable à l’éloignement des anciennes traditions mené par Babu Keshub Chander Sen. Les points de dissidence d’autrefois étaient quasiment les mêmes qu’aujourd’hui. La motivation profonde était également identique dans les deux cas : un sentiment d’insatisfaction quant à l’intégrité de ce qui nous était parvenu, imprégné des corruptions du passé. De ce point de vue, l’ancien système, la philosophie des Upanishads et de la Gîtâ, ainsi que la philosophie du Bouddha, constituent une progression régulière et intelligible. Mais supposons que la tournure des événements soit différente, comme le suppose la théorie alternative évoquée ci-dessus. Supposons que le mouvement de Babu Keshub soit chronologiquement antérieur et ait commencé à influencer la société orthodoxe. Est-il alors probable qu’un membre du parti orthodoxe adopte la position de Rammohun Roy ? S’appuierait-il encore sur les autorités anciennes, mais avec des réserves diverses, tout en attaquant avec ferveur les formes actuelles de l’orthodoxie ? Je ne le pense pas. Je pense que la véritable vision est, comme je l’ai déjà dit, très différente. Les Upanishads, avec la Gîtâ et les préceptes du Bouddha [ p. 27 ] me semblent être les incarnations successives [61:4] de la pensée spirituelle de l’époque, à mesure qu’elle devenait de plus en plus insatisfaite du système purement cérémonial alors dominant.
Français Il y a plusieurs autres points très intéressants dans la Bhagavadgîtâ, tels que la référence au Sânkhya et au Yoga ; la place assignée au mois de Mârgasîrsha ; l’allusion aux doctrines du matérialisme ; la coïncidence presque totale entre une strophe de la Gîtâ et une autre du Manu Smriti. Mais dans l’état actuel de nos connaissances, je ne pense pas que nous puissions en tirer des résultats historiques. Sans m’y attarder davantage [62], je me contenterai donc d’exprimer mon opinion selon laquelle le Sânkhya et le Yoga de la Gîtâ ne sont pas identiques aux systèmes que nous connaissons sous ces noms, et que le Manu Smriti a probablement emprunté à la Gîtâ la strophe commune aux deux ouvrages.
Français Nous passons maintenant à une discussion de certaines des preuves externes concernant l’âge de la Bhagavadgîtâ. Il est, bien sûr, inutile d’examiner toute preuve d’une date postérieure au huitième siècle après J.-C., cette date étant généralement admise, bien que sans fondement très solide, comme étant la date de Sankarâkârya, le célèbre commentateur de la Gîtâ [63]. Pour la période antérieure à cette limite, le premier témoignage à considérer est celui de Bânabhatta, l’auteur de la Kâdambarî. La date de Bâna est maintenant assez bien établie comme étant le milieu du septième siècle après J.-C. Le doute que le regretté Dr. Bhâu Dâjî avait jeté sur son exactitude [64], en contestant la date reçue du roi Harshavardhana, me semble avoir été dissipée de manière satisfaisante par l’article de [ p. 28 ] mon ami le professeur RG Bhâttârkar sur les dates de Kâlukya [65]. Dans le Kâdambarî, nous avons donc un témoignage de l’existence de la Bhagavadgîtâ au milieu du septième siècle après J.-C. Car dans cet ouvrage, qui, comme on le sait, abonde en équivoques, nous avons un passage qui compare le palais royal au Mahâbhârata, tous deux étant « Anantagitâkarnanânanditanaram [66] », ce qui, appliqué au palais royal, signifie « dans lequel le peuple était ravi d’entendre d’innombrables chants » ; et appliqué au Mahâbhârata signifie « dans lequel Arguna était ravi d’entendre l’Anantagîtâ. » Anantagîtâ n’est évidemment ici qu’un autre nom pour la Bhagavadgîtâ. Français La conclusion déductible de ce fait n’est pas seulement que la Gîtâ existait, mais qu’elle existait comme une partie reconnue du Bhârata, au septième siècle après J.-C. Or, la Kâdambarî montre, dans de nombreux passages, en quelle haute estime le Mahâbhârata était tenu à son époque. La reine Vilâsavatî avait l’habitude d’assister à ces lectures et à ces expositions du Mahâbhârata, qui ont perduré jusqu’à nos jours ; et il était même alors considéré comme un ouvrage sacré d’une très haute autorité, de la même manière qu’il l’est aujourd’hui. Il s’ensuit donc que la Gîtâ devait être vieille de plusieurs siècles à l’époque de Bânabhattâ.
