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Paul et l’Éternel Féminin | Le Lien Urantien — Numéro 55 — Été 2011 — Table des matières | Sur les traces de Paul |
Un brin d’histoire: Shu Wen est une jeune chinoise originaire de Nankin. Après ses études de médecine elle décide de se spécialiser en dermatologie. À l’université, elle fait la rencontre d’un autre étudiant, Kejun, assistant de laboratoire. Ayant perdu toute sa famille pendant la guerre sino-japonaise, le gouvernement finance les études de Kejun qui est doux et gentil avec tout le monde. Il travaille dur et c’est un étudiant exceptionnel. L’armée ayant un besoin urgent de chirurgien, Kejun pense à s’engager. Il part et Shu Wen n’a aucune nouvelle pendant deux années. À son retour, Kejun termine ses études et le jeune couple décide de se marier. Il a vingt-neuf ans et Shu Wen vingt-six. Le mariage est célébré mais seulement trois semaines plus tard, l’unité de Kejun est envoyée au Tibet. Shu Wen attend impatiemment son retour mais elle reçoit une convocation au quartier général de Suzhou pour apprendre que son mari est mort dans un incident survenu à l’est du Tibet le 24 mars 1958, à l’âge de vingtneuf ans.
Mais Shu Wen refuse de croire à la mort de Kejun. Elle décide de partir au Tibet pour tenter de le retrouver. L’armée ayant désespérément besoin de médecins, le diplôme de dermatologie de Wen la rend précieuse à ses yeux. Elle part donc avec l’armée pour une quête qui durera une trentaine d’années pendant laquelle Wen sera recueillie par une famille de nomades tibétains avec laquelle elle vivra de nombreuses années en compagnie d’une amie tibétaine, Zhuoma, rencontrée dans l’armée et qui est elle aussi à la recherche de son amour disparu.
L’histoire de Shu Wen, cette jeune médecin chinoise devenue une tibétaine d’âge mûr, est véridique. L’auteur Xinran, est journaliste à Pékin et anime une émission de radio lorsqu’elle rencontre, en 2003, cette femme extraordinaire qu’est Shu Wen. Elle recueillera ses confidences avant de la perdre de vue. Depuis ce temps, elle est à sa recherche et une émouvante lettre pour Wen accompagne le récit. Cette histoire est tout simplement bouleversante. C’est le récit d’une femme habitée par la détermination inébranlable d’apprendre ce qui est advenu de son mari, son grand amour qu’elle n’a jamais oublié. Faisant preuve d’un courage et d’une ténacité hors du commun, elle parcourra pendant trente longues années le Tibet afin de retrouver les traces de son compagnon de vie. Pendant ce temps, elle découvre un pays dont elle ignorait à peu près tout des coutumes et croyances et devient peu à peu plus tibétaine que chinoise. Elle adopte les vêtements et la coiffure des femmes tibétaines et apprend à vivre à la mode des familles nomades du Tibet. Tous les soirs, elle écrit son journal et sort la photo de Kejun afin de bien garder en mémoire ses traits. Au fil des années, la photo a jauni mais le doux visage de son grand amour la rassure et la console de ses tourments…
Ma réflexion personnelle : Bien loin de toute considération historique, politique et même littéraire, l’histoire de cet amour nomade est d’une intensité rare et prodigieuse. L’émotion qu’elle suscite a quelque chose de viscéral, nullement frivole. Et pourtant cette relation amoureuse de quelques mois a su engendrer des sentiments si puissants qu’ils se sont accrus toute une vie durant, malgré l’absence physique de l’autre. C’est un parcours atypique que nous suivons là, avec une boule au ventre, et notre esprit qui cogite, qui s’emballe. Celui d’une jeune femme partie seule au Tibet, sans d’autre but que de retrouver son mari pourtant certainement décédé. Sa foi en lui, sa quiétude, lui a permis de surmonter de multiples souffrances, physiques comme morales et de survivre dans une région en apparence inhospitalière, comparée à « un grand monastère ». Et ce décor, ce « vide des paysages, le vent invisible soufflant sur la terre inculte, le ciel haut, infini, et silence total », à la fois immense et désertique, accentuent notre affectivité.
Un être humain, en occurrence une femme, subit une épreuve qu’elle estime juste d’assumer. Elle ira jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’au point de non retour, là où il n’y a plus rien de matériel ou de mental. Là où fleure la spiritualité authentique, la respiration de l’âme avec des fruits tels que patience, constance, résignation, sérénité…
Les années ne comptent plus. Intemporalité. Shu Wen est devenue une femme transfigurée ! Et dire qu’elle est aurait pu arrêter cette expérience, se consoler avec un autre homme, choisir une vie plus facile, … que sais-je encore ? J’ose à peine imaginer si les rôles étaient intervertis! Ce gentil Kejun, aurait-il été aussi sage, aussi exemplaire, aussi persévérant ? Et de prolonger mes réflexions : quelle est la suite de leur aventure ? Leurs retrouvailles seront-elles aussi célestes que l’on espère ? Quel est le but ou le prix de cette expérience? Ce couple humain a-t-il une destinée particulière? Les associés célestes de ces personnages avaient-ils prémédité cette aventure ? Ces qualités pourraient-elles se manifester, être transposées dans une vie « normale » de couple ? Entre « Acteurs conjoints » consentants ?
En tout cas, chapeau bas, Madame Shu Wen ! Merci d’être femme ! Merci de nous montrer tant d’aptitudes et de compétences ! Merci de nous apprendre à aimer si intensément, de sublimer l’amour humain ! Merci pour le sacrifice discret de votre vie terrestre ! Merci de nous être si humainement proche!
Si je me rappelle bien le LU nous dit que les différences entre genres vont s’accentuer durant notre carrière universelle. Comme le sexe ne sera plus un critère, il faut bien deviner qu’il y a d’autres raisons plus essentielles… Pourquoi ne pas en profiter dès notre première incarnation? Nos différences peuvent être acquises ou innées. Le rôle de l’éducation et de la civilisation est parfois plus déterminant que celui de la physiologie humaine. Par exemple, on nous apprend que les femmes ont actuellement un bâtonnet de plus que les hommes dans les yeux ; ce qui leur permettrait de distinguer plus précisément certaines nuances de couleur dans le spectre des rouge-violet et que cela serait vraisemblablement dû à la cueillette des petits fruits durant des millénaires alors que les hommes chassaient le mammouth et développaient le sens de l’orientation, indispensable à … la chasse ! Bref, cette acquisition féminine pourrait être résolument exploitée de nos jours dans tous les travaux graphiques, publicitaires, de décoration etc. ! Ce serait génial pour une infinité d’applications. Faire appel à de telles compétences qu’elles soient physiques, mentales ou spirituelles deviendrait réellement passionnant et motiverait notre de joie de vivre nos partenariats ici-bas … Dansson interprétationdumythed’Orphée,GustaveGrasset propose uncortège de musiciennes pour apprivoiser les fauves. Comme quoi, le potentiel de la féminitude fait partie de notre imaginaire collectif mais peut aussi devenir une réalité si nous lui en donnons la possibilité.
(à suivre)
* Les funérailles célestes ou l’extraordinaire aventure d’une chinoise au Tibet de Xin ran P. Picquier / PICQUIER PHILIP. Texte compilé et reformaté par la rédaction.
Guy de Viron
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