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Comment Frère Juniper coupa le pied d’un cochon pour le donner à un homme malade
L’un des disciples les plus éminents et premiers compagnons de saint François fut frère Genévrier, homme d’une profonde humilité, d’une grande ferveur et d’une grande charité. Saint François, parlant un jour avec ses saints compagnons, dit : « Ce serait un bon frère mineur qui aurait conquis lui-même et le monde comme frère Genévrier. » Un jour, à Sainte-Marie-des-Anges, comme enflammé par la charité divine, il rendait visite à un frère malade et lui demanda avec une grande compassion : « Puis-je vous rendre service ? » Le malade répondit : « Cela me serait d’un grand réconfort si vous pouviez me procurer un pied de porc. » Frère Genévrier dit aussitôt : « Laissez-moi faire, je vous le procurerai immédiatement. » Français Et il alla prendre un couteau, je crois, dans la cuisine, et, dans la ferveur de l’esprit, traversa le bois, où certains pourceaux paissaient, et il se jeta sur l’un d’eux et lui coupa le pied et s’enfuit, laissant [ p. 200 ] le cochon avec le pied ainsi mutilé; et revenant, il lava, hacha et fit cuire ce pied; et avec beaucoup de diligence, l’ayant bien préparé, il porta ledit pied au malade avec beaucoup de charité; et le malade le mangea très avidement, à la grande consolation et joie de frère Genévrier; qui, pour le divertissement du malade, raconta avec beaucoup de plaisir les agressions qu’il avait faites au cochon. Pendant ce temps, le porcher, qui avait vu ce frère couper le pied du cochon, raconta toute l’histoire à son maître en ordre, avec une grande douleur. Ayant appris cela, il se rendit chez les frères et, les traitant d’hypocrites, de petits voleurs, de faussaires, de bandits de grand chemin et de méchants, leur demanda : « Pourquoi avez-vous coupé le pied de mon cochon ? » Au grand vacarme qu’il fit, saint François et tous les frères sortirent. Avec beaucoup d’humilité, saint François chercha à excuser ses frères et, ignorant le crime, promit, pour l’apaiser, de réparer tous les dommages. Mais il ne se laissa nullement apaiser ; au milieu d’une grande colère, d’injures et de menaces, il quitta les frères, furieux ; et, répétant sans cesse qu’ils avaient coupé le pied de son cochon par malice, il refusa toute récompense ou promesse, et s’en alla plein d’indignation. Et saint François, plein de prudence, tandis que tous les autres frères étaient stupéfaits, réfléchit et dit en son cœur : « Frère Genévrier a-t-il pu faire cette chose de zèle indiscret ? » Et il fit appeler secrètement Frère Genévrier et l’interrogea en disant : « As-tu coupé le pied d’un cochon dans le bois ? » À quoi Frère Genévrier, non pas comme quelqu’un qui avait commis une faute, mais comme quelqu’un qui se croyait avoir fait une grande charité, répondit très joyeusement, et parla ainsi : « Mon doux père, il est vrai que j’ai coupé le pied de ce [ p. 201 ] cochon ; et la raison,Mon père, écoute-moi, si tu le veux, avec indulgence. Je suis allé par charité visiter tel frère malade. » Il lui raconta ensuite toute l’affaire dans l’ordre, puis ajouta : « Je te dis qu’étant donné la consolation que ce frère a reçue et le réconfort qu’il a tiré de ce pied, je crois vraiment que si j’avais coupé les pieds de cent porcs au lieu d’un seul, Dieu en aurait été satisfait. » Saint François, avec un zèle vertueux et un profond mécontentement, dit alors : « Ô frère Genévrier, pourquoi as-tu causé un si grand scandale ? Ce n’est pas sans raison que cet homme se lamente et est si en colère contre nous ; et peut-être parle-t-il encore de nous en mal dans toute la ville à cause de cette mauvaise action ; et il a vraiment de bonnes raisons de le faire. C’est pourquoi je t’ordonne, par