Antérieur à Bâna se trouve le Shakespeare indien, Kâlidâsa, tel qu’il est mentionné dans Harshakarita de Bânabhatta [67], ainsi que dans une inscription sur cuivre du début du VIIe siècle, comme un poète qui avait déjà acquis une grande réputation [68]. Malheureusement, il n’est pas encore possible de fixer avec précision la date à laquelle Kâlidâsa a prospéré. Néanmoins, je pense que nous disposons d’éléments assez satisfaisants pour montrer que le milieu du Ve siècle après J.-C. est la date la plus récente à laquelle il peut être mentionné. Dans un petit traité (écrit par moi en 1873), discutant de la théorie du professeur Weber sur le Râmâyana, j’ai souligné [69] que le Pañkatantra [ p. 29 ] cite de Kâlidâsa un passage dont il y a de bonnes raisons de croire qu’il faisait partie du Pañkatantra lorsqu’il fut traduit pour le roi Nushirvan de Perse vers le début du VIe siècle après J.-C. [70]. Compte tenu du temps nécessaire pour élever Kâlidâsa au rang d’autorité, et du temps nécessaire à la propagation de la renommée d’un ouvrage indien en Perse à cette époque, je pense que le milieu du Ve siècle est une date à laquelle Kâlidâsa ne peut pas avoir été postérieur. Or, dans les œuvres de Kâlidâsa, nous avons des allusions très remarquables à la Bhagavadgîtâ. Il n’est pas nécessaire de passer en revue toutes ces allusions. Je ne mentionnerai que les plus remarquables, une du Raghuvamsa, et une du Kumârasambhava. Dans Raghu, chant X, strophe 67, les dieux s’adressant à Vishnu disent : « Tu n’as rien à acquérir qui n’ait été acquis. Le seul motif de ta naissance et de ton œuvre est le bien des mondes. » La première phrase rappelle immédiatement la Gîtâ, chapitre III, strophe 22, dont la coïncidence, tant dans le sens que dans l’expression, est très frappante. La deuxième phrase contient les mots « naissance et œuvre », les mots exacts employés dans la Gîtâ IV, 9 ; et l’idée de « bien des mondes » est identique à celle exprimée dans la Gîtâ III, 20-24, seuls les mots qui l’habillent étant différents. Relions ce passage à celui de Kumârasambhava, chant VI, 67, où les sept Rishis disent à la montagne de l’Himalaya : « C’est avec raison que tu as été appelé Vishnu sous une forme fermement fixée. » Français L’allusion à la Gîtâ, chapitre X, strophe 25 (p. 89), est, je me permets de le penser, sans équivoque. Le mot « fermement fixé » est identique dans les deux passages ; l’idée est identique, et Mallinâtha se réfère au passage de la Gîtâ comme l’autorité que Kâlidâsa avait en vue. Il s’ensuit donc que la Gîtâ doit être antérieure à l’époque de Kâlidâsa. On peut ajouter que Kâlidâsa, dans son Raghu XV, 67, cite Manu comme une autorité [p.30] pour la proposition selon laquelle un roi doit protéger toutes les castes et tous les ordres, ou âsramas. Manu a donc dû vivre bien avant Kâlidâsa, et la Gîtâ, comme nous l’avons déjà soutenu, doit être bien antérieure, non seulement à Manu, mais aussi à son prédécesseur Âpastamba. On peut donc affirmer sans risque que la Gîtâ appartient à une période antérieure de plusieurs siècles au Ve siècle de notre ère.
