Comment le frère Juniper se rendit un jour à Assise pour sa confusion
Un jour, alors que frère Juniper séjournait dans le Val de Spolète, il apprit qu’il y avait une grande fête à Assise et que beaucoup de gens s’y rendaient avec une grande dévotion. Il eut alors le désir d’y aller et d’écouter comment il s’y prit. Frère Juniper se déshabillait entièrement, à l’exception de ses caleçons, et partit, traversant Spolète en plein cœur de la ville. C’est ainsi qu’il arriva nu au couvent. Les frères, très inquiets, le scandalisèrent et le réprimandèrent très durement, le traitant de fou, d’idiot et de fauteur de troubles de l’Ordre de Saint-François, et disant qu’il devait être enchaîné comme fou. Le général, qui se trouvait alors sur place, fit appeler tous les frères et frère Juniper avec eux. Et, en présence de tout le couvent, il lui adressa une sévère et sévère réprimande. Après de longs discours, s’exprimant comme quelqu’un ayant autorité pour punir, il dit à Frère Genévrier : « Ta faute est telle et si grande que je ne sais quelle pénitence convenable te donner. » Sur quoi Frère Genévrier, se complaisant dans sa propre confusion, répondit : « Père, je te le dis : comme je suis venu ici nu, permets-moi, par pénitence, de retourner, sous le même déguisement, au lieu d’où je suis parti pour cette fête. »
Comment le frère Juniper fut ravi en extase pendant la célébration de la messe
Un jour, tandis que frère Juniper écoutait la messe avec une grande dévotion, il fut transporté d’extase par l’élévation de son esprit et pendant longtemps. Ayant été laissé dans une cellule loin des autres frères, lorsqu’il revint à lui, il commença, avec une grande ferveur, à dire : « Ô mes frères, qui est-il dans cette vie si noble qu’il ne porterait volontiers un panier de fumier à travers toute la ville, si on lui donnait une maison pleine d’or ? » Et il dit : « Hélas ! pourquoi ne voulons-nous pas souffrir un peu de honte, si nous pouvons ainsi obtenir la vie bienheureuse ? »
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De la douleur que Frère Juniper eut pour la mort de son compagnon, Frère Amazialbene
FRÈRE GENÉVRIER avait pour compagnon un frère qu’il aimait tendrement, nommé Amazialbène. Cet homme était doté d’une patience et d’une obéissance sans bornes ; car, même battu toute la journée, il ne murmurait jamais ni ne prononçait un seul mot de plainte. Il était souvent envoyé dans des lieux où les frères étaient maussades et difficiles à satisfaire, et il souffrait de nombreuses persécutions, qu’il supportait avec la plus grande patience, sans murmurer. À l’instigation de Frère Genévriere, il pleurait et riait. Or, comme Dieu le voulut, ce frère Amazialbène mourut en très bonne réputation ; et lorsque Frère Genévriere apprit sa mort, il en ressentit une douleur plus grande que jamais auparavant pour une chose charnelle ; ainsi, par son attitude extérieure, il manifesta la grande amertume qui était en lui, et dit : « Malheur à moi ! Misérable que je suis, car il ne me reste plus rien de bon, et le monde entier est perdu par la mort de mon doux et bien-aimé frère Amazialbene ! Et il dit : « Si je n’avais pas de paix avec les frères, j’irais à sa tombe et j’en prendrais sa tête, et de son crâne je ferais deux écuelles ; de l’une, en mémoire de lui et par amour pour moi, je mangerais toujours, et de l’autre je boirais chaque fois que j’aurais soif ou envie de boire. »
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De la main que frère Juniper vit dans l’air
Un jour, alors que frère Genévrier priait, et peut-être se vantait-il trop, il lui sembla voir une main en l’air et entendre une voix qui lui parlait ainsi : « Ô frère Genévrier, avec cette main tu ne peux rien. » Sur quoi, il se leva aussitôt et, levant les yeux au ciel, il s’écria d’une voix forte, tout en courant à travers le couvent : « C’est vrai, c’est vrai. » Et il répéta cela longtemps.