Sur les questions de S’aunaka et d’autres [ p. 1 ] 1. Je médite sur la Brahmâvidyâ sans commencement qui est Sarvachaitanyarûpâ, de la nature de toute conscience ; Puisse-t-elle stimuler notre buddhi à la réalisation de Cela (ou qui stimule notre buddhi dans différentes directions).
2. S’aunaka dit : « Ô Sûta très fortuné ! Ô noble Sûta ! Tu es la meilleure des personnes ; tu es béni dans la mesure où tu as étudié à fond tous les Purânas de bon augure.
3. Ô toi qui es sans péché ! tu as parcouru les dix-huit Purânas composés par Krisna Dvaipâyana ; ceux-ci sont dotés de cinq excellentes caractéristiques et pleins de significations ésotériques.
Note :— Les caractéristiques sont de faire en sorte que les mantras se révèlent à soi-même, de réaliser, de transférer aux autres la S’akti, la force de ceux-ci, de prouver les diverses manifestations de leurs différents effets, etc.
4-5. Ô toi sans péché ! Ce n’est pas que tu les aies déchiffrés comme un perroquet, mais tu en as parfaitement saisi le sens tel que tu l’as appris de Vyâsa lui-même, le fils de Satyavati. C’est maintenant notre mérite que tu sois arrivé en ce divin, saint et excellent Vis’vasan Ksettra (lieu), exempt de toute tare de l’âge de Kali.
6-10. Ô Sûta ! Ces Munis ici rassemblés désirent entendre le saint Purâna Samhitâ, qui confère des mérites religieux. Décrivez-nous donc cela avec votre esprit concentré. Ô Sûta omniscient ! Vivez longtemps et soyez libéré des trois peines de l’existence. Ô très fortuné ! Racontez-nous le Purâna équivalent aux Védas. Ô Sûta ! Ceux qui n’entendent pas les Purânas sont certainement privés par le Créateur, bien qu’ils aient apparemment l’organe de l’ouïe, du pouvoir de goûter la douce essence des mots ; car l’organe de l’ouïe est satisfait alors et alors seulement lorsqu’il entend les paroles des sages, tout comme l’organe du goût est satisfait alors et alors seulement lorsqu’il goûte les six sortes de rasas (saveur, goût) (sucré, acide, piquant, amer, salé et astringent). Ceci est connu de tous. Les serpents dépourvus de l’organe de l’ouïe sont enchantés par la douce musique ; Alors pourquoi les personnes qui ont des organes de l’ouïe et qui sont réticentes à entendre les Purânas ne seraient-elles pas classées dans la catégorie des sourds ? [ p. 2 ] 11-18. Ô Saumya ! C’est pourquoi tous ces brahmanes, affligés par la peur de cette Kali, sont venus ici, à ce Naimisâranya, désireux d’entendre attentivement les Purânas, et ils restent ici dans ce seul but. Il faut passer le temps d’une manière ou d’une autre ; les fous passent leur temps à s’amuser et à pratiquer d’autres mauvaises pratiques, et les érudits passent leur temps à méditer sur les S’âstras ; mais ces S’âstras sont trop vastes et très variés ; Français ils contiennent des Jalpas (débats ou discussions querelleuses pour gagner la partie adverse), des Vadas (doctrines saines pour arriver à des conclusions justes), et divers Arthavâdas (explications et assertions, recommandant des Vidhis ou préceptes en énonçant le bien découlant de sa bonne observance et les maux découlant de son omission et en citant également des exemples historiques à l’appui ; louanges et éloges) et remplis de nombreuses argumentations. Et, parmi ces S’âstras encore, le Vedânta est le Sâttvik, les Mimâmsas sont les Râjasik et les Nyâya S’âstras avec Hetuvâdas, sont les Tâmasik ; ainsi les S’âstras sont variés. De même, les Purânas sont de trois sortes : (1) S’attvik, (2) Râjasik et (3) Tâmasik. Ô Saumya ! (celui d’apparence douce) tu as récité ces Purânas dotés de cinq caractéristiques et pleins de nombreux récits ; Parmi ceux-ci, le cinquième Purâna, équivalent aux Védas et doté de toutes ses vertus, le Bhâgavata, qui dispense le Dharma et le Kâma (religion et désirs), donne la libération à ceux qui aspirent à l’émancipation et est très merveilleux ; vous l’avez mentionné auparavant, mais d’ordinaire ; vous ne vous y êtes pas attardé spécialement. Or, ces Brâhmanas sont impatients d’entendre avec joie ce Bhâgavata divin et propice, le meilleur des Purânas ; veuillez donc le décrire en détail.
