AVERTISSEMENTS, SUPPOSÉS ÊTRE ADRESSÉS AU ROI LÎ, SUR LES QUESTIONS DE LA COURSE QU’IL POURSUIVAIT, MONTRANT QUE LES MISÈRES DU TEMPS ET LE DANGER IMMINENT DE RUINE DEVAIT ÊTRE ATTRIBUÉS, NON AU CIEL, MAIS À LUI-MÊME ET À SES MINISTRES.
Cette ode, comme la neuvième de la deuxième décennie, est attribuée au duc Mû de Shâo. La structure de la pièce est particulière : après la première strophe, le roi Wăn est introduit, adressant une série d’avertissements à Kâu-hsin, le dernier roi de la dynastie Shang. Ces avertissements sont mis dans la bouche de Wăn, dans l’espoir que Lî, s’il était bien le monarque visé par l’auteur, se transmette la figure de Kâu-hsin et modifie sa conduite afin d’éviter une ruine similaire.
Combien Dieu est vaste, le souverain des hommes d’en bas ! Combien Dieu est paré de terreurs, avec bien des choses irrégulières dans ses ordonnances ! Le ciel a donné naissance à la multitude des peuples, mais la nature qu’il confère est indéniable. Tous sont (bons) [ p. 411 ] au début, mais peu se révèlent tels à la fin [^554].
Le roi Wăn dit : « Hélas ! Hélas ! toi, souverain des Shang, tu as des ministres si violemment oppressifs, tu as des extorqueurs si avides, tu les as à des postes, tu les as à la conduite des affaires ! Le Ciel les a créés avec leurs dispositions insolentes ; mais c’est toi qui les emploies et qui leur donnes la force. »
Le roi Wăn dit : « Hélas ! Hélas ! toi (souverain de) Yin-shang, tu devrais employer des gens de bien, mais tu emploies des oppresseurs violents, qui causent bien des mécontentements. Ils te répondent par des histoires sans fondement, et des brigands et des voleurs sont à ta cour. De là viennent les serments et les malédictions, sans limite, sans fin. »
Le roi Wăn dit : « Hélas ! Hélas ! toi (souverain de) Yin-shang, tu fais preuve d’une volonté farouche et forte au centre du royaume, et tu considères contracter des inimitiés comme une preuve de vertu. Tu es totalement inintelligent. De ta vertu (propre), et ainsi, tu n’as pas d’hommes (bons) derrière toi, ni à tes côtés. Sans aucune intelligence de ta vertu (propre), tu n’as pas de (bon) conseiller intime ou de ministre. »
Le roi Wăn dit : « Hélas ! Hélas ! toi (souverain de) Yin-shang, ce n’est pas le Ciel qui te couvre le visage d’esprits, pour que tu suives le mal et l’imites. Tu te trompes dans toute ta conduite ; tu ne fais aucune distinction entre la lumière et les ténèbres ; mais au milieu des clameurs et des cris, tu changes le jour en nuit [^555]. »
Le roi Wăn dit : « Hélas ! Hélas ! Toi (souverain de) Yin-shang, tout autour de toi est comme le chant des cigales, ou comme le bouillonnement d’une soupe bouillante. Les affaires, grandes et petites, sont au bord de la ruine, et pourtant, toi (et tes créatures) continuez sur cette lancée. L’indignation gronde contre vous ici, dans l’Empire du Milieu, et s’étend jusqu’aux régions démoniaques [^556]. »
Le roi Wăn dit : « Hélas ! Hélas ! toi (souverain de) Yin-shang, ce n’est pas Dieu qui a causé cette époque mauvaise, mais elle provient du fait que Yin n’a pas suivi les anciennes (voies). Bien que tu n’aies pas d’hommes expérimentés, il existe encore d’anciens statuts et lois. Mais tu ne les écoutes pas, et ainsi ton grand projet est renversé. »
Le roi Wăn dit : « Hélas ! Hélas ! toi (souverain de) Shang, les gens ont un dicton : « Lorsqu’un arbre tombe complètement, alors que ses branches et ses feuilles sont encore intactes, il doit d’abord avoir été déraciné. » Le phare de Yin n’est pas très loin ; il se trouve à l’époque du (dernier) souverain de Hsiâ. »
[ p. 413 ]
CONTENANT DIVERS CONSEILS QUE LE DUC WÛ DE WEI A DONNÉS POUR S’ADMINISTRER, LORSQU’IL AVAIT PLUS DE QUATRE-VINGT-DIX ANS, NOTAMMENT SUR LE DEVOIR D’UN DIRIGEANT DE FAIRE ATTENTION À SON COMPORTEMENT EXTÉRIEUR, SE SENTANT TOUJOURS SOUS L’INSPECTION DES ÊTRES SPIRITUELS, ET DE RECEVOIR AVEC DOCILITÉ LES INSTRUCTIONS QUI LUI SONT DONNÉES.
