© 2007 Jean-Claude Romeuf
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Petite réflexion sur la puissance d'aimer (1ère partie) | Le Lien Urantien — Numéro 41 — Hiver 2007 — Table des matières | Rencontre d'automne de l'AFLLU à AIX-LES-BAINS |
Les faits. En bas coulait une rivière. Him, pour s’être maintes fois baigné sous les cascades, la connaissait bien. Ses gours étaient remplis de poissons exotiques, les mêmes poissons multicolores qui peuplent les atolls des îles tropicales. Bien souvent, il avait été étonné de pouvoir respirer sous l’eau.
En sautant vers l’amont, de rochers en rochers, il s’était aperçu que la rivière était aussi une réserve d’or. Combien de fioles de ce métal précieux avait-il remplies en cherchant dans les failles? II ne pouvait le dire; il ne se rappelait pas non plus dans quelle cachette, il les avait enfouies.
Him marchait maintenant sur le chemin surplombant et longeant la rivière à quelques mètres. $1 droite se dressaient d’immenses falaises infranchissables, mais Him savait qu’en suivant le chemin fait de rocaille et de terre, il arriverait sûrement un jour jusqu’au sommet blanc de la montagne. Là-haut où le ciel se confond à la terre, le chemin et la rivière, il en était sûr, devaient se rencontrer. Comme il en avait l’intime conviction, il verrait qu’une source jaillirait à l’endroit où le chemin finissait.
Pas très loin, sur le bord, une grange semblant surgir du songe moyenâgeux d’un héraut ou d’un troubadour fit son apparition. Him ne douta pas que cette masure lui appartenait. C’était presque une ruine, mais les fondations étaient solides et pour peu qu’il se mette au travail, il en ferait un joli mas cévenol. Ce quil l’intrigua le plus, ce fut une sorte de trappe en bois située à la partie supérieure de l’édifice et par laquelle s’envolaient des oiseaux de la couleur des tourterelles, mais la race de ces oiseaux lui était totalement inconnue. S’il s’était s’agi de colombes blanches, Him n’aurait pas manqué de penser qu’il avait eu affaire à Dieu!
Him grimpa jusqu’à la trappe sans difficulté et se hissa à l’intérieur d’une pièce, une sorte de grenier rempli de paille. Il s’attendait à trouver là une multitude d’oiseaux, mais la pièce était vide. Un grand nid situé au centre contenait, le jugeat-il, pas loin de deux cents œufs. Aucun oiseau n’était là pour les couver, cela rendit Him un peu triste: les œufs allaient donc pourrir!
La paille était accueillante, il s’allongea et s’endormit.
Les significations. Him savait qu’aucun fait n’est inutile pourvu qu’on lui donne une signification. Il appelait cela « la réaction positive aux évènements ». A son réveil, il comprit que la rivière était un flot de vie s’écoulant indéfiniment, chargé d’influences bénéfiques que les dieux envoient incessamment aux hommes afin qu’ils profitent au mieux de leur expérience de la vie.
Le chemin qui montait, parallèle à la rivière et pas très éloigné d’elle, semblait représenter la lente progression de Him en quête de spiritualité, tout au long du temps et de l’éternité.
Le soleil se lève chaque jour, mais pourquoi le fait-il? Se chauffer au soleil sans se demander pourquoi il se lève, ne profite ni à l’évolution de la pensée ni à celle de l’esprit.
Ce jour-là, justement il faisait très beau. Les oiseaux qui s’envolaient, il le sut tout de suite, étaient les révélateurs qui lui laissèrent un livre. Les révélateurs étaient partis, mais les oeufs restaient. Les œufs représentaient les fascicules contenus dans le livre. Il y en avait exactement cent quatre-vingt seize. Mais pourquoi n’étaient-ils pas couvés? Him ressentit un peu d’amertume ; il comprit que pour en profiter réellement, ce serait à lui de les couver. Autrement dit, il lui fallait lire et relire les pages des fascicules!
II eut un peu honte d’avoir tenu si longtemps un trésor entre ses mains et d’avoir gaspillé tant de temps à ne pas le faire fructifier suffisamment.
Les valeurs. Elles ne lui appartenaient pas encore tout à fait. Etaient-elles la propriété de l’étoile qui l’habitait? Pas plus qu’il ne savait où il avait remisé l’or ramassé dans la rivière, il ne savait en quel endroit les valeurs de sa vie étaient entreposées. Expliquer la rotation de la terre autour du soleil par les sciences physiques, ne peut rester qu’une rotation autour des significations humaines, mais voir Dieu à travers la beauté des sciences humaines, c’est comme admirer la beauté de Dieu à travers un lever de soleil. C’est une valeur d’éternité! Ces valeurs, pensa Him, aident les hommes à gravir leur chemin et à construire leur maison.
