Qu’il me soit permis d’exprimer ma satisfaction de constater qu’avec les deux volumes du Lî Kî désormais publiés, j’ai accompli, en matière de traduction, bien plus que tout ce que j’avais entrepris sur les classiques chinois il y a plus de vingt-cinq ans. Lors de la publication du premier volume en 1891, mon ami, feu Stanislas Julien, m’a écrit pour me demander si j’avais bien réfléchi à l’ampleur du Lî Kî et pour me faire part de ses doutes quant à ma capacité à mener à bien mon entreprise. Ayant commencé cette tâche, je l’ai cependant poursuivie jusqu’au bout, malgré quelques interruptions inévitables et de nombreux autres engagements.
Français La présente traduction est la première qui ait été publiée dans une langue européenne de l’ensemble du Lî Kî. En 1853, feu J.M. Callery publia à l’Imprimerie Royale de Turin ce qu’il appelait « Lî Kî, ou Mémorial des Rites, traduit pour la première fois du Chinois, et accompagné de Notes, de Commentaires, et du Texte Original ». Mais en fait, le texte adopté par P. Callery n’était qu’une édition expurgée, publiée par Fan Sze-tang, un érudit de la dynastie Yüan, telle que commentée et annotée par Kâu Kih, dont l’ouvrage bien connu parut en 1711, la cinquantième année du règne ou de la période Khang-hsî[^1]. Callery lui-même a attiré l’attention sur ce point dans son introduction, et il est regrettable qu’il ne l’ait pas indiqué sur la page de titre de son livre. Le texte de Fan omet entièrement les 5e, 12e, 13e, 19e, 28e, 31e, 32e, 33e, 34e, 35e, 37e et 39e Livres dans ma traduction, tandis que pour la plupart des autres, « un bon tiers » a été expurgé. Je ne pense pas que la version de Callery contienne plus de la moitié du Lî Kî, tel qu’on le trouve dans les grandes éditions des dynasties Thang et actuelles. Ce dernier fut ordonné par un rescrit impérial en 1748, la 13e année de la période Khien-lung. Le comité chargé de son exécution était composé de 85 dignitaires et érudits, qui se sont appuyés sur les travaux antérieurs de 244 auteurs, ajoutant, sur nombre des passages les plus difficiles, leurs propres remarques et décisions, généralement très précieuses.
Ma propre version se fonde sur une étude de ces deux recueils impériaux et sur une vaste compilation, réalisée spécialement pour moi par mon ami et ancien collaborateur chinois, le diplômé Wang Thâo, principalement auprès d’auteurs plus récents des 250 dernières années. Les éditeurs de Khien-lung font fréquemment référence à l’ouvrage de Khan Hâo, paru en 1322 sous le modeste titre de « Recueil de remarques sur le Lî Kî »[1]. Cet ouvrage acquit une telle célébrité sous la dynastie Ming que, comme le rapporte Callery, un édit fut promulgué en 1403 le désignant comme référence pour l’interprétation du Classique lors des examens publics ; cette prééminence lui fut accordée jusqu’à la période Khien-lung. L’intégralité du Lî Kî est donnée et expliquée par Khan, à l’exception des 28e et 39e Livres, qui étaient depuis longtemps des extraits des « Quatre Livres ». Je dois dire que j’ai lu et relu, avec grand profit, chaque phrase de ses commentaires. Me forgeant mon propre jugement sur chaque passage, tantôt d’accord avec lui, tantôt en désaccord, et trouvant souvent des raisons d’accorder une plus grande valeur aux opinions des éditeurs de Khien-lung, je dois dire qu’il « mérite » le mérite du Lî Kî. Ses volumes se caractérisent par une étude minutieuse du texte original et une tentative sincère de démontrer l’enchaînement logique de la pensée dans ses différentes parties.
La traduction de P. Callery de son texte expurgé est généralement bien exécutée, et ses notes, que j’ai souvent utilisées, sont admirables. J’ai également bénéficié de l’ouvrage plus récent, « Cursus Litteratura o Sinicae », de P. Angelo Zottoli, qui a ravivé l’érudition des premiers missionnaires jésuites. Son troisième volume, publié à Shanghaï en 1880, contient de bonnes traductions des premier, cinquième, dixième, vingtième, vingt et unième et vingt-deuxième livres ; les vingt-huitième et trente-neuvième se trouvent dans son deuxième volume. Dans le latin qu’il emploie, conformément aux traditions de son Église et à ce qui est encore une pratique courante chez certains érudits, il est capable d’être plus concis que Callery et moi-même dans ses traductions, mais peut-être moins satisfaisant pour le lecteur en général. J’ai aussi fait référence occasionnellement au « Lî-Kî » de Signor Carlo Puini : Instituzioni, Usi e Costumanze della Cina antica ; Traduction. Commentaire et note (Fascicolo Primo; Firenze, i883Y
La présente traduction est, comme je l’ai dit plus haut, la première publiée dans une langue européenne de l’ensemble du Lî Kî ; mais une autre existait sous forme manuscrite depuis plusieurs années, celle de M. Alexander Wylie, malheureusement mis de côté par la perte de la vue et une santé défaillante pour d’autres raisons, dans ses importants travaux chinois. J’ai eu la chance de la récupérer lorsque j’en suis arrivé au 35e livre dans ma propre version, et, en les imprimant, j’y ai constamment fait référence. Elle a été écrite au début des études chinoises de M. Wylie, et elle n’est pas telle qu’un sinologue de ses connaissances et de ses recherches l’aurait produite plus tard. J’ai néanmoins été heureux de l’avoir sous la main, même si je peux me permettre d’affirmer que, pour l’interprétation des paragraphes et la traduction des caractères, je n’ai eu aucune dette envers lui ou P. Callery. Les six premiers livres, et des extraits de plusieurs autres, avaient été écrits à plusieurs reprises avant mon départ définitif de Chine en 1873 ; Mais j’ai repris depuis le début, début 1883, la préparation de la présente version. J’ai du mal à espérer qu’en traduisant un ouvrage aussi vaste et singulier, décrivant des coutumes et des choses à une époque aussi reculée, et sans l’aide d’un diplômé chinois avec qui j’aurais pu discuter de paragraphes compliqués et déroutants, je n’ai pas commis d’erreurs ; mais j’espère qu’elles seront rares. Mon seul et unique objectif a été, d’abord, de comprendre le texte par moi-même, puis de le restituer en anglais, aussi fidèlement et aussi bien que possible dans les délais impartis, pour mes lecteurs.
JL
OXFORD,
10 juillet 1885.
LE Lî Kî OU RECUEIL DE TRAITÉS SUR LES RÈGLES DE PROPRIÉTÉ OU USAGES CÉRÉMONIELS.
TROIS LÎ KING DIFFÉRENTS, OU LIVRES RITUELS, RECONNUS EN CHINE. LA RÉCUPÉRATION DES DEUX PREMIERS ET LA FORMATION DU TROISIÈME SOUS LA DYNASTIE DES HAN.
Comment Confucius parlait des Lî.
1. Confucius a dit : « C’est par les Odes que l’esprit est éveillé ; par les Règles de la Bienséance que le caractère s’établit ; par la Musique que l’on reçoit le résultat[^3]. » À une autre occasion, il a dit : « Sans les Règles de la Bienséance, le respect devient une agitation laborieuse ; la prudence, la timidité ; l’audace, l’insubordination ; et la franchise, la grossièreté[2]. »
Voici deux exemples de la manière dont Confucius s’exprimait à propos des Lî, les règles de bienséance ou usages cérémoniels, reconnues à son époque. On peut naturellement déduire de son langage qu’il existait des recueils de telles règles, accessibles à la lecture et à l’étude ; mais il ne le dit pas expressément.
Comment Mencius parlait d’eux.
Le langage de Mencius était plus précis. Dans au moins deux passages de ses œuvres, on retrouve la forme habituelle de citation de Lî Yüeh, « Le Lî dit[3] », qui, selon l’analogie de Shih Yüeh, « Le Shih Roi, ou Livre de Poésie, dit », pourrait être traduit par « Le Lî. Roi dit ». Dans un autre passage, il dit à un certain M. le Roi Khun : « N’avez-vous pas lu le Lî ? » Il ne semble pas que Mencius se référait toujours au même recueil de Lî ; mais il est clair qu’à son époque, il existait un ou plusieurs recueils de ce type, courants et bien connus de ses compatriotes.
Il y a maintenant trois Rois Lî, ou trois Rituels.
Il existe aujourd’hui trois classiques chinois dans lesquels le nom Lî entre : l’Î Lî, le Kâu Lî et le Lî Kî, souvent appelés, tant par les Chinois eux-mêmes que par les sinologues, « Les Trois Rituels »[4]. Les deux premiers sont des livres de la dynastie Kâu (1122-225 av. J.-C.). Le troisième, dont une traduction complète est donnée dans le présent ouvrage, pourrait contenir des passages antérieurs aux autres ; mais, sous sa forme actuelle, il ne dépasse pas la dynastie Han et ne fut achevé qu’au IIe siècle. Il a cependant pris une position plus élevée que ces autres, et se classe avec le Shû, le Shih, le Yî et le Khun Khiû, formant l’un des « Cinq Rois », reconnus comme les livres de la plus grande autorité en Chine. D’autres considérations, outre l’antiquité, ont donné, nous le verrons, son importance au Lî Kî.
État des livres Lî à l’avènement de la dynastie Han.
2. Les monuments de la littérature ancienne, à l’exception peut-être du Yi King, étaient dans un état de désordre et d’incomplétude à l’avènement de la dynastie Han (206 av. J.-C.). Tel était particulièrement le cas des Î Lî et des Kâu Lî. Ils avaient souffert, comme les autres livres, des incendies et de la proscription de la brève dynastie des Khin, dont le fondateur était déterminé à les détruire[5] ; et durant les derniers siècles de Kâu, durant toute la période des « Royaumes en guerre », ils avaient été mutilés à plusieurs reprises par la princesse rivale[6].
Travail des anciens empereurs de Han pour récupérer les livres.
Les souverains Han entreprirent de rassembler et d’organiser les fragments des livres anciens, et ils s’en acquittèrent avec brio. En 213 av. J.-C., Shih Hwang Tî de Khin promulgua un édit interdisant à quiconque de cacher et de conserver en sa possession les anciens écrits. Cet édit fut abrogé en 191 av. J.-C. par l’empereur Hui, de sorte qu’il n’existait plus que depuis vingt-deux ans, dont la majeure partie, on peut le supposer, fut inopérante. Des dispositions furent également prises pour recevoir et préserver les anciennes tablettes susceptibles d’être présentées[7], et pour consigner par écrit ce que les érudits pourraient répéter. En 164 av. J.-C., l’empereur Wan ordonna aux « Grands Érudits » de sa cour de compiler les « Ordonnances royales », le cinquième des Livres de notre Lî Kî[8].
Récupération de l’Î Lî.
i. Des preuves internes montrent que lorsque ce traité a été rédigé, l’Î Lî, ou du moins des parties de celui-ci, avait été retrouvée ; et cela concorde avec le témoignage de Sze-mâ Khien, qui est né peut-être cette année-là[9] et a vécu entre 90 et 80 av. J.-C. Dans le 61e livre de ses biographies, mentionné dans une note ci-dessus, Khien dit : « De nombreux érudits ont répété (des parties du) Lî ; mais aucun autre d’entre eux autant que Kâo Thang de Lû ; et maintenant nous n’avons que le Shih Lî, qu’il était capable de réciter. » En harmonie avec cette déclaration du grand historien, se trouve la première entrée dans le Catalogue des livres Lî de Liû Hsin dans la bibliothèque impériale des Han : « 56 küan ou sections de Lî dans l’ancien texte, et 17 phien dans le texte (actuel) (de l’époque) ; » formant, comme on le croit universellement, l’actuel Î Lî, pour lequel le Shih Lî de Khien n’est qu’un autre nom.
Que Kâo Thang ait pu dicter une si grande partie de l’ouvrage ne sera pas surprenant pour ceux qui connaissent la puissance de mémoire dont font preuve de nombreux érudits chinois, même de nos jours. Les sections de l’ancien texte furent découvertes sous le règne de l’empereur Wû (140-187 av. J.-C.) et entrèrent en possession de son frère, connu sous le nom de roi Hsien de Ho-kien. Nous ignorons dans quelle mesure cette masse de tablettes contribua à l’Î Lî telle que nous la connaissons aujourd’hui, mais elles confirmèrent l’authenticité de la portion obtenue de Kâo.
Le roi Hsien de Ho-kien, et sa récupération du Kâu Lî.
ii. La restauration du Kâu Lî eut lieu peu après, grâce au même roi Hsien. Personne n’avait autant contribué que lui à restaurer la littérature ancienne. Nommé Teh, et l’un des quatorze fils de l’empereur Roi (156-141 av. J.-C.), il fut nommé par son père, en 155 av. J.-C., roi de Ho-kien, nom encore donné à l’un des départements de Kih-lî. Il y demeura jusqu’à sa mort, en 129, le protecteur de tous les hommes de lettres, poursuivant sans relâche sa quête de livres anciens datant d’avant la dynastie Khin. Des multitudes venaient à lui de toutes parts, lui apportant les précieuses tablettes conservées dans leurs familles ou trouvées ailleurs. Il conservait les originaux dans sa propre bibliothèque et en faisait tirer une copie, qu’il offrait au donateur avec un précieux présent. Nous lui sommes redevables de la conservation du Tâo Teh King, des œuvres de Mencius et d’autres précieux trésors ; mais je n’ai qu’à signaler ici ses services en rapport avec les livres Lî[10].
Quelqu’un [11] lui apporta les tablettes du Kâu Lî, alors appelées Kâu Kwan, « Le Livre Officiel de Kâu », et censées contenir un compte rendu complet du gouvernement organisé de la dynastie de Kâu en six sections. La sixième section, cependant, qui aurait dû fournir une liste des officiers du département du ministre des Travaux publics, avec leurs fonctions, manquait, et le roi offrit de payer 1 000 pièces d’or à quiconque fournirait les tablettes manquantes, mais en vain[12]. Il présenta les tablettes qu’il avait obtenues à la cour de son demi-frère, l’empereur Wû ; mais le trésor resta sans surveillance dans l’un des dépôts impériaux jusqu’au siècle suivant, lorsqu’il passa sous la garde de Liû Hsin. Hsin remplaça la partie manquante d’un autre ancien ouvrage, appelé Khâo Kun Kî, que Wylie traduit par « Le Registre des Artificiers ». Depuis, ce texte apparaît comme la sixième section de l’ouvrage, pour laquelle Hsin obtint la nomination d’un comité spécial de savants, celui-là même qui avait été chargé dès le début de la conservation de l’Î Lî. Le Kâu Lî est un ouvrage constitutionnel et non rituel. La dernière entrée du Catalogue des Livres Lî de Hsin est : « Le Kâu Kwan en six sections ; et un traité sur le Kâu Kwan en quatre sections. » C’est son nom exact. Il ne fut appelé Kâu Lî qu’à l’époque de la dynastie Thang[13].
Formation du Lî Kî.
iii. Nous en arrivons à la formation du texte du Lî Kî, qui nous intéresse plus particulièrement. Nous ne pouvons parler de sa récupération, car bien que certaines parties existassent sous la dynastie Kâu, nombre de ses livres ne peuvent prétendre à une antiquité supérieure à celle de la période Han. Tout ce que l’on sait de leur auteur se trouve dans les notices qui constituent le dernier chapitre de cette introduction ;
Après l’entrée du Catalogue de Lia Hsin concernant le texte retrouvé de l’Î Lî, suivent « 131 phien de Kî », soit autant de documents ou traités différents sur le sujet de Lî. Ceux-ci avaient également été rassemblés par le roi Hsien, et la note de Kû Hsî à leur sujet est qu’il s’agissait de « traités composés par les disciples des soixante-dix disciples », entendant par « les soixante-dix disciples » ceux des disciples de Confucius qui avaient le plus fréquenté sa société et qui avaient le plus profité de ses instructions. Ces 131 phien contenaient, sans aucun doute, le germe de notre Lî Kî ; mais ils y sont restés pendant environ un siècle dans les dépôts impériaux, non digérés et négligés, et constamment enrichis d’autres traités de nature similaire.
