« Le hibou est roi », etc. — Cette histoire que le Maître raconta alors qu’il vivait à Jetavana, à propos d’une querelle entre les corbeaux et les hiboux.
À l’époque en question, les Corbeaux mangeaient les Hiboux pendant la journée, et la nuit, les Hiboux volaient, coupant la tête des Corbeaux pendant leur sommeil, les tuant ainsi. Un frère vivait dans une cellule à la périphérie de Jetavana. Quand venait le moment de balayer, il y avait une quantité de têtes de corbeaux à jeter, tombées de l’arbre, assez pour remplir sept ou huit pots. Il raconta cela aux frères. Dans la Salle de la Vérité, les frères commencèrent à en parler. « Ami, frère Untel trouve plus de tant de têtes de corbeaux à jeter chaque jour là où il vit ! » [352] Le Maître entra et leur demanda de quoi ils parlaient alors qu’ils étaient assis ensemble. Ils le lui racontèrent. Ils demandèrent ensuite depuis combien de temps les Corbeaux et les Hiboux ne s’étaient pas disputés. Le Maître répondit : « Depuis le premier âge du monde » ; et puis il leur raconta une histoire du vieux monde.
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Il était une fois, les peuples du premier cycle du monde se rassemblèrent et choisirent pour roi un homme beau, propice, autoritaire et parfaitement parfait. Les quadrupèdes se rassemblèrent également et choisirent pour roi le Lion ; et les poissons de l’océan choisirent pour eux un poisson appelé Ānanda. Alors tous les oiseaux de l’Himalaya se rassemblèrent sur un rocher plat, criant :
« Parmi les hommes, il y a un roi, et parmi les animaux, et même parmi les poissons, il y en a un ; mais parmi nous, les oiseaux, il n’y a pas de roi. Ne vivons pas dans l’anarchie ; nous aussi, choisissons un roi. Choisis quelqu’un qui soit digne de le remplacer ! »
Ils cherchèrent un oiseau et choisirent le hibou. « Voici l’oiseau que nous aimons », dirent-ils. Et un oiseau proclama à trois reprises qu’un vote serait organisé sur cette question. Après avoir patiemment écouté cette annonce à deux reprises, à la troisième fois, un corbeau se leva et cria :
« Arrête ! Si c’est à cela qu’il ressemble lorsqu’on le consacre roi, à quoi ressemblera-t-il lorsqu’il sera en colère ? S’il nous regarde avec colère, nous serons dispersés comme des graines de sésame jetées sur une assiette chaude. Je ne veux pas faire de ce camarade roi ! » Et, développant cela, il prononça la première strophe : —[353]
« Le hibou est roi, dites-vous, de toutes les espèces d’oiseaux :
Avec votre permission, puis-je dire ce que je pense ?
Les Oiseaux répétèrent la seconde, lui accordant la permission de parler :
« Vous avez notre permission, Monsieur, afin que ce soit bon et juste :
Car d’autres oiseaux sont jeunes, sages et intelligents.
Ainsi autorisé, il répéta le troisième :
« Je n’aime pas (avec toute la déférence qu’il faut dire)
Avoir le Hibou oint comme notre chef.
Regardez son visage ! Si cette bonne humeur est,
Que fera-t-il quand il regardera avec colère ?
Puis il s’envola dans les airs en criant : « Je n’aime pas ça ! Je n’aime pas ça ! » Le hibou s’éleva et le poursuivit. Dès lors, les deux oiseaux nourrirent une inimitié l’un envers l’autre. Et les oiseaux choisirent une oie d’or pour roi et se dispersèrent.
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[354] Lorsque le Maître eut terminé ce discours, il déclara les Vérités et identifia la Naissance : « À cette époque, l’Oie sauvage choisie pour roi, c’était moi-même. »