La sixième ode de la septième décennie des Odes mineures du Royaume est attribuée au même duc de Wei que celle-ci ; et les deux semblent provenir du même auteur. Les sources externes permettant d’attribuer cette pièce au duc Wû sont la mention de la préface et un article des « Récits des États », ouvrage déjà mentionné comme appartenant à la période de la dynastie Kâu. Cet article raconte comment Wû, à l’âge de quatre-vingt-quinze ans, insista pour que tous ses ministres et officiers s’empressent, à temps et à contretemps, de le réprimander sur sa conduite, et qu’il « formulait les avertissements du Î pour se réprimander lui-même ». Le Î est compris comme n’étant qu’un autre nom de ce Yî. Ainsi, le locuteur tout au long de la pièce est Wû, et « le jeune Fils », auquel il s’adresse parfois, est aussi lui-même. La conception de l’auteur, en adoptant une telle méthode pour se réprimander et transmettre les leçons de sa longue vie, est très remarquable ; et son exécution est réussie.
Une attitude extérieure, prudente et grave, est un signe de vertu. On dit : « Il n’y a pas d’homme sage qui ne soit stupide. » La stupidité de l’homme ordinaire est déterminée par ses défauts. La stupidité du sage vient de sa violence envers son propre caractère.
Ce qui est le plus puissant, c’est d’être l’homme [^557] ; — [ p. 414 ] Dans tous les quartiers (de l’État), les hommes sont influencés par elle. À une conduite droite et vertueuse, tous, dans les quatre quartiers de l’État, rendent un hommage obéissant. Avec de grands conseils et des ordres déterminés, avec des plans de grande envergure et des annonces opportunes, et avec un soin respectueux de son comportement extérieur, chacun deviendra le modèle du peuple.
Quant aux circonstances actuelles, vous êtes enclin à l’erreur et à la confusion dans votre gouvernement. Votre vertu est corrompue ; vous êtes enivré par l’alcool [^558]. Bien que vous ne recherchiez ainsi que le plaisir, comment se fait-il que vous ne pensiez pas à votre relation avec le passé, et que vous n’étudiiez pas en profondeur les rois précédents, afin de vous en tenir à leurs sages lois ?
Ceux que le grand Ciel n’approuve pas, comme les eaux qui coulent d’une source, ne sombreront-ils pas tous ensemble dans la ruine ? Levez-vous tôt et couchez-vous tard, Arrosez et balayez votre cour ; afin de servir d’exemple au peuple [^559]. Ayez en bon état vos chars et vos chevaux, vos arcs et vos flèches, et vos autres armes de guerre ; pour être prêts à l’action guerrière, afin de tenir à distance (les hordes du) sud.
Perfectionnez ce qui concerne vos officiers et votre peuple ; [ p. 415 ] Soyez prudent dans vos devoirs de prince (du royaume). Pour être prêt à affronter des dangers imprévus, soyez prudent dans ce que vous dites ; soyez respectueusement prudent dans votre comportement extérieur ; en toutes choses, soyez doux et correct. Un défaut dans une masse de jade blanc peut être effacé ; mais pour un défaut de langage, rien ne peut être fait.
Ne parle pas à la légère ; tes paroles t’appartiennent. Ne dis pas : « Cela n’a aucune importance ; personne ne peut me retenir. » Les paroles ne doivent pas être rejetées. Chaque parole trouve sa réponse ; chaque bonne action a sa récompense. Si tu es bienveillant envers tes amis, et envers le peuple, comme s’il était toi, tes enfants, ta descendance se perpétuera sans interruption, et tout le peuple t’obéira certainement.