sainte obéissance, de courir après lui jusqu’à ce que tu l’aies rejoint, de te jeter à terre devant lui et de lui dire ta faute, en lui promettant de faire réparation de telle manière qu’il n’ait aucun motif de plainte contre nous ; car, assurément, c’est une très grave offense. » Frère Genévrier fut très surpris par ces paroles, et les autres frères furent stupéfaits, s’étonnant que quelqu’un puisse s’indigner d’un acte aussi charitable ; car il lui semblait que ces biens temporels n’étaient rien, sauf dans la mesure où ils étaient charitablement partagés avec son prochain. Et Frère Genévrier répondit : « Ne doute pas, mon père, que je le paierai immédiatement et le contenterai. Et pourquoi serait-il si inquiet, vu que ce porc dont j’ai coupé le pied était plutôt de Dieu que du sien, et qu’une si grande charité a été faite à son égard ? » Il se mit donc en route et rejoignit cet homme, qui était tellement enragé qu’il n’avait plus aucune patience. Il lui raconta comment et pour quelle raison il avait coupé le pied dudit cochon, et cela avec autant de ferveur, de joie et de délice que s’il lui avait rendu un grand service, pour lequel il méritait d’être bien récompensé. Mais lui, plein de colère et hors de lui-même, injuria amèrement Frère Genévrier, le traitant de fou et d’idiot, de petit voleur et de voleur de grand chemin le plus vil. Frère Genévrier ne se soucia pas de ces paroles injurieuses, mais s’étonna en lui-même ; car, bien qu’il se réjouisse des insultes, il croyait que l’homme ne l’avait pas bien compris, car il lui semblait qu’il s’agissait d’un sujet de joie et non de colère. C’est pourquoi il raconta son histoire encore une fois, se jeta à son cou, l’embrassa et l’embrassa, lui disant que cette chose n’avait été faite que par charité, et l’invitant et le suppliant de donner le reste du cochon dans le même but, avec tant de simplicité, de charité et d’humilité que cet homme, revenu à lui, se jeta à terre non sans beaucoup de larmes ; et confessant le mal qu’il avait fait, il dit aux frères :Il alla prendre ce cochon, le tua, et, l’ayant cuit, le porta avec beaucoup de dévotion et en pleurant à chaudes larmes à Sainte-Marie-des-Anges, et le donna à manger à ces saints frères, par pitié pour le mal qu’il leur avait fait. Saint François, considérant la simplicité et la patience dans l’adversité dudit saint frère Genévrier, dit à ses compagnons et à ceux qui se tenaient autour : « Plût à Dieu, mes frères, que j’aie une grande forêt de tels genévriers ! »
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Exemple du grand pouvoir du frère Juniper contre le diable
Que les démons ne supportassent pas la pureté d’innocence et la profonde humilité de Frère Juniper apparaît dans l’exemple suivant : un jour, un démoniaque, contrairement à ses habitudes et avec une violence étrange, sauta brusquement hors de la route et, courant très vite, s’enfuit sur sept milles par divers sentiers. Interrogé par ses proches, qui le suivaient avec une grande tristesse, sur la raison de sa fuite si étrange, il répondit : « Voilà pourquoi ce fou de Juniper passait par là ; et ne pouvant supporter sa présence ni l’attendre, je me suis enfui dans ces bois. » Et, s’assurant de cette vérité, ils découvrirent que Frère Juniper était passé à cette heure-là, comme le démon l’avait dit. C’est pourquoi saint François, lorsqu’on lui amenait des démoniaques pour qu’il les guérisse, si les démons ne s’éloignaient pas immédiatement sur son ordre, avait coutume de dire : « Si tu ne t’éloignes pas immédiatement de cette créature, je ferai venir frère Genévrier contre toi » ; et alors le démon, craignant la présence de frère Genévrier, et ne pouvant supporter la vertu et l’humilité de saint François, s’en alla immédiatement.