Conseil de la Colombie-Britannique 511.
Finalement, en 51 av. J.-C., l’empereur Hsüan (71-47 av. J.-C.) convoqua une grande assemblée de grands érudits pour se réunir dans la Galerie du Conduit de Pierre et discuter du texte des classiques retrouvés[14]. Un membre éminent de cette assemblée, son président je suppose, était Liû Hsiang, lui-même écrivain célèbre et descendant de la maison impériale, qui semble avoir eu la charge principale de tous les dépôts. Parmi les autres membres, et en rapport particulier avec les œuvres de Lî, nous trouvons le nom de Tâi Shang, qui reviendra devant nous[15].
26 av. J.-C.
Nous ignorons le résultat des délibérations des Grands Savants, mais vingt-cinq ans plus tard, l’empereur Khang fit effectuer une nouvelle recherche dans tout l’empire pour retrouver des livres qui auraient pu jusque-là passer inaperçus. Une fois celle-ci terminée, il ordonna à Hsiang d’examiner tout le contenu des dépôts et de collationner les différentes copies des classiques. De là naquit la préparation d’un catalogue. Hsiang mourut à l’âge de soixante-douze ans, en 9 av. J.-C., avant qu’il ne soit achevé, et le travail fut confié à son troisième et plus jeune fils, Hsin. Nous possédons heureusement son catalogue. Il mentionne, outre les Î Lî et Kâu Lî, 199 phien de traités Lî. Le résumé annexé aux livres Lî dans le Catalogue de la dynastie Su i, omettant les ouvrages mentionnés par Hsin et en insérant deux autres, indique que Hsiang possédait en tout 214 phien. Que faire de cette masse de tablettes, ou des copies écrites qui en étaient tirées ?
Hâu Zhang et les deux Tâis
Français Le plus distingué des érudits Lî du temps des empereurs Hsüan et Khang était un certain Hâu Zhang, l’auteur de la compilation appelée Khü Tâi Kî dans le Catalogue de Hsin ; et deux de ses disciples, Tâi Teh et Tâi Shang, cousins[16], dont le nom a déjà été mentionné comme membre du conseil de 51 av. J.-C., étaient également célèbres pour leur talent. Teh, le plus âgé des deux, et communément appelé Tâ Tâi, ou « le Grand Tâi », du vivant de Hsiang, digéra la masse de phien, et ce faisant, réduisit leur nombre à 85. Le plus jeune, appelé Hsiâo Tâi, ou « le Petit Tâi », faisant de même pour l’œuvre de son cousin, la réduisit à 46 traités. Cette seconde condensation des documents Lî rencontra un succès général et fut appelée le Lî Kî. Shang lui-même a écrit un ouvrage en douze chapitres, intitulé « Discussion des doutes des érudits sur le Lî Kî », qui, bien que perdu aujourd’hui, existait déjà à l’époque de Sui.
Mâ Yung et Kang Hsüan.
Par l’intermédiaire de Khiâo Zan et d’autres, érudits renommés de leur époque, la rédaction passa au célèbre Mâ Yung (79-166 apr. J.-C.), qui ajouta aux livres de Shang le Yüeh Ling, le Ming Thang Wei et le Yo Kî, portant leur nombre total à quarante-neuf, bien que, selon la structure adoptée dans la présente traduction, ils ne soient toujours que quarante-six. De Mâ, elle passa à son élève Kang Hsüan (127-200 apr. J.-C.), en qui il était obligé de reconnaître un plus grand érudit que lui.
C’est ainsi que le Lî Kî fut formé. Il n’est pas nécessaire d’en poursuivre l’histoire. Kang était le savant de son époque et peut être comparé, en érudition, au futur Kû Hsî. Il a eu la chance de préserver ses œuvres. Il s’est consacré aux trois Rituels, et ses travaux sur chacun d’eux, le Kâu Lî, l’Î Lî et le Lî Kî, subsistent. Ses commentaires se trouvent dans le grand ouvrage des Treize Rois de la dynastie Thang. Ils y figurent, suivis des gloses, illustrations et paraphrases de Khung Ying-tâ.
Zhâi Yung et son manuscrit.
En 175 apr. J.-C., du vivant de Kang, Zhâi Yung, érudit et officier aux multiples talents, supervisa la gravure sur pierre du texte de tous les classiques confucéens. Seuls des fragments de ce grand manuscrit subsistent aujourd’hui, mais d’autres, de même nature, furent réalisés ultérieurement. Nous pouvons être certains de posséder le texte du Lî Kî et d’autres livres chinois anciens, tel qu’il était il y a 1 800 ans, avec plus de précision que n’importe quel manuscrit existant ne nous le donne pour n’importe quel ouvrage occidental, sémitique, grec ou latin, d’une antiquité comparable.
Lî du Grand Tâi.
3. Quelques phrases sur le Lî du Grand Tâi clôtureront ce chapitre. Il transmit sa volumineuse compilation à un certain Hsü Liang de Lang Yeh, dans l’actuel Shan-tung[17], et elle fut transmise dans sa famille ; mais si des commentaires furent publiés, on n’en trouve aucune trace dans l’histoire. L’ouvrage plus court de son cousin ayant bénéficié d’une large diffusion, le sien tomba dans l’oubli et, comme le dit Kû Î-zun, fut simplement mis de côté. Pourtant, on trouve dans le Catalogue Sui ces deux entrées : « Le Lî Kî de Tâ Tâi, en 13 sections » et « Le Hsiâ Hsiâo Kang, en 1 section », avec une note de l’éditeur précisant qu’il fut compilé par Tâ Tâi. Ce petit traité a peut-être été inclus, ou non, dans l’une des 13 sections. On trouve également des entrées concernant l’œuvre de Tâ Tâi dans les catalogues des dynasties Thang et Song, qui ont donné lieu à de nombreuses discussions. Certains érudits Song le considéraient même comme un 14e roi. Dans la vaste collection des « Livres des Han et des Wei », une partie du Lî de Tâ Tâi est toujours d’actualité : 39 livres en 10 sections, incluant le fragment de la dynastie Hsiâ, dont une version, accompagnée du texte, a été publiée en 1882 par le professeur Douglas du King’s College, sous le titre de « Calendrier de la dynastie Hsiâ ». J’ai parcouru toute cette partie de la collection Han et Wei, et je dois la déclarer très inférieure à la compilation du Hsiâo ou Petit Tâi. Cette infériorité, et non seulement son volume, explique pourquoi, dès le début, elle a été relativement peu étudiée.
SIGNIFICATION DU CARACTÈRE CHINOIS APPELÉ LÎ. SIGNIFICATION DU TITRE LÎ KÎ. VALEUR DE L’ŒUVRE.
Lî est un symbole d’importance religieuse.
1. Le caractère chinois Lî se prête à une grande variété de termes pour traduire une œuvre où il abonde dans n’importe laquelle de nos langues occidentales. Afin d’en saisir pleinement la signification, il faut s’efforcer de dégager les idées fondamentales qu’il est censé transmettre. Et il y en a deux. Premièrement, en consultant le Shwo Wan, le plus ancien dictionnaire chinois, on trouve Lî défini comme « une étape ou un acte ; ce par quoi nous servons les êtres spirituels et obtenons le bonheur ». Ce caractère était pour l’auteur, Hsü Shan, un idéogramme à portée religieuse ; et nous pouvons constater qu’il a bien interprété l’intention de son ou ses créateurs. Il se compose de deux éléments, appelés séparément khih et lî[18]. Celui de gauche est le symbole, déterminant la catégorie de sens à laquelle appartient le composé. C’est le premier chiffre employé pour désigner les êtres spirituels et il entre dans les caractères désignant les esprits, les sacrifices et la prière[^21]. Celui de droite, appelé lî, est phonétique, mais même s’il est le symbole d’un récipient utilisé pour accomplir des rites, et si, comme le dictionnaire Khang-hsî semble le dire, il était autrefois utilisé seul pour le composé actuel, la signification spirituelle lui serait néanmoins attachée, et l’ajout du khih pour compléter le caractère, quelle que soit la façon dont il a été fabriqué, montre que les fabricants considéraient que les rites dans lesquels le récipient était utilisé avaient en premier lieu une signification religieuse.
Lî est un symbole du sentiment de bienséance.
Ensuite, le caractère est utilisé, dans les dissertations morales et philosophiques, pour désigner l’un des constituants fondamentaux de la nature humaine. Ceux-ci, comme l’énonce Mencius, sont au nombre de quatre ; « non fondus en nous de l’extérieur », non produits, c’est-à-dire, par la force des circonstances, mais « nous appartenant naturellement, comme le font nos quatre membres ». Ce sont la bienveillance (zan), la droiture (î), la bienséance (lî) et la compréhension (kîh). Notre possession du premier se prouve par le sentiment de détresse à la vue de la souffrance ; du second, par nos sentiments de honte et d’aversion ; du troisième, par nos sentiments de modestie et de courtoisie ; du quatrième, par notre conscience d’approuver et de désapprouver[^22].
Ainsi, le caractère lî, dans son application concrète, désigne les manifestations et, dans son usage impératif, les règles de la bienséance. Ce double symbolisme – religieux et moral – doit être gardé à l’esprit dans l’étude de notre classique. Une vie ordonnée en harmonie avec lui réaliserait l’idéal chinois le plus élevé, et assurément un très haut idéal, du caractère humain.
Mais jamais et nulle part il n’a été possible aux hommes de maintenir ce niveau de vie élevé. En Chine et ailleurs, les lî sont devenus, dans les usages de la société dans ses diverses relations, bien sûr, des formes sans esprit, et nous ne pouvons donc pas toujours traduire le caractère par le même terme. Il serait facile d’ajouter au nombre de mots, plus ou moins synonymes, en français, en anglais ou dans toute autre langue aryenne, que Callery a entassés dans le passage suivant : « Tant que possible, j’ai traduit Lî par le mot Rite, dont le sens est susceptible à une grande étendue ; mais il faut convenir que, suivant les circonstances où il est employé, il peut signifier—Cérémonial, Cérémonies, Pratiques cérémoniales, L’étiquette, Politesse, Urbanité, Courtoisie, Honnêteté, Bonnes manières, Égards, Bonne éducation, Bienséance, Les formes, Les convenances, Savoir-vivre, Décorum, Décence, Dignité personnelle, Moralité de conduite, Ordre Social, Devoirs de Société, Lois Sociales, Devoirs, Droit, Morale, Lois hiérarchiques, Offrande, Usages, Coutumes[19].’ J’ai peu utilisé dans ma traduction le mot Rite ou Rites, auquel Callery dit qu’il s’était efforcé d’adhérer autant que possible, mais je ne pense pas m’être permis autant de liberté dans d’autres termes dans mon anglais qu’il l’a fait dans son français. Pour le symbole dans le titre, j’ai dit « Règles de propriété ou usages cérémoniaux ».
Traduction du titre.
2. La signification du titre – Lî Kî – ne nous prend pas tant de temps. Il est inutile d’en dire plus sur la signification de Lî ; l’autre caractère, Kî, devrait avoir une valeur plurielle. L’unité des Livres qui le composent vient du fait qu’ils sont tous, plus ou moins, consacrés au sujet de Lî. Chacun d’eux, ou du moins chaque groupe, est complet en soi. Chacun est un Ki ; pris ensemble, ils sont autant de Kî. Ce n’est que dans les titres distincts de sept d’entre eux, les 13e, 16e, 17e, 18e, 19e, 27e et 29e, que le nom de Kî entre en jeu. Ce caractère est le symbole de « l’enregistrement des choses une par une » et est souvent remplacé par un autre Kî[20], dont l’élément classificateur est sze, le symbole de « un paquet de cocons », le composé désignant le déroulement et l’agencement des fils. Le « Livre des Rites » de Wylie et le « Mémorial des Rites » de Callery ne m’ont jamais donné une idée précise de la nature de notre classique. L’ouvrage de Sze-mâ Khien s’intitule Sze Kî [^25] [21], ou « Archives historiques », et Lî Kî pourrait de la même manière être traduit par « Archives cérémonielles », mais j’ai préféré lui donner comme titre « Recueil de traités sur les règles de bienséance ou les usages cérémoniels ».
La valeur du Lî Kî.
3. La valeur de l’ouvrage a été longuement discutée par P. Callery dans le sixième paragraphe de l’introduction à sa traduction d’une édition abrégée, et je suis heureux de me sentir d’accord avec une grande partie de ce qu’il a dit. Je suis d’accord avec lui, par exemple, que le livre est « la monographie la plus exacte et la plus complète que la nation chinoise ait pu donner d’elle-même au reste de la race humaine ». Mais cette phrase apparaît dans une description de l’esprit chinois, qui n’est guère mieux qu’une caricature. « Le cérémonial », dit-il, « résume l’esprit chinois… Ses affections, si elle en a, sont satisfaites par le cérémonial ; ses devoirs, elle les remplit au moyen du cérémonial ; la vertu et le vice, elle les reconnaissait au cérémonial ; en un mot, pour elle le cérémonial c’est l’homme, l’homme moral, l’homme politique, l’homme religieux, Dans ses multiples rapports avec la famille, la société, l’état, la morale et la religion.’
À toutes ces représentations, la première phrase de notre classique suffit : « Que la révérence soit toujours et en toutes choses. » Des centaines d’autres passages insistent sur ce point : une cérémonie sans une révérence inspirante n’est rien. Je ne nie pas qu’en Chine on accorde une grande attention aux formes, oubliant l’esprit qui devrait les animer. Mais quelle nation ne peut être imputée à la même chose ? Les traités des nations occidentales avec la Chine contiennent un article stipulant la tolérance envers les chrétiens chinois au motif que « la religion chrétienne, telle que professée par les protestants ou les catholiques romains, inculque la pratique de la vertu et enseigne à l’homme à agir comme il voudrait qu’on le fasse[27]. » De nombreux Chinois, officiers, érudits et autres, se sont demandé, lors de conversations avec moi, si telle était bien la nature du christianisme, invoquant en même temps certains éléments qui, selon eux, les faisaient douter. Tout ce que l’on peut dire à ce sujet est que, de même que les croyances des hommes ailleurs sont souvent supérieures à leurs pratiques, il en va de même en Chine. Que ce soit plus vrai là-bas ou ici, c’est un point sur lequel les conclusions divergeront, selon les connaissances et les préjugés des spéculateurs.
On en apprend davantage sur la religion des anciens Chinois grâce à ce classique que grâce à tous les autres réunis. Où les auteurs ont-ils puisé leurs informations sur le culte et les sacrifices les plus élevés des temps les plus anciens, ainsi que sur les écoles de Shun ? Nous ignorons où ils ont puisé leurs informations. Ils exprimaient sans doute les opinions courantes sous la dynastie Han, issues en partie de la tradition et en partie de livres anciens non rassemblés, ou peut-être de ces deux sources. Mais que les lecteurs ne s’attendent pas à trouver dans le Lî Kî quoi que ce soit qui ressemble à une théologie. L’absence d’enseignement dogmatique de la religion dans le système confucéen n’est peut-être pas uniquement un inconvénient ni un défaut ; mais il y a une certaine vérité mélancolique dans les observations suivantes de Callery : « Le Lî Kî, celui de tous les Rois où les questions religieuses auraient dû être traitées tout naturellement, à propos des sacrifices au Ciel, aux Dieux tutélaires et aux ancêtres, glisse légèrement sur tout ce qui est de pure spéculation, et ne mentionne ces graves matières qu’avec une extrême indifférence. » Selon moi ceci prouve deux choses : la première, que dans les temps anciens les plus grands génies de la Chine n’ont possédé sur le créateur, sur la nature et les destinées de l’âme, que des notions obscures, incertaines et souvent contradictoires ; la seconde, que les Chinois capables à un très faible degré le sentiment religieux, et qu’ils n’éprouvent pas, comme les races de l’occident, le besoin impérieux de sonder les mystères du monde invisible.