Considéré dans vos rapports amicaux avec des hommes supérieurs, votre visage paraît harmonieux et doux ; soucieux de ne rien faire de mal. Considéré dans votre chambre, vous devriez être également exempt de honte devant la lumière qui y brille. Ne dites pas : « Ce lieu n’est pas public ; personne ne peut me voir ici. » Les approches des êtres spirituels ne peuvent être calculées à l’avance ; mais à plus forte raison ne devraient-elles pas être négligées [^561].
[ p. 416 ]
Ô prince, que ta pratique de la vertu soit entièrement bonne et admirable. Soigne bien ta conduite, et ne tolère aucun mal dans ton comportement. Ne commettant aucun excès, ne faisant rien de mal, rares sont ceux qui, dans un tel cas, ne te prendront pas pour modèle. Quand on me jette une pêche, je lui rends une prune [^562]. Chercher des cornes sur un jeune bélier ne fera que t’épuiser, mon fils [^563].
Le bois dur et élastique peut être équipé d’une corde de soie [^564]. L’homme doux et respectueux possède les fondements de la vertu. Il y a un homme sage ; je lui dis de bonnes paroles, et il s’y soumet à la pratique d’une vertu docile. Il y a un homme stupide ; il dit au contraire que mes paroles ne sont pas vraies : tant les esprits sont différents.
Oh ! mon fils, quand tu ne savais pas distinguer le bien du mal, non seulement je t’ai guidé par la main, mais j’ai montré la différence entre les deux en faisant appel à des exemples. Non seulement je t’ai instruit face à face, mais je t’ai tenu par l’oreille [^565]. Et peut-être ne le sais-tu toujours pas, bien que tu aies tenu un fils dans tes bras. Si les gens ne sont pas autosuffisants, qui atteint une maturité tardive après une instruction précoce ?
Le Grand Ciel est très intelligent, Et je passe, [ p. 417 ] ma vie sans plaisir. Quand je te vois si sombre et stupide, Mon cœur est plein de douleur. Je t’ai enseigné avec des répétitions assidues, Et tu m’as écouté avec mépris. Tu ne me considérais pas comme ton professeur, Mais tu me considérais comme gênant. Peut-être l’ignores-tu encore ; — Mais tu es très vieux.
Oh ! mon fils, je t’ai enseigné les anciennes coutumes. Écoute et suis mes conseils : alors tu n’auras plus de regrets. Le Ciel inflige maintenant des calamités et détruit l’État. Mes exemples ne sont pas tirés de choses lointaines : le Grand Ciel ne se trompe pas. Si tu continues à dépérir dans ta vertu, tu plongeras le peuple dans une grande détresse.
L’ÉCRIVAIN DÉPLORE LA MISÈRE ET LE DÉSORDRE DE L’ÉPOQUE, EN VUE DE RÉPRIMER LA MAUVAISE GOUVERNANCE DU ROI LÎ, EN APPELANT ÉGALEMENT AU CIEL POUR QU’IL AIE DE LA COMPASSION.
Français Le roi Lî n’est pas nommément mentionné dans la pièce, mais le deuxième vers de la strophe 7 ne peut être expliqué que par lui. Il fut chassé du trône, en conséquence de sa mauvaise gouvernance, en 842 av. J.-C., et ne sauva sa vie qu’en s’enfuyant à Kih, un lieu dans l’actuel Ho Kâu, département de Phing-yang, Shan-hsî, où il resta jusqu’à sa mort en 828 av. J.-C. Le gouvernement était entre-temps assuré par les ducs de Shâo et de Kâu, dont l’administration, appelée la période de « l’Harmonie Mutuelle », constitue une ère chronologique importante dans l’histoire chinoise. Sur l’autorité d’une référence dans le Ȝo Kwan, la pièce est attribuée à un comte de _Z_ui.
Ce jeune mûrier est luxuriant, et sous lui s’étend une vaste ombre ; mais ils arracheront ses feuilles jusqu’à ce qu’il soit entièrement détruit [^566]. La détresse [ p. 418 ] infligée à ces (multitudes de) gens, est une douleur incessante pour mon cœur ; ma commisération remplit (ma poitrine). Ô toi, Ciel brillant et grand, ne devrais-tu pas avoir compassion de nous ?