L’élément de preuve externe suivant est fourni par les Vedânta-sûtras de Bâdarâyana. Dans plusieurs de ces sûtras, il est fait référence à certains Smritis comme autorités pour les propositions énoncées. Prenons, par exemple, I, 2, 6, ou I, 3, 23, et bien d’autres. Or, trois de ces sûtras sont très utiles pour notre propos actuel. Français Le premier que nous devons considérer est le Sûtra II, 3, 45. Les commentateurs Sankarâkârya, Râmânuga, Madhva et Vallabha [71] sont unanimes à comprendre que le passage de la Gîtâ, chapitre XV, strophe 7 (p. 112), est celui auquel se réfèrent les mots du Sûtra, qui sont : « Et il est dit dans un Smriti. » Or, un coup d’œil au contexte du Sûtra nous convaincra, je pense, que les commentateurs, qui sont unanimes bien que représentant des écoles de pensée différentes, voire conflictuelles, ont également tout à fait raison. Le Sûtra 43, dans le langage elliptique caractéristique de cette branche de notre littérature, dit : « Une partie, de l’énoncé de la différence, et l’inverse aussi ; certains prétendent qu’il s’agit d’un pêcheur ou d’un tricheur. » Le Sûtra 44 est ainsi rédigé : « Et aussi des paroles du Mantra. » Vient ensuite le Sûtra 45, tel qu’il a été exposé plus haut. Il est clair que le Sûtra n° 45 fait autorité pour quelque chose de non spécifié, considéré comme faisant partie d’une autre chose également non spécifiée. Or, la discussion dans les Sûtras précédents a porté sur l’âme ; nous pouvons donc facilement accepter l’interprétation unanime des commentateurs, selon laquelle la proposition que l’on cherche à établir ici est que l’âme individuelle fait partie de l’Âme Suprême, proposition énoncée dans la Gîtâ dans le passage mentionné. Le Sûtra suivant auquel il est fait référence est le IV, 1, 10. Je n’exposerai pas ici les autres Sûtras pertinents comme dans le cas précédent. Je constate simplement que les trois commentateurs, Sankara, Râmânuga et Madhva, s’accordent à dire qu’il est ici fait référence à la Gîtâ, à savoir au chapitre VI, strophe 2 et suivantes. Vallabha, cependant, je dois ajouter, n’est pas d’accord avec cela, car il interprète le Sûtra en question et ceux qui le précèdent et le suivent comme se référant à un sujet entièrement différent. Si je puis me permettre de le dire, je considère cependant que son interprétation n’est pas aussi satisfaisante que celle des trois autres commentateurs, plus anciens. Enfin, nous arrivons au Sûtra IV, 2-19. Là encore, les quatre commentateurs sont unanimes et affirment que la Gîtâ, chapitre VIII, strophe 24 et suivantes (p. 80), est l’autorité à laquelle il est fait référence. Et je pense qu’il ne fait guère de doute qu’ils ont raison. Ces divers éléments de preuve rendent, je crois, historiquement certain que la Gîtâ doit être considérablement antérieure aux Vedânta-sûtras ; et que le mot Brahma-sûtras, qui apparaît dans la Gîtâ, chapitre XIII, strophe 4 ([p.102] (Bhagavadgita_12#p102)), est correctement interprété par les commentateurs comme se référant non pas aux Vedânta-sûtras, également appelés Brahma-sûtras, mais à un sujet entièrement différent [72]. Quand les Vedânta-sûtras ont-ils été composés ? La question doit être d’emblée admise comme difficile ; mais je pense que les considérations suivantes montreront que la date de ces Sûtras doit, au plus tard, être considérablement antérieure à la période que nous avons déjà atteinte dans cette partie de notre enquête. Français Nous pouvons tenir pour assez bien établi que Bharia Kumârila, le célèbre commentateur de l’école Pûrva Mîmâmsâ, a prospéré au plus tard à la fin du VIIe siècle après J.-C. [73]. Une période considérable avant lui doit être placée le grand commentateur des Mîmâmsâ-sûtras, à savoir Sabarasyâmin. Si l’on en juge par le style de son grand commentaire, il ne peut pas avoir prospéré beaucoup plus tard que Patañgali, dont on peut maintenant considérer qu’il est historiquement prouvé qu’il [ p. 32 ] ont prospéré vers 140 av. J.-C. [74]. Or, un temps considérable a dû s’écouler entre Sabarasyâmin et un autre commentateur du Pûrva Mîmâmsâ, que Sabara cite sous le titre hautement honorifique de Bhagavân, le Vénérable, à savoir Upavarsha. Upavarsha semble, d’après la déclaration de Sankara, avoir commenté les Vedânta-sûtras [75]. Nous disposons ainsi d’une longue chaîne d’ouvrages datant du VIIe siècle apr. J.-C., indiquant une antiquité assez élevée pour les Vedanta-sûtras, et[74:1] Or, un temps considérable a dû s’écouler entre Sabarasyâmin et un autre commentateur du Pûrva Mîmâmsâ, que Sabara cite sous le titre hautement honorifique de Bhagavân, le Vénérable, à savoir Upavarsha. Upavarsha semble, d’après les déclarations de Sankara, avoir commenté les Vedanta-sûtras [75:1]. Nous disposons ainsi d’une longue série d’ouvrages datant du VIIe siècle apr. J.