Comment, par l’intermédiaire du diable, frère Juniper fut condamné à la potence
Un jour, le diable, voulant effrayer frère Juniper et le couvrir de honte et d’affliction, se rendit chez un despote très cruel, nommé Nicolas, qui était alors en guerre avec la ville de Viterbe, et lui dit : « Seigneur, prenez bien soin de votre ville, car un grand traître arrive bientôt, envoyé par les Viterbiens pour vous tuer et incendier cette ville. Et voici ce que je vous assure : il vient déguisé en mendiant, les vêtements en lambeaux et rapiécés, un capuchon déchiré sur les épaules ; il porte un poinçon pour vous tuer, et possède en outre un silex et de l’acier pour incendier cette ville ; et si vous constatez que cela n’est pas vrai, punissez-moi comme vous le souhaitez. » À ces mots, Nicolas fut tout étonné et saisi de crainte, car celui qui lui avait adressé ces paroles paraissait un homme de valeur. Il ordonna qu’une surveillance fût assurée et que, si cet homme, muni des signes susmentionnés, se présentait, il fût immédiatement amené devant lui. Cependant, frère Genévrier arriva seul ; car, en raison de sa perfection, il avait le droit d’aller et de rester seul à sa guise. En arrivant, il rencontra des jeunes débauchés qui le raillèrent et commencèrent à se moquer de lui. Malgré cela, il ne s’inquiéta pas, mais les incita plutôt à se moquer davantage de lui. Arrivé à la porte de la ville, les gardes le virent si laid, vêtu de peu et tout déchiré (car, en chemin, il avait donné une partie de son habit aux pauvres par amour de Dieu, et ne ressemblait en rien à un moine mineur), Comme les signes qui leur avaient été donnés apparaissaient clairement en lui, il fut violemment traîné devant ce despote Nicolas. Les serviteurs le fouillèrent pour voir s’il avait des armes offensives. Ils trouvèrent dans sa manche un poinçon avec lequel il avait coutume de réparer ses sandales ; ils trouvèrent également un silex qu’il portait pour allumer un feu, car il faisait beau et il habitait souvent dans les bois et les lieux désolés.
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Nicolas, voyant ces signes en lui, conformément aux informations données par le diable qui l’avait accusé, ordonna qu’on lui nouât une corde autour de la tête ; ce qui fut fait, et avec une telle cruauté que la corde lui pénétra entièrement la chair. Puis il le mit à l’estafette, lui fit tirer et déchirer les bras et torturer tout son corps, sans aucune pitié. Lorsqu’on lui demanda qui il était, il répondit : « Je suis un très grand pécheur » ; et lorsqu’on lui demanda s’il voulait trahir la ville et la donner aux Viterbiens, il répondit : « Je suis un très grand traître, et je ne mérite aucun bien. » Et lorsqu’on lui demanda s’il voulait tuer Nicolas, le despote, avec ce poinçon et brûler la ville, il répondit : « Je ferais des choses bien plus grandes et pires, si Dieu le permettait. » Alors Nicolas, pris de colère, ne voulut plus l’interroger ; Mais, plein de fureur, il condamna sans délai frère Juniper, comme traître et meurtrier, à être attaché à la queue d’un cheval et traîné à travers la ville jusqu’à la potence, pour y être immédiatement pendu par le cou. Frère Juniper ne se défendit pas ; mais, comme quelqu’un qui, par amour de Dieu, se réjouissait des tribulations, il était tout joyeux et heureux. Et lorsque l’ordre du despote fut exécuté, et que frère Juniper fut traîné à travers la ville, attaché par les pieds à la queue d’un cheval, il ne se plaignit ni ne se lamenta, mais, tel un doux agneau mené à l’abattoir, il s’en alla en toute humilité. À ce spectacle et à cette justice soudaine, tout le peuple accourut pour le voir exécuté avec rapidité et sévérité ; et personne ne le reconnut. Néanmoins, comme Dieu le voulut, un homme de bien, qui avait vu frère Juniper se faire prendre et qui le voyait maintenant aussitôt traîné au supplice, courut chez les frères mineurs et dit : « Pour l’amour de Dieu, je vous en supplie, venez vite ; car un pauvre mendiant a été pris, et la sentence a été immédiatement prononcée contre lui, et il est emmené à la mort. Venez au moins, afin qu’il puisse remettre son âme entre vos mains ; car il me semble un homme de bien, et il n’a pas eu le temps de se confesser, et il a été