Les quatre coursiers galopent, ardents et forts [^567] ; les bannières de la tortue, du serpent et du faucon flottent. Le désordre grandit, et la paix est impossible. Tous les États sont en ruine ; il n’y a pas de têtes noires parmi le peuple [^568]. Tout est réduit en cendres par la calamité. Oh ! hélas ! La ruine du royaume se précipite.
Rien ne peut arrêter la ruine du royaume ; le ciel ne nous nourrit pas. Il n’y a pas de lieu où s’arrêter en sécurité ; il n’y a pas d’endroit où aller. Les hommes supérieurs sont les liens (de l’état social) [^569], ne laissant aucune place à l’amour de la lutte dans leurs cœurs. Qui a élevé les marches de l’insatisfaction [^570], qui a atteint la détresse présente ?
La douleur de mon cœur est extrême, et je m’attarde sur l’état de notre terre. Je suis né à une époque malheureuse, pour affronter la colère du Ciel. De l’ouest à l’est, il n’y a pas de lieu paisible où demeurer. Nombreuses sont les détresses que je rencontre ; les troubles à nos frontières sont très pressants.
Le ciel envoie la mort et le désordre, et a mis fin à notre roi. Il envoie maintenant ces dévoreurs de blé, si bien que toute l’agriculture est en mauvais état. Hélas pour nos États intermédiaires [^571] ! Tout est en péril et va à la ruine. Je n’ai plus la force (de faire quoi que ce soit), et pense à (la puissance dans) la voûte d’azur.
LE ROI HSÜAN, À L’OCCASION D’UNE GRANDE SÉCHERESSE, S’EXPRIME AUPRÈS DE DIEU ET DE TOUS LES ESPRITS QUI POURRAIENT LUI VENIR EN AIDE, LUI ET SON PEUPLE ; LEUR DEMANDE POURQUOI ILS LUTTAIENT AVEC LUI ; ET DÉTAILLE LES MESURES QU’IL AVAIT PRISES, ET QU’IL PRENDAIT ENCORE, POUR ÉLIMINER LA CALAMITÉ.
Le roi Hsüan n’apparaît pas nommément dans l’ode, bien que la remarquable prière qu’elle relate soit attribuée à un roi dans la strophe 1. Tous les critiques ont admis l’affirmation de la préface selon laquelle la pièce fut composée, en admiration pour le roi Hsüan, par Z_ăng Shû, un grand officier, on peut le supposer, de la cour. La chronologie standard situe le début de la sécheresse en 822 av. J.-C., la sixième année du règne de Hsüan. On ne peut dire combien de temps elle dura.
La Voie lactée était éclatante, brillant et tourbillonnant dans le ciel. Le roi dit : « Oh ! Quel crime nous incombe maintenant, que le Ciel (ainsi) fasse descendre la mort et le désordre ? La famine revient sans cesse. Il n’est pas d’esprit auquel je n’aie sacrifié [^572] ; il n’est pas de victime que j’aie refusée ; nos symboles de jade, oblongs et ronds, sont épuisés [^573] ; comment se fait-il que je ne sois pas entendu ?
La sécheresse est excessive ; ses ferveurs deviennent de plus en plus tourmentantes. Je n’ai cessé d’offrir des sacrifices purs ; des autels frontaliers, je suis allé au temple ancestral [1]. Aux (Puissances) d’en haut et d’en bas, j’ai présenté mes offrandes, puis je les ai enterrées [2] ; il n’est pas d’esprit que je n’aie honoré. Hâu-_k_î n’est pas à la hauteur de la situation ; Dieu ne vient pas à nous. Ce dévastation et cette ruine de notre pays, — si seulement cela ne tombait que sur moi !
La sécheresse est excessive, et je ne peux pas chercher à m’excuser. Je suis rempli de terreur et je ressens le péril, comme un coup de tonnerre ou un roulement. Du reste de Kâu, parmi le peuple aux cheveux noirs, il ne restera pas la moitié d’un homme ; et Dieu ne m’exemptera pas de son grand ciel. Ne devrions-nous pas [ p. 421 ] mélanger nos peurs ? (Les sacrifices à) mes ancêtres seront éteints [3].