-C., indiquant une antiquité assez élevée pour les Vedanta-sûtras, et[74:2] Or, un temps considérable a dû s’écouler entre Sabarasyâmin et un autre commentateur du Pûrva Mîmâmsâ, que Sabara cite sous le titre hautement honorifique de Bhagavân, le Vénérable, à savoir Upavarsha. Upavarsha semble, d’après les déclarations de Sankara, avoir commenté les Vedanta-sûtras [75:2]. Nous disposons ainsi d’une longue série d’ouvrages datant du VIIe siècle apr. J.-C., indiquant une antiquité assez élevée pour les Vedanta-sûtras, etFrançais par conséquent une plus haute pour la Bhagavadgîtâ. L’antiquité des Vedânta-sûtras découle également de la circonstance, que nous avons sur le témoignage de Râmânuga, répété par Mâdhavâkârya, qu’un commentaire sur les Sûtras a été écrit par Baudhâyanâkârya [76], commentaire que Râmânuga dit avoir suivi. La date de Baudhâyanâ n’est pas fixée avec précision. Mais il semble être plus ancien qu’Âpastamba, dont la date, comme suggéré par le Dr Bühler, a déjà été mentionnée [77]. Les Vedânta-sûtras, sembleraient donc être au moins aussi vieux que le quatrième siècle avant J.-C., si l’on peut se fier aux informations que nous avons de Râmânuga. Un troisième argument peut être évoqué, portant sur la date des Vedânta-sûtras. Dans le Sûtra 110 du troisième Pâda du quatrième Adhyâya des Sûtras de Pânini, un Pârâsarya est mentionné comme l’auteur d’un Bhikshu-sûtra. Qui est ce Pârâsarya, et qu’est-ce que ce Bhikshu-sûtra ? Malheureusement, Patañgali ne nous donne aucune information à ce sujet, pas plus que le Kâsikâ Vritti. Mais une note du professeur Târânâtha Tarkavâkaspati, de Calcutta, indique que Pârâsarya est Vyâsa, et que le Bhikshu-sûtra est le Vedânta-sûtra [78]. Si cela est exact, les Vedânta-sûtras remontent très loin dans l’Antiquité. Car Pânini ne peut certainement pas être attribué à une date postérieure au IVe siècle av. J.-C., tandis que le professeur Goldstücker, érudit et éminent, l’a attribué, en se fondant sur des arguments solides, à une date bien antérieure [79]. La question se pose donc : la remarque du professeur Târânâtha, exposée ci-dessus, est-elle correcte ? Je découvre donc, d’après les renseignements que j’ai demandés à mon vénérable et érudit ami Yagesvar Sâstrin, l’auteur de l’Âryavidyâsudhâkara, que la note de Târânâtha est fondée sur les œuvres de Bha_ttog_î Dîkshita, Nâgogî Bharia et Gñânendra Sarasvatî, qui donnent tous la même interprétation du Sûtra en question. Il est certainement regrettable que nous n’ayons pas d’autorité plus ancienne sur ce point que Bha_ttog_î. L’interprétation n’est pas en elle-même improbable. Vyâsa est certainement, selon la tradition courante [80], considéré comme l’auteur des Vedânta-sûtras, et aussi comme le fils de Parâsara. Bhikshu-sûtra n’est pas non plus un nom très éloigné du Vedânta-sûtra, bien que le premier nom ne soit sans doute plus utilisé aujourd’hui, du moins pour les Sûtras attribués à Bâdarâyana, et bien que, il faut le préciser, un Bhikshu-sûtra Bhâshya Vârtika soit mentionné nominement par le professeur Weber comme existant actuellement [81]. En résumé,Nous pouvons donc provisoirement considérer que le Bhikshu-sûtra mentionné par Pânini est identique aux Vedânta-sûtras. Mais même en dehors de cette identification, les autres témoignages que nous avons produits prouvent, je pense, la haute antiquité de ces Sûtras, et par conséquent de la Bhagavadgîtâ.
Nous avons ainsi examiné, avec une longueur que, compte tenu de l’importance et de la difficulté du sujet, je ne pense pas déraisonnable, certains des principaux éléments de preuve internes et externes concernant l’âge de la Bhagavadgîtâ et sa place dans la littérature sanskrite. Bien que, comme indiqué dès le début, les conclusions que nous avons déduites au cours de cet examen ne soient pas toutes de nature à être acceptées d’emblée, j’ose penser que nous avons maintenant des raisons suffisantes d’affirmer que les diverses pistes de recherche indépendantes que nous avons suivies convergent vers ce point : la Gîtâ, sur des sujets nombreux et essentiels, se classe, pour ainsi dire, parmi les Upanishads de la littérature sanskrite. Sa philosophie, sa manière de traiter son sujet, son style, sa langue, sa versification, ses opinions sur divers sujets de la plus haute importance, tout converge vers cette conclusion. Nous pouvons également, je pense, affirmer comme plus que probable que la date la plus récente de composition de la Gîtâ doit être antérieure au IIIe siècle av. J.-C., bien qu’il soit totalement impossible de dire à ce jour de combien. Cette proposition est également étayée par la force cumulative de plusieurs témoignages indépendants.
