[ p. 151 ]
[ p. 152 ]
[ p. 153 ]
La plupart des questions relatives au Grihya-sûtra d’Ârivalâyana seront traitées plus commodément en rapport avec les différents sujets que nous aurons à aborder dans notre Introduction générale aux Grihya-sûtras. Je souhaite simplement attirer l’attention ici sur un passage bien connu de Sharigururiishya, dans lequel ce commentateur donne quelques explications sur les œuvres composées par Ârivalâyana et par son maître Saunaka. Comme un point important de ce passage a été, autant que je puisse le voir, mal compris par plusieurs éminents érudits, je me permettrai peut-être ici d’essayer de corriger ce malentendu, bien que ce point soit en rapport moins direct avec le Grihya-sûtra qu’avec un autre aspect de l’activité littéraire d’Ârivalâyana.
Shadguru dishya [^348], avant de parler de l’Âdvalâyana, fait les déclarations suivantes à propos du maître de l’Âdvalâyana, Saunaka. « Il y avait, dit-il, le Sâkala Sadhitâ (du Rig-veda) et le Bâshkala Sadhitâ ; après ces deux Sadhitâ et les vingt et un Brâhmad, adoptant principalement l’Aitareyaka et le complétant par les autres textes, celui qui était vénéré par tous les grands Rishis composa le premier Kalpa-sûtra. » Il continue ensuite à parler de Âdvalâyana — ‘_Sds_valâyana. Lui qui savait tout ce qu’il avait appris de ce maître, composa un Sûtra et annonça (à Saunaka qu’il l’avait fait) [1].’ Saunaka détruisit alors son propre Sûtra, et [ p. 154 ] décida que le Sûtra de Âdvalâyana devait être adopté par les étudiants de ce Sâkhâ védique. Ainsi, dit Shadgurudishya, il y avait douze ouvrages de Saunaka par lesquels une connaissance correcte du Rig-veda était préservée, et trois ouvrages d’Âdvalâyana. Les Sdsa granthâs étaient les cinq Anukramadîs, les deux Vidbânas, le Bârhaddaivata, le Prâtidâkhya et un ouvrage de Smârta [2]. Âdvalâyana, d’autre part, a composé le Srauta-sûtra en douze Adhyâyas, le Gdhya en quatre Adhyâyas et le quatrième Âradyaka : c’est la grande composition de Sûtra d’Âdvalâyana [3].
Nous avons ici une déclaration intéressante et importante par laquelle la paternité d’une partie de l’Aitareyâranyaka, qui serait ainsi séparée du reste de ce texte, est attribuée, non pas à Mahidâsa Aitareya, mais à un auteur de ce que l’on peut appeler la période historique de l’antiquité védique, à Ânvalâyana.
Mais quel est le quatrième Âranyaka auquel ce passage fait référence ? S’agit-il du texte qui est maintenant consigné, par exemple, dans l’édition du Dr Rânendralâla Mitra, comme le quatrième Âranyaka des Aitareyinas ?
Avant de donner une réponse à cette question, il faut attirer l’attention sur d’autres passages se référant, semble-t-il, à une autre partie, à savoir la cinquième partie de l’Âranyaka.
Sâyana, dans son grand commentaire sur le Rig-veda, cite très fréquemment le pandamâranyaka comme appartenant à Saunaka. Ainsi, dans le vol. i, p. 112, éd. Max Müller, il dit : pandamâranyaka aushnihatndânîtir iti khande Snmnrinnnm rayim iti dve iti. Il y a en effet dans le cinquième Âranyaka un chapitre commençant par les mots aushnihi tndânîti_h_, dans lequel apparaissent les mots cités par Sâyana [4]. Des citations similaires, dans [ p. 155 ] où le cinquième Âranyaka est attribué à Saunaka, se trouvent dans le commentaire de Sâyana sur l’Âranyaka lui-même ; voir, par exemple, p. 97, ligne 19, p. 116, ligne 3.
Il semble donc que la paternité des quatrième et cinquième Âranyaka ait été attribuée à des maîtres appartenant à la période des Sûtras de la littérature védique, à savoir respectivement à Sns_valâyana. C’est ce que déclarent le professeur Weber dans ses « Vorlesungen über indische Literaturgeschichte » [5], et le Dr Rânendralâla Mitra dans l’introduction de son édition de l’Aitareya Âranyaka [6].