19-25. Ô connaisseur du Dharma ! Par ta foi et ta dévotion envers ton Guru, tu es devenu Sâttvik et as ainsi parfaitement connu les Purâna Samhitâs prononcés par Veda Vyâs. Ô Omniscient ! C’est pourquoi nous avons entendu de nombreux Purânas de ta bouche ; mais nous ne sommes pas satisfaits comme les Devas ne le sont pas de boire le nectar. Ô Sûta ! Fi du nectar, tout comme boire du nectar est totalement inutile pour donner Mukti. Mais entendre le Bhâgavata donne instantanément Mukti de ce Samsâra, ou cycle des naissances et des morts. Ô Sûta ! nous avons accompli des milliers et des milliers de Yajñas pour boire le nectar (Amrita), mais jamais nous n’avons atteint la paix totale. La raison en est que les Yajñas ne mènent qu’au ciel ; à l’expiration de la période de punya (bons mérites), la vie céleste cesse et l’on est expulsé, pour ainsi dire, des Cieux. Ainsi, les séjours incessants dans cette roue du Samsâra, les cycles constants des naissances et des morts ne finissent jamais. Ô Connaisseur de toute chose ! Ainsi, sans Jñâna (connaissance, sagesse) Mukti ne vient jamais aux hommes, errant dans cette roue du Temps (Kâlachakra) composée [ p. 3 ] des trois Gunas. Ainsi décris ce saint Bhâgavata, toujours aimé des Mumuksas (ceux qui désirent Mukti), cette œuvre secrète donnant la libération, sainte et pleine de tous les sentiments (rasas).
Ainsi se termine le premier chapitre du premier Skandha sur le questionnement sur le Purâna par Saunaka et d’autres Rishis dans le Mahâpurâna S’rîmad Devî Bhâgavatam de 18 000 versets du Maharsi Veda Vyâsa.
Ici se termine le premier chapitre du premier Skandha du S’rîmad Devi Bhâgavatam sur les questions de S’aunaka et d’autres Risis.
Sur les questions posées par S’aunaka et d’autres Rsis [ p. 3 ] 1-5. S’rî Sûta dit : « Je suis très chanceux ; je me considère béni et je suis purifié par les Mahâtmâs (personnes à l’âme élevée) ; dans la mesure où ils m’interrogent sur le très méritoire Purâna, célèbre dans les Védas. Je vais maintenant parler en détail de ce Purâna, le meilleur des Âgamas, approuvé par tous les Védas et le secret de tous les S’âstras.
Ô Brahmanes ! Je m’incline devant les doux pieds pareils-au-lotus, connus dans les trois Lokas, de la Devî Bhagavatî, loués par Brahmâ et les autres devas Visnu, Mahes’a et d’autres, toujours médités par les Munindras et que les yogis contemplent comme leur source de libération. Aujourd’hui, je vais décrire avec dévotion, en détail et en langage clair, ce Purâna qui est le meilleur de tous les Purânas, qui apporte la prospérité et contient tous les sentiments (Rasas) qu’un être humain puisse concevoir, le S’rimad Devî Bhâgavatam.
Que cette S’akti primordiale la plus élevée, connue sous le nom de Vidyâ dans les Védas, qui est omnisciente, qui contrôle l’intime de tout et qui est habile à trancher le nœud du monde, qui ne peut être réalisée par les méchants et les vicieux, mais qui est visible aux Munis dans leur méditation, que Bhagavatî Devî me donne toujours la buddhi digne de décrire le Purâna !