Avant de conclure cette introduction, il convient d’ajouter un mot concernant le texte de la Bhagavadgîtâ. Le soin religieux avec lequel ce texte a été préservé mérite d’être souligné. Schlegel et Lassen [82] ont tous deux déclaré que nous possédons aujourd’hui le texte presque exactement dans l’état où il était lorsqu’il a quitté les mains de l’auteur. Il existe très peu de véritables lectures diverses, et certaines des rares qui existent sont mentionnées par les commentateurs. Sachant que le Mahâbhârata a dû être altéré à de nombreuses reprises, cette préservation de la Gîtâ est des plus intéressantes. Elle témoigne sans aucun doute de la grande vénération que lui portent encore, et depuis longtemps, les Hindous, et qui se reflète dans l’expression utilisée dans les colophons des manuscrits décrivant la Gîtâ comme « l’Upanishad chantée par Dieu [83] ». Au vu des faits et des déductions exposés dans cet essai, cette expression existant, comme je le crois, presque universellement dans les manuscrits indiens de la Gîtâ, n’est pas totalement dénuée de valeur historique.
Schlegel attire l’attention sur une autre circonstance concernant le texte de la Gîtâ, qui est également très intéressante, à savoir que le nombre de strophes est exactement de 700. [ p. 35 ] Schlegel conclut que l’auteur a dû délibérément fixer ce nombre, afin d’empêcher, autant que possible, toute interpolation ultérieure [84]. Cela n’est certainement pas improbable ; et si le but de l’auteur était tel que le suggère Schlegel, il a assurément été pleinement atteint. Dans le chapitre du Mahâbhârata qui suit immédiatement le dix-huitième chapitre de la Gîtâ, l’étendue de l’œuvre en slokas est clairement indiquée. Les versets dans lesquels cela est indiqué n’existent pas dans la recension de Gauda ou du Bengale, et ne sont sans doute pas authentiques. Mais, néanmoins, ils sont intéressants, et je les reproduirai ici. « Kesava a prononcé 620 versets, Arguna cinquante-sept, Sañgaya soixante-sept et Dhritarâshtra un seul ; telle est l’étendue de la Gîtâ. » Il est très difficile d’expliquer ces chiffres. Selon eux, le nombre total de versets de la Gîtâ serait de 745, alors que le nombre dans les manuscrits actuels, et même dans le Mahâbhârata lui-même, n’est, comme nous l’avons déjà dit, que de 700 [85]. Je ne peux suggérer aucune explication à cette divergence.
En conclusion, quelques mots peuvent être ajoutés concernant les principes généraux suivis dans la traduction contenue dans ce volume. Mon objectif a été de rendre cette traduction aussi fidèle et littérale que possible de la Gîtâ, telle qu’interprétée par les commentateurs Sankarâkârya, Srîdharasvâmin et Madhusûdana Sarasvatî. Il a également été fréquemment fait référence au commentaire de Râmânugâ-kârya, ainsi qu’à celui de Nîlakantha, ce dernier faisant partie du commentaire général de l’auteur sur le Mahâbhârata. Ces commentateurs divergent parfois, et j’ai alors fait mon propre choix. Les notes de bas de page visent principalement à clarifier ce qui reste nécessairement obscur dans une traduction littérale. Certaines notes soulignent cependant les parallélismes existant entre la Gîtâ et d’autres ouvrages, principalement les Upanishads et le Dhammapada et le Sutta Nipâta bouddhiques. De ce dernier [ p. 36 ], je n’ai pas pu me procurer le Pâlî original ; je n’ai utilisé que la traduction de Sir MC Swamy. Mais je peux noter ici qu’il y a quelques versets, en particulier dans le Salla Sutta (voir pp. 124-127 du livre de Sir MC Swamy), dont la similitude, en doctrine et en expression, avec certains versets de la Gîtâ est particulièrement frappante. Les analogies entre la Gîtâ et les Upanishads ont servi de base à certaines conclusions de cette introduction. Celles entre la Gîtâ et ces ouvrages bouddhiques ne sont pour l’instant, à mon avis, qu’intéressantes ; Je ne suis pas encore en mesure de dire si ces éléments peuvent légitimement servir de prémisses à des déductions historiques.