La sécheresse est excessive, et elle ne peut être arrêtée. Plus féroce et ardente, elle ne me laisse plus de place. Ma fin est proche ; je n’ai personne vers qui lever les yeux, personne vers qui me tourner. Les nombreux ducs et leurs ministres du passé [4] ne m’apportent aucun secours. Ô vous, parents et ancêtres (plus proches) [5], comment pouvez-vous supporter de me voir ainsi ?
« La sécheresse est excessive ; les collines sont desséchées et les ruisseaux sont à sec. Le démon de la sécheresse exerce son oppression, comme s’il dispersait des flammes et du feu [6] Mon cœur est terrifié par la chaleur ; mon cœur affligé est comme en feu. Les nombreux ducs et leurs ministres du passé ne m’entendent pas. Ô Dieu, de ton grand ciel, accorde-moi la liberté de me retirer (dans la retraite [7]).
« La sécheresse est excessive ; j’ai du mal à m’en aller et j’ai peur. Comment se fait-il que je sois affligé par cette sécheresse ? Je ne peux en déterminer la cause. En priant pour une bonne année, j’ai été très tôt [8]. Je n’ai pas tardé à sacrifier aux esprits des quatre coins du monde et de la terre [9]. Dieu, dans le grand ciel, ne me considère pas. Révérencieux envers les esprits intelligents, je ne devrais pas être ainsi l’objet de leur colère. »
La sécheresse est extrême ; tout est dispersion, et les liens du gouvernement sont relâchés. Les chefs de département sont réduits à l’extrême ; mes principaux ministres, le maître de cavalerie, le commandant des gardes, le chef cuisinier [10] et mes serviteurs sont en détresse. Il n’est personne qui n’ait tenté d’aider (le peuple) ; ils ne se sont pas abstenus sous prétexte d’en être incapables. Je lève les yeux vers le grand ciel ; pourquoi suis-je plongé dans ce chagrin ?
« Je lève les yeux vers le grand ciel, mais ses étoiles brillent de mille feux. Mes grands officiers et mes excellents hommes, vous vous êtes approchés avec révérence (du Ciel) de toutes vos forces. La mort approche, mais ne rejetez pas ce que vous avez fait. Vous ne cherchez pas seulement pour moi, mais pour donner du repos à tous nos services. Je lève les yeux vers le grand ciel ; quand serai-je favorisé du repos ? »
CÉLÉBRANT LA NOMINATION PAR LE ROI HSÜAN D’UN PARENT POUR ÊTRE MARQUIS DE SHĂN ET DÉFENSEUR DE LA FRONTIÈRE SUD DU ROYAUME, AVEC LES DISPOSITIONS PRISES POUR SON ENTRÉE SOUS SA CHARGE.
Il est suffisamment établi que le roi qui apparaît dans cette pièce était le roi Hsüan. Il y apparaît en train de charger « son grand-oncle », frère aîné, c’est-à-dire de sa mère, d’aller régner, comme marquis de Shăn et chef ou président des États du sud du royaume, pour défendre les frontières contre les hordes envahissantes venues du sud, menées par les princes de Khû, dont les seigneurs s’étaient rebellés contre les États du centre dès l’époque de la dynastie Shang ; voir la dernière des Odes sacrificielles de Shang.
Les montagnes sont majestueusement hautes, avec leurs masses imposantes atteignant les cieux. De ces montagnes fut envoyé un esprit, qui produisit la naissance (des princes de) Fû et Shăn [11]. Fû et [ p. 424 ] Shăn Sont le soutien de Kâu, Écrans pour tous les états, Diffusant (leur influence) sur les quatre points du royaume.
Le chef de Shăn est plein d’activité, et le roi veut l’employer pour continuer les services (de ses pères), avec sa capitale à Hsieh [12], où il devrait être un modèle pour les États du Sud. Le roi chargea le comte de Shâo, de tout organiser autour de la résidence du chef de Shăn, où il pourrait faire ce qui était nécessaire pour les régions du Sud, et où sa postérité pourrait maintenir son mérite.
Français Des services du chef de Shăn Les fondations furent posées par le comte de Shâo, Qui construisit d’abord les murs (de sa ville), Et ensuite acheva son temple ancestral [13]. Quand le temple fut achevé, large et grandiose, Le roi conféra au chef de Shâo Quatre nobles destriers, Avec les crochets pour les harnais des pectoraux, étincelants de mille feux [14].
