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« L’arc est tendu », etc. — Le Maître raconta cela alors qu’il résidait dans la Bambouseraie, à propos d’un Frère qui fréquentait de mauvaises compagnies. L’occasion en fut longuement donnée dans la Naissance du Mahilāmukhata. [^121] Le Maître dit : « Frères, ce n’est pas la première fois qu’il fréquente de mauvaises compagnies », et raconta une vieille histoire.
Il était une fois, alors que Brahmadatta régnait à Bénarès, le Bodhisatta était un lion qui vivait avec une lionne et avait deux enfants, un fils et une fille. Le fils s’appelait Manoja. Devenu adulte, il prit une jeune lionne pour épouse : ils furent ainsi cinq. Manoja tuait des buffles sauvages et d’autres animaux, obtenant ainsi de la chair pour nourrir ses parents, sa sœur et sa femme. [322] Un jour, sur son terrain de chasse, il aperçut un chacal nommé Giriya, incapable de s’enfuir et couché sur le ventre. « Comment ça, ami ? » dit-il. « Je souhaite vous servir, mon seigneur. » « Eh bien, faites-le. » Il emmena donc le chacal dans sa tanière. Le Bodhisatta, le voyant, dit : « Cher Manoja, les chacals sont méchants et pécheurs, et donnent de mauvais conseils ; ne l’approche pas de celui-ci », mais il ne put l’en empêcher. Un jour, le chacal voulut manger de la chair de cheval et dit à Manoja : « Seigneur, à part la chair de cheval, il n’y a rien que nous n’ayons mangé ; prenons un cheval. » « Mais où sont les chevaux, mon ami ? » « À Bénarès, au bord du fleuve. » Il suivit ce conseil et l’accompagna là où les chevaux se baignaient dans le fleuve ; il prit un cheval, le jeta sur son dos et arriva en toute hâte à l’entrée de sa tanière. Son père, mangeant la chair de cheval, dit : « Mon cher, les chevaux sont la propriété des rois, les rois ont de nombreux stratagèmes, ils ont d’habiles archers pour tirer ; les lions qui mangent de la chair de cheval ne vivent pas longtemps, désormais ne prends plus de chevaux. » Le lion, ne suivant pas le conseil de son père, continua à les prendre. Le roi, apprenant qu’un lion prenait les chevaux, fit construire un bassin de baignade pour chevaux dans la ville ; mais le lion vint quand même et les prit. Le roi fit construire une écurie et y fit fournir du fourrage et de l’eau. Le lion franchit le mur et prit les chevaux, même dans l’écurie. Le roi fit appeler un archer qui tirait comme l’éclair, et lui demanda s’il pouvait tirer sur un lion. Il répondit que oui, et construisit une tour près du mur où le lion était arrivé, il attendit là. Le lion arriva et, postant le chacal dans un cimetière à l’extérieur, se précipita dans la ville pour prendre les chevaux. L’archer, pensant « Sa vitesse est très grande quand il arrive », ne le tira pas, mais alors qu’il s’éloignait après avoir pris un cheval, gêné par le poids de son cheval, il le toucha d’une flèche acérée à l’arrière-train. La flèche ressortit à l’avant et vola dans les airs. [323] Le lion cria « Je suis touché ! » L’archer, après l’avoir touché, fit vibrer son arc comme le tonnerre. Le chacal entendant le bruit du lion et de l’arc se dit : « Mon camarade est abattu et doit être tué, il n’y a pas d’amitié avec les morts, je vais maintenant retourner dans mon ancienne demeure dans les bois », et il prononça donc deux strophes :
L’arc est tendu, la corde résonne fortement ;
Manoja, roi des bêtes, mon ami, est tué.
Hélas, je cherche les bois du mieux que je peux :
Une telle amitié n’est rien ; d’autres doivent être mon soutien.
Le lion s’élança et jeta le cheval à la gueule du repaire, qui tomba mort lui aussi. Ses proches sortirent et le virent couvert de sang, le sang coulant de ses blessures, mort pour avoir suivi les méchants ; et son père, sa mère, sa sœur et sa femme, le voyant, prononcèrent quatre strophes successives :
La fortune de celui qui est attiré par les méchants n’est pas prospère ;
Regardez Manoja allongé là, grâce aux conseils de Giriya.
Les mères n’ont aucune joie d’avoir un fils dont les camarades ne sont pas bons :
Regardez Manoja allongé là, tout couvert de son sang.
Et même ainsi se comporte encore l’homme, dans un état inférieur il se trouve,
Qui ne suit pas les conseils du véritable ami et du sage.
Ceci, ou pire que cela, son destin
Qui est élevé, mais fait confiance à ce qui est bas :
[324] Voyez, c’est ainsi de l’état royal
Il est tombé à la proue.
Enfin, la strophe de la Sagesse Parfaite :
Qui suit les parias est lui-même paria,
Celui qui courtise ses égaux ne sera jamais trahi,
Qui s’incline devant le plus noble se relève vite ;
Compte donc sur l’aide de tes supérieurs.
Après la leçon, le Maître déclara les Vérités et identifia la Naissance : — Après les Vérités, le frère qui fréquentait de mauvaises compagnies fut établi dans la réalisation du Premier Sentier : — « À cette époque, le chacal était Devadatta, Manoja était le gardien de mauvaises compagnies, sa sœur était Uppalavaṇnā, sa femme la Sœur Khemā, sa mère la mère de Rāhula, son père moi-même. »