Mais il faut se demander : les deux livres du recueil Âranyaka, attribués à ces deux auteurs, sont-ils réellement deux livres différents ? Il est surprenant que Shangurunishya, tout en parlant de la paternité du quatrième livre par Ânvalâyana, et tout en ayant l’intention, comme il le fait évidemment, de donner une liste complète des compositions de Saunaka, ne mentionne pas le cinquième Âranyaka parmi les œuvres de cet auteur. Pour expliquer cette omission, on pourrait supposer que Shangurunishya, en parlant du quatrième Âranyaka comme appartenant à l’Ânvalâyana, entend le même ouvrage que Sâyana présente comme le cinquième et qu’il attribue à Saunaka. À première vue, cette conjecture peut paraître plutôt hasardeuse ou contre nature ; cependant, je crois que, si nous comparons les deux textes eux-mêmes qui sont concernés, nous la trouverons très probable et même évidente. Que contiennent ces deux livres Âranyaka ? Le quatrième est très court : il ne remplit pas plus d’une page dans l’édition imprimée. Français Son contenu consiste exclusivement en le texte des versets Mahânâmnî ou Sakvarî, qui semblent appartenir à une antiquité non moins lointaine [ p. 156 ] que la moyenne des hymnes du Rig-veda. Ils peuvent en effet être considérés comme faisant partie du Rig-veda Sanhitâ, et c’est seulement en raison de la sainteté mystique particulière attribuée à ces versets, qu’ils n’ont pas été étudiés au village mais dans la forêt [7], et ont par conséquent été reçus non pas dans le corps du Sanhitâ lui-même, mais dans l’Âranyaka. Ils sont mentionnés dans tous les textes Brâhmana, et peut-être pouvons-nous même aller jusqu’à exprimer notre opinion selon laquelle certains passages des hymnes du Rig-veda eux-mêmes font allusion aux versets Sakvarî :
ya_k kh ri n s_ushmam adadhâtâ Vasish âh (Rig-veda VII, 33, 4).
_rikâmkâhkâmkâs_akvarîshu (Rig-veda X, 71, 11).
Voilà pour le quatrième Âranyaka. Le cinquième contient une description de la cérémonie du Mahâvrata. Le premier livre est également consacré au même sujet, à la différence que le premier livre est composé dans le style Brâhmana, le cinquième dans le style Sûtra [8].
Or, lequel de ces deux livres Shadgurudishya considère-t-il comme appartenant à l’Âdvalâyanasûtraka ? Il est impossible que ce soit le quatrième, car les versets Mahânâmnî n’ont jamais été considérés par les théologiens indiens comme l’œuvre d’un auteur humain ; ils participaient de l’apaurusheyatva du Véda, et dire qu’ils ont été composés par l’Âdvalâyana serait incompatible avec les principes les plus fermement établis de l’histoire littéraire du Véda, telle que conçue par les Indiens et par nous-mêmes. Et même si nous admettions que les versets Mahânâmnî aient pu être attribués, par un auteur comme Shadgurudishya, à l’Âdvalâyana, — et nous ne pouvons l’admettre [ p. 157 ] — il n’y a aucune possibilité qu’il ait utilisé l’expression « Âdvalâyanasûtrakam » à l’égard des Mahânâmnîs ; appliquer la désignation de Sûtra à l’hymne Mahânâmnî ne serait pas moins absurde que de l’appliquer à n’importe quel Sûkta du Ri_k-Sadhitâ. D’autre part, le cinquième livre de l’Âradyaka est un Sûtra ; C’est la seule partie de l’ensemble du recueil des Âradyaka qui soit composée dans le style des Sûtras. Elle traite d’une partie particulière du rituel du Rig-Véda, dont le reste est intégralement incorporé, à l’exception de cette partie, dans les deux grands Sûtras de l’Âdvalâyana. Il me semble donc qu’il n’y a guère de doute quant à savoir si le cinquième Âradyaka est réellement le texte auquel fait référence Shadgurudishya, bien que je ne sache pas comment expliquer qu’il ait classé ce livre comme le quatrième. Et je peux ajouter qu’il y a un passage, jusqu’ici, autant que je sache, passé inaperçu, dans le commentaire du Sâma-veda de Sâyada, dans lequel cet auteur attribue directement le cinquième Âradyaka non pas, comme dans le commentaire du Rig-veda, à Saunaka, mais à Âdvalâyana. Sâyada dit ici [9] : yathâ bahvdkâm adhyâpakâ mahâvrataprayogapratipâdakam Âdvalâyananirmita_mdndhdñdamam âradyakam iti vedatvena vyavaharanti.