traîné à la potence, et il ne semble se soucier ni de la mort ni du salut de son âme. Oh ! venez vite, je vous en prie. » Le gardien, qui était un homme compatissant, alla aussitôt chercher à sauver son âme ; Mais, à son arrivée, la foule venue assister à l’exécution était déjà si nombreuse qu’il ne put se frayer un chemin à travers eux. Il resta donc là, guettant l’occasion. Tandis qu’il observait, il entendit une voix venant d’entre les gens : « Non, non, petits coquins, vous me faites mal aux jambes. » À cette voix, le gardien soupçonna qu’il s’agissait de Frère Juniper. Avec ferveur, il se jeta parmi eux et arracha le bandage du visage de l’homme.et alors il savait avec certitude que c’était frère Genévrier. Le gardien, par pitié, aurait donc ôté son habit pour en couvrir frère Genévrier, mais celui-ci, d’un air joyeux et comme pour plaisanter, dit : « Ô gardien, tu es un homme gras, et il serait très inconvenant de te voir nu. Je ne le veux pas. » Alors le gardien, en pleurant abondamment, supplia les bourreaux et tout le peuple d’attendre un peu par pitié, pendant qu’il allait intercéder auprès du despote pour frère Genévrier, si par hasard il pouvait lui accorder sa grâce à son sujet. Les bourreaux et certains assistants y consentirent, croyant sincèrement qu’il était son parent ; et le gardien pieux et compatissant alla trouver Nicolas, le despote, en pleurant amèrement et lui dit : « Seigneur, je suis dans un tel [ p. 207 ] un étonnement et une douleur que ma langue ne pourrait jamais exprimer, car il me semble que dans cette ville a été commis aujourd’hui un péché et un tort plus grands que ceux qui ont jamais été commis au temps de nos ancêtres ; et je crois que cela a été fait par ignorance. Nicolas écouta le gardien avec patience et lui demanda : « Quel est le grand crime et le tort qui a été commis aujourd’hui dans cette ville ? » Le gardien répondit : « Monseigneur, l’un des plus saints frères de l’ordre de Saint-François (pour lequel vous portez une dévotion singulière) a été condamné par vous à une mort si cruelle, et certainement, je crois, sans raison. » Nicolas dit : « Maintenant, dites-moi, gardien, qui est-ce ? Peut-être, ne le reconnaissant pas, j’ai commis un grand tort. » Le gardien dit : « Celui que vous avez condamné à mort est frère Genévrier, le compagnon de Saint-François. » Nicolas, le despote, fut stupéfait, car il avait entendu parler de la renommée et de la sainte vie de frère Genévrier. Tout pâle, comme saisi d’horreur, il courut avec le gardien et alla trouver frère Genévrier, le détacha de la queue du cheval et le libéra. Devant tout le peuple, il se jeta à terre devant lui et, en pleurant abondamment, confessa sa faute concernant l’injure et l’insulte qu’il avait faites subir à ce saint frère. Il ajouta : « Je crois, en vérité, que les jours de ma mauvaise vie touchent à leur fin, car j’ai ainsi torturé ce saint homme sans raison. Pour ma mauvaise vie, Dieu permettra que je meure bientôt d’une mort atroce, bien que je l’aie fait par ignorance. » Frère Genévrier pardonna volontiers à Nicolas, le despote ; mais Dieu permit que, quelques jours plus tard, ce Nicolas, le despote, meure d’une mort très cruelle ; et frère Genévrier partit, laissant tout le peuple édifié.Alors le gardien, en pleurant abondamment, supplia les bourreaux et tout le peuple d’attendre un peu, par pitié, pendant qu’il allait intercéder auprès du despote en faveur de Frère Juniper, si par hasard il pouvait lui accorder sa grâce. Les bourreaux et certains assistants acceptèrent, persuadés qu’il était son parent ; et le gardien pieux et compatissant alla trouver Nicolas, le despote, en pleurant amèrement, et dit : « Seigneur, je suis dans un tel étonnement et une telle douleur que ma langue ne pourrait jamais l’exprimer, car il me semble qu’aujourd’hui dans cette ville a été commis un péché et un tort plus grands que ceux qui ont jamais été commis du temps de nos ancêtres ; et je crois que cela a été fait par ignorance. » Nicolas écouta le gardien avec patience et lui demanda : « Quel est le grand crime et le grand tort qui a été commis aujourd’hui dans cette ville ? » Le gardien répondit : « Monseigneur, l’un des plus saints frères de l’ordre de Saint-François (pour