[ p. 425 ]
CÉLÉBRANT LES VERTUS DE KUNG SHAN-FÛ, QUI SEMBLE AVOIR ÉTÉ L’UN DES PRINCIPAUX MINISTRES DU ROI HSÜAN, ET SON ENVOI À L’EST POUR FORTIFER LA CAPITALE DE L’ÉTAT DE KHÎ.
Le Ciel, en donnant naissance à la multitude du peuple, a annexé sa loi à chaque faculté et relation. Le peuple possède cette nature normale, et il (par conséquent) aime sa vertu normale [15]. Le Ciel a vu le souverain de Kâu, l’influencer brillamment par sa conduite ici-bas, et pour le maintenir, son Fils a donné naissance à Kung Shan-fû [16].
Le roi Shan-fû partit, après avoir sacrifié à l’esprit de la route [17]. Ses quatre coursiers étaient forts ; [ p. 426 ] Ses hommes étaient vigilants, Il était toujours inquiet de ne pas être à la hauteur de sa mission ; Ses coursiers continuaient sans s’arrêter, Au son de leurs huit cloches. Le roi avait chargé le roi Shan-fû De fortifier la ville à l’est.
CÉLÉBRANT LE MARQUIS DE HAN : SON INVESTITURE ET LA CHARGE DU ROI À LUI ; LES CADEAUX QU’IL A REÇUS ET LE FESTIN D’ADIEU À LA COUR ; SON MARIAGE ; L’EXCELLENCE DE SON TERRITOIRE ; ET SON DOMAINE SUR LES RÉGIONS DU NORD.
Un seul vers – le premier de la strophe 3 – dans cette intéressante pièce sert à illustrer les pratiques religieuses de l’époque, et n’a pas besoin d’être mentionné plus en détail que ce qui a été donné au premier vers de la strophe 7 de l’ode précédente. Le nom du marquisat de Han subsiste dans le district de Han-_kh_ăng, département de Hsî-an, Shen-hsî, où se trouve également le mont Liang.
Très majestueuse est la montagne de Liang, rendue cultivable par Yü. Lumineuse est la route qui en part, par laquelle le marquis de Han est venu recevoir son investiture. Le roi en personne donna cet ordre : « Continuez à servir vos ancêtres ; ne laissez pas mes instructions vous être vaines. Soyez diligents matin et soir, et accomplissez vos devoirs avec respect : ainsi, ma nomination restera inchangée. Soyez un soutien contre les princes qui ne viennent pas à la cour, assistant ainsi votre souverain. »
Lorsque le marquis de Han quitta la cour, il sacrifia à l’esprit de la route. Il sortit et passa la nuit à Tû.
[ p. 427 ]
CÉLÉBRANT UNE EXPÉDITION CONTRE LES TRIBUS DU SUD DES HWÂI, ET LE TRAVAIL ACCOMPLI POUR LE ROI DANS LEUR PAYS, PAR HÛ, LE COMTE DE SHÂO, AVEC LA MANIÈRE DONT LE ROI LE RÉCOMPENSE, ET IL RÉPOND À LA FAVEUR ROYALE.
Hû était probablement le même comte de Shâo, mentionné dans l’ode 5, comme ayant construit sa capitale de Hsieh pour le nouveau marquis de Shan. Les seigneurs de Shâo s’étaient distingués au service de Kâu depuis l’avènement de la dynastie.
Le roi donna des instructions à Hû de Shâo : « Tu as partout fait connaître (et exécuté mes ordres). Lorsque (les rois) Wăn et Wû reçurent leur nomination, le duc de Shâo fut leur solide soutien. Non seulement tu as de l’estime pour moi, le petit enfant, mais tu t’efforces de ressembler à ce duc de Shâo. Tu as commencé et sérieusement démontré ton mérite ; et je te rendrai heureux. »
« Je te donne une grande coupe de jade [18], et un pot d’alcool de millet noir aromatisé aux herbes [19]. J’ai fait une annonce à l’Accompli [20], et je te confère des collines, des terres et des champs. En (Khî-)_k_âu tu recevras l’investiture, comme ton ancêtre a reçu la sienne. » Hû s’inclina, [ p. 428 ] tête contre terre (et dit) : « Que le Fils du Ciel vive éternellement ! »
L’ÉCRIVAIN DÉPLORE, AVEC UN CRI APPELANT AU CIEL, LA MISÈRE ET L’OPPRESSION QUI PRÉVALAIENT, ET SOUHAITE QU’ELLES ONT ÉTÉ CAUSÉES PAR L’INGÉRENCE DES FEMMES ET DES EUNUQUES DANS LE GOUVERNEMENT.