Il savait que la lecture de son livre l’aiderait à combler sa curiosité, à faire naître en lui de nouveaux concepts, de nouvelles significations; c’était louable, mais était-ce assez? Peut-être, malgré tout, cela engendrerait quelque part en son âme, des horizons de valeurs nouvelles — une croissance dans le divin native d’une conscience ou d’une connaissance accrue de la Déité et du cosmos- mais de cela, rien n’était sûr ! Him reprit le livre par le début, il commença par l’Introduction, il se concentra plusieurs fois sur les passages traitant des Déités, de l’lle Eternelle et de l’Univers. Il s’aperçut que chaque lecture l’amenait à de nouvelles questions ; ce qu’il avait cru comprendre jusqu’alors se révélait insuffisant et imparfait. Chaque page l’amenait à réfléchir, un passage oublié ou trop vite lu, était souvent la clé qui permettait d’ouvrir une des portes de la vérité. Il décida de prendre des notes sur un petit carnet.
II chercha d’abord à élucider la complexité de la réalité cosmique dans laquelle tout semblait quelquefois se contredire dans le livre, mais il s’aperçut que les révélateurs avaient deux façons d’appréhender l’espace selon qu’ils se plaçaient sur le niveau absolu ou sur le niveau fini. Dans tous les cas le cosmos avait une limite.
L’espace, disaient-ils, n’existe pas sur les surfaces absolues de l’lle Eternelle. Elle-même existe hors du temps et sans emplacement dans l’espace. Il est donc naturel, pensa Him, que la vision de l’espace des êtres qui la peuplent soit différente de la nôtre.
Pour ces êtres, sur le niveau absolu, le profil vertical de la totalité d’espace ressemble à une croix de Malte. Les bras horizontaux représentent l’espace pénétré, c’est-à-dire formé de galaxies, de trous noirs (d’îles obscures), de soleils, de planètes. Les bras verticaux représentent l’espace non pénétré (dépourvu d’énergie force) qui est un réservoir potentiel du volume et en même temps un des stabilisateurs de l’espace pénétré. Pendant que l’un se contracte, l’autre est en train de se dilater. C’est ce qui explique l’expansion actuelle et visible des galaxies. Entre les quatre bras, existe une zone semi tranquille d’espace médian séparant les différents étages de l’univers.
Or, ces mêmes êtres, vivant dans l’absolu, savent se projeter dans le fini. Lorsqu’ils discourent de notre univers et non plus du Paradis, leur vision du cosmos n’est plus la même : Lorsque nous partons du centre divin vers l’extérieur dans n’importe quelle direction nous finissons par arriver aux limites extérieures du grand univers. Cela contredirait l’analyse précédente si l’on ne tenait pas compte des niveaux absolu ou fini, mais se rapproche de notre propre concept astronomique.
Cette seconde vision du cosmos, différente de la première, ressemble à ce que nos astronomes peuvent observer avec leurs télescopes. En effet, de n’importe quel point où l’on se trouve dans l’univers, l’espace semble se déployer dans toutes les directions. La science, bien qu’elle en connaisse les galaxies, ignore pour l’instant l’existence des quatre niveaux d’espaces extérieurs, mais elle sait que les galaxies sont séparées entre elles par des zones où la matière se raréfie (l’espace médian). Elle présume que notre cosmos a une limite au-delà de laquelle rien n’existerait (l’espace non pénétré). Ne parlons pas ici de néant, il n’existe pas!
Him poursuivit à écrire que la description d’un centre paradisiaque des différents étages matériels est nécessaire pour faire comprendre aux humains leur profil d’ascension spirituelle. Le fait que les révélateurs lui donnent une situation géographique sert à leur faire concevoir un cheminement spatial parallèle au développement spirituel de chaque homme, le but ultime étant le Paradis. Him se dit qu’il lui faudrait des âges et des âges pour atteindre le sommet de la montagne, mais après tout, cela lui importait peu: il ne se trouvait pas si mal que cela sur terre, sur le chemin proche de la rivière. Il lui fallait d’abord construire sa maison, ce serait long ! II se mit à réfléchir un peu plus.
II avait lu que l’espace ne touchait pas le Paradis, il s’en contrefichait aussi. L’important, c’était que le Paradis puisse toucher l’espace! Pourquoi ne le feraitil pas? Le Paradis, étant un Absolu, le modèle absolu de l’espace, devait avoir ce pouvoir. Le Père Universel, se dit-il, aussi éloigné qu’il soit, habite bien dans le cœur des hommes?
Si le Paradis n’avait pas le pouvoir de rencontrer l’espace, s’il était aussi éloigné qu’on puisse le croire, la puissance d’espace qui est le réservoir cosmique de tout univers matériel, ne pourrait pas pénétrer dans le grand univers et encore moins dans les univers extérieurs. Or, la puissance d’espace venant du Paradis est la réserve ancestrale de toute force, énergie ou matière et est toujours présente dans l’espace. Elle n’est pas un niveau de réalité actuelle, mais c’est le potentiel de toute réalité cosmique révélée et organisée par l’Absolu Non Qualifié.
Jean-Claude Romeuf
02 décembre 2007
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