lequel vous portez une dévotion singulière) a été condamné par vous à une mort si cruelle, et certainement, je crois, sans motif. » Nicolas dit : « Maintenant, dites-moi, gardien, qui est celui-ci ? Peut-être, ne le reconnaissant pas, ai-je commis un grand tort. » Le gardien dit : « Celui que vous avez condamné à mort est frère Genévrier, le compagnon de saint François. » Nicolas, le despote, fut stupéfait, car il avait entendu parler de la renommée et de la sainte vie de frère Genévrier ; et, tout pâle, comme saisi d’horreur, il courut avec le gardien et vint vers frère Genévrier, le détacha de la queue du cheval et le libéra. Devant tout le peuple, il se jeta à terre devant lui et, en pleurant abondamment, confessa sa faute concernant l’injure et l’insulte qu’il avait fait subir à ce saint frère, et ajouta : « Je crois, en vérité, que les jours de ma mauvaise vie touchent à leur fin, car j’ai ainsi torturé ce saint homme sans aucune raison. Pour ma mauvaise vie, Dieu permettra que je meure bientôt d’une mauvaise mort, bien que je l’aie fait par ignorance. » Frère Genévrier pardonna volontiers à Nicolas, le despote ; mais Dieu permit que, quelques jours après, ce Nicolas, le despote, termina sa vie par une mort très cruelle ; et frère Genévrier partit, laissant tout le peuple édifié.Alors le gardien, en pleurant abondamment, supplia les bourreaux et tout le peuple d’attendre un peu, par pitié, pendant qu’il allait intercéder auprès du despote en faveur de Frère Juniper, si par hasard il pouvait lui accorder sa grâce. Les bourreaux et certains assistants acceptèrent, persuadés qu’il était son parent ; et le gardien pieux et compatissant alla trouver Nicolas, le despote, en pleurant amèrement, et dit : « Seigneur, je suis dans un tel étonnement et une telle douleur que ma langue ne pourrait jamais l’exprimer, car il me semble qu’aujourd’hui dans cette ville a été commis un péché et un tort plus grands que ceux qui ont jamais été commis du temps de nos ancêtres ; et je crois que cela a été fait par ignorance. » Nicolas écouta le gardien avec patience et lui demanda : « Quel est le grand crime et le grand tort qui a été commis aujourd’hui dans cette ville ? » Le gardien répondit : « Monseigneur, l’un des plus saints frères de l’ordre de Saint-François (pour lequel vous portez une dévotion singulière) a été condamné par vous à une mort si cruelle, et certainement, je crois, sans motif. » Nicolas dit : « Maintenant, dites-moi, gardien, qui est celui-ci ? Peut-être, ne le reconnaissant pas, ai-je commis un grand tort. » Le gardien dit : « Celui que vous avez condamné à mort est frère Genévrier, le compagnon de saint François. » Nicolas, le despote, fut stupéfait, car il avait entendu parler de la renommée et de la sainte vie de frère Genévrier ; et, tout pâle, comme saisi d’horreur, il courut avec le gardien et vint vers frère Genévrier, le détacha de la queue du cheval et le libéra. Devant tout le peuple, il se jeta à terre devant lui et, en pleurant abondamment, confessa sa faute concernant l’injure et l’insulte qu’il avait fait subir à ce saint frère, et ajouta : « Je crois, en vérité, que les jours de ma mauvaise vie touchent à leur fin, car j’ai ainsi torturé ce saint homme sans aucune raison. Pour ma mauvaise vie, Dieu permettra que je meure bientôt d’une mauvaise mort, bien que je l’aie fait par ignorance. » Frère Genévrier pardonna volontiers à Nicolas, le despote ; mais Dieu permit que, quelques jours après, ce Nicolas, le despote, termina sa vie par une mort très cruelle ; et frère Genévrier partit, laissant tout le peuple édifié.207] un étonnement et une douleur que ma langue ne pourrait jamais exprimer, car il me semble que dans cette ville a été commis aujourd’hui un péché et un tort plus grands que ceux qui ont jamais été commis au temps de nos ancêtres ; et je crois que cela a été fait par ignorance. Nicolas écouta le gardien avec patience et lui demanda : « Quel est le grand crime et le tort qui a été commis aujourd’hui dans cette ville ? » Le gardien répondit : « Monseigneur, l’un des plus saints frères de l’ordre de Saint-François (pour lequel vous portez une dévotion singulière) a été condamné par vous à une mort si cruelle, et certainement, je crois, sans