Je me souviens de la Mère de tous les mondes qui crée cet univers, dont la nature est à la fois réelle (d’un point de vue grossier et pratique) et irréelle (d’un point de vue réel), préserve et détruit par Ses qualités Râjasik, Sâttvik et Tâmasik et à la fin résout tout cela en Elle-même et joue seule dans la période de Dissolution - à ce moment-là, je me souviens de cette Mère de tous les mondes.
6-10. Il est communément admis que Brahmâ est le créateur de cet univers ; et les connaisseurs des Védas et des Purânas le disent ; mais ils disent aussi que Brahmâ est né du lotus ombilical de Visnu. Il apparaît donc que Brahmâ ne peut créer indépendamment. Visnu, du lotus ombilical duquel Brahmâ est né, repose en sommeil yogique sur le lit d’Ananta (le serpent aux mille têtes) au temps de Pralaya ; alors comment pouvons-nous appeler Bhagavân Visnu, qui repose sur le serpent aux mille têtes Ananta, le créateur de l’univers ? Le refuge d’Ananta est l’eau de l’océan Ekârnava ; un liquide ne peut reposer sans récipient ; aussi je prends refuge auprès de la Mère de tous les êtres, qui réside en tant que S’akti de tous et est ainsi le soutien de tous ; Je cherche refuge auprès de cette Devî qui fut louée par Brahmâ alors qu’elle reposait sur le lotus du nombril de Visnu, profondément endormi en Yoga nidrâ. Ô Munis ! méditant sur cette Maya Devî qui crée, préserve et détruit l’univers, connue pour être composée des trois gunas et qui accorde la mukti, je décris maintenant l’ensemble du
Purânas ; maintenant vous feriez mieux d’écouter.
11-16. Le Purâna S’rimad Bhâgavat (Devî Bhâgavat) est excellent et saint ; il contient dix-huit mille S’lokas purs. Bhagavân Krisna Dvaipâyan a divisé ce Purâna en douze Skandhas (Livres) propices et trois cent dix-huit chapitres. Vingt chapitres composent le premier Skandha ; douze chapitres le deuxième Skandha ; trente chapitres le troisième Skandha ; vingt-cinq chapitres le quatrième Skandha ; trente-cinq chapitres le cinquième ; trente et un chapitre le sixième ; quarante chapitres le septième ; vingt-quatre chapitres le huitième ; cinquante chapitres le neuvième ; treize chapitres le dixième ; vingt-quatre chapitres le onzième et quatorze chapitres sont contenus dans le douzième Skandha, ô Munis ! Ainsi, le Dvaipâyan Muni a disposé ses chapitres dans chaque Skandha.
17-20. Ainsi, le Mahâtmâ Veda Vyâs a divisé ce Bhâgavata Purâna en autant de Skandhas et de chapitres ; et il a déjà été précisé que le nombre de versets est de dix-huit mille. On appelle Purâna ce qui contient les cinq caractéristiques suivantes : (1) la création de l’univers ; (2) la création secondaire ; (3) les dynasties ; (4) les Manvantaras ; et (5) la description de Manus et des autres rois.
S’iva est au-delà des attributs prâkritiques, éternelle et toujours omniprésente ; Elle est sans aucun changement, immuable, inaccessible sinon par le yoga ; Elle est le refuge de l’univers et Sa nature est Turîya Chaitanya. Mahâ Lakshmi est Sa Sattvikî S’akti ; Sarasvati est Sa Râjasik S’akti et Mahâ Kâlî est Sa Tâmasik S’akti ; ce sont toutes des formes féminines.