Le nombre de Kî consacrés aux rites de deuil témoigne de l’immense respect que les gens portaient aux membres défunts de leur famille. La solidarité familiale, et même raciale, est un sentiment qui a toujours été très fort parmi eux. La doctrine de la piété filiale occupe également une place prépondérante dans plusieurs livres, comme on pouvait s’y attendre.
Quant aux idées philosophiques et morales qui abondent dans l’ouvrage, elles sont, comme le dit Callery, « en général, saines et profondes ». La manière dont elles sont présentées est souvent excentrique et entourée de spéculations absurdes sur le cours de la nature matérielle, mais une étude prolongée des passages les plus difficiles fera généralement apparaître ce que les érudits chinois appellent un tâo-li, un fondement de la raison ou de l’analogie, qui intéresse et satisfait l’esprit.
Le Lî Kî comme l’un des Cinq Rois.
4. La place progressivement accordée au Lî Kî comme l’un des « Cinq Rois » par excellence était un hommage à son mérite intrinsèque. Il ne traitait pas, comme le Kâu Lî, de questions propres à une dynastie, mais de sujets importants pour tous les temps ; ni, comme le Î Lî, d’usages propres à une ou plusieurs classes officielles, mais de ceux qui concernaient tous les hommes. La catégorie des « Cinq Rois » fut formée très tôt, mais les « Trois Rituels » y étaient compris comme d’égale valeur et en formaient une subdivision. Il en fut de même au début de la dynastie Thang lorsque parut le recueil des « Treize Rois » ; mais avant la fin de cette dynastie, notre classique avait confirmé son éminence sur les deux autres Rituels. Dans le chapitre 29 des Monographies de Thang, page 17, il est dit : « À la charge de chacun des Cinq Rois, deux Grands Savants furent nommés. Le Yî de Kâu, le Shang Shû, le Shih de Mâo, le Khun Khiû et le Lî Kî sont les Cinq Rois. »
BRÈVES NOTICES DES DIFFÉRENTS LIVRES QUI COMPOSENT LA COLLECTION.
Ce premier livre du recueil est aussi le plus long et, de ce fait, a été divisé en deux livres. Dans cette traduction, cependant, il n’apparaît que comme un seul livre divisé en deux sections, elles-mêmes subdivisées, d’après les éditeurs de Khien-lung, en cinq et trois parties respectivement.
Le nom Khü Lî est tiré des deux premiers caractères du premier paragraphe, et la première phrase, « Le Khü Lî dit », s’étend à tout ce qui suit jusqu’à la fin du Livre. P. Callery, en effet, ne met entre guillemets que le premier paragraphe, comme s’il provenait seul du Khü Lî, et que le reste du Livre était d’une main différente. Il traduit le titre par « Rites divers », et à sa première phrase, « Le Recueil des rites divers dit », ajoute la note suivante : « Cet ouvrage, perdu depuis fort longtemps, était, autant qu’il paraît, un de ces recueils de proverbes et de maximes par lesquels la philosophie a commencé chez presque tous les peuples. Bien que l’auteur ne le dise pas, il est probable que ce chapitre et le suivant contiennent une analyse de cet ancien recueil, car la grande discordance qu’on y trouve s’accorde bien avec la variété indiquée par le titre Khü Lî. » Ma propre conclusion à partir du texte est cependant celle que j’ai énoncée ci-dessus, à savoir que le Livre est une transcription du Khü Lî, et non pas simplement une condensation de son contenu, ou une rédaction de celui-ci par un auteur différent.
Français Il n’est pas facile de traduire le titre de manière satisfaisante. Selon Kang Hsüan (ou Kang Khang-khang), le plus ancien de tous les grands commentateurs du Lî Kî, « Le Livre est appelé Khü Lî, car il contient des sujets relatifs aux cinq catégories cérémonielles. Ce qui y est dit sur les sacrifices appartient aux « cérémonies de bon augure » ; sur les rites de deuil et de perte ou d’abandon de son état, aux « mauvais auspices » ; sur le paiement des tributs et les apparitions à la cour royale, aux « rites d’hospitalité » ; sur les armes, les chars et les bannières, « à ceux de guerre » ; et sur le service des anciens, le respect des personnes âgées, les offrandes ou les présents, et le mariage des filles, aux « cérémonies festives ». » Selon ce point de vue, le titre signifierait « Règles appartenant aux différentes classes de cérémonies », ou, plus brièvement, les « Divers Rites » de Callery ; et M. Wylie a appelé le livre « Le rituel universel ».
Mais cette traduction du titre ne convient pas à la force du caractère Khü, symbole de « courbé ou tordu », et utilisé, avec un sens substantiel, pour ce qui est petit et apparaît irrégulièrement. Il est fait mention au Livre XXVIII, ii, 23, de « celui qui cultive les pousses de bonté dans sa nature », ces « pousses » étant exprimées par ce caractère Khü ; et dans une note sur ce passage, j’ai cité les mots du commentateur Pâi Lü : « Placez une pierre sur une pousse de bambou, ou à l’endroit où la pousse se montrerait, et elle contournera la pierre et sortira tordue à son côté. » Ainsi, Khü est employé pour ce qui est exposé partiellement ou à un faible degré. Même Kang Hsüan, dans ce passage, l’explique par « de très petites choses » ; et les deux plus compétents à mon avis de tous les critiques et commentateurs chinois, Kû Hsî et Wû Khang (de la dynastie Yüan, 1249-1333 apr. J.-C.), considèrent que notre titre signifie « Les formes les plus infimes et les points les plus mineurs de la cérémonie ». Il ne faut pas reprocher à P. Zottoli de les avoir suivis et d’avoir intitulé le Livre « Minutiores Ritus ». Pourtant, même cela ne me satisfait pas. De grands rites sont mentionnés dans le traité aussi bien que de petits. Les principes de la cérémonie y sont énoncés aussi bien que les détails. Le contenu est en effet marqué par le « manque de lien » mentionné par Callery ; mais un traducteur n’y peut rien. Le Livre n’est peut-être pas, quant à la méthode, tout ce que nous pourrions souhaiter, mais nous devons en tirer le meilleur parti possible ; et j’ai osé l’appeler « Un résumé des règles de la cérémonie ». Il occupe très justement la place au début du recueil et constitue une bonne introduction aux traités qui suivent.
Parmi les livres Lî du Catalogue de la Bibliothèque impériale des Han de Lâo Hsin, figure un Traité en neuf chapitres (phien), compilé par Hâu Zhang, et intitulé Khü Thâi Ki, ou « Archives faites dans la Tour Khü ». La Tour Khü était le nom d’un bâtiment éducatif où les érudits se réunissaient à l’époque de l’empereur Hsüan pour discuter de questions relatives aux cérémonies et autres sujets liés à la littérature ancienne, et Hâu Zhang (mentionné dans le chapitre précédent) tenait un registre de leurs travaux. J’aimerais penser que notre Khü Lî est une partie de ce Khü Thâi Kî, et je regrette de ne pouvoir citer d’autorités chinoises partageant le même point de vue. Cela nous éviterait la difficulté d’expliquer l’utilisation de Khü dans le titre.
Le nom de Than Kung donné à ce livre est tiré du premier paragraphe, où le gentilhomme ainsi nommé apparaît assistant aux rites funéraires d’un officier de l’État de Lû. Nulle part ailleurs dans le traité, cependant, il n’est mentionné, ni fait référence à lui. Il n’y a aucune raison pour que ce livre porte son nom, si ce n’est que son nom et son prénom apparaissent au début. Il était originaire de Lû, semble-t-il ; mais on n’en sait rien de plus.
Le Than Kung, comme le Khü Lî, est divisé en deux livres, qui apparaissent dans cette traduction comme deux sections d’un seul livre. Chaque section est subdivisée en trois parties.
L’ouvrage est principalement consacré aux rites de deuil. Il est précieux par les informations qu’il fournit à leur sujet et par les opinions dominantes de l’époque sur la mort. Il contient également de nombreux faits historiques concernant Confucius et d’autres, que nous sommes heureux de posséder. Certains commentateurs, et notamment les éditeurs de Khien-lung, en rejettent nombre, les qualifiant de légendaires et de fabuleux. L’ensemble du Livre est réduit à une très petite échelle dans les éditions expurgées du Lî Kî. Nous sommes cependant heureux de disposer des faits tels qu’ils sont. Qui ne regretterait pas de manquer le récit de la mort de Confucius, rapporté en I, II, 20 ? De plus, nous semblons mieux le comprendre grâce aux récits que le Livre contient de ses relations avec ses disciples et de leur deuil.
Dze-yû[22], un membre éminent de son école, apparaît dans le premier paragraphe, ce qui est tout à son honneur, et de même à plusieurs reprises par la suite ; ce qui a conduit les éditeurs de Khien-lung à rejeter l’idée que le Livre ait été compilé par ses disciples. Il se peut que ce soit le cas.
Selon Lû Kih (mort en 192 apr. J.-C.)[23], le Wang Kih, ou « Règlements royaux », fut rédigé par les Grands Savants de l’époque de l’empereur Wan (179-157 av. J.-C.), à la demande de ce souverain[24]. Il prétend donner les règlements des premiers rois sur les classes des nobles et des officiers féodaux et leurs émoluments, sur leurs sacrifices et sur leurs soins aux personnes âgées. L’empereur ordonna sa compilation après la mort de Kiâ Î, un Grand Savant très estimé par le souverain, événement qui a dû se produire vers 170 av. J.-C., alors que Kih n’avait que trente-trois ans. Le Livre aurait contenu, lors de sa première parution, un compte rendu des progrès royaux et des autels et cérémonies d’investiture, dont nous ne trouvons plus aucune trace aujourd’hui. Certaines parties sont tirées de Mencius, du Shû et des Commentaires de Kung-yang et Zo sur le Khun Khiû ; d’autres parties encore ne sont pas facilement conciliables avec ces autorités.
Français Les éditeurs de Khien-lung rendent leur jugement à ce sujet en ce sens que, lors de sa rédaction, le Î Lî a dû apparaître, mais pas le Kâu Lî. De ce fait, le Banquet et les Missions figurent parmi les « Six Sujets d’Enseignement », et aucune mention n’est faite du ministre de la Religion, comme l’un des six grands ministres, ni de la gestion de l’armée par le ministre de la Guerre. D’une vue générale, de nombreux sujets sont évidemment basés sur Mencius, et des paragraphes entiers lui sont empruntés. Rien n’est dit de la position particulière du fils du Ciel, car sous la dynastie Han, succédant immédiatement à celle de Khin, l’empereur devait être distingué des princes féodaux, et non nommé avec eux. Dans ce qui est dit au sujet des rapports sur les revenus et la fixation des dépenses, seuls les grands ministres de l’Instruction, de la Guerre et des Travaux publics sont mentionnés, car il s’agissait des trois ministres ducaux de la dynastie Han, et les anciennes dispositions étaient présentées de manière à correspondre à ce qui existait déjà. Si rien n’est dit au sujet des autels et des investitures, c’est parce que Wan a ignoré à ce sujet l’avis de Hsin-yüan Phing[25]. Cela montre seulement combien les informations des compilateurs surpassaient celles de Shû-sun Thung[26] et de Sze-mâ Hsiang-zû[^33]. Le Livre fut admis dans la collection du Lî Kî, car il fut rédigé peu de temps après l’Antiquité. Il est insensé pour les érudits ultérieurs de peser et d’évaluer chaque paragraphe en fonction de sa concordance ou de sa divergence avec Mencius et le Kâu Lî.
Ce récit de Wang Kih est à recommander aux lecteurs impartiaux. À mon avis, le plus intéressant dans ce livre réside dans les informations qu’il contient sur l’existence des écoles aux temps les plus reculés. On y découvre, dès les débuts de l’histoire chinoise, un système d’éducation rudimentaire, dont est issu, par un développement progressif, le système d’examens actuel.
Le Yüeh Ling, ou « Procédures du gouvernement au cours des différents mois », paraît dans l’édition Khien-lung du Lî Kî en six sections ; mais il m’a semblé plus en harmonie avec la nature du livre et plus utile pour l’étudiant de le diviser en quatre sections, chaque section en trois parties, chaque section comprenant ainsi une saison de l’année, et chaque mois ayant une partie qui lui est propre. Il y a aussi une courte section supplémentaire au milieu de l’année, à la fin du sixième mois, rendue nécessaire par les lignes taoïstes selon lesquelles les différentes parties sont rassemblées.
Français Zhâi Yung (133-192 apr. J.-C.)[1] et Wang Sû[2], un peu plus tard (au cours de notre troisième siècle), soutenaient que le Livre était l’œuvre du duc de Kâu et devait être attribué au XIe ou XIIe siècle avant J.-C. Mais on peut dire que cette vision de son antiquité est universellement abandonnée. Même le roi Hsüan vit au IIe siècle qu’il s’agissait d’une compilation du Khun Khiû de Lü Pû-Wei[3], que de nombreux écrivains chinois considèrent encore à tort comme le véritable père du fondateur de la dynastie Khin, et qui mourut en 237 avant J.-C. Lû Teh-ming[4], écrivant au VIIe siècle, a déclaré : « Le Yüeh Ling faisait à l’origine partie du Khun Khiû de Lü, à partir duquel quelqu’un a compilé par la suite ce Mémoire. Les éditeurs de Khien-lung affirment sans hésitation cette origine du Yüeh Ling ; En effet, personne, après l’avoir comparé à l’ouvrage attribué à Lü, ne peut avoir le moindre doute à ce sujet. Mayers dit de cet ouvrage qu’il s’agit d’un recueil de notices quasi historiques, et que, bien qu’il soit nominalement l’œuvre de Lü, il a en réalité été compilé sous sa direction par un groupe de savants. Mayers ajoute qu’une fois l’ouvrage terminé, Lü Pû-wei suspendit 1 000 pièces d’or à la porte de son palais, qu’il offrit en récompense à quiconque suggérerait une amélioration en y ajoutant ou en supprimant un seul caractère[27].
Telle fut l’origine du Yüeh Ling. Nous ignorons qui l’a compilé à partir du Khun Khiu de Lü, mais c’est Mâ Yung qui l’a intégré au Lî Kî. On ne peut l’expliquer qu’en notant les particularités khin dans les noms de titres et autres éléments. Il est en soi plein d’intérêt, éclairant les anciennes coutumes et conceptions religieuses, et montrant comment ces dernières, plus particulièrement, ont été corrompues par l’intrusion d’éléments taoïstes.
Le Livre a parfois été appelé « Calendrier des mois de Kâu ». Callery traduit le nom Yüeh Ling par « Attributs des Mois ». Ma propre traduction est inspirée du roi Hsüan, qui dit : « Le Livre s’appelle Yüeh Ling, car il consigne les actes du gouvernement au cours des douze mois de l’année. »
Ce livre tire son nom de ses trois premiers caractères, signifiant « Les Questions de Zang-dze ». La plupart des paragraphes ou chapitres des deux sections commencent de la même manière. On ne le retrouve absolument pas dans les éditions expurgées du classique.
Zang-dze, ou Monsieur Zang[28], d’environ cinquante ans le cadet de Confucius, était l’un des principaux disciples de son école, peut-être le plus doué d’entre eux. Il se distinguait par sa piété filiale et sa simplicité franche et honnête.
Français Il y a un récit intéressant de sa mort dans le Livre II, i, Partie i, 18. Dans la section du Catalogue de Liû Hsin, qui contient les « Œuvres des lettrés », sont inscrits « 18 Traités (phien) de Zang-dze », mais sans autre précision. Dix de ces traités, ou fragments de ceux-ci, se trouvent dans le Lî du Grand Tâi, mais ce Livre n’en fait pas partie, et je ne l’ai vu nulle part attribué à lui comme auteur. Il a dû être compilé, cependant, à partir de notes laissées par lui ou certains de ses disciples intimes. Les noms de deux autres disciples du Maître seulement y figurent : ceux de Dze-yû et de Dze-hsiâ[29]. La référence aux disciples du premier dans la Section ii, 19, doit être une note du compilateur final. La mention de Lâo-dze ou Lâo Tan, et de ses vues également, dans la section ii, 22, 24, 28, nous paraît remarquable.