raison. » Nicolas dit : « Maintenant, dites-moi, gardien, qui est-ce ? Peut-être, ne le reconnaissant pas, j’ai commis un grand tort. » Le gardien dit : « Celui que vous avez condamné à mort est frère Genévrier, le compagnon de Saint-François. » Nicolas, le despote, fut stupéfait, car il avait entendu parler de la renommée et de la sainte vie de frère Genévrier. Tout pâle, comme saisi d’horreur, il courut avec le gardien et alla trouver frère Genévrier, le détacha de la queue du cheval et le libéra. Devant tout le peuple, il se jeta à terre devant lui et, en pleurant abondamment, confessa sa faute concernant l’injure et l’insulte qu’il avait faites subir à ce saint frère. Il ajouta : « Je crois, en vérité, que les jours de ma mauvaise vie touchent à leur fin, car j’ai ainsi torturé ce saint homme sans raison. Pour ma mauvaise vie, Dieu permettra que je meure bientôt d’une mort atroce, bien que je l’aie fait par ignorance. » Frère Genévrier pardonna volontiers à Nicolas, le despote ; mais Dieu permit que, quelques jours plus tard, ce Nicolas, le despote, meure d’une mort très cruelle ; et frère Genévrier partit, laissant tout le peuple édifié.207] un étonnement et une douleur que ma langue ne pourrait jamais exprimer, car il me semble que dans cette ville a été commis aujourd’hui un péché et un tort plus grands que ceux qui ont jamais été commis au temps de nos ancêtres ; et je crois que cela a été fait par ignorance. Nicolas écouta le gardien avec patience et lui demanda : « Quel est le grand crime et le tort qui a été commis aujourd’hui dans cette ville ? » Le gardien répondit : « Monseigneur, l’un des plus saints frères de l’ordre de Saint-François (pour lequel vous portez une dévotion singulière) a été condamné par vous à une mort si cruelle, et certainement, je crois, sans raison. » Nicolas dit : « Maintenant, dites-moi, gardien, qui est-ce ? Peut-être, ne le reconnaissant pas, j’ai commis un grand tort. » Le gardien dit : « Celui que vous avez condamné à mort est frère Genévrier, le compagnon de Saint-François. » Nicolas, le despote, fut stupéfait, car il avait entendu parler de la renommée et de la sainte vie de frère Genévrier. Tout pâle, comme saisi d’horreur, il courut avec le gardien et alla trouver frère Genévrier, le détacha de la queue du cheval et le libéra. Devant tout le peuple, il se jeta à terre devant lui et, en pleurant abondamment, confessa sa faute concernant l’injure et l’insulte qu’il avait faites subir à ce saint frère. Il ajouta : « Je crois, en vérité, que les jours de ma mauvaise vie touchent à leur fin, car j’ai ainsi torturé ce saint homme sans raison. Pour ma mauvaise vie, Dieu permettra que je meure bientôt d’une mort atroce, bien que je l’aie fait par ignorance. » Frère Genévrier pardonna volontiers à Nicolas, le despote ; mais Dieu permit que, quelques jours plus tard, ce Nicolas, le despote, meure d’une mort très cruelle ; et frère Genévrier partit, laissant tout le peuple édifié.Il se prosterna devant lui et, avec de grandes larmes, confessa sa faute concernant l’injure et l’insulte qu’il avait fait subir à ce saint frère. Il ajouta : « Je crois, en vérité, que les jours de ma mauvaise vie touchent à leur fin, car j’ai ainsi torturé ce saint homme sans aucune raison. Pour ma mauvaise vie, Dieu permettra que je meure bientôt d’une mauvaise mort, bien que je l’aie fait par ignorance. » Frère Genévrier pardonna volontiers à Nicolas, le despote ; mais Dieu permit que, quelques jours après, ce Nicolas, le despote, achevât sa vie d’une mort très cruelle ; et Frère Genévrier partit, laissant tout le peuple édifié.Il se prosterna devant lui et, avec de grandes larmes, confessa sa faute concernant l’injure et l’insulte qu’il avait fait subir à ce saint frère. Il ajouta : « Je crois, en vérité, que les jours de ma mauvaise vie touchent à leur fin, car j’ai ainsi torturé ce saint homme sans aucune raison. Pour ma mauvaise vie, Dieu permettra que je meure bientôt d’une mauvaise mort, bien que je l’aie fait par ignorance. » Frère Genévrier pardonna volontiers à Nicolas, le despote ; mais Dieu permit que, quelques jours après, ce Nicolas, le despote, achevât sa vie d’une mort très cruelle ; et Frère Genévrier partit, laissant tout le peuple édifié.
