Je vais maintenant vous parler, à vous qui n’êtes pas enclins à critiquer, de cette connaissance très mystérieuse, accompagnée d’expérience, dont la connaissance vous libérera du mal. C’est la principale des sciences, le principal des mystères. C’est le meilleur moyen de sanctification. Elle est impérissable, non opposée à la loi sacrée. Elle doit être appréhendée directement [1] et est facile à pratiquer. Ô terreur de vos ennemis ! Ces hommes qui n’ont pas foi en cette sainte doctrine, retournent sur le chemin de ce monde mortel, sans m’atteindre. Cet univers entier est imprégné par moi sous une forme invisible. Toutes les entités vivent en moi, mais je ne vis pas en elles [2]. Et toutes les entités ne vivent pas non plus en moi. Voyez ma puissance divine. Soutenant toutes les entités et produisant toutes les entités, mon moi ne vit pas dans (ces) entités. Comme la grande et omniprésente atmosphère demeure toujours dans l’espace, sache que de même toutes les entités vivent en moi [3]. À l’expiration d’un Kalpa, ô fils de Kuntî ! toutes les entités entrent dans ma nature ; et au début d’un Kalpa, je les fais à nouveau surgir. Prenant le contrôle de ma propre nature [4], je fais surgir encore et encore toute cette collection d’entités, sans volonté propre [5], par le pouvoir de la nature. Mais, ô Arguna ! ces actions ne m’entravent pas [6], qui reste comme quelqu’un d’indifférent, et qui n’est pas attaché à ces actions. La nature donne naissance aux meubles et aux immeubles par mon intermédiaire, le superviseur, et c’est à cause de cela [7], ô fils de Kuntî ! que l’univers tourne. Les gens égarés par de vains espoirs, des actes vains, des vains [ p. 83 ] connaissance [8], dont les esprits sont désordonnés et qui sont enclins à la nature trompeuse des Asuras et des Râkshasas, ne connaissant pas ma nature la plus élevée de grand seigneur de toutes les entités, me méprisent comme si j’avais assumé un corps humain [9]. Mais les êtres à l’âme élevée, ô fils de Prithâ! qui sont enclins à la nature divine, me connaissant comme la source inépuisable de (toutes) les entités, m’adorent avec des esprits non (tournés) ailleurs.
Me glorifiant constamment, et s’efforçant [10], fermes dans leurs vœux [11], et me saluant avec révérence,
ils m’adorent, étant toujours dévoués. Et d’autres encore, offrant le sacrifice de la connaissance, m’adorent comme un, comme distinct et comme omniprésent sous de nombreuses formes [12]. Je suis le Kratu [13], je suis le Yaga, je suis le Svadhâ, moi le produit des herbes. Je suis le verset sacré. Moi aussi je suis le beurre sacrificiel, et moi le feu, moi l’offrande [14]. Je suis le père de cet univers, la mère, le créateur, l’aïeul, la chose à connaître, le moyen de sanctification, la syllabe Om [15], le Rik, Sâman et aussi Yagus ; le but, le soutien, le seigneur, le superviseur, le [ p. 84 ] résidence [16], l’asile, l’ami, la source, et ce en quoi elle se fond, le soutien, le réceptacle, et la semence inépuisable. Je cause la chaleur et j’envoie et j’arrête les averses. Je suis l’immortalité et aussi la mort ; et moi, ô Arguna ! je suis ce qui est et ce qui n’est pas [17]. Ceux qui connaissent les trois (branches de) connaissance, qui boivent le jus de Soma, dont les péchés sont lavés, offrent des sacrifices et me prient pour un passage au ciel ; et atteignant le monde sacré du seigneur des dieux, ils jouissent dans les régions célestes des plaisirs célestes des dieux. Et ayant joui de ce grand monde céleste, ils entrent dans le monde mortel lorsque (leur) mérite est épuisé [18]. Ainsi, ceux qui désirent des objets de désir et recourent aux ordonnances des trois (Védas), obtiennent (comme fruit) l’aller et le retour. À ces hommes qui m’adorent, méditant sur moi et sur personne d’autre, et qui sont constamment dévoués, je fais de nouveaux dons et préserve ce qu’ils ont acquis [19]. Même ceux, ô fils de Kuntî ! qui, étant dévots d’autres divinités, adorent avec foi, m’adorent seul, (mais) irrégulièrement [20]. Car je suis le bénéficiaire aussi bien que le seigneur [21] de tous les sacrifices. Mais ils ne me connaissent pas