Le roi auquel s’adresse cette pièce était probablement Yû. Cela correspond à son caractère et à son règne.
Je lève les yeux vers le grand Ciel, mais il ne nous témoigne aucune bienveillance. Nous sommes depuis longtemps inquiets, et ces grandes calamités nous sont envoyées. Rien n’est réglé dans le pays ; officiers et citoyens sont en détresse. À cause des insectes extérieurs et intérieurs, il n’y a ni paix ni limite (à notre misère). Le filet du crime n’est pas levé [21], et il n’y a ni paix ni remède (à notre état).
Pourquoi le Ciel te réprimande-t-il ainsi ? Pourquoi ne te bénit-il pas ? Tu négliges tes grands barbares, et tu me méprises. Tu es indifférent aux mauvais présages, et ton comportement est tout à fait inconvenant. Les hommes de bien s’en vont, et le pays est voué à la ruine.
Le ciel jette son filet, et les calamités sont nombreuses. Les hommes (de bien) s’en vont, et mon cœur est triste. Le ciel jette son filet, et bientôt tous seront pris. Les hommes (de bien) s’en vont, et mon cœur est triste.
L’eau jaillit de la source, révélant sa profondeur. La tristesse de mon cœur est-elle d’aujourd’hui ? Pourquoi ces choses n’ont-elles pas eu lieu avant moi ? Ou après moi ? Mais le Ciel, si grand et mystérieux, est capable de tout fortifier. Ne déshonore pas tes illustres ancêtres, cela sauvera ta postérité [22].
L’ÉCRIVAIN FAIT APPEL AU CIEL, DÉPLOYANT LA MISÈRE ET LA RUINE QUI SE PRODUISENT, ET MONTRANT COMMENT ELLES ÉTAIENT DUES À L’EMPLOI PAR LE ROI DE CRÉATURES MÉCHANTES ET SANS VALEUR.
Le Ciel compatissant est paré de terreurs furieuses. Le Ciel fait venir la ruine, nous accablant de famine, si bien que tous les peuples sont des fugitifs errants. Dans les régions habitées et aux frontières, tout n’est que désolation.
Le ciel envoie son filet de crime : des insectes dévoreurs qui fatiguent et embrouillent l’esprit des hommes, ignorants, oppressifs, négligents, semeurs de confusion, totalement pervers : voilà les hommes employés.
411:1 Le sens semble être que, quelles que soient les misères qui puissent prévaloir et être attribuées par ignorance à Dieu, elles étaient en réalité dues à la négligence des hommes envers la loi du Ciel inscrite dans leurs cœurs. ↩︎
412:1 Nous parlons de « transformer la nuit en jour ». Le tyran de Shang transformait le jour en nuit. Les excès, généralement commis dans l’obscurité, étaient commis par lui ouvertement. ↩︎
412:2 Ces « régions démoniaques » sont censées désigner le siège des tribus turques au nord de la Chine, connues depuis les temps les plus anciens sous divers noms : « la colline _Z_ung », « le Lî du nord », « le Hsien-yun », etc. Vers le début de notre ère, elles étaient appelées Hsiung-nû, d’où vient peut-être le nom de Huns ; et quelques siècles plus tard, Thû-_k_üeh (Thuh-_k_üeh), d’où vient Turk. On nous dit dans le Yî, sous le diagramme Kî-_k_î, que Kâo Ȝung (1324-1266 av. J.-C.) mena une expédition contre les régions démoniaques et les soumit en trois ans. ↩︎
413:1 Wû écrit en tant que marquis de Wei, dirigeant d’un État ; mais ses paroles sont susceptibles d’application universelle. Dans chaque sphère, plus ou moins grande, « être l’homme », c’est-à-dire manifester les qualités propres à l’humanité, sera apprécié et ressenti. ↩︎
414:1 Han Ying (mentionné dans l’Introduction) dit que Wû composa la sixième ode de la septième décennie de la partie précédente contre l’ivresse, alors qu’il se repentait d’avoir cédé à ce vice. Sa mention de cette habitude ici, à l’âge de quatre-vingt-quinze ans, doit être comprise comme un avertissement aux autres dirigeants. ↩︎