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Comment frère Juniper a donné tout ce qu’il pouvait aux pauvres, par amour de Dieu
Frère Juniper avait une telle pitié et une telle compassion pour les pauvres que, chaque fois qu’il voyait quelqu’un de mal vêtu ou nu, il avait l’habitude d’ôter immédiatement sa tunique ou le capuchon de son habit et de le donner à ce pauvre homme. C’est pourquoi le gardien lui ordonna, par obéissance, de ne donner ni toute sa tunique ni une partie de son habit à aucun pauvre. Or, quelques jours plus tard, il rencontra un pauvre homme, presque nu, qui demandait l’aumône à Frère Juniper pour l’amour de Dieu. Avec une grande compassion, il dit : « Je n’ai rien que je puisse te donner, si ce n’est ma tunique ; et mon supérieur m’a ordonné, par obéissance, de ne la donner ni une partie de mon habit à personne ; mais si tu me l’enlevais, je ne te dirais pas non. » Il ne s’adressa pas à des oreilles sourdes ; Le pauvre homme, en effet, enleva aussitôt sa tunique et s’enfuit, laissant frère Juniper nu. De retour sur place, on lui demanda où était sa tunique. Il répondit : « Un homme de bien me l’a arrachée et est parti avec. » La compassion grandit en lui à tel point qu’à la fin, il ne se contenta pas de donner sa tunique, mais donna des livres, des vêtements sacerdotaux et des manteaux ; et tout ce qu’il put trouver, il le donna aux pauvres. C’est pourquoi les frères ne laissèrent rien à découvert, car frère Juniper donna tout pour l’amour de Dieu et pour sa gloire.
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Comment le frère Juniper a arraché certaines cloches de l’autel et les a données pour l’amour de Dieu
Un jour, frère Genévrier se trouvait à Assise pour la Nativité du Christ, en profonde méditation devant l’autel du couvent, lequel passait, magnifiquement drapé et orné. À la prière du sacristain, frère Genévrier resta pour garder l’autel, tandis que celui-ci allait manger. Alors qu’il était en dévotion, une mendiante lui demanda l’aumône pour l’amour de Dieu. Frère Genévrier répondit ainsi : « Attends un peu, et je verrai si je ne peux pas te donner quelque chose de cet autel si richement orné. » Il y avait sur l’autel une bordure d’or, très belle et majestueuse, avec de petites clochettes en argent de grand prix. Frère Genévrier dit : « Ces clochettes sont superflues. » Il prit un couteau et les coupa toutes sur la bordure ; et, par compassion, il les donna à la mendiante. Le sacristain, après avoir mangé trois ou quatre bouchées, se souvint des manières de frère Juniper et commença à craindre vivement que frère Juniper, par zèle de charité, ne lui fasse quelque tort à l’égard de cet autel si richement orné qu’il lui avait confié. Aussitôt, plein de soupçons, il se leva de table et se rendit à l’église. Il regarda si les ornements de l’autel avaient été enlevés ou emportés ; il vit que les cloches avaient été coupées et arrachées du bord ; ce qui le troubla et le scandalisa au-delà de toute mesure. Frère Juniper, le voyant ainsi troublé, dit : « Ne vous inquiétez pas de ces cloches, car je les ai données à une pauvre femme qui en avait grand besoin, et ici elles ne servaient à rien, si ce n’est à des pompes vaines et mondaines. » Lorsque le sacristain entendit cela, il fut profondément attristé et courut aussitôt à travers l’église et toute la ville, cherchant par hasard la trouver. Mais non seulement il ne la trouva pas, mais il ne trouva personne qui l’eût vue. Il retourna à la place et, furieux, prit la bordure et la porta au général, alors à Assise, en disant : « Père général, je vous demande justice contre frère Genévrier qui a détruit pour moi cette bordure, la plus honorable de la sacristie. Voyez comme il l’a gâtée, et en a arraché toutes les clochettes d’argent ; et il dit les avoir données à une pauvre femme. » Le général répondit : « Ce n’est pas frère Genévrier qui a fait cela, mais plutôt ta folie ; car tu devrais maintenant connaître ses voies ; et je te dis que je m’étonne qu’il n’ait pas donné tout le reste ; néanmoins, je le corrigerai bien pour cette faute. » Et, tous les frères étant réunis en chapitre, il fit appeler frère Juniper et, en présence de tout le couvent, le gronda en frappant bruyamment les cloches susdites. Sa colère s’accrut tellement qu’il cria jusqu’à en perdre la voix. Frère Juniper ne se soucia