21-25. L’incarnation de ces trois S’aktis pour la création de cet univers est appelée « Sarga » (création) par le personnage à l’âme élevée (Mahârpurusa), expert en S’astras. Et la résolution ultérieure de ces trois S’aktis en Brahmâ, Visnu et Mahes’a pour la création, la préservation et la destruction de cet univers est appelée (dans ce Purâna) Pratisarga (création secondaire). La description des rois des dynasties solaires et lunaires et des familles d’Hiranya Kasipu et d’autres est connue sous le nom de description des lignées royales et de leurs dynasties. La description de Svâyambhûva et des autres Manus [ p. 5 ] et de leurs périodes de règne est connue sous le nom de Manvantaras. Et la description de leurs descendants est connue sous le nom de description de leurs familles. (Voilà donc les cinq caractéristiques des Purânas.) Ô meilleur des Munis ! tous les Purânas sont dotés de ces cinq caractéristiques.
26-32. Ainsi est le Mahâbhârata écrit par Vedavyâsa, caractérisé par ces cinq choses. Ceci est connu comme le cinquième Véda et Itihâsa (histoire). On y trouve plus d’un lakh de slokas. S’aunaka dit : « Ô Sûta ! Que sont ces Purânas et combien de versets contiennent chacun ? Dis-les tous en détail dans ce saint Ksettra ; nous, les habitants de Naimisâranya, sommes tous très impatients d’entendre cela. » (Pourquoi nous nous appelons les résidents de Naimisâranya, écoutez ; vous réaliserez alors qu’il n’existe aucun autre endroit dans cet âge de Kali pour entendre les discours sacrés sur la religion) :— Quand nous avions peur de l’âge de Kali, Brahmâ nous a donné un Manomaya Chakra (roue) et j’ai dit à nous tous :— Suivez cette roue, allez après elle et l’endroit où le fouet de la roue deviendra mince (au point de se briser) et ne roulera plus, ce pays est le lieu saint ; Kali ne pourra jamais y entrer ; vous feriez mieux d’y rester tous jusqu’au retour de l’âge de Satya. Ainsi, selon la parole de Brahmâ, nous avons reçu l’ordre de rester ici. En entendant les paroles de Brahmâ, nous sommes partis rapidement en faisant tourner la roue, notre objectif étant de déterminer quel endroit est le meilleur et le plus saint. Quand nous sommes arrivés ici, le fouet de la roue est devenu mince et tondu sous mes yeux ; c’est pourquoi ce Ksettra est appelé Naimis ; c’est l’endroit le plus sanctifiant.
Kali ne peut entrer ici ; c’est pourquoi les Mahatmas, les Munis et les Siddhas, terrifiés par l’âge de Kali, m’ont suivi et se sont rendus en ce lieu. Nous avons accompli des yajñas avec du Purodâsa (beurre clarifié offert en offrande au feu), sans sacrifice d’animaux ; nous n’avons plus d’autre tâche importante à accomplir que de passer notre temps ici jusqu’à l’arrivée de Satyayuga. Ô S’ûta ! Nous sommes extrêmement heureux à tous égards que tu sois venu ici ; purifie-nous aujourd’hui en nous racontant les noms des Purânas équivalents aux Védas. Ô S’ûta ! Tu es aussi un orateur érudit ; nous aussi sommes d’ardents auditeurs, sans autre travail qui nous préoccupe ; raconte-nous aujourd’hui le saint et propice Bhâgavata Purâna. Ô S’ûta ! Longue vie à toi ; et qu’aucun mal, intérieur, extérieur ou venant des Dévas, ne te tourmente. (Voici notre bénédiction pour toi). Nous avons entendu dire que dans le Purâna le plus sanctifiant, raconté par Maharsi Dvaipâyan, tout est dûment décrit concernant le Dharma (religion), l’Artha (richesse) et le Kama (désirs), ainsi que l’acquisition du Tattvajñan et la libération. Ô S’ûta ! Plus nous entendons ces belles paroles sacrées, plus nos désirs ne sont satisfaits. Décris-nous maintenant la très pure S’rîmad Devî.
[ p. 6 ]
Bhâgavatam où tous les Lilas (les actes dramatiques) de la Mère des trois mondes purifiant les péchés, ornés de toutes les qualifications sont décrits comme donnant tous les désirs comme le Kalpa Vriksa (l’arbre céleste donnant tous les désirs).