Français Au lieu d’affirmer donc que des deux derniers Âranyakas des Aitareyinas l’un est attribué à Saunaka, l’autre à Ânvalâyana, nous devons énoncer les choses autrement : non pas deux Âranyakas furent, selon Sâyana et Shangurunishya, composés par ces Sûtrakâras, mais un seul, à savoir le cinquième, qui forme une sorte de supplément au grand corps des Sûtras de ce _Knn_a, et qui est attribué soit à _Sns_valâyana. Peut-être que des recherches plus poussées nous permettront de décider si cette partie Sûtra de l’Âranyaka, ou nous pouvons tout aussi bien dire, cette partie Âranyaka du Sûtra, appartient à l’auteur du Srauta-sûtra, ou doit être considérée comme un vestige d’une composition plus ancienne, dont la partie étudiée dans la forêt a survécu, tandis que la partie [ p. 158 ] qui était enseignée au village a été remplacée par le plus récent Ânvalâyana-sûtra.
Il y aurait encore de nombreuses questions qu’une Introduction à l’Âvalâyana et au valâyana devrait traiter ; ainsi, la relation entre l’Âvalâyana et le valâyana et le Saunaka, que nous avions l’intention de traiter ici en référence à un point particulier, devrait être discutée plus en détail quant à plusieurs autres de ses incidences, et les conséquences qui en découlent quant à la position de l’Âvalâyana et du valâyana dans l’histoire de la littérature védique devraient être exposées. Mais nous préférons réserver la discussion de ces questions à l’Introduction générale au Gvalâyana et aux hya-sûtras.
153 : 1 Voir History of Ancient Sanskrit Literature de Max Müller, pp. 230 suiv.; Indische Studien, I, 102. ↩︎
153:2 Ceci me semble être le sens de sûtra_mkri_tvâ nyavedayat ; p. 154 le cas est semblable à celui où un élève fait sa tournée pour demander l’aumône et annonce (nivedayati) à son maître ce qu’il a reçu. Le professeur Max Müller traduit ces mots différemment ; selon lui, ils signifient que Âkvalâyana « a fait un Sûtra et l’a enseigné ». ↩︎
154:1 Comp. Article du Prof. Bühler dans le Journal As. Soc. du Bengale, 1866, pp. 149 seqq. ↩︎
154:2 Dvâdasâdhyâyaka_msmsksmsrisksksnsmskss_valâyanasûtrakam. ↩︎
154:3 Voir p. 448 de l’édition du Dr Râgendralâla Mitra dans la Bibliotheca Indica. ↩︎
155 : 1 2e édition, p. 53 : Obwohl wir für das vierte Buch des letztern (ie of the Aitareya Âranyaka) sogar die direct Nachricht haben, dass es dem Ânvalâyana, dem Schüler eines Saunaka angehört, so wie auch ferner für das fünfte Buch desselben Ceser Saunaka lui-même et Urheber gegolten zu haben scheint, nach dem was Colebrooke Misc. Ess. Moi, 47 n. darüber berichtet. ↩︎
155:2 P. 11: Si cette hypothèse est admise, la conclusion appropriée à laquelle on pourrait arriver serait également que la totalité du cinquième Livre appartient à Saunaka, et la totalité du quatrième Livre à Âvalâyana et valâyana. P. 12: Les écrits de Âvalâyana et valâyana et de Svalâyana et n_yaka, etc. ↩︎
156:1 Voir Sâṅkhâyana-Grihya II, 12, 13. ↩︎
156:2 Ainsi Sâyana, dans sa note sur V, 1, 1, dit : Nanu prathamâranyakeऽpi atha mahâvratam Indro vai Vntra_mnh_, pandameऽpi tasyaivâbhidhâne punaruktih syât. nâya_mnh_, sûtrabrâhmanarûpena tayor vibhedât. pandamâranyakam rinmnm, prathamâranyakan tv apaurusheya_mnnnm_. ata eva tatrârthavâdaprapandena sahitâ vidhaya_hns_rûyante, pandame tu na ko py arthavâdoऽsti . . . . aranya evaitad adhyeyam ity abhipretyâdhyetâra âranyakandeऽntarbhâvyâdhîyate. ↩︎