Il existe deux index : le premier est un index général des sujets, le second contient les principaux mots de la Gîtâ qui peuvent s’avérer utiles ou intéressants à des fins philologiques, historiques ou autres.
1:1 Conférences Hibbert, p. 131. ↩︎
1:2 Conférences sur l’histoire de la philosophie moderne (traduit par OW Wight), vol. i, pp. 49, 50. À la p. 433 seq. du deuxième volume, M. Cousin donne une vue générale de la doctrine de la Gîtâ. Voir aussi les Histoires de la philosophie de M. Maurice et Ritter. ↩︎
2:1 Ex. gr. Sârîraka Bhâshya, vol. ii, p. 840. Il est également souvent cité comme un Smriti, ibid. vol. i, p. 152. ↩︎
2:2 Voir entre autres Sârîraka Bhâshya, vol. i, p. 455, vol. ii, p. 687, et Colebrooke’s Essays, vol. i, p. 355 (Madras) ; édition de Lassen de la Gîtâ, XXXV. ↩︎
3:1 L’histoire entière est donnée brièvement par le regretté professeur Goldstücker dans la Westminster Review, avril 1868, p. 392 seq. Voir maintenant ses Literary Remains, II, 104 seq. ↩︎
3:2 Histoire de l’Inde, vol. i, p. 293. ↩︎
4:1 Histoire de l’Inde, vol. i, p. 288,; et comparez généralement sur ce point les remarques de l’Homère de Gladstone, en particulier vol. i, p. 70 seq. ↩︎
5:2 Comparez les remarques du regretté professeur Goldstücker dans la Westminster Review d’avril 1868, p. 389. ↩︎
5:3 Contemporary Review (février 1879). ↩︎
5:4 Madhusûdana mentionne le dialogue entre Ganaka et Yâgñavalkya comme un parallèle spécifique. ↩︎
6:1 Voir à cet effet M. Fauriel, cité dans Grèce de Grote, II, 195 (éd. du Cabinet). ↩︎
6:2 Comparez aussi l’Histoire de la littérature indienne de Weber (traduction anglaise), p. 187. L’instruction, cependant, quant à « l’indice de révérence envers la prêtrise » de la part de « la caste militaire », dont il est question ici, me semble être entièrement absente de la Gîtâ ; voir p. 21 seq. infra. ↩︎
6:3 Westminster Review, avril 1868, p. 388 seq.; et Remains, I, 104, 105. ↩︎
6:4 P. 6 (éd. Calcutta, Samvat, 1927). ↩︎
6:5 p. 841 (éd. indic. bibl.); également Svetâsvatara, p. 278. ↩︎
7:1 Voir, à ce sujet, Colebrooke’s Essays, vol. i, p. 328 (Madras). ↩︎
8:1 Voir l’Essai introductif à ma Bhagavadgîtâ, traduit en anglais en vers blancs, p. lxvii. Voir aussi les Restes de Goldstücker, I, 48, 77 ; II, 10. ↩︎
8 : 3 Préface de Sânkhya Sâra, p. 7 (Bibl. Indic. Éd.) ↩︎
8:4 Histoire de la littérature indienne, p. 28. ↩︎
8:5 Devons-nous déduire de la circonstance mentionnée dans l’Histoire de la littérature indienne de Weber (p. 223, note, 235), que l’auteur de ces Sûtras était plus âgé que Bouddha ? ↩︎
9 : 1 Sûtra, 12, Abhyâsa-vairâgyâbhyâm tannirodhah. ↩︎
10:1 Dans la préface de son Sânkhya Sâra, je pense. ↩︎
10:2 C’est tout ce que nous pouvons déduire des quelques cas de division et de classification que nous rencontrons dans la Gîtâ. Un sujet comme celui traité dans cet ouvrage ne pourrait être bien discuté sans quelques classifications, etc. ↩︎
11:1 Au chapitre X, le mot apparaît dans deux sens différents dans la même strophe (st. 7). ↩︎
11:2 Comparez les différents passages dont les références sont rassemblées dans l’index sanskrit à la fin de ce volume. ↩︎
12:1 Et voir aussi le chapitre VII, strophe 17, où l’homme de connaissance est déclaré « cher » à Krishna. ↩︎