Ainsi se termine le deuxième chapitre du premier Skandha sur la description du Purâna (le texte) dans le Mahâ Purâna S’rîmad Devî Bhâgavatam de 18 000 versets du Maharsi Veda Vyâs.
Ainsi se termine le deuxième chapitre du S’rîmad Devî Bhâgavatam sur les questions posées par Saunaka et d’autres Risis.
Sur la louange des Purânas et sur chaque Vyâsa de chaque Dvâpara Yuga [ p. 6 ] 1-11. Sûta dit : « Ô meilleur des Munis ! Je te dis maintenant les noms des Purânas, etc., exactement comme je l’ai entendu de Veda Vyâsa, le fils de Satyavati ; écoute.
Français Les Purâna commençant par « ma » sont au nombre de deux ; ceux commençant par « bha » sont au nombre de deux ; ceux commençant par « bra » sont au nombre de trois ; ceux commençant par « va » sont au nombre de quatre ; ceux commençant respectivement par « A », « na », « pa », « Ling », « ga », « kû » et « Ska » sont au nombre de un chacun et « ma » signifie Matsya Purâna, Mârkandeya Purâna ; « Bha » signifie Bhavisya, Bhâgavat Purânas ; « Bra » signifie Brahmâ, Brahmânda et Brahmâvaivarta Purânas ; « va » signifie Vâman, Vayu, Visnu et Varaha Purânas ; « A » signifie Agni Purâna ; « Na » signifie Narada Purâna ; « Pa » signifie Padma Purâna ; « Ling » signifie Linga Purânam ; « Ga » signifie Govinda Purânam ; Kû signifie Kurma Purâna et « Ska » signifie Skanda Purânam. Ce sont les dix-huit Purânas. Ô Saunaka ! Dans le Matsya Purâna, il y a quatorze mille slokas ; dans le merveilleusement varié Markandeya Purânam, il y en a neuf mille. Dans le Bhavisya Purâna, quatorze mille cinq cents slokas sont comptés par les Munis, les voyants de la vérité. Dans le saint Bhâgavata, il y a dix-huit mille S’lokas ; dans le Brahmâ Purâna, il y a dix-mille Ajuta S’lokas. Dans le Brahmânda Purâna, il y a douze mille cent S’lokas ; dans le Brahmâ Vaivarta Purânam, il y a dix-huit mille S’lokas. Dans le Vaman Purâna, il y a dix mille Ajuta S’lokas ; dans le Vayu Purânam, il y a vingt-quatre mille six cents S’lokas ; Français dans le très merveilleux Visnu Purâna il y a vingt-trois mille S’lokas ; dans l’Agni Purânam il y en a seize mille ; dans le Brihat Narada Purânam il y en a vingt-cinq mille ; dans le grand Padma Purâna il y en a cinquante-cinq mille ; dans le volumineux Linga Purâna il y en a onze mille ; dans le Garuda Purânam prononcé par Hari il y en a dix-neuf mille ; dans le Kurma Purâna il y en a dix-sept mille ; et dans le très merveilleux Skanda Purâna il y en a quatre-vingt-un mille, ô Risis sans péché ! Ainsi je vous ai décrit [ p. 7 ] les noms de tous les Purânas et le nombre de versets qu’ils contiennent. Maintenant, écoutez ce qui concerne les Upa Purânas.
12-17. Le premier est l’Upapurâna raconté par Sanat Kumâra ; vient ensuite Narasimha Purâna ; puis Naradiya Purâna, S’iva Purâna, Purâna raconté par Durvasa, Kapila Purâna, Manava Purâna, Aus’anasa Purâna, Varuna Purâna. Kalika Purâna, Samva Purâna, Nandi Kes’wara Purâna, Saura Purâna, Purâna parlé par Parâs’ara, Âditya Purâna, Mahesvara Purâna, Bhâgavata et Vasistha Purâna. Ces Upa Purânas sont décrites par les Mahatmas.