vraiment, c’est pourquoi ils chutent [22]. Ceux qui font des vœux [23] aux dieux vont aux dieux ; [ p. 85 ] ceux qui font des vœux aux mânes vont aux mânes, ceux qui adorent les Bhûtas vont aux Bhûtas ; et de même ceux qui m’adorent vont à moi. Quiconque m’offre avec dévotion une feuille, une fleur, un fruit, de l’eau, cela, présenté avec dévotion, je l’accepte de celui dont l’être est pur. Quoi que tu fasses, ô fils de Kuntî ! quoi que tu manges, quel que soit le sacrifice que tu fasses, quoi que tu donnes, quelle que soit la pénitence que tu accomplis, fais-le comme si c’était pour moi [24]. Ainsi, tu seras libéré des liens de l’action, dont les fruits sont agréables ou désagréables. Et avec ton être possédé de (ce) dévouement, (ce) renoncement [25], tu seras libéré (des liens de l’action) et tu viendras à moi. Je suis semblable à tous les êtres ; rien ne m’est haïssable, rien ne m’est cher. Mais ceux qui m’adorent avec dévotion (habitent) en moi [26], et moi aussi en eux.Même si un homme très mal conduit m’adore, sans adorer personne d’autre, il doit certainement être considéré comme bon, car il a bien résolu [27]. Il devient bientôt pieux de cœur et obtient une tranquillité durable. (Tu peux) affirmer, ô fils de Kuntî! que mon dévot n’est jamais ruiné. Car, ô fils de Prithâ! même ceux qui sont de naissance pécheresse [28], les femmes, les Vasyas; et de même les Sûdras, recourant à moi, atteignent le but suprême. Que faut-il donc dire des saints Brâhmanes et des saints royaux qui sont (mes) dévots ? En venant dans ce monde passager et malheureux 1, adorez-moi. (Placez votre) esprit sur moi, devenez mon dévot, mon adorateur ; révérez-moi, et ainsi faisant de moi votre but le plus élevé, et vous consacrant à l’abstraction, vous viendrez certainement à moi.
81:4 Tout ce qui est énoncé dans ce chapitre. ↩︎
82:1 C’est-à-dire par une conscience immédiate, non médiatement ; « non opposé à la loi sacrée », c’est-à-dire comme le sacrifice de Syena pour détruire un ennemi. ↩︎
82:2 Parce qu’il est pur de toute souillure. Et donc les entités ne vivent pas en lui, comme indiqué dans la phrase suivante. Voir p. 80 supra. ↩︎
82:3 Comme l’espace n’est ni souillé ni affecté par l’air qui y demeure, ainsi je le suis par les entités. ↩︎
82:6 Je ne suis pas affecté par les différences dans les conditions de ces entités. ↩︎
82:7 À savoir la supervision. ↩︎
83:1 Espérer, c’est-à-dire qu’une autre divinité leur donnera ce dont ils ont besoin ; actes, vains car non offerts au suprême ; connaissance, vaine car abondante en doutes insensés, etc. ↩︎
83:3 Pour une connaissance du suprême, ou pour les moyens d’une telle connaissance. ↩︎
83:4 Vœux = véracité, innocuité, etc. ↩︎
83:5 Sacrifice de la connaissance, à savoir la connaissance que Vâsudeva est tout ; comme un = croire que tout est un ; comme distinct = croire que le soleil, la lune, etc. sont des manifestations différentes de « moi ». ↩︎
83:6 Kratu est un sacrifice védique ; Yaga, un sacrifice prévu dans les Smritis. Svadhâ = offrande aux mânes ; ‘produit des herbes’ = nourriture préparée à partir de légumes, ou médicament. ↩︎
84:1 C’est-à-dire le siège de la jouissance ; réceptacle = où les choses sont conservées pour une utilisation future, disent les commentateurs. ↩︎
84:2 Les éléments grossiers et subtils, ou causes et effets. ↩︎
84 : 3 Cf. Mundakopanishad, p. 279 ; et Khândogya, p. 344. ↩︎
84:4 Cf. Dhammapada, strophe 23. C’est-à-dire l’atteinte du Brahman et le fait de ne pas en revenir. — Râmânuga. ↩︎
84:5 Parce que dans la forme ils adorent d’autres divinités. ↩︎
84 : 6 Donateur du fruit. Quant au jouisseur, cf. p. 67 supra. ↩︎
84:7 C’est-à-dire retourner au monde des mortels. ↩︎
84:8 C’est-à-dire une certaine réglementation quant au mode de culte. Cf. aussi p. 76 supra. ↩︎
85:2 Ce mode d’action est à la fois dévotion et renoncement : le premier, parce qu’on ne se soucie pas du fruit ; le second, parce qu’il est offert au suprême. ↩︎
85:3 « Ils demeurent en moi » par leur dévotion envers moi ; je demeure en eux comme celui qui leur donne du bonheur. ↩︎
85:4 À savoir que seul l’Être suprême doit être vénéré. ↩︎