14:1 Comparer Muir, Sanskrit Texts, vol. i, p. 5. Voir aussi Goldstücker’s Remains, I, 177. ↩︎
14:2 Cette opinion, que j’avais exprimée dès 1874 dans l’introduction à mon édition des Satakas de Bhartrihari, est, je trouve, également partagée par le Dr Bühler ; voir son introduction à Âpastamba dans cette série, p. xx seq., note. Les Purânas sont mentionnés dans le Sutta Nipâta (p. 115), quant à la date de leur publication, voir entre autres l’introduction de Swamy, p. xvii. ↩︎
16:1 Comparez les passages rassemblés sous le mot Vedas dans notre Index. ↩︎
16:2 Conférences Hibbert, p. 340 seq. ↩︎
16 : 3 II, 42-45 ; IX, 20, 21. ↩︎
16:4 XVII, 12. ↩︎
16 : 5 VII, 21-23 ; IX, 23-24. ↩︎
16 :6 VIII, 14-16 ; IX, 39-33. ↩︎
17:1 Voir Khândogya-upanishad, p. 473, ou plutôt j’aurais dû me référer au Mundaka-upanishad, où la supériorité et l’infériorité sont énoncées plus distinctement en mots, pp. 266, 267. ↩︎
18:1 Contemporary Review, février 1879. ↩︎
19:1 Voir aussi Sutta Nipâta, p. 115. ↩︎
19 : 2 édition de Haug, p. 68. ↩︎
20:1 Bibl. Ind. éd. 12 ↩︎
20:2 Bibl. Ind. éd., p. 221 seq. ↩︎
20 :3 Bibl. Éd. ind. : p. 11. ↩︎
20:4 Chapitre IV, strophes 123, 124. ↩︎
20:5 Vol. iii (2e éd.), p. 11 seq. Cf. Goldstücker’s Remains, I, 4, 28, 366; II, 67. ↩︎
20:6 Âpastamba (éd. de Bühler) I, 317, 18 (pp. 38, 39 dans cette série) ; voir plus loin sur ce point Devatâdhyâya-brâhmana de M. Burnell, Introd., pp. viii, ix, et notes. ↩︎
20:7 Le professeur Tiele (Histoire des religions anciennes, p. 127) considère que les « principales caractéristiques » de Manu sont « pré-bouddhiques ». ↩︎
21:1 P. xxxv. ↩︎
21:2 Voir l’Essai introductif à ma Bhagavadgîtâ en vers anglais, publié en 1875, p. cxii. ↩︎
22:1 Les remarques dans le texte montreront combien il y a peu dans la Gîtâ de cette « brahmanisation » qui a été brièvement remarquée dans une page précédente. ↩︎
22:2 Quant aux Kshatriyas, le contraste avec les règles de Manu est encore plus fort qu’avec celles d’Âpastamba. Voir notre Introduction à la Gîtâ en vers anglais, p. cxiii. ↩︎
23:3 Voir p. 58 intra; et comparer avec cela les remarques de Weber sur l’une des classes dans lesquelles il divise l’ensemble des Upanishads, History of Indian Literature, p. 165. Voir aussi Muir, Sanskrit Texts, vol. i, p. 508; Max Müller, Upanishads, vol. i, p. lxxv. ↩︎
23:4 Cf. Sutta Nipâta, p. 32; et aussi la note de M. Davids sur ce passage dans son Bouddhisme, p. 131. ↩︎
24:2 Essais sur la littérature sanskrite, vol. iii, p. 150. ↩︎
24:3 Voir nos remarques sur ce point dans l’Essai introductif à notre Gîtâ en vers, p. ii seq. ↩︎
24:4 Introduction à la Gîtâ en vers anglais, p. v seq. ↩︎
25:1 Cf. les conférences Hibbert de Max Müller, p. 137 ; la littérature indienne de Weber, pp. 288, 289 ; et l’excellent petit volume de M. Rhys Davids sur le bouddhisme, p. 151 ; et voir aussi p. 83 du livre de M. Davids. ↩︎
25:2 Cf. Histoire de la littérature indienne de Weber, p. 285. Dans le Bouddhisme de M. Davids, p. 94, nous avons un extrait remarquable d’un ouvrage bouddhiste standard, touchant p. 26 l’existence de l’âme. Comparez cela avec la doctrine correspondante dans la Gîtâ. On constatera que les deux sont d’accord pour rejeter l’identité de l’âme avec les sens, etc. La Gîtâ va ensuite jusqu’à admettre une âme séparée de ceux-ci. Le bouddhisme rejette également cela et ne voit rien d’autre que les sens. ↩︎ ↩︎ ↩︎ ↩︎ ↩︎