S’il était nécessaire de donner un titre au Livre, je proposerais : « Questions de casuistique sur les rites cérémoniels. » Zang-dze expose les difficultés qui l’ont frappé sur divers points de cérémonie, notamment en rapport avec les rites de deuil ; et Confucius y répond avec ingéniosité et beaucoup de fécondité. Certaines questions et réponses, cependant, sont insignifiantes. Khung Ying-tâ affirme que seul Zang-dze aurait pu poser ces questions, et que seul Confucius aurait pu fournir les réponses. Il applique au Livre la description du Yî dans le troisième des Appendices de ce classique, I, 40, comme « parlant des phénomènes les plus complexes sous le ciel, et n’ayant rien en lui qui puisse éveiller l’aversion, et des mouvements les plus subtils sous le ciel, et n’ayant rien en lui qui puisse produire la confusion. »
Aucune indication n’est donnée, rien n’a été suggéré, quant à l’identité du compilateur de ce livre, que les éditeurs de Khien-lung publient en deux sections. Son nom est tiré de la première clause du premier paragraphe, qui traite du roi Win, fondateur de la dynastie Kâu, tel qu’il se conduisit dans sa jeunesse, alors qu’il était Shih-dze, ou fils et héritier de son père. Ceci est suivi d’un récit similaire de son fils, qui devint roi Wû ; et au paragraphe 3, l’auteur aborde la formation du roi Khing, le jeune fils de Wû, par le duc de Kâu. Dans le dernier paragraphe de la deuxième section, le sujet du roi Wan en tant que prince est repris.
Mais le véritable sujet du Livre se situe entre ces parties et traite de trois choses.
Premièrement, la section I, paragraphe 5 jusqu’à la fin, traite de l’éducation et de la formation des fils aînés du roi et des princes féodaux, ainsi que des jeunes hommes les plus prometteurs du royaume, choisis pour étudier auprès d’eux. Nous y apprenons beaucoup sur les institutions et les méthodes éducatives de l’Antiquité.
Deuxièmement; dans la section ii, paragraphes 1 à 15, nous avons les devoirs du Shû-dze, le chef d’une section officielle, appartenant au département du premier ministre, dont la tâche spéciale était de diriger les jeunes nobles des cours royales et féodales dans toutes les questions appartenant à leur instruction.
Troisièmement, du paragraphe 17 au 23 de la section ii, nous avons un compte rendu des diverses cérémonies ou observances dans les festins et les soins du roi aux personnes âgées, et de son souci qu’une démarche similaire soit suivie par tous les princes dans leurs États.
Lî Yun signifie littéralement « La Transmission des Rites ». P. Callery traduit ce nom, non sans raison, par « Phases du Cérémonial » ; mais je préfère ma propre version, plus longue, car elle donne au lecteur une meilleure idée du contenu du Livre. Kang Hsüan dit qu’il s’intitule « La Transmission des Rites », car il relate comment les cinq Tîs et les trois Rois y ont apporté leurs diverses modifications, et comment le Yin et le Yang, ou le double mouvement et l’opération de la nature, les ont produits par leurs révolutions. L’ensemble est difficile et profond ; et aucune autre partie du recueil n’a autant sollicité les commentateurs les plus compétents. Les éditeurs de Khien-lung disent que nous trouvons dans ce Livre une expression magistrale de l’importance des usages cérémoniels, et que, si nous nous méfions d’un léger élément taoïste, il est pur et sans faille. Cet élément dépravé, pensent-ils, fut introduit par le petit Tâi, qui, par ignorance, crut pouvoir donner au Traité une apparence supérieure en le mêlant subrepticement aux fantaisies de Lâo et de Kwang. Mais le mélange taoïste est plus important qu’ils ne veulent bien l’admettre.
Certains ont attribué le Livre à Dze-yû, qui apparaît, dans la première de ses sections, trois fois sous son nom et son prénom de Yen Yen, comme l’interrogateur de Confucius, donnant ainsi lieu à l’exposition des vues du sage ; d’autres l’attribuent à ses disciples. La deuxième section commence par une déclaration de Confucius sans l’intervention d’aucun interlocuteur ; et peut-être le compilateur voulait-il que tout le reste du Traité soit reçu comme reflétant non seulement les idées du Maître, mais aussi ses paroles. Quel que soit l’auteur du Livre tel que nous le connaissons aujourd’hui, il est l’un des plus précieux de toute l’œuvre. Hwang Kan (à la fin de la dynastie Song) dit de lui que, malgré l’apparition, ici et là, d’éléments taoïstes, il contient de nombreux passages admirables, et il cite ce qui est dit sur la création ou les processus de la nature, dans iii, 2 ; sur le gouvernement, dans ii, 18 ; sur l’homme, dans iii, 1, 7 ; et sur les usages cérémoniels, dans iv, 6.
Mais l’élément taoïste traverse tout le Livre, comme il le fait dans le Livre IV. On y trouve une tentative d’intégrer les fantasmes sur les nombres, les couleurs, les éléments et autres choses au bon sens et à la moralité du confucianisme. Néanmoins, le Traité apporte un témoignage important sur le sens de la religion comme élément premier et principal des cérémonies, et sur son existence dès les temps les plus reculés.
Le livre VII, dit-on, a été attribué à Dze-yû. Je n’ai vu aucun auteur l’attribuer à cet auteur ; mais il s’agit certainement d’une suite de l’autre, et on peut considérer qu’il provient du même auteur. Plus on les étudiera ensemble, plus cela paraîtra probable.
Callery n’a pas tenté de traduire le titre, et dit que les deux caractères qui le composent donnent le sens de « Ustensiles de Rites », et n’ont aucun rapport plausible avec la portée du Livre dans lequel il n’est en aucune façon question du matériel employé soit dans les sacrifices, soit dans d’autres cérémonies ; et il soutient, par conséquent, qu’ils ne devraient pas être traduits, mais simplement considérés comme des sons[30].
Mais la traduction que j’ai donnée est conforme à un usage reconnu du deuxième caractère, Khî. Nous lisons dans les Entretiens de Confucius, V, 3 : « Dze-kung demanda : « Que dites-vous de moi ? » Le Maître répondit : « Vous êtes un vase. » « Quel vase ? » « Un vase sacrificiel en jade. » L’objet du Livre est de montrer comment les usages cérémoniels ou rites contribuent à former « le vase d’honneur », « l’homme supérieur », qui est à la hauteur des services les plus difficiles et les plus importants. Kang Hsüan l’a clairement vu et a dit : « Le Livre a été nommé Lî Khi, car il relate comment les cérémonies transforment les hommes en vases parfaits. » « Le Livre précédent montre l’évolution des Rites ; celui-ci montre leur utilisation » : telle était la déclaration de Fang Küeh, commentateur souvent cité par Khan Hâo et par les éditeurs de Khien-lung, en 1113 apr. J.-C.
Tout au long du Livre, il est principalement question de rites religieux, notamment comme culminant dans l’adoration de Dieu. Et rien n’est plus clairement démontré que tous les rites sont sans valeur sans vérité et sans révérence.
Le nom du Livre est composé des trois caractères par lesquels il commence, tout comme le nom hébreu du Livre de la Genèse dans nos Saintes Écritures est Beraishith ({BeRAShiTh}). Cependant, d’après la signification de Kiâo Theh Sang, le lecteur est amené à supposer que le Traité sera principalement consacré au récit du grand Sacrifice Frontalier. Mais il n’en est rien.
Le sujet principal du Livre est le sacrifice en général ; et comment ce qui y est le plus précieux est la révérence et la sincérité du fidèle, qui se manifestent dans la simplicité de ses observances. Dans le Livre précédent, différentes conditions ont été mentionnées, particulièrement précieuses dans les sacrifices et autres cérémonies. Parmi elles figure la rareté des choses (Section I, paragraphe 8) ; et cette considération est illustrée de la manière la plus frappante par « la victime unique » employée dans le sacrifice frontalier, la plus grande de toutes les cérémonies. Parallèlement, divers abus de la sincérité et de la simplicité anciennes sont dénoncés et déplorés.
Les cérémonies de couronnement et de mariage sont traitées dans la troisième section ; nous sommes reconnaissants des informations qu’elle fournit à leur sujet. À la fin, l’auteur revient sur le sujet des sacrifices ; et les différences dans leur célébration selon les dynasties, depuis l’époque de Shun, sont soulignées.
Les éditeurs de Khien-lung affirment que ce livre ne faisait à l’origine qu’un avec le précédent, et qu’il en fut séparé par une main ultérieure. J’étais arrivé à la même conclusion avant de prendre connaissance de leur jugement. Les livres VII, VIII et IX ont dû former, je pense, à l’origine un seul traité.
Le titre de ce livre, signifiant « Le Modèle de la Famille », rendu par Callery par « Réglements Intérieurs », se rapproche davantage de la description de son contenu que la plupart des titres du Lî Kî. De plus, il n’est repris d’aucune partie du texte, ni près du début ni ailleurs. Il est difficile de comprendre pourquoi si peu de choses en sont conservées dans les éditions expurgées, une page à peine plus grande de l’ouvrage de P. Callery y étant suffisante.
Kang Hsüan dit : « Le Livre porte le nom de Nêi Zeh, car il consigne les règles pour les fils et les filles dans le service de leurs parents, et pour les fils et leurs épouses dans le service de leurs beaux-parents au foyer familial. Parmi les autres Traités du Lî Kî, il peut être considéré comme donnant les Règles pour les Enfants. Et parce que les observances du harem sont dignes d’être imitées, il est appelé Nêi Zeh, « le Modèle de l’Intérieur ». » Kû Hsî dit que « c’est un Livre qui était enseigné au peuple dans les anciennes écoles, un ancien Classique ou Texte Sacré. »
Parce que le nom de Zang-dze et une phrase de lui apparaissent, les éditeurs de Khien-lung sont enclins à attribuer la paternité à ses disciples ; mais la prémisse est trop étroite pour soutenir une telle conclusion.
La position de l’épouse, telle que décrite dans la section I, paraîtra très déplorable aux lecteurs occidentaux. Cette partie du traité témoigne en grande partie de l’exagération caractéristique des conceptions chinoises de la vertu de piété filiale.
Le récit de la section 2 sur l’attention portée aux personnes âgées et sur leur alimentation est intéressant, mais, comme le sujet lui-même, il entre trop dans les détails. Que nous importe aujourd’hui la façon dont ils préparaient les frites, les gratins, les mets délicats et autres mets pour séduire le palais et maintenir les forces ? Les observances dans les relations entre époux, la naissance d’un enfant, l’éducation et les devoirs des jeunes des deux sexes, que la section détaille ensuite, ne manquent cependant pas d’attrait.
Le nom du Livre, Yü Zâo, est tiré de la première clause du premier paragraphe. Les deux caractères désignent les pendentifs de la coiffe royale, portée lors des grandes occasions, et sur lesquels étaient enfilées des perles de jade. Douze de ces pendentifs pendaient, devant et derrière, aux extrémités du sommet carré ou rectangulaire de la coiffe, comme sur la coiffe cardinalice qui est le cimier de Christ Church, à Oxford. Mais nous n’en lisons plus rien sur cette coiffe ni sur ses pendentifs après le premier paragraphe ; et le contenu des trois sections du Livre est si varié qu’il est impossible d’en donner un compte rendu exhaustif.
Le roi Hsüan dit que le Livre fut nommé Yü Zâo, car il décrit les vêtements et les coiffes portés par le fils du Ciel ; mais il ne se limite pas au roi, mais présente également les dirigeants et les officiers en général. Il traite également d’autres sujets que les vêtements, qu’il serait difficile de traiter en tant de catégories. De plus, une grande partie de la deuxième section semble être constituée de disjecta membra, et les paragraphes sont agencés différemment selon les éditeurs. Çà et là, le lecteur attentif rencontrera des sentiments et des phrases qui resteront gravés dans sa mémoire, comme lors de la lecture du Livre I ; mais il n’en gardera qu’une vague impression du Livre dans son ensemble.
Les lecteurs se tourneront vers ce livre, comme je l’ai fait il y a de nombreuses années, s’attendant à y trouver une description complète du Ming Thang, généralement appelé par les sinologues « la Salle Brillante » et « la Salle de Lumière » ; mais ils découvriront que le sujet est très différent. J’ai traduit ici ce nom par « la Salle de la Distinction », conformément à la signification donnée au paragraphe 5, en prenant « distinction » au sens de séparation ou de discrimination.
Le Traité commence par, sans toutefois le décrire fidèlement, la grande scène de la vie du duc de Kâu : régent du royaume, il reçut tous les seigneurs féodaux et les chefs des tribus barbares dans la capitale, à l’occasion d’une grande audience ou darbâr. Le duc était l’ancêtre des seigneurs ou marquis de l’État de Lû, une partie de l’actuelle province du Shan-tung. Il fut lui-même investi de ce fief par son neveu, le roi Khang. Cependant, restant à la cour royale pour des raisons d’État, il n’en prit jamais personnellement possession, mais envoya son fils Po-khin le faire à sa place. Cependant, en raison de ses grands services dans l’établissement et la consolidation de la nouvelle dynastie, divers privilèges furent conférés aux souverains de Lû, supérieurs aux seigneurs des autres États. Ces privilèges sont largement exagérés dans le Livre ; et après le sixième paragraphe, nous n’entendons plus parler de la Salle de Distinction. Tout ce qui suit est consacré aux privilèges particuliers que les marquis de Lû auraient revendiqués et aux antiquités qu’ils auraient possédées. Ce qui est dit n’a aucune valeur historique, et le livre entier est exclu des éditions expurgées.
Les éditeurs de Khien-lung affirment que son auteur devait être un érudit ignorant et vaniteux de Lû, à la fin de la dynastie Kâu. Certains ont imaginé qu’il avait été transmis, avec des ajouts de sa part, par Mâ Yung à Kang Hsüan ; mais ce dernier ne dit rien de l’autre dans sa brève note préliminaire.
La Salle de Distinction était un édifice royal. Une partie servait de temple, lors des sacrifices où un honneur particulier était rendu au roi Wan (Le Shih, IV, i, 7). Elle servait également d’espace d’audience, comme lors de l’occasion mentionnée dans ce livre ; et des règlements gouvernementaux y étaient promulgués (Mencius, I, ii, 5). C’est à cette troisième utilisation qu’appartiennent les diverses références qui lui sont faites dans le livre IV de ce recueil.
La salle principale se trouvait dans la capitale ; mais il en existait de plus petites, portant le même nom, aux quatre points où les rois s’arrêtaient lors de leurs tournées d’inspection pour recevoir les seigneurs féodaux des différentes régions du royaume. C’est l’une d’elles que Mencius avait en tête dans le passage mentionné plus haut.
Dans le 67e Livre du Lî du Grand Tâi, on trouve une description de l’édifice et de ses différentes parties ; et parmi les « Livres de Kâu » qui auraient été trouvés en 279 après J.-C. dans la tombe du roi Hsiang de Wei, le 55e chapitre porte le titre de Ming Thang, mais il n’est guère plus qu’une reformulation des quatre premiers paragraphes de ce Livre du Lî Kî.
Dans le dictionnaire chinois de Morrison, vol. i, p. 512, il y a un plan au sol de la salle selon une représentation courante de celle-ci par les autorités chinoises.
Ce « Rapport sur les points mineurs relatifs à la tenue de deuil » est le premier des nombreux traités de notre collection, consacrés expressément aux rites de deuil, et plus particulièrement à la tenue vestimentaire des personnes endeuillées, selon leur degré de parenté. Les éditions expurgées n’en donnent aucun détail ; et il est difficile, voire impossible, de dégager un plan général selon lequel le compilateur, inconnu, en aurait assemblé les différentes parties. Il arrive que deux ou trois paragraphes se succèdent sur le même sujet, et je les ai regroupés à l’instar de Khung Ying-tâ ; mais les différentes notices sont disposées comme au hasard, telles qu’elles sont venues à l’esprit de l’auteur.