guère de ces paroles.car il se plaisait aux insultes et à être humilié ; mais, considérant l’irritation du général, il commença à réfléchir à un remède. Aussi, dès qu’il eut reçu la réprimande du général, frère Juniper se rendit en ville et commanda et fit préparer une bonne écuelle de gruau au beurre ; et, après une bonne partie de la nuit passée, il alla la chercher et revint, alluma une bougie, se rendit dans la cellule du général avec cette écuelle de gruau et frappa à la porte. Le général ouvrit et le vit debout, la bougie allumée et l’écuelle à la main, et demanda à voix basse : « Qu’est-ce que c’est ? » Frère Juniper répondit : « Mon père, aujourd’hui, lorsque vous m’avez réprimandé pour mes fautes, j’ai remarqué que votre voix était devenue rauque, comme je le crois, à cause d’un effort excessif, et j’ai donc pensé à un remède et j’ai fait préparer ce gruau pour vous. Mange-le, je t’en prie, car je t’assure qu’il soulagera ta gorge et ta poitrine. » Le général dit : « À quelle heure cela va-t-il venir déranger les autres ? » Frère Juniper répondit : « Vois-tu, il a été préparé pour toi ; mange-le, je t’en prie, sans plus tarder, car il te fera beaucoup de bien. » Le général, irrité par l’heure tardive et par son importunité, le pria de partir, car à une telle heure il ne voulait pas manger, le traitant de très vil et de scélérat. Frère Juniper, voyant que ni les supplications ni les paroles doucereuses ne prévalaient, parla ainsi : « Mon père, puisque tu ne veux pas manger ce gruau qui a été préparé pour toi, fais au moins ceci pour moi ; « Tiens-moi la chandelle, je la mangerai moi-même. » Alors le général, compatissant et pieux, considérant la piété et la simplicité de Frère Juniper, et considérant que tout cela était fait par dévotion, répondit : « Maintenant, puisque tu le veux ainsi, mangeons-le, toi et moi, ensemble. » Et ils mangèrent tous deux cette écuelle de gruau, par sa charité importune. Et la dévotion les réconforta bien plus que la nourriture.J’ai donc pensé à un remède et j’ai fait préparer ce gruau pour toi. Mange-le, je t’en prie, car je t’assure qu’il soulagera ta gorge et ta poitrine. Le général dit : « À quelle heure va-t-il venir déranger les autres ? » Frère Juniper répondit : « Vois-tu, il a été préparé pour toi ; mange-le, je t’en prie, sans plus tarder, car il te fera beaucoup de bien. » Le général, irrité par l’heure tardive et par son importunité, le pria de partir, car à une telle heure il ne voulait pas manger, l’appelant par son nom, un très vil et un scélérat. Frère Juniper, voyant que ni les supplications ni les paroles doucereuses ne prévalaient, parla ainsi : « Mon père, puisque tu ne veux pas manger ce gruau qui a été préparé pour toi, fais au moins ceci pour moi ; tiens-moi la bougie et je le mangerai moi-même. » Alors le général, compatissant et pieux, considérant la piété et la simplicité de frère Juniper, et considérant que tout cela était fait par dévotion, répondit : « Maintenant, puisque tu le veux ainsi, mangeons-le, toi et moi, ensemble. » Et ils mangèrent tous deux cette écuelle de gruau, par sa charité importune. Et la dévotion les réconforta bien plus que la nourriture.J’ai donc pensé à un remède et j’ai fait préparer ce gruau pour toi. Mange-le, je t’en prie, car je t’assure qu’il soulagera ta gorge et ta poitrine. Le général dit : « À quelle heure va-t-il venir déranger les autres ? » Frère Juniper répondit : « Vois-tu, il a été préparé pour toi ; mange-le, je t’en prie, sans plus tarder, car il te fera beaucoup de bien. » Le général, irrité par l’heure tardive et par son importunité, le pria de partir, car à une telle heure il ne voulait pas manger, l’appelant par son nom, un très vil et un scélérat. Frère Juniper, voyant que ni les supplications ni les paroles doucereuses ne prévalaient, parla ainsi : « Mon père, puisque tu ne veux pas manger ce gruau qui a été préparé pour toi, fais au moins ceci pour moi ; tiens-moi la bougie et je le mangerai moi-même. » Alors le général, compatissant et pieux, considérant la piété et la simplicité de frère Juniper, et considérant que tout cela était fait par dévotion, répondit : « Maintenant, puisque tu le veux ainsi, mangeons-le, toi et moi, ensemble. » Et ils mangèrent tous deux cette écuelle de gruau, par sa charité importune. Et la dévotion les réconforta bien plus que la nourriture.