27:1 Le mot Brahma-nirvânâ, qui apparaît si souvent à la fin du chapitre V et aussi au chapitre II, 72, me semble indiquer que le nirvânâ n’était pas encore techniquement défini, pour ainsi dire, dans le sens que le bouddhisme lui donna ultérieurement, comme le nom de ce qu’il considérait comme le summum bonum. Le Nirvânâ lui-même apparaît au chapitre VI, 15. ↩︎
27:2 Voir quelques remarques supplémentaires sur ces points dans mon Introduction à la Gîtâ en vers. ↩︎
27:3 Le professeur Tiele (Histoire des religions anciennes, p. 140) dit que Sankara est né en 798 après J.-C. ; sur l’autorité, je présume, de l’Âryavidyâsudhâkara, p. 226. ↩︎
27:4 Journal of the Bombay Branch of the Royal Asiatic Society, vol. viii, p. 250 ; et voir aussi Indian Antiquary, vol. vi, p. 61. Dr. Bühler). ↩︎
28:1 Journal de la branche de Bombay de la Royal Asiatic Society, vol. xiv, p. 16 seq. ↩︎
28:2 P. 182 (éd. de Târânâtha) ↩︎
28:3 Voir la note de FE Hall dans Vâsavadattâ, p. 14. ↩︎
28:4 Voir Indian Antiquary, vol. v, p. 70. ↩︎
28:5 ‘Le Râmâyana a-t-il été copié d’Homère ?’ Voir pp. 36-59. ↩︎
29:1 Cf. Colebrooke’s Essays, vol. ii. p. 166, seq. On peut remarquer que cet argument n’est pas affecté par la tentative de distinguer le Kâlidâsa du Sakuntalâ du Kâlidâsa du Raghuvamsa. Car l’ouvrage cité dans le Pañkatantra est le Kumârasambhava, qui appartient indiscutablement au même auteur que le Raghuvamsa. ↩︎
30:1 Je suis redevable au professeur MM Kunte pour le prêt du commentaire de Vallabhâkârya sur les Sûtras mentionnés dans le texte. Je ne l’avais pas vu en 1875, la dernière fois que j’ai discuté de cette question. ↩︎
31:1 Cf. Weber’s Indian Literature, p. 241. Voir aussi la préface de Lassen à son édition de la Gîtâ de Schleger, XXXV. Râmânuga adopte un point de vue opposé. ↩︎
31:2 Voir Sâmavidhâna-brâhmana de Burnell, Introduction, p. vi note. ↩︎ ↩︎ ↩︎
32 : 1 Les autorités sont rassemblées dans notre édition de Bhartrihâri (Bombay Series of Sanskrit Classics), Introd. p. xi remarque. Voir aussi Âpastamba de Bühler dans cette série, Introd. p. xxviii. ↩︎ ↩︎ ↩︎
32:2 Voir Colebrooke’s Essays, vol. i, p. 332. Un Upavarsha est mentionné dans le Kathâsaritsâgara comme vivant à l’époque du roi Nanda, et ayant Pânini, Kâtyâyana et Vyâdi pour élèves. ↩︎
32:3 Voir le Râmânuga Bhâshya; et le Râmânuga Darsana dans Sarvadarsana-sangraha. ↩︎
32 : 4 Âpastamba, p. XVI. ↩︎
32 : 5 Voir Siddhânta Kaumudî, vol. je, p. 592. ↩︎
33:1 Voir son Pânini; et voir aussi l’Âpastamba de Bühler dans cette série, Introd. p. xxxii note. ↩︎
33:2 L’exactitude de cette tradition est très douteuse. ↩︎
33 : 3 Indische Studien I. 470. ↩︎
34:1 Voir l’édition de la Gîtâ de ce dernier, Préface, p. xxvii. ↩︎
34:2 Dans l’édition de la Gîtâ publiée à Bombay en Saka 1782, il y a une strophe qui dit que les Upanishads sont les vaches, Krishna le laitier, Arguna le veau, et que le lait est la Gîtâ semblable au nectar, ce qui indique la vision traditionnelle de la Gîtâ — une vision en accord avec celle à laquelle nous ont conduit les faits et les arguments contenus dans cette introduction. ↩︎
35:1 p. xl (éd. de Lassen) ↩︎