Kû Hsî dit que Dze-hsiâ a fait un traité supplémentaire au 11e Livre de l’Î Lî, et que nous avons ici une explication de nombreux points de ce Livre. Il en est ainsi ; et pourtant nous ne sommes peut-être pas justifiés de conclure qu’il s’agit d’un vestige de la production de Dze-hsiâ.
Ce livre, « le Grand Traité », a été comparé au Hsî Zhze, le plus long et le plus important des appendices du Yî King, également appelé Tâ Kwan.
Il est cependant court comparé à l’autre ; il n’est pas non plus facile à comprendre, les sujets qu’il traite étant si différents dans les conceptions des esprits chinois et occidentaux. « Il traite », disait Khan Hsiang-tâo (au début de la dynastie Song), « du plus grand sacrifice, celui offert par le souverain à tous ses ancêtres ; du plus grand exemple de piété filiale, celui de transmettre à ses ancêtres le titre acquis par le sacrifiant ; du principe fondamental de la famille, celui exprimé par l’ordre des noms de ses membres selon leurs relations ; et du cours de l’humanité comme la plus grande illustration de la bienséance et de la droiture. C’est pour cette raison qu’on l’appelle le Grand Traité. »
Ce résumé de son contenu révèle l’importance du Livre. Nous ne savons rien de son auteur ni de la date de sa compilation.
Le Shâo Î, ou « Règles de Conduite Minimales », est apparenté à une grande partie du premier Livre de notre collection, « Le Sommaire des Règles de Cérémonie ». Shâo signifie « peu », et souvent « peu d’années », ou « jeune » ; c’est pourquoi certains ont pensé que le sujet du Livre était « Règles pour les Jeunes ». C’est ce qu’a déclaré Callery, qui donne pour titre « Règles de Conduite des Jeunes Gens ».
Mais le contenu ne peut être aussi restreint ; et depuis l’époque du roi Hsüan, shâo a été pris par la plupart des commentateurs chinois comme équivalent à hsiâo[31], qui apparaît dans le titre du Livre XIII. La différence entre les deux caractères chinois n’est pas aussi grande que celle entre ces représentations alphabétiques de leurs noms. Lû Teh-ming dit : « Shâo est ici équivalent à hsiâo » ; et Kang dit que le Livre est nommé Shâo Î « parce qu’il consigne les petites règles de comportement lors des entretiens et pour apporter les provisions pour un festin. » Mais les observances décrites sont très diverses et nous permettent de nous faire une image réaliste des mœurs de cette époque.
Selon Kû Hsi, le Livre devait constituer une branche du savoir élémentaire, ou des leçons pour la jeunesse ; il a cependant été étendu à divers sujets de la vie quotidienne et des relations sociales. On ignore quand et par qui il a été compilé.
Le Hsio Kî, ou « Registre des études », est un traité d’un intérêt et d’une importance considérables. Khang-dze, que Kû Hsî avait coutume d’appeler son « Maître », le considérait, après les Livres XXVIII et XXXIX, le Kung Yung et le Tâ Hsio, comme le Livre le plus correct et le plus orthodoxe du Lî Kî.
Les éditeurs de Khien-lung indiquent que les paragraphes 4 et 5 présentent les institutions éducatives des anciens rois ; les paragraphes 6 à 19, les lois pour les enseignants ; et les suivants, celles pour les élèves. Le résumé est globalement correct, mais le compilateur (inconnu) n’a pas toujours distingué ses sujets. Les trois premiers paragraphes illustrent de manière frappante l’importance de l’éducation pour le bien-être moral du peuple. L’ensemble témoigne d’un sens de l’observation et d’une maturité de réflexion remarquables. Les informations sur les écoles et les établissements d’enseignement supérieur anciens se trouvent dans les livres précédents, mais nous sommes heureux de les retrouver.
Le Yo Kî, ou « Registre de Musique », intéressera davantage le grand public que la plupart des autres Livres de la Lî. Khang-dze en parle en des termes similaires à ceux cités dans la notice précédente concernant le Hsio Kî. Ce dernier, en termes d’exactitude et d’orthodoxie, se situe à côté du Kung Yung et du Tâ Hsio ; celui-ci leur est proche. Son introduction dans notre collection est attribuée à Mâ Yung.
Français Les anciens documents sur la musique qui avaient été retrouvés au cours de la première dynastie Han apparaissent dans le Catalogue de Liû Hsin après ceux des Lî, s’élevant au total à 165 phien, répartis en six recueils. Le premier d’entre eux était le Yo Kî, en 23 phien ; le second, le Kî de Wang Yü[32], en 24 phien. Khung Ying-tâ, tirant ses informations d’une note du Catalogue de Hsin et d’autres sources, résume ce qu’il a à dire sur ce livre de la manière suivante : — À l’avènement de la dynastie Han, les traités d’autrefois sur la musique, ainsi que sur la pratique de l’art, étaient dans un état de délabrement particulier. À l’époque de l’empereur Wû, son frère Teh, avec l’aide de nombreux érudits, copia tout ce qui restait sur le sujet de la musique et composa un Yo Kî, ou « Registre de musique », en 24 phien ou livres, que Wang Yü présenta à la cour à l’époque de l’empereur Khang (32-37 av. J.-C.) ; mais on en entendit peu parler par la suite. Lorsque Liû Hsiang (mort en 9 av. J.-C.) examina les livres de la bibliothèque impériale, il trouva un « Registre de musique » en 23 phien, différent de celui présenté par Wang Yü. Notre Yo Kî actuel contient onze de ces phien, classés avec les noms de leurs sujets. Les douze autres sont perdus, bien que leurs noms subsistent.
La majeure partie du texte actuel se trouve dans la Monographie sur la musique de Sze-mâ Khien ; et comme il était bien antérieur à Liû Hsiang (Khien est mort entre 90 et 80 av. J.-C.), les éditeurs de Khien-lung supposent qu’il s’agit d’une des parties de l’œuvre de Khien, fournie par Khû Shâo-sun[33], qui était un contemporain de Hsiang.
Kû Hsî vouait une grande admiration à de nombreux passages du Yo Kî, et y trouve les germes de ses conceptions sur la constitution de l’humanité, sur l’action et l’interaction du principe et de la passion, de la raison et de la force, dans l’économie de ce que nous appelons la Providence, sur laquelle il se plaisait à s’attarder dans ses spéculations philosophiques. On s’attend, d’après le titre, comme le dit Hwang Kan-hsing (dynastie Ming), à ce que la musique soit le sujet principal du Traité, mais partout on trouve des usages cérémoniels évoqués de manière égale et en relation avec elle ; car, selon l’auteur, la structure de la société repose sur la vérité qui sous-tend les cérémonies, et la musique est l’expression nécessaire de la satisfaction face à la beauté et à l’harmonie qui en résultent.
Le livre XVII est presque complet dans l’édition expurgée traduite par Callery, tandis que le dix-huitième, ou « Mélanges », heureusement traduit par lui par le mot français « Mélanges », est réduit à environ un tiers de sa longueur dans le texte chinois. Malgré son nom de « Mélanges », la majeure partie est consacrée aux observances des rites de deuil. Des questions intéressantes les concernant sont abordées, et des informations sont fournies sur des coutumes que nous ne trouvons pas aussi détaillées ailleurs, comme par exemple celles relatives aux offrandes de linges funéraires et autres objets pour l’enterrement des morts. Vers la fin, d’autres coutumes, outre celles des rites de deuil, sont introduites. Il serait toutefois erroné de supposer que cela justifie le nom de « Mélanges » donné à l’ensemble. C’est une particularité de beaucoup d’autres livres que l’écrivain, ou les écrivains, semblent se lasser de se limiter à un sujet ou même à quelques sujets, et introduisent des entrées d’une nature tout à fait différente sans aucune raison que nous puissions découvrir, si ce n’est leur plaisir arbitraire.
L’exactitude et l’intégrité de nombreux paragraphes ont été à juste titre remises en question. L’autorité du Livre n’est pas très élevée. Il doit être classé à cet égard avec le Than Kung.
Le Livre XIII traite des points mineurs relatifs à la tenue de deuil ; le Livre XVIII, de divers points relatifs au deuil ; et ce Livre, des points plus importants, notamment les deux habillages des morts, la mise en bière et l’enterrement. Commençant par les préparatifs du décès, qu’il s’agisse d’un souverain, d’un grand officier ou d’un simple officier, il passe méthodiquement en revue toutes les observances pendant et après la mort, jusqu’à l’enterrement. Il nous emmène dans le palais, la demeure et la petite résidence officielle, et nous montre les différentes étapes entre la mort et la mise en bière. Certaines observances diffèrent sur des points mineurs des détails de ces autres Livres et du Than Kung ou Livre II ; mais, prises dans leur ensemble, elles nous offrent un récit merveilleusement détaillé de tous les rites de deuil dans la Chine ancienne. Wû Khang dit : « Ce Livre relate les règles les plus importantes observées pour chaque événement qu’il mentionne. » Il n’avait pas pour but de compléter les informations données ailleurs sur des détails mineurs ; et c’est pourquoi il est appelé « Le Grand Registre des Rites de Deuil ».
Ki Fâ, ainsi nommé d’après les deux premiers caractères du Livre et signifiant « Lois ou Règles des Sacrifices », est le premier des trois traités, tous consacrés aux sacrifices, réunis dans cette partie du recueil des Lî. Ils ne sont peut-être pas l’œuvre de la même main ; mais l’auteur de celui-ci avait manifestement sous les yeux le 17e article de la première partie des Récits relatifs à l’État de Lû, qui forment la deuxième section des « Récits des États[34] ». Cet article contient une exposition du sujet des sacrifices par un certain Ken Khin, en dénonciation d’un sacrifice ordonné par Zang Wan-kang, qui avait été pendant une cinquantaine d’années l’un des ministres de Lû. Zang mourut en 617 av. J.-C.
Certaines affirmations historiques du Livre soulèvent des difficultés que nous ne pouvons éclaircir faute de documents suffisants. L’ensemble se compose de deux parties : les paragraphes 1 à 8 et le paragraphe 9. Le premier est entièrement exclu des éditions expurgées ; mais, comme dans l’autre, les sacrifices sont principalement faits aux personnes décédées. Il n’y a aucune idée de dépréciation, et encore moins d’expiation. Ce sont des expressions de gratitude et des hommages à des hommes dont les lois et les réalisations ont été bénéfiques à leur époque et ont contribué au progrès de la civilisation, de sorte qu’elles le seront également à toutes les époques.
En conclusion, les sacrifices au soleil, à la lune et aux autres éléments de la nature apparaissent ; on dit qu’ils furent institués parce que l’action de ces corps contribuait au bien-être et à l’action des hommes. Jusque-là, ces sacrifices constituaient une forme de culte de la nature ; mais la question se pose de savoir s’ils n’étaient pas en réalité offerts aux esprits sous la protection desquels ces objets opéraient.
Le Kî Î, ou « Sens des Sacrifices » dans Callery, aborde un plus large éventail de sujets que le précédent livre. Il traite d’abord des sacrifices au Ciel, et au soleil et à la lune en rapport avec lui, ainsi que de ceux du temple ancestral, bien que ces derniers constituent le sujet principal. L’auteur, quel qu’il soit, détaille en détail les préparatifs du sacrificateur et l’esprit de révérence dans lequel les services doivent être célébrés.
Aucune idée de dépréciation ou d’expiation n’est exprimée comme appartenant aux sacrifices. Il est dit, en effet, dans la section I, A, que le sacrifice dans la banlieue de la capitale était la grande expression de gratitude envers le Ciel.
Dans la section 2, d’autres sujets que le sacrifice sont traités. Elle commence par une conversation remarquable entre Confucius et son disciple Zâi Wo, sur la constitution de l’homme, comprenant à la fois le Kwei et le Shin, le premier nom désignant l’âme animale qui, avec les os et la chair, « moisit en bas et devient la poussière des champs » ; tandis que le second désigne l’âme intelligente ou l’esprit, qui émerge à la mort et se déploie en haut dans un état de glorieuse clarté.
Le labourage des champs spéciaux par le roi et les dirigeants des États, ainsi que les règlements pour l’alimentation des vers à soie et la préparation de la soie par leurs épouses, sont exposés, les deux opérations visant à fournir le grain et les robes sacrificiels.
Après cela, nous avons les vues de Zang-dze et d’un de ses disciples sur la piété filiale, sujet qui passe à nouveau à la soumission du frère cadet à l’aîné, et au respect que doivent généralement porter les cadets à leurs aînés.
Le « Résumé des sacrifices » est le dernier et le plus long, et, on peut l’ajouter, le plus intéressant des traités, notamment sur ce sujet. On n’y trouve rien, pas plus que dans les autres, de l’idée de propitiation ; mais il donne de nombreux détails sur les objectifs de l’institution des sacrifices dans l’État chinois. Les anciens commentateurs ont pris le caractère Thung[42] dans le sens de « racine » ou « origine[43] », et c’est pourquoi certains sinologues anglais ont intitulé ce livre « L’origine des sacrifices », et P. Zottoli lui donne pour titre « Sacrificii Principium ». Callery l’intitule, plus justement, « Généralités sur les sacrifices ». Le très habile commentateur Khan Hsiang tâo compare le Traité à « la grande corde qui contrôle les mailles d’un filet », en disant qu’il commence par le sacrifice comme venant du sentiment du cœur, et se termine par la démonstration de son influence dans la conduite du gouvernement.
Le paragraphe de conclusion montre qu’il a été écrit alors que l’État de Lû existait encore ; et si le Livre entier provient de la même main, il doit avoir été composé quelque temps après la mort de Confucius et avant l’extinction de Lû, qui fut consommée par Khû en 248 avant J.-C. Je pense que nous pouvons le rapporter au quatrième siècle avant J.-C.
La doctrine de la piété filiale y occupe une place prépondérante. Le paragraphe 13 et les dix suivants, consacrés au lien entre le sacrifice et les dix relations humaines, sont particulièrement instructifs. L’auteur écrit avec force et souvent subtilité, et peine à se rendre justice dans l’expression de ses idées. Ce qu’il dit au sujet des inscriptions vers la conclusion est intéressant. C’était un véritable homme Lû, et ses opinions sur les sacrifices de son État sont contraires aux normes de l’orthodoxie chinoise à ce sujet.
Le roi Kieh a été traduit sous le titre « Explications des Classiques », et Callery donne pour titre « Sens Général des Livres Canoniques ». Une brève attention aux quelques paragraphes qui composent le livre convaincra cependant le lecteur que ces traductions du nom sont incorrectes. Aucune explication n’est donnée des passages des différents rois. La véritable signification du roi Kieh a été donnée par Hwang Khan en 538 apr. J.-C. « Kieh », dit-il, « doit être pris au sens de « séparation » ou de « division » ; et le traité décrit la différence entre les sujets traités dans les différents rois. »
Le Livre, bien qu’ingénieux, ne mérite guère d’attention. Les deux premiers paragraphes, attribués à Confucius, ne peuvent provenir de lui. On suppose qu’il y eut six Rois ; mais cette énumération des écrits anciens provient des érudits de la dynastie Han. Parmi ces six se trouve le Khun Khiû, œuvre de Confucius lui-même, compilée un an ou deux seulement avant sa mort. C’était à la postérité, et non à lui, de l’élever au rang de Roi et de le placer au même niveau que le Shû, le Shih et le Yî. On peut d’ailleurs douter qu’il y ait jamais eu un Roi Yo, ou « Classique de la musique ». Des traités de musique existaient sans doute sous la dynastie Kâu, mais il ne semble pas qu’il en ait été compilé avant les tentatives mentionnées dans la notice introductive du Livre XVII.
