« C’est la connaissance. » — Cette histoire fut racontée par le Maître dans un certain hameau du Kosala à propos de quelqu’un qui gâcha un plaisir.
La tradition raconte qu’au cours d’un voyage d’aumônes parmi les habitants du Kosala, le Maître arriva dans un hameau. Un écuyer du lieu invita le Bouddha à prendre le repas de midi chez lui et fit asseoir son invité dans la cour. Il offrit l’hospitalité à la Confrérie, dirigée par le Bouddha, et leur permit courtoisement de se promener librement dans ses terres. Les Frères se levèrent alors et se promenèrent dans les terres avec le jardinier. Observant un espace vide au cours de leur promenade, ils dirent au jardinier : « Disciple laïc, ailleurs dans la cour, l’ombre est abondante ; mais ici, il n’y a ni arbre ni arbuste. Comment cela se fait-il ? »
« Messieurs », répondit l’homme, « lors de l’aménagement de ce terrain, un villageois, qui arrosait, a arraché tous les jeunes arbres des environs et leur a donné plus ou moins d’eau selon la taille de leurs racines. Les jeunes arbres ont alors dépéri et sont morts ; c’est pourquoi cet espace est vide. »
S’approchant du Maître, les Frères lui dirent ceci. « Oui, Frères », dit-il, « ce n’est pas la première fois que ce villageois gâche un plaisir ; il a fait exactement la même chose autrefois. » Et ce disant, il raconta cette histoire du passé.
_____________________________
Il était une fois, lorsque Brahmadatta était roi de Bénarès, une fête fut proclamée dans la ville ; et aux premières notes d’appel du tambour de fête, les habitants de la ville se précipitèrent pour célébrer la fête.
[ p. 119 ]
En ce temps-là, une tribu de singes vivait dans la résidence royale. Le jardinier du roi pensa : « Ils sont en vacances en ville. Je vais demander aux singes d’arroser pour moi et je m’en vais profiter avec les autres. » Ayant ainsi parlé, il alla trouver le roi des singes et, après avoir évoqué les bienfaits que sa majesté et ses sujets tiraient de leur séjour dans cette résidence, en termes de fleurs, de fruits et de jeunes pousses à manger, il termina en disant : « Aujourd’hui, c’est la fête en ville, et je m’en vais profiter. Ne pourriez-vous pas arroser les jeunes arbres pendant mon absence ? »
« Oh ! oui », dit le singe.
« Faites attention », dit le jardinier ; et il partit, donnant aux singes les outres et les arrosoirs en bois pour faire le travail.
Les singes prirent alors les outres et les arrosoirs et se mirent à arroser les jeunes arbres. « Mais il faut veiller à ne pas gaspiller l’eau », observa leur roi ; « quand vous arrosez, arrachez d’abord chaque jeune arbre et observez la taille de ses racines. Ensuite, arrosez abondamment ceux dont les racines sont profondes, et très peu ceux dont les racines sont minuscules. Quand toute l’eau sera épuisée, nous aurons bien du mal à en récupérer. »
« Bien sûr », dirent les autres singes, et ils firent ce qu’il leur avait demandé.
À ce moment-là, un certain homme sage, voyant les singes ainsi occupés, leur demanda pourquoi ils arrachaient arbre après arbre et les arrosaient selon la taille de leurs racines.
« Parce que tels sont les ordres de notre roi », répondirent les singes.
Leur réponse poussa le sage à réfléchir à la façon dont, malgré leur désir de faire le bien, les ignorants et les insensés ne parviennent qu’à faire du mal. Et il récita cette strophe : [251]
C’est la connaissance qui couronne l’effort de succès,
Car les insensés sont contrariés par leur folie,
\—Voyez le singe qui a tué les arbres du jardin.
Après avoir adressé cette réprimande au roi des singes, le sage quitta le lieu de plaisance avec ses disciples.
_____________________________
Le Maître dit : « Ce n’est pas la première fois, mes frères, que ce villageois gâche des plaisirs ; il était pareil autrefois. » Sa leçon terminée, il démontra le lien et identifia la Naissance en disant : « Le villageois qui a gâché ce plaisir était le roi des singes à cette époque, et j’étais moi-même l’homme sage et bon. »
[Note. Cf. n° 268 et 271 ; et voir la scène sculptée dans le Stūpa de Bharhut, planche xlv, 5.]