414:2 La ligne 3 décrit les choses importantes pour la culture de soi-même ; et la ligne 4, celles importantes pour la gestion de sa famille. Elles peuvent paraître sans importance, dit-on, comparées à la défense de l’État, évoquée dans les quatre derniers vers de la strophe ; mais le souverain ne doit pas les négliger. ↩︎
415:1 Et donc chacun est lui-même responsable de ses paroles. ↩︎
415:2 Kû Hsî dit qu’à partir du quatrième vers, cette strophe ne parle que du soin constant qu’il faut apporter à la surveillance de ses pensées ; mais ce faisant, il néglige la considération par laquelle une telle vigilance est imposée. Comparez ce qui est dit du roi Wăn dans la troisième strophe de la sixième ode de la première décennie. Le roi Wăn et le duc Wû étaient tous deux influencés par la considération que leurs pensées les plus intimes, même lorsqu’elles étaient « invisibles aux hommes », étaient ouvertes à l’inspection des êtres spirituels. ↩︎
416:1 C’est-à-dire que chaque acte, en fait, rencontre sa récompense. ↩︎
416:2 Voir la conclusion de l’ode du duc Wû contre l’ivresse. Les cornes poussent comme le jeune bélier. Il ne faut pas s’attendre à des effets là où les conditions d’où ils naissent naturellement n’ont pas été réunies. ↩︎
416:3 Un tel bois est le matériau approprié pour un arc. ↩︎
416:4 C’est-à-dire pour attirer votre attention. ↩︎
417:1 Ces trois lignes sont métaphoriques du royaume autrefois florissant, qui était maintenant au bord de la ruine. ↩︎
418:1 C’est-à-dire les chars de guerre, chacun tiré par son attelage de quatre chevaux. ↩︎
418:2 Les jeunes et les valides du peuple furent tués ou absents lors d’expéditions lointaines, et seuls des hommes âgés et aux cheveux gris furent vus. ↩︎
418:3 Indiquant qu’aucun homme de ce genre ne se trouvait désormais au pouvoir. ↩︎
418:4 Signifiant le roi par son mauvais gouvernement et l’emploi d’hommes mauvais. ↩︎
419:1 Il faut traduire ici au pluriel, ‘les États du milieu’ signifiant tous les États soumis au souverain de Kâu. ↩︎
419:2 Dans le Livre Officiel de Kâu, parmi les devoirs du Ministre de l’Instruction, ou, comme Biot traduit le titre, « le Directeur des Multitudes », il est indiqué qu’une des choses qu’il doit faire, en cas de famine, est de « chercher les esprits », c’est-à-dire, comme l’expliquent les commentateurs, de veiller à ce que des sacrifices soient offerts à tous les esprits, même ceux qui ont été abandonnés. Cette règle avait sans doute été appliquée pendant la sécheresse décrite dans cette ode. ↩︎
420:1 Nous avons, dans le sixième livre de la cinquième partie du Shû, un exemple de l’utilisation des symboles mentionnés ici lors des sacrifices aux esprits des rois défunts. Le Livre Officiel, parmi les devoirs du Ministre de la Religion, mentionne l’utilisation de ces symboles et d’autres – au nombre de six, de formes et de couleurs différentes – lors des différents sacrifices. ↩︎
420:2 Par « autels de frontière », nous devons entendre les autels des faubourgs de la capitale, où le Ciel et la Terre étaient sacrifiés aux grands services des solstices et à toute autre saison. La mention de Hâu-_k_î au septième vers nous fait penser particulièrement au service du printemps, pour prier pour une bonne année, lorsque Hâu-_k_î était associé à Dieu. ↩︎
421:1 Équivalent à l’extinction de la dynastie. ↩︎