On ne sait pas qui était le compilateur ingénieux, mais peu critique, du King Kieh.
« Questions du duc Âi » est une traduction des trois caractères par lesquels le livre commence, signifiant « Le duc Âi a demandé ». Le titre décrit bien le contenu du livre : deux conversations sur les cérémonies et la pratique du gouvernement entre le marquis Ziang de Lû, appelé à titre posthume duc Âi, et Confucius. Le sage mourut dans la seizième année du marquisat de Ziang. Ancien ministre d’État, après s’être retiré de la vie publique, il avait un droit d’entrée à la cour, droit qu’il exerçait parfois, comme nous le savons. Il a peut-être conversé avec le marquis sur les sujets abordés dans ce traité ; mais la question de savoir s’il a eu les conversations particulières relatées ici ne peut être tranchée qu’en examinant leur style et leur contenu. Je suis personnellement disposé à mettre en doute leur authenticité.
Il existe d’autres recensions du Traité. Il constitue le troisième des Livres des éditions actuelles du « Lî du Grand Tâi », et est considéré comme le quarante et unième de ceux qui figuraient dans sa collection plus vaste ; il est identique à notre Lî Kî, avec à peine une variation. La deuxième conversation, elle aussi, apparaît comme le quatrième article du recueil intitulé « Récits de l’École », mais avec des variations considérables et importantes, sous le titre de Tâ Hwan, « Le Grand Mariage ». La première conversation se trouve également dans le même recueil, au sein du sixième article, intitulé Wan Lî, ou « Questions sur les Cérémonies ». Elle comporte également des variations ; mais l’auteur des deux articles est le duc Âi.
Les passages les plus remarquables du Livre sont quelques paragraphes de la deuxième conversation vers sa conclusion. P. Callery traduit Thien Tâo, « la Voie du Ciel », au paragraphe 16, par « La Vérité Céleste », et dit dans une note que Confucius parle de ce Tâo d’une manière qui n’est pas sans rappeler Lâo-dze dans le Tâo Teh King, ajoutant que « ces deux pères de la philosophie chinoise avaient sur cet Être mystérieux des idées presque semblables ». Mais un examen attentif du passage, qui est lui-même remarquable, montre que cette ressemblance avec des passages du classique taoïste n’existe pas. Voir ma note de conclusion sur le Livre. S’il y avait une ressemblance taoïste dans la phraséologie, cela nous ferait rapporter la composition du Traité à l’époque de Khin ou aux premiers temps de Han, lorsque le taoïsme avait pris dans la littérature nationale une place qu’il n’avait pas eue sous la dynastie des Kâu.
Le titre de ce livre est tiré des quatre caractères par lesquels il commence. Confucius est rentré de sa visite à la cour de Lû et se trouve chez lui. Trois de ses disciples sont assis à ses côtés, et sa conversation avec eux se poursuit jusqu’à aborder le sujet des usages cérémoniels. En réponse à leurs questions, il en discute longuement, abordant également la musique et les pratiques gouvernementales liées aux cérémonies, d’une manière familière et pratique.
Il apparaît dans le titre par sa désignation, ou nom en tant que marié, Kung-nî, que nous trouvons également deux ou trois fois dans le Livre XXVIII, qui est reçu comme la composition de son petit-fils Khung Kî, ou Dze-sze. Ce Traité, cependant, est beaucoup plus court que cela, et inférieur à celui-ci. Le commentateur Wang de Shih-liang[35], souvent cité par Khan Hâo, dit que, bien que ce Traité ait un début et une fin, le style et les idées sont si rejetés et lâches, que beaucoup des déclarations attribuées à Confucius ne peuvent être acceptées comme étant réellement les siennes.
Le titre de ce livre est apparenté à celui du précédent, les caractères de celui-ci nous incitant à penser que Confucius était revenu de la cour pour « son affaire », et ceux de celui-ci ne suggérant rien de ses antécédents immédiats, mais indiquant simplement qu’il était « chez lui et à loisir ». Au lieu d’être appelé, comme là-bas, par sa désignation, il apparaît ici sous le nom de Khung-dze, « le philosophe Khung », ou « M. Khung ».
Le Livre relate également une conversation, mais en présence d’un seul disciple, le Maître lui prononce un discours sur la description du souverain comme « parent du peuple » et sur la vertu des fondateurs des trois dynasties Hsiâ, Shang et Kâu, illustrant ses vues par des citations du Livre de la Poésie. Son langage est parfois étrange et surprenant, tandis que les idées qui le sous-tendent sont subtiles et ingénieuses. De plus, les citations poétiques sont inapplicables aux sujets qui les intéressent. Si le commentateur Wang n’a pu adopter les discours attribués à Confucius dans le dernier Livre comme étant véritablement les siens, nous pouvons encore moins accepter ceux de celui-ci comme tels.
D’après leurs analogies internes dans la forme et le sentiment, je suppose que les deux livres ont été écrits par le même écrivain ; mais je n’ai rencontré aucune hypothèse quant à son identité.
Le titre de ce livre, « Les Digues », évoque son sujet. Les règles ou usages cérémoniels y sont présentés sous la forme de digues, de barrages ou de barrières ; des structures défensives destinées à protéger ce qui se trouve à l’intérieur contre toute fuite ou dispersion, et à le défendre contre les inondations ou autres agressions et invasions extérieures. Le caractère, appelé « fang », est généralement employé avec force verbale, « agissant comme une digue ou une barrière » ; et il est souvent difficile de dire si l’auteur pensait à l’institution ou à l’usage particulier évoqué comme servant à se défendre contre les dangers intérieurs ou contre la violence extérieure.
Les illustrations sont nombreuses, et elles sont toutes données comme si elles provenaient de Confucius lui-même ; mais nous ne pouvons supposer qu’elles soient réellement de lui. Elles ne sont pas dans son style, et les raisonnements sont parfois indignes de lui. De nombreux paragraphes portent en première page une protestation contre le fait que nous les prenions pour de véritables siens. Néanmoins, le Livre, bien que parfois fastidieux, est dans l’ensemble intéressant, et nous aimons l’idée de considérer les usages comme des « dykes ». Nous ignorons à qui nous le devons. L’un des célèbres frères Khang de la dynastie Song a déclaré : « Nous ne savons pas qui a écrit le Traité. Puisque nous y trouvons des expressions telles que « Le Lun Yü dit », il ne faut manifestement pas l’attribuer à Confucius. Des passages des érudits Han, Kiâ Î et Tung Kung-shû, vont dans le même sens que ce que nous trouvons ici ; et peut-être ce mémoire est-il leur œuvre. »
Le Kung Yung serait, je crois, considéré par les érudits chinois comme le plus précieux de tous les traités du Lî Kî ; et, dès son plus jeune âge, il s’est imposé comme un ouvrage unique. Sa place dans la collection générale des Traités rituels fut reconnue par Mâ Yung et son disciple Kang Hsüan ; mais dans le Catalogue des Livres Lî de Liû Hsin, on trouve une entrée intitulée « Observations sur le Kung Yung, en deux phien », tant l’ouvrage fut considéré très tôt comme méritant un traitement particulier. Dans les archives de la dynastie Sui (589-617 apr. J.-C.), dans le Catalogue de sa bibliothèque impériale, figurent les noms de trois autres ouvrages spécialisés sur ce sujet, dont l’un est l’œuvre de l’empereur Wû (502-549 apr. J.-C.), de la dynastie Liang.
Plus tard, sous la dynastie Song, le Kung Yung, le Tâ Hsio, ou « Grande Étude », qui est également une partie du Lî Kî, les Entretiens de Confucius, ou Lun Yü, et les œuvres de Mencius furent regroupés sous le nom de « Les Quatre Livres », qui ont depuis lors formé une branche si importante de la littérature chinoise. Le Kung Yung, en chapitres et en phrases, avec un condensé de commentaires, fut publié par Kû Hsî au début de 1189. Environ 125 ans plus tard, le quatrième empereur de la dynastie Yuan décréta que l’édition et les vues de Kû seraient le manuel du classique aux examens littéraires. À partir de cette époque, seul le nom du Kung Yung fut conservé dans les éditions du Lî Kî, jusqu’à la parution de l’édition impériale de l’ensemble du recueil à l’époque de Khien-lung de la dynastie actuelle. Le texte y est donné en deux sections selon l’ancienne division, avec les anciens commentaires de l’édition des « Treize Rois » de la dynastie Thang, suivis à la fin de chaque paragraphe par le Commentaire de Kû.
La paternité du Kung Yung est attribuée à Khung Kî, plus connu sous le nom de Dze-sze, petit-fils de Confucius. Rien dans l’ouvrage lui-même ne le mentionne, mais la tradition n’est pas à remettre en question. Il existait certainement dans la famille Khung. Le Livre a dû être écrit au Ve siècle avant J.-C., probablement entre 450 et 400. Depuis 1267 après J.-C., l’auteur occupe une place dans les temples de Confucius comme l’un des « Quatre Assesseurs », avec le titre de « Le Philosophe Dze-sze, transmetteur du Sage ». J’ai vu son tumulus funéraire dans le cimetière confucéen, à l’extérieur de la ville de Khü-fû, dans le Shandong, devant ceux de son père et de son grand-père. Une statue de lui y figure, portant l’inscription : « Duc (ou Prince) de l’État de Î. »
Il n’est pas facile de traduire le titre du Traité, Kung Yung. Il a été désigné par « Juste Milieu », « Medium Constans vel Sempiternurn », « L’Invariable Milieu », « The Constant Medium », « The Golden Medium » et « The True Medium », entre autres. Je l’ai appelé, en 1861, « La Doctrine du Milieu », que j’ai maintenant remplacé par « L’État d’Équilibre et d’Harmonie », pour les raisons qui se trouvent dans les notes du premier chapitre de la présente version.
Je n’entre pas ici dans une description de la portée et de la valeur de ce livre. Il offre le meilleur aperçu que nous ayons de la philosophie et de la morale confucéennes. Il mérite amplement une étude attentive et conserve sa place non seulement en Chine, mais aussi au-delà. L’auteur avait une conception exagérée du sage ; mais il mérite amplement l’attention de son pays et du monde.
Le caractère Piâo symbolise les vêtements extérieurs et désigne l’extérieur, par opposition à l’intérieur ; l’extérieur des choses, ce qui sert à les distinguer et à attirer l’attention. De là son utilisation, au sens qu’il a dans le titre de ce livre, pour désigner ce qui sert d’exemple ou de modèle. Callery traduit ce titre par « Mémoire sur l’Exemple » ; Wylie par « The Exemplar Record ».
Piâo est également utilisé pour le gnomon d’un cadran ; et les éditeurs de Khien-lung s’attachent à cette application du caractère pour expliquer le nom du Livre. « Piâo », disent-ils, « est le gnomon d’un cadran, par lequel le mouvement du soleil est mesuré ; il s’élève au Centre, et tout autour est réglé par lui. Le Fang Kî montre aux hommes ce dont ils doivent se méfier ; le Piâo Kî, ce qu’ils doivent prendre comme modèle. » Puis ils ajoutent : « Parmi les modèles, il n’y en a pas de plus honorable que la bienveillance (ou l’humanité proprement dite), et pour aider cela il y a la droiture, tandis que, pour la compléter, il y a la sincérité ou la bonne foi, et la révérence est ce par quoi la quête de l’humanité est poursuivie. » Cette deuxième phrase peut être considérée comme un résumé du contenu du Livre, qu’ils concluent en disant qu’ils ont divisé en huit chapitres à l’exemple du savant Hwang ; signifiant, je suppose, Hwang Khan, qui a déjà été mentionné comme ayant publié son travail sur notre classique en 538 après JC.
Cette division en huit chapitres est inscrite dans le Traité. Nous avons huit paragraphes commençant par les caractères que j’ai traduits par « Voici les paroles du Maître » ; ils sont suivis d’un certain nombre d’autres, plus ou moins nombreux selon les cas, dans lesquels les paroles du Maître (« Le Maître a dit ») sont invoquées pour étayer ce qui a été affirmé dans ce passage introductif. La disposition est uniforme, sauf dans un cas que j’ai signalé dans une note, et qui divise l’ensemble en huit chapitres.
Mais personne ne suppose que « les paroles du Maître » soient réellement celles de Confucius, ou qu’elles aient été utilisées par lui dans le contexte qui leur est donné ici. Elles ont été inventées par l’auteur du Traité, ou appliquées par lui, pour servir ses propres objectifs ; et les érudits s’opposent à nombre d’entre elles, les jugeant contraires aux sentiments du sage et trahissant une tendance aux vues du taoïsme. Cela apparaît, de la manière la plus frappante peut-être, au cinquième chapitre. À propos de l’affirmation, par exemple, au paragraphe 32, selon laquelle les méthodes de Yin et de Kâu n’étaient pas à la hauteur de la correction des erreurs produites par celles de Shun et de Hsîa, les éditeurs de Khien-lung disent : « Comment ces paroles ont-elles pu sortir de la bouche du Maître ? Les disciples de Lâo-dze méprisaient les formes et appréciaient la simplicité sans fioritures, louaient l’ancien et condamnaient tout ce qui était de leur temps. Au début de la dynastie Han, les principes de Hwang et de Lâo étaient largement diffusés ; Les étudiants se perdaient dans le flot de ce qu’ils entendaient, ne parvenaient pas à en déterminer l’erreur et l’attribuaient au Maître. Ces cas étaient nombreux, et même dans plusieurs paragraphes du Lî Yun (Livre VII), nous en trouvons quelques-uns. Ce que nous y trouvons était probablement la déclaration d’un disciple de Lâo-dze.
Personne, à ma connaissance, n’a osé attribuer la paternité de ce livre à un exemple. Je l’identifie, pour ma part, à Kung-sun Nî-dze, à qui l’on attribue le suivant.
Le lecteur est déçu lorsqu’il découvre, après avoir lu le titre de ce livre, qu’il n’a rien à voir avec les Robes Noires dont il s’attend à ce qu’il soit un récit. Cette expression apparaît dans le deuxième paragraphe, dans une note expliquant son origine ; mais l’autre nom, Hsiang Po, qui figure dans le même paragraphe, aurait pu, avec la même justesse, ou plutôt la même inadéquation, être adopté pour le Traité.
Il est en réalité de même nature que le précédent et contient vingt-quatre paragraphes, tous attribués au « Maître », chacun pouvant être considéré comme un modèle pour les dirigeants et leur peuple. Il devrait former un seul livre avec le XXIX, sous le titre de « Leçons modèles ». J’ai souligné dans les notes quelques exemples de concordance dans leur style et leur phraséologie, et le lecteur intelligent qui consulte la traduction en se référant au texte chinois en découvrira davantage. Lû Teh-ming (au début de la dynastie Thang) nous apprend, sur l’autorité de Liû Hsien, que le Dze Î fut écrit par un certain Kung-sun Ni-dze. Liû Hsien était un éminent érudit du début de la dynastie Song, mort vers 500 après J.-C. ; mais on ignore, en l’état actuel de nos connaissances, sur quelles preuves il attribua la paternité du Livre à Kung-sun Ni-dze. Français Le nom de cet individu se trouve deux fois dans le Catalogue de Liû Hsin, comme appartenant à l’école savante, et parmi les « écrivains divers », avec une note indiquant qu’il était « un disciple des soixante-dix disciples du Maître ». La première entrée le concernant précède celle concernant Mencius, de sorte qu’il doit être rapporté à la fin de la dynastie Kâu, le IIIe siècle avant J.-C. Il pourrait donc avoir été l’auteur des « Robes noires », ainsi que du Livre précédent, donnant ses propres vues, mais les attribuant, selon la mode de l’époque, à Confucius ; mais, comme le commentateur Fang Î (? dynastie Ming) l’observe : « De nombreux passages du Livre sont faits pour ressembler aux paroles d’un sage ; mais le style n’est pas bon et le sens est inférieur. »
Ce livre évoque un cas particulier lié aux rites de deuil : celui d’un individu empêché de participer aux cérémonies habituelles avec ses proches en temps voulu. Il se peut qu’il soit absent de l’État, chargé par son souverain d’affaires publiques, ou qu’il se trouve dans le même État, mais à distance, et tellement occupé qu’il n’a pu prendre part aux cérémonies de deuil.
