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Un exemple de frère Léon, comment saint François lui ordonna de laver la pierre
Sur la montagne d’Alverne, alors que saint François parlait avec frère Léon, saint François dit : « Frère brebis, lave cette pierre avec de l’eau. » Frère Léon s’empressa d’obéir et lava la pierre avec de l’eau. Saint François dit, avec une grande joie et allégresse : « Lave-la avec du vin » ; et ainsi fut fait. « Lave-la », dit saint François, « avec de l’huile » ; et ainsi fut fait. Saint François dit : « Frère brebis, lave cette pierre avec du baume. » Frère Léon répondit : « Ô doux père, comment puis-je trouver du baume dans un endroit aussi sauvage que celui-ci ? » Saint François répondit : « Sache, frère brebis du Christ, que c’est la pierre où le Christ s’est assis lorsqu’il m’est apparu un jour, en ce lieu même ; c’est pourquoi je t’ai dit quatre fois : « Lave-la et tais-toi » ; car Jésus-Christ m’a promis quatre grâces singulières pour mon Ordre. » La première est que tous ceux qui aimeront mon Ordre de tout leur cœur, et les frères qui persévéreront, connaîtront, par la grâce divine, une bonne fin. La deuxième est que les persécuteurs de cette sainte Religion seront sévèrement punis. La troisième est qu’aucun homme mauvais ne pourra demeurer longtemps dans cet Ordre, persistant dans son intransigeance. La quatrième est que cette Religion perdurera jusqu’au jugement dernier.
Comment saint François est apparu à frère Léon
À un moment donné, après le départ de saint François, frère Léon eut le désir de revoir ce doux père qu’il avait tant aimé de son vivant. Ce désir l’incita, plus que de coutume, à affliger son corps de prières et de jeûnes, implorant Dieu avec une grande ferveur de l’exaucer. Alors, tandis qu’il était tout enflammé par cette prière, saint François lui apparut tout glorieux, ailé, avec des serres aux mains et aux pieds, semblables à celles d’un aigle, mais dorées. Et frère Léon, tout réjoui et consolé par cette apparition si merveilleuse, dit avec étonnement : « Pourquoi, mon très vénérable père, m’es-tu apparu sous une forme si étrange ? » Saint François répondit : « Parmi les autres grâces qui m’ont été données et accordées par la divine compassion, il y a ces ailes ; afin qu’étant invoqué, je puisse immédiatement secourir les amoureux de cette sainte Religion dans leurs tribulations et leurs nécessités ; et que je puisse emporter leurs âmes et celles de mes frères, comme en volant, vers la gloire céleste. Ces serres si grandes, si fortes et si dorées me sont données contre le diable, contre les persécuteurs de ma Religion et contre les frères réprouvés de ce saint Ordre, afin que je les châtie par des coups durs et douloureux [ p. 277 ] et des châtiments cruels. À la louange du Christ. Amen.
Comment frère Léon eut une terrible vision dans un rêve
Un jour, en songe, frère Léon eut une vision du jugement divin qui se préparait. Il vit les anges jouer de la musique avec des trompettes et divers instruments, et rassembler une foule immense et merveilleuse dans un pré. D’un côté du pré était dressée une échelle toute rouge rosé, qui montait de la terre jusqu’au ciel, et de l’autre côté une autre échelle toute blanche, qui descendait du ciel jusqu’à la terre. Au sommet de l’échelle rouge apparut le Christ, Seigneur offensé et en proie à une colère extrême. Saint François était près du Christ, quelques marches plus bas ; il descendit encore l’échelle et, d’une voix forte et pleine de ferveur, il appela et dit : « Venez, mes frères, venez avec confiance, n’ayez pas peur, approchez-vous du Seigneur, car il vous appelle. » À la voix de saint François et à son commandement, les frères montèrent l’échelle rouge avec une grande confiance. Et, lorsqu’ils furent tous là, les uns tombèrent de la troisième marche, les autres de la quatrième, les autres de la cinquième et de la sixième ; et à la fin tous tombèrent, de sorte qu’il n’en resta pas un seul sur l’échelle. Et la ruine de ses frères fut si grande que saint François, tel un père pitoyable, fut ému de compassion et supplia le Juge pour ses fils, afin qu’il les reçoive dans sa miséricorde. Et le Christ montra ses plaies toutes sanglantes et dit à saint François : « Voilà ce que tes frères m’ont fait. » Et saint François [ p. 278 ] ne tarda pas, mais, tout en intercédant, il descendit quelques marches et cria aux frères tombés de l’échelle rouge : « Venez, levez-vous, mes fils et mes frères, ayez bon courage et ne désespérez pas, mais courez à l’échelle blanche et montez-la, car par elle vous serez reçus dans le Royaume des Cieux ; courez, frères, par l’avertissement paternel, à l’échelle blanche. » Et au sommet de l’échelle apparut la glorieuse Vierge Marie, la Mère de Jésus-Christ, toute pitoyable et bienveillante, et accueillit ces frères ; et sans aucune difficulté ils entrèrent dans le royaume éternel. À la louange du Christ. Amen.
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IMPRIMÉ PAR
TURNBULL ET SPEARS,
ÉDIMBOURG