Après avoir compilé les dix-huit Purânas, Veda Vyâsa, le fils de Satyavati, a composé le Mahabharata, qui n’a pas de rival, à partir de ces Purânas.
18-24. À chaque Manvantara, dans chaque Dvâpara Yuga, Veda Vyâsa expose les Purânas comme il se doit pour préserver la religion. Veda Vyâsa n’est autre que Visnu lui-même ; lui, sous la forme de Veda Vyâsa, divise l’unique Véda en quatre parties, dans chaque Dvâpara Yuga, pour le bien du monde. Les Brahmânas de l’âge de Kali ont une vie courte et leur intellect (Buddhi) est faible ; ils ne peuvent en saisir le sens après avoir étudié les Védas ; sachant cela, dans chaque Dvâpara Yuga, Bhagavân expose les saints Purâna Samhitas. D’autant plus que les femmes, les S’udras et les Dvijas inférieurs ne sont pas autorisés à entendre les Védas ; pour leur bien, les Purânas ont été composés. Le Manvantara de bon augure actuel est Vaivasvata ; c’est le septième dans l’ordre ; et le fils de Satyavati, le meilleur des connaisseurs du Dharma, est le Veda Vyâsa du 28e Dvâpara Yuga de ce septième Manvantara. Il est mon Guru ; dans le prochain Dvâpara, Yuga Asvatthama, le fils de Drona sera le Veda Vyâsa. Vingt-sept Veda Vyâsas avaient expiré et chacun d’eux avait dûment compilé son propre Purâna Samhitas dans son propre Dvâpara Yuga.
25-35. Les Risis dirent : « Ô Sûta, très fortuné ! Veuillez nous décrire les noms des précédents Veda Vyâsas, les récitants des Purânas dans les Dvâpara Yugas.
Sûta dit : Dans le premier Dvâpara, Brahmâ Lui-même divisa les Védas ; dans le second Dvâpara, le premier Prajapati Vyâsa fit de même ; ainsi S’akra, dans le troisième, Brihaspati, dans le quatrième, Surya dans le cinquième ; Yama, dans le sixième, Indra, dans le septième, Vasistha, dans le huitième ; Sarasvata Risi dans le neuvième, Tridhama, dans le dixième ; Trivrisa, dans le onzième, Bharadvâja, dans le douzième ; Antariksa, dans le treizième ; Dharma, dans le quatorzième ; Evaruni dans le quinzième ; Dhananjaya, dans le seizième ; Medhatithi dans le dix-septième ; Vrati, dans le dix-huitième ; Atri, dans le dix-neuvième ; Gautama au vingtième, Uttama, dont l’âme était fixée sur Hari, au vingt et unième, Vâjasravâ Vena, au vingt-deuxième ; son descendant familial Soma [ p. 8 ] au vingt-troisième ; Trinavindu, au vingt-quatrième ; Bhârgava, au vingt-cinquième ; Sakti, au vingt-sixième, Jâtûkarnya au vingt-septième et Krisna Dvaipâyana devint le vingt-huitième Veda Vyâs dans les Dvâpara Yugas. Ainsi ai-je parlé des 28 Veda Vyâsas, comme je l’ai entendu. J’ai entendu le saint S’rimad Bhâgavat du mois de Krisna Dvaipayana. Ce traité dissipe tous les soucis, apaise tous les désirs et procure Moksa. Il est imprégné des significations des Védas. Il contient l’essence de tous les S’astras et est toujours cher aux Mamuksas (ceux qui aspirent à Moksa, ou libération).
36-43. Ô meilleurs Munis ! Ainsi, compilant les Purânas, Veda Vyâsa pensa que ce Purâna était le meilleur ; ainsi (sans l’enseigner à d’autres personnes), il décida que son propre fils, S’uka Deva, à l’âme noble, né des bois secs utilisés pour allumer le feu (excité par l’usure), et dénué de passion pour les choses de ce monde, serait l’élève idéal pour apprendre ce Purâna, et c’est pourquoi je le lui ai enseigné. À cette époque, j’étais condisciple de S’aka Deva et j’entendis tout de la bouche de Vyâsa Deva et j’en compris les significations secrètes. Cela est arrivé par la grâce du miséricordieux Guru Veda Vyâsa.