Mais ils étaient trop sacrés pour être entièrement négligés, et nous avons ici les règles applicables à un tel cas, dans diverses circonstances et à différents degrés de consanguinité. Un autre sujet, plus ou moins analogue, est introduit vers la fin.
Nous avons vu que le premier des « Trois Rituels » retrouvés sous la dynastie Han comprenait dix-sept Livres qui forment aujourd’hui l’Î Lî. Kang Hsüan supposait que le Pan Sang était un autre Livre de cette collection, et qu’il avait été obtenu ultérieurement à partir des tablettes découvertes dans le village de Yen-kung, dans la province de Lû. Il a cependant été décidé que le style le désignait comme provenant d’une autre main que l’Î Lî.
Voilà, et il ne nous reste plus qu’à en tirer le meilleur parti possible, sans savoir qui l’a écrit ni quand il a été découvert. Les éditeurs de Khien-lung disent : « Autrefois, en cas de deuil d’un an ou moins, les officiers quittaient leurs charges et se hâtaient d’assister aux rites. En raison des inconvénients que cela impliquait, il fut décrété que les officiers ne devaient quitter leur charge qu’au décès d’un parent. Il s’avéra cependant difficile de faire respecter cette règle. La règle est qu’une charge ne peut être quittée sans autorisation demandée et obtenue. »
Le Wan Sang, ou « Questions sur les rites de deuil », est un court traité qui tire son nom des questions posées sur l’habillage du corps, le retrait du bonnet et son remplacement par la ceinture, ainsi que l’usage du bâton en deuil. Ces questions sont accompagnées de récits condensés et imparfaits de certains rites. Ce livre doit être lu en parallèle avec les autres livres de même nature, en particulier le XIII.
On ne peut guère en dire autant du style ni de la qualité des réponses aux questions posées. L’idée principale de l’auteur, quel qu’il soit, était que les rites étaient le fruit des sentiments naturels des hommes et que le deuil était une manifestation de piété filiale. Le passage le plus remarquable est celui par lequel le traité conclut que l’usage du bâton ne devait être recherché dans aucune révélation céleste ou terrestre, mais simplement dans l’affection filiale du bon fils. La manière dont ce sentiment est exprimé m’a souvent rappelé la question de l’apôtre Paul sur la foi, dans Romains 10, 6-8.
Comme les deux derniers livres et les deux suivants, le Fû Wan est omis dans les éditions expurgées. Il est encore plus court que le Wan Sang et traite également des rites de deuil, et notamment des vêtements et des modifications qui y sont apportées, ce qui a naturellement suscité des interrogations.
L’auteur, ou le compilateur, cite souvent ce qu’il appelle le Kwan, nom parfois traduit par « Tradition ». Mais le terme chinois, pris isolément, peut désigner aussi bien ce qui est transmis par écrit que ce qui est transmis oralement. Il est utilisé à plusieurs reprises dans Mencius au sens de « Registre » et de « Documents ». Je l’ai appelé ici « Le Répertoire du Deuil ». Wû Khang affirme à juste titre que le Livre a le même caractère que le XIII ; que les rites de deuil étaient si nombreux, et certains si particuliers, que les conflits entre différents rites devaient être fréquents. Le Fû Wan aborde plusieurs cas de ce genre et nous explique comment ils ont été respectés, de manière satisfaisante ou, comme on peut le penser, insatisfaisante.
Le Kien Kwan est un traité sur les points secondaires des rites de deuil. Il n’est pas facile de traduire ce nom avec justesse en français. Je l’ai rencontré sous le nom de « Récit intermédiaire ». Kwan est le caractère mentionné dans la notice précédente ; Kien est le symbole de l’espace entre deux choses, suggérant l’idée de distinction ou de différence. Kang Hsüan explique que « ce nom fait référence aux distinctions appropriées lors du deuil, selon qu’il est plus léger ou plus important. »
Quelle que soit la traduction ou l’explication du nom, le Livre s’intéresse aux manifestations du deuil : le maintien des personnes en deuil ; la modulation de leur voix ; leur façon de manger et de boire ; leurs places ; la texture de leurs vêtements ; et les divers changements qui y ont été apportés jusqu’à son abandon définitif. Certains points sont difficiles à comprendre à cette époque, et nous connaissons encore mal les coutumes du deuil de nos jours.
Les « Questions sur le deuil de trois ans » s’intéressent principalement au deuil des parents pendant cette période, mais elles abordent également toutes les autres périodes de deuil, expliquant pourquoi une période diffère dans sa durée des autres.
Le deuil, dit-on, est le résultat du sentiment relatif propre à l’homme ; les matières du vêtement, la durée des rites et d’autres formes sont issues des anciens sages et législateurs, pour régler et diriger l’expression du sentiment.
Ce qui est dit au paragraphe 4 sur le deuil des oiseaux et des animaux est intéressant, mais fantaisiste. Bien que le deuil d’un parent soit censé durer trois ans, le lecteur occidental ne doit pas supposer qu’il se prolonge jusqu’à la fin de cette période, mais simplement qu’il se prolonge jusqu’à la troisième année. Il se termine virtuellement au vingt-cinquième mois, et positivement au vingt-septième. En Orient, pour parler du temps, on dit qu’il dure trois ans. De même, on m’a souvent dit qu’un enfant, visiblement âgé de six mois au plus, avait deux ans, alors qu’un bref interrogatoire a révélé qu’il était né vers la fin de l’année précédente, qu’il avait vécu deux ans et qu’on le considérait donc comme tel.
Le Shan Î est ce que l’on peut attendre de son nom, une description de ce qu’on appelait la robe. C’était le vêtement de déshabillage, porté par toutes les classes sociales, de la plus haute à la plus basse, lorsqu’elles étaient à la maison et à l’aise. Ce qui le distinguait des autres robes était que, dans celles-ci, la veste ou vêtement supérieur était d’une seule pièce, et la jupe ou vêtement inférieur d’une autre, tandis que dans celle-ci, elles étaient jointes, ce qui permettait de l’enfiler et de l’enlever facilement.
Dans l’édition khien-lung du Lî Kî, chapitre 29, deuxième recueil de planches, on trouve des images du Shan Î, tirées des « Règles pour la famille » de Kû Hsî, mais elles ne correspondent pas à la description ici. On trouve des planches plus précises dans une monographie sur le sujet de Yung Kiang, licencié senior de la dynastie actuelle, qui constitue le 251e chapitre des « Explications des classiques sous la dynastie impériale de Khing ». Le sens exact de Shan Î est « la robe profonde » ; mais le vêtement était aussi appelé « la robe longue », ce qui convient mieux à notre nomenclature ; et « la robe intérieure », lorsqu’il était porté sous un autre.
Les raisons invoquées pour le façonner d’après la description des paragraphes 3 et 4 sont bien sûr fantaisistes ; mais M. Callery est trop sévère envers l’auteur inconnu, lorsqu’il dit : « On est tenté de rire en voyant les rapprochements que Pauteur cherche à établir entre la forme de cette habitude et les principes les plus abstraits de la morale. Je suis porté à croire que toutes ces allégories ont été imaginées après coup; car si elles avaient dirigé la coupe primitive du Shan Î, il faudrait dire que les ateliers des anciens tailleurs de la Chine étaient des écoles de mysticisme.
Le Thâu Hû, ou « Passer dans une jarre », décrit un jeu pratiqué autrefois, et probablement encore aujourd’hui, lors des fêtes. C’était une sorte de tir à l’arc, avec des fléchettes au lieu de flèches, et la main au lieu d’un arc ; « le plus petit », comme le dit Kang, « de tous les jeux de tir à l’arc », et pourtant on pourrait en tirer des leçons pour la pratique de la vertu et pour juger le caractère. Il nous intéresse cependant, simplement comme jeu de divertissement, et ce livre nous en donnera une idée précise.
Deux personnes pouvaient y jouer, ou n’importe quel nombre. Dans le texte, l’hôte et l’invité représentent les deux camps. Il s’agissait d’un concours consistant à lancer des fléchettes dans l’ouverture d’un pot ou d’un vase, placé à faible distance des joueurs – trop faible, nous semble-t-il. La forme du vase dont nous avons une description au paragraphe 10 n’avait rien de particulier. Nous sommes surpris d’en lire la description dans le Dictionnaire syllabique du regretté Dr Williams, sous le caractère pour Hû : « Un ancien type (de vase) était fait avec des tubes de chaque côté de l’ouverture, et un jeu courant, appelé Thâu Hû, consistait à lancer des roseaux dans les trois orifices. » Il s’agissait d’une jarre différente, et le jeu était différent de celui décrit ici, et plus difficile.
Le style du Traité est semblable à celui de l’Î Lî, dans le récit des concours de tir à l’arc des Livres VIII-XI, auquel il faut se référer pour comprendre le sens de plusieurs phrases.
Le livre devrait se terminer par le paragraphe 10. Les trois paragraphes qui suivent semblent avoir été notés par le compilateur à partir de quelques mémos qu’il a trouvés, afin que rien ne soit perdu qui puisse éclairer le jeu.
Suit ensuite un paragraphe, qui peut être jugé inintelligible. Le livre entier est exclu des éditions expurgées.
Le Zû Hsing, ou « Conduite du lettré », se présente comme un discours adressé au duc Âi de Lû sur le caractère et le style de vie par lesquels les lettrés, ou les hommes prétendant posséder des connaissances littéraires, devaient être, et étaient, dans une certaine mesure, distingués. Déjà à une époque reculée, une telle classe d’hommes existait en Chine. Ils avaient certaines particularités vestimentaires, dont certaines sont évoquées dans les Odes du Shih. Le duc, cependant, n’avait pas l’habitude de les apprécier ; et, frappé par quelque chose dans la tenue de Confucius, il lui demande s’il portait l’habit d’un lettré. Le sage nie cette affirmation ; et, interrogé plus longuement sur la conduite du lettré, il s’étend longuement sur ce sujet, avec une remarquable magnificence de pensée et de diction. Il dépeint à son souverain un homme sans peur et sans reproche, fort de principes, d’une intelligence cultivée et animé d’un esprit généreux, patriotique et bienveillant. La conclusion nous dit que l’effet sur le duc Âi fut grand et positif. Il fit de lui un homme meilleur et lui permit d’avoir une meilleure opinion des érudits. L’influence du Livre sur de nombreux lettrés a dû être considérable au cours des siècles qui ont suivi, et doit l’être encore.
Mais une telle conversation a-t-elle réellement eu lieu entre le marquis de Lû et le sage ? L’opinion générale des érudits chinois est qu’il n’en fut rien. Lü Tâ-lin (du XIe siècle, contemporain des frères Khang), cité par les éditeurs de Khien-lung, tout en approuvant cordialement les sentiments, pense que le style est trop grandiloquent pour que nous puissions l’attribuer à Confucius. Un autre commentateur de l’époque Song, l’un des Lîs[^1], soutient que le langage est celui d’un érudit ambitieux de l’époque des Royaumes Combattants, qui souhaitait inciter les membres de son ordre à un style d’action digne de lui. P. Callery ajoute à sa traduction la note suivante : « En général, les maximes de ce chapitre sont suffisamment profondes pour nous permettre de les attribuer à Confucius, de préférence à tant d’autres passages que l’auteur de cet ouvrage place au crédit du grand philosophe. On y trouve néanmoins quelques idées dont les œuvres réellement authentiques de Confucius n’offrent aucune trace.
Comme le Kung Yung (XXVIII), le Tâ Hsio a longtemps été publié séparément des autres Livres du Lî Kî et constitue désormais le premier des célèbres « Quatre Livres ». Dans cette traduction, nous suivons l’arrangement du texte, donné par les éditeurs de Khien-lung, à partir de celui des Treize Rois publié par Khung Ying-tâ, qui lui-même suivait simplement le roi Hsüan. Au début de la dynastie Song, les frères Khang s’intéressèrent au Traité ; pensant que des erreurs s’étaient glissées dans l’ordre des paragraphes et que des parties manquaient, ils y apportèrent diverses modifications et ajouts. Kû Hsî participa à leurs travaux et, selon lui, les améliora. Il figure aujourd’hui dans les Quatre Livres, tel qu’il l’a publié en 1189, et la différence entre son arrangement et le plus ancien peut être constatée en comparant la traduction du premier volume de mes Classiques chinois et celle de la présente publication.
Malgré la différence d’arrangement, le fond de l’œuvre est le même.
Il ne fait aucun doute que le Tâ Hsio est un véritable monument de l’enseignement confucéen et nous donne une idée suffisante des méthodes et des sujets des grandes écoles de l’Antiquité. L’enthousiasme de M. Pauthier n’est pas à blâmer lorsqu’il affirme : « Il est évident que le but du philosophe chinois est de montrer que les devoirs du gouvernement politique sont le perfectionnement de soi et la pratique de la vertu par tous. »
Pauthier adopte pleinement l’opinion de Kû, selon laquelle le premier chapitre est une relique authentique de Confucius lui-même, opinion qui n’est étayée par aucune preuve. Il pense également que tout ce qui suit doit être attribué au disciple Zang-dze, ce qui est contraire aux preuves fournies par le Traité lui-même.
S’il était nécessaire d’attribuer un auteur à cet ouvrage, j’adopterais l’opinion de Kiâ Kwei (30-101 apr. J.-C.) et l’attribuerais à Khung Kî, petit-fils de Confucius et auteur du Kung Yung. « Lorsque Khung Kî, dit Kiâ, était encore vivant et dans la détresse, sous les Song, craignant que les leçons du ou des anciens sages ne s’obscurcissent et que les principes des anciens Tîs et Rois ne s’effondrent, il fit du Tâ Hsio leur chaîne et du Kung Yung leur trame. » Telle semble avoir été l’opinion des érudits de cette époque, et la seule difficulté à l’admettre est que Kang Hsüan ne la mentionne pas. Malgré son silence, la conviction que Khung Ki a écrit les deux traités est devenue très forte dans mon esprit. Il y a une concordance dans le sujet, la méthode et le style des deux, qui exige presque une auteure commune.
On trouve un récit plus complet de la cérémonie de la couronne dans des passages du neuvième et d’autres Livres, où elle n’apparaît qu’incidemment, que dans ce Livre, dont le titre nous donnerait probablement tous les détails. Mais l’auteur inconnu avait pour but de glorifier ce rite comme l’occasion magistrale où un jeune homme sortait de son immaturité pour accéder à tous les privilèges et responsabilités d’un homme, et d’expliquer certains des usages qui avaient été utilisés dès les premiers temps pour en marquer l’importance. Cette intention est indiquée par le deuxième caractère du titre, appelé Î, que nous n’avons rencontré qu’une seule fois auparavant dans le nom d’un Livre : dans Kî Î, « la Signification des Sacrifices », le titre XXI. Il est employé dans les titres de ce Livre et des cinq suivants, et toujours avec la même force de « signification », de « signification », d’« idées sous-jacentes à la cérémonie ». Callery rend correctement Kwan Î par « Signification de la Prise du Chapeau Viril ».
Le bonnet chinois évoque toujours la toge virile des Romains ; mais il existait une différence entre les institutions des deux peuples. L’âge pour revêtir la toge était de quatorze ans ; celui pour recevoir le bonnet était de vingt ans. Le Chinois coiffé était encore jeune, mais il avait atteint l’âge adulte ; le Romain en robe avait peut-être atteint la puberté, mais il n’était guère plus qu’un garçon.
Tant que l’étudiant ne comprend pas pleinement l’objet du traité, les paragraphes semblent complexes et lourds, et le travail de traduction est difficile.
Après le couronnement vient, dans l’ordre naturel, la cérémonie du mariage ; et nous sommes heureux d’avoir, dans la première partie de ce livre, un compte rendu aussi complet des objets envisagés dans le mariage, de la manière dont la cérémonie s’est déroulée et des procédures ultérieures par lesquelles l’union a été déclarée établie.
