« Amis insensés » — Cette histoire fut racontée par le Maître à Jetavana, à propos d’une servante du Grand Trésorier, Anātha-piṇḍika. On raconte qu’il avait une servante nommée Rohiṇī, dont la vieille mère s’approcha de l’endroit où la jeune fille pilait du riz et s’allongea. Les mouches encerclèrent la vieille femme et la piquèrent comme avec une aiguille. Elle cria alors à sa fille : « Les mouches me piquent, ma chère ; chasse-les. » « Oh ! Je vais les chasser, mère », dit la jeune fille en levant son pilon vers les mouches qui s’étaient posées sur sa mère. Puis, s’écriant : « Je vais les tuer ! », elle frappa sa mère d’un coup tel que la vieille femme fut tuée sur le coup. Voyant ce qu’elle avait fait, la jeune fille se mit à pleurer et à crier : « Oh ! mère, mère ! »
La nouvelle fut portée au Grand Trésorier qui, après avoir fait brûler le corps, se rendit au monastère et raconta au Maître ce qui s’était passé. « Ce n’est pas la première fois, laïc », dit le Maître, « que Rohiṇī, soucieuse de tuer les mouches de sa mère, la tue avec un pilon ; elle avait déjà fait exactement la même chose auparavant. » Puis, à la demande d’Anātha-piṇḍika, il raconta cette histoire du passé.
_____________________________
Un jour, alors que Brahmadatta régnait à Bénarès, le Bodhisatta naquit fils du Seigneur Grand Trésorier, et devint lui-même Seigneur Grand Trésorier à la mort de son père. Lui aussi avait une servante nommée Rohiṇī. Sa mère, de la même manière, alla là où sa fille pilait du riz, s’allongea et cria : « Chasse ces mouches loin de moi, ma chère ! » De la même manière, elle frappa sa mère avec un pilon, la tua et se mit à pleurer.
En entendant ce qui s’était passé, [249] le Bodhisatta réfléchit : « Ici, dans ce monde, même un ennemi, doté de bon sens, serait préférable », et récita ces lignes :
Les amis dépourvus de sens sont pires que les ennemis dotés de sens,
Soyez témoin de la fille dont la main imprudente s’est abattue
Sa mère, qu’elle pleure désormais en vain.
Dans ces lignes à la louange du sage, le Bodhisatta a prêché la Vérité.
_____________________________
« Ce n’est pas la première fois, laïc », dit le Maître, « que Rohiṇī, soucieuse de tuer des mouches, tue sa propre mère. » Cette leçon terminée, il démontra le lien et identifia la Naissance en disant : « La mère et la fille d’aujourd’hui étaient aussi mère et fille de ces temps passés, et moi-même le Seigneur Grand Trésorier. »