L’auteur a largement exploité les chapitres consacrés au mariage dans l’Î Lî. Il n’est pas question de l’âge auquel un jeune homme se mariait généralement ; or, comme nous l’avons vu, il est fixé, dans d’autres parties de ce recueil, à trente ans. Le même âge est mentionné dans le Kâu Lî, XIII, 55, sur les devoirs du contractant du mariage. Mais, d’après le cas de Confucius lui-même, le mariage était en réalité célébré plus tôt dans l’Antiquité, comme c’est le cas aujourd’hui. Le Dze[1], ou nom de maturité, donné lors de la cérémonie, est communément considéré comme le nom pris au mariage, comme dans le Dictionnaire Morrison, I, 1, page 627.
Les devoirs énoncés dans le Livre ne sont cependant pas ceux du jeune mari, mais ceux de l’épouse, tous compris dans la vertu générale d’« obéissance ». Après le dixième paragraphe, l’auteur abandonne le sujet du mariage et évoque les différents établissements du roi et de la reine, ainsi que leurs fonctions. Jusqu’ici, ce qui est dit sur ces sujets concerne le mariage, car il présente, mystiquement, cette union comme analogue aux relations entre le ciel et la terre, le soleil et la lune, et les énergies masculines et féminines de la nature ; et la réponse de ces dernières à la conduite des parties humaines dans leur union conjugale.
Hsiang était autrefois le nom de la plus grande division territoriale de l’État. Sous la domination de Kâu, du hameau de cinq familles, en passant par les lü, les zû, les tang et les kâu, on atteint le hsiang, comptant nominalement 12 000 familles et présidé par un « Grand Officier ». Le domaine royal comprenait six hsiang et l’État féodal, trois.
Dans plus d’une de ces divisions territoriales, des réunions festives avaient lieu à intervalles réguliers, toutes censées avoir pour but de « boire ». On y faisait aussi des festins, mais les mets ne constituaient qu’une faible proportion de la boisson, appelée Kiû, qui a généralement été traduit par vin, bien que le raisin n’y fût pour rien, et que la question de savoir s’il était distillé ou simplement fermenté soit controversée.
La fête décrite dans ce livre se déroulait lors de la véritable réunion de Hsiang, célébrée une fois tous les trois ans, sous la direction du « Grand Officier » lui-même. Dans la principale école ou le principal collège du district, il rassemblait les hommes de valeur et de vertu et leur offrait un festin. Son objectif était de sélectionner, notamment parmi les jeunes hommes, ceux qui étaient les plus susceptibles de se révéler utiles au gouvernement dans divers services. Cette célébration portait en elle l’empreinte des concours qui caractérisent depuis si longtemps la nation chinoise.
L’auteur avait sous les yeux les sixième et septième livres de l’Î Lî sur le même sujet, ou leurs équivalents. Il met en évidence cinq aspects de la cérémonie, tous de nature morale et sociale ; mais en essayant d’expliquer les arrangements, il devient allégorique ou mystique, et parfois absurde.
Il y avait divers jeux ou compétitions de tir à l’arc ; à la cour royale, dans les cours féodales, lors des réunions dans les districts ruraux qui font l’objet du dernier livre, et probablement d’autres de caractère moins public et distingué. Ce livre fait référence à au moins un des procès de tir à l’arc à la cour royale ; à celui des cours féodales ; et à un autre présidé par Confucius lui-même, dont il est difficile d’en préciser l’occasion. L’auteur a pour objectif de montrer l’attention portée au tir à l’arc dans l’Antiquité et comment on s’efforçait de le subordonner à des objectifs moraux et éducatifs.
Il avait devant lui les comptes rendus du tir à l’arc pour les officiers dans les livres VIII, IX et X de l’Î Lî ; mais il se donne plus de latitude, dans ses observations à leur sujet, que les auteurs des deux livres précédents, et explique plusieurs pratiques à sa manière, — de façon insatisfaisante, comme je l’ai souligné dans mes notes.
Le Yen Î, ou « Signification du Banquet », est un fragment de seulement cinq paragraphes, qui, de plus, sont mal construits, le premier n’ayant aucun lien avec les autres. Le livre devrait commencer par le paragraphe 2, commençant ainsi : « Voici la signification du Banquet à la cour féodale. » C’est de ce banquet que le compilateur entendait donner une idée à ses lecteurs.
Le plus grand de tous les banquets antiques était celui qui suivait immédiatement les sacrifices dans le temple ancestral, offert à tous les membres de la famille du même nom que le souverain, et auquel il est fait plusieurs références dans le Shih King. Thang San-zhâi (dynastie Ming) précise quatre autres occasions pour ce banquet : il pouvait être offert par un prince féodal, sans occasion particulière, comme celui décrit dans le deuxième des Chants de Louange de Lû ; ou à un haut dignitaire ou à un grand officier ayant servi au service royal, comme celui des Odes mineures du Royaume, iii, 3 ; ou lorsqu’un haut dignitaire revenait d’une mission amicale, comme celui également décrit dans les Odes mineures, i, 2 ; ou lorsqu’un officier se rendait d’un État à un autre en mission amicale. On peut cependant imaginer de nombreuses autres occasions où des banquets publics étaient appropriés et pouvaient être donnés. Les usages qui y étaient pratiqués étaient, pour la plupart, de même nature.
Les onzième et douzième chapitres de l’Î Lî sont consacrés à la cérémonie du banquet. L’auteur de ce traité en cite ici et là des passages et y ajoute sa propre explication de leur portée éducative. Deux leçons, dit-il, y sont particulièrement illustrées : les bonnes relations à entretenir entre supérieurs et inférieurs, et la distinction entre nobles et humbles.
Le Phing Î porte sur l’échange de missions entre les anciens États féodaux. La règle du royaume voulait que ces États entretiennent, par ces échanges, une bonne entente, afin de prévenir les troubles internes et les agressions extérieures. P. Callery donne comme titre : « Signification (du rite) des visites ». J’ai déjà rencontré ce titre traduit en anglais par « The Theory of Embassies » ; mais le Phing n’était pas une ambassade pour une grande occasion d’État, et il n’était pas non plus obligatoire qu’elle soit envoyée à intervalles réguliers. On ne pouvait le négliger longtemps entre deux États sans compromettre leur bonne amitié, mais des événements pouvaient survenir à tout moment dans un État, suscitant une telle expression de sympathie amicale de la part des autres.
Une mission occasionnait une dépense considérable à l’État qui la recevait, et l’auteur, avec une ingéniosité amusante, explique cela comme un stratagème pour apprendre aux princes et à leurs peuples « à se soucier peu de telles dépenses en comparaison du maintien de la coutume et de ses cérémonies ».
Ces visites sont traitées avec tous les détails nécessaires dans l’Î Lî, livres XV-XVIII ; et bien que les extraits ne soient pas nombreux, nous obtenons de l’auteur un récit suffisamment intelligible de la nature des missions et de la manière dont elles ont été menées.
Au paragraphe 11, cependant, il aborde un autre sujet et parle longuement du tir à l’arc, tandis que les paragraphes de conclusion (12 et 13) relatent une conversation entre Confucius et son disciple Dze-kung sur les raisons pour lesquelles le jade est si prisé. Ces trois paragraphes n’ont aucun lien avec ceux qui précèdent sur le sujet des missions ; et la question se pose : d’où proviennent-ils ? Les paragraphes précédents, tirés ou basés sur l’Î Lî, se trouvent dans l’un des traités survivants de la plus grande collection du Grand Tâi, le trente-sixième Livre, appelé Khâo-sze, en conséquence de quoi les éditeurs de Khien-lung suggèrent que ces paragraphes de conclusion sont un ajout de son parent, Tâi Shang. C’est peut-être vrai, mais nous ne devons pas pour autant nous laisser impressionner par l’habileté ou le jugement avec lesquels Shang a exécuté son ouvrage.
Ce livre, qui conclut le recueil du Lî Kî, tente d’expliquer les usages des rites de deuil, et notamment de l’habillement, leurs points communs et leurs différences, en les rapportant aux quatre composantes de la nature humaine : l’amour, la droiture, le sentiment de bienséance et la connaissance, en harmonie avec les opérations du ciel et de la terre dans le cours de la nature. Nous ignorons qui en est l’auteur, mais les éditeurs de Khien-lung soutiennent qu’il ne pouvait figurer dans la compilation originale du Petit Tâi et qu’il doit sa place dans le recueil à Kang Hsüan.
Français On en trouve la plus grande partie dans le trente-neuvième, ou avant-dernier[36], des Livres encore en vigueur comme Lî du Grand Tâi ; et une autre partie dans les « Récits de l’École », le troisième article du sixième chapitre de ce Recueil[37], dont la compilation sous sa forme actuelle est attribuée à Wang Sû dans la première moitié de notre troisième siècle. Mais ce second fragment devait exister antérieurement, sinon Kang lui-même n’aurait pas pu le voir. L’argument de ces éditeurs, donc, selon lequel un érudit, postérieur au Petit Tâi, a dû l’incorporer à ce que nous trouvons dans le Grand Tâi, en y ajoutant un début et une fin de son cru, de manière à former un Livre semblable à ceux de Tâi Shang, et que Kang a jugé utile de le préserver comme la dernière partie du recueil de Shang, cet argument n’est pas concluant. Ce fragment a peut-être fait partie à l’origine du trente-neuvième Livre de Tâi Teh ou d’un autre, et l’ensemble de ce Livre a été arrangé, tel que nous le connaissons aujourd’hui, par Shang lui-même, travaillant, comme il l’aurait fait, à la compilation ou au condensé de son cousin. Quoi qu’il en soit, les vues exprimées dans ce Livre sont assurément ingénieuses et méritent d’être lues avec attention.
Quelques lignes dans l’ouvrage de Callery suffisent à traduire tout le Livre admis dans les éditions expurgées.
[^1] : Le {(###} pour lequel Callery donne—Combinaison des Commentaires Ta Tsüen (le Grand Complet) et Chu (I’explication), d’après le sens original du Mémorial des rites.’ Kâu Kih *(###) a le pseudonyme de Kâu Tan-lin (###).
[^3] : Analectes confucéens, Livre VIII, 8 et 2.
[^21] : Par exemple ### (shan), ###, (kî), ### (khi).
[^22] : Mencius, II, i, 6 ; VI, I, 6.7.
[^25] : Structure des caractères chinois, p. 132.
[^33] ### Officier et auteur. Décédé en 126 av. J.-C.
Œuvres de Mencius, II, Partie ii, 2. 5; III, Partie ii, 3. 3. ↩︎
Œuvres de Mencius, III, ii, 2. 2. ↩︎
Voir les Notes de Wylie sur la littérature chinoise, p. 4, et le Manuel du lecteur chinois de Mayers, p. 300. ↩︎
Biographies de Sze-mâ Khien, Livre 61 (###), p. 5b. D’autres témoignages sur ce fait pourraient être apportés. ↩︎
Mencius V, ii, 2. 2. Voir aussi la note de Liû Hsin, annexée à son catalogue des œuvres de Lî, dans la bibliothèque impériale de Han. ↩︎
Telle était la « Galerie des conduits de pierre », que Mayers (Manuel, p. 18,5) décrit comme un bâtiment érigé par Hsiâo Ho à Khang-an pour la réception des archives de la dynastie éteinte Khin, vers 200 av. J.-C., ajoutant que « en 51 av. J.-C., l’empereur Hsüan nomma une commission d’érudits pour se réunir dans ce bâtiment et achever la révision des écrits classiques. » Mais il avait également été prévu dès le départ comme un dépôt pour ces écrits au fur et à mesure qu’ils étaient récupérés. ↩︎
Voir le Miroir Général de l’Histoire sous cette année. ↩︎
Mayers situe sa naissance « vers 163 av. J.-C. » et sa mort « vers 86 ». ↩︎
Voir le récit du roi Hsien dans le vingt-troisième chapitre des Biographies de l’Histoire de la première dynastie Han. Hsien était le titre posthume du roi (###), signifiant « Le Profond et l’Intelligent ». ↩︎
Le catalogue de la bibliothèque impériale de la dynastie Sui (589-618 après J.-C.) indique qu’il s’agissait d’un érudit du nom de famille Lî (###). Je n’ai pas pu remonter plus loin dans le temps pour retrouver l’autorité de cette affirmation. ↩︎
Ceci est relaté dans le Catalogue de la dynastie Sui. Cela ne pouvait pas figurer dans le soixante et unième chapitre des Biographies de Khien, car le Kâu Kwan n’était pas connu, ou, du moins, n’était pas rendu public, à l’époque de Khien. Les écrivains Sui, sans doute, l’ont emprunté à quelque biographie des Han, qui m’a échappé. ↩︎
Une traduction complète du Kâu Lî parut à Paris en 1851, œuvre d’Edward Biot, décédé avant sa publication, avant ses 50 ans. D’après une note du Mémorial des Rites de Callery (p. 191), le travail de sa préparation hâta la mort de Biot. La version comporte quelques erreurs, mais elles sont peu nombreuses. J’ai eu l’occasion de me référer à des centaines de passages, toujours avec une admiration croissante pour les ressources générales et la connaissance du chinois de l’auteur. Sa mort prématurée fut la plus grande perte qu’ait subie la cause de la sinologie. Ses travaux, principalement sur des sujets chinois, avaient été incessants depuis 1835. Leur lecture m’a souvent rappelé les mots de Newton : « Si M. Cotes avait vécu, nous aurions su quelque chose. » N’y a-t-il pas un sinologue qui entreprendrait aujourd’hui une traduction complète du Kâu Lî ? ↩︎
Voir les détails dans le Miroir général de l’histoire, sous 51 av. J.-C. ↩︎
Voir le 58e Livre des biographies (###) dans l’Histoire des premiers Han et le Catalogue de la Bibliothèque Sui. ↩︎
Les sinologues, sans exception je crois, ont appelé Shang un « neveu » de Teh, négligeant la manière dont leur relation est exprimée en chinois. Shang est toujours le ### de Teh, et pas simplement ###. Les étudiants étrangers ont négligé la portée de l’expression et, plus complètement, ###. Le père de Teh et de Shang avait le même grand-père et était lui-même fils de frères. Ils étaient donc ce que nous appelons des cousins germains, et Teh et Shang étaient des cousins issus de germains. Le point est sans importance, mais il est bon d’être correct même dans les petites choses. Non négligeable, cependant, est l’erreur de Callery (Introduction, p. 6), qui dit : « Le neveu, homme dépravé, beaucoup plus adonné aux plaigirs, qu’à l’étude, retrancha encore davantage et fixa le nombre des chapitres à 46. » Le personnage de Taî Shang n’est pas frappé d’un tel stigmate, et je suis sûr que les traducteurs ont des raisons de lui être reconnaissants d’avoir condensé, comme il l’a fait, le résultat des travaux de son cousin. ↩︎
###. ↩︎
###. ↩︎
Introduction, p. 16. ↩︎
Le classificateur de Kî dans le titre est ### (yen), le symbole des mots ; celui de ce Kî (###) est ### (sze). ↩︎
###. ↩︎
###. ↩︎
Voir le 54e livre des biographies de l’histoire de la deuxième dynastie Han. ↩︎
En 164 av. J.-C. Voir le Miroir de l’Histoire sur cette année-là. ↩︎
Mayers 'Chinese Reader’s Manual, p. 145. Les 1000 pièces d’or suspendues à la porte de Lü ne sont probablement qu’une variante de ce qui a été relaté dans le chapitre précédent de ce qui a été fait par le roi Hsien de Ho-kien pour la récupération du Livre manquant du Kâu Kwan. ↩︎
###; son nom était (Shan, ###), et ce qu’il a reçu dans sa maturité, Dze-yü (###). ↩︎
###. ↩︎
###. ↩︎
###; voir les notes de Wylie, p. 14. ↩︎
###. ↩︎
###. ↩︎
###. ↩︎
###. ↩︎