Ici se termine le troisième chapitre du S’rimad Devi Bhâgavatam sur la louange des Purânas et sur chaque Vyâsa de chaque Dvâpara Yuga.
Sur l’excellence du Devî
1-3. Les Risis dirent : Ô Saumya ! Comment S’uka Deva est-il né ? Qui a étudié ces Purâna Samhitâs ? De quelle épouse de Vyâsa Deva est-il né ? Et comment ? Ô toi, très intelligent ! Tu viens de dire que S’uka Deva n’est pas né du ventre maternel, de manière naturelle ; il est né de morceaux de bois secs destinés au sacrifice Homa. Mais nous avons entendu dire auparavant que le grand ascète était Yogi dès le sein maternel, aussi un grand doute nous vient-il à l’esprit. Tu ferais mieux de dissiper cela aujourd’hui ; comment il a également étudié ces Purânas, aussi vastes soient-ils ; dis-le.
4-5. Sûta dit : — Autrefois, Vedas Vyâs, le fils de Satyavati, alors qu’il se trouvait dans son ermitage sur les rives de la rivière Sarasvati, fut très étonné de voir un couple de Châtakas (moineaux). Il les vit becqueter leur petit, tout juste né de l’œuf, au corps magnifique, à la bouche rouge et au corps graisseux. Ils ne se soucient ni de leur faim ni de leur labeur ; tout ce qui les préoccupe, c’est de nourrir leur petit. Il dit aussi que le couple se frottait le corps et embrassait amoureusement la bouche du petit, ressentant le plus grand plaisir. Voyant cette merveilleuse affection des deux moineaux envers leur petit, Veda Vyâs devint très anxieux et pensa à ce qui suit. [ p. 9 ] 9-14. Oh ! Quoi d’étonnant, alors que les oiseaux ont tant d’affection filiale pour leur enfant, que les hommes, désireux de recevoir les services de leurs fils, leur témoignent leur affection ! Ce couple de moineaux ne célébrera pas l’heureux mariage de leur enfant et ne verra pas le visage de l’épouse de leur fils ; ni, lorsqu’ils seront vieux, que leur enfant devienne très religieux et les serve pour obtenir de grands mérites au Ciel. Ils ne s’attendent pas non plus à ce que leur enfant gagne de l’argent et les satisfasse, ni qu’il accomplisse dûment leurs obsèques à leur mort et les aide dans leur séjour dans l’autre monde ; rien de tout cela. L’enfant n’accomplira pas non plus la cérémonie du S’râdh à Gayâ ; il n’offrira pas non plus l’oblation d’un taureau bleu le jour du sacrifice à son ancêtre (le taureau est alors lâché et tenu pour sacré) ; et pourtant, ce couple de moineaux a tant d’affection pour son petit ! Oh ! en ce monde, toucher le corps d’un fils, et surtout le nourrir, est le plus grand bonheur de la vie.
15-27. L’après-naissance est sans perspective pour celui qui n’a pas de fils ; jamais, jamais, le Ciel ne lui appartiendra. Sans fils, nul autre ne peut l’aider dans l’autre monde. Ainsi, dans les Dharma S’âstras, Manu et d’autres Munis déclarent que l’homme qui a des fils va au Ciel, tandis que l’homme sans fils ne peut jamais y aller. L’homme qui a un fils a droit aux plaisirs célestes, ce qui est visible, et non imaginé. L’homme qui a un fils est libéré de ses péchés ; telle est la parole des Védas. L’homme sans fils est profondément angoissé, même au moment de la mort, et, allongé sur un lit par terre, il pense tristement : « Toutes mes immenses richesses, toutes ces choses, ma belle maison, qui jouira de tout cela ? »
Lorsque l’homme sans fils est ainsi perplexe et agité au moment de sa mort, il est certain que son avenir sera semé d’embûches ; sans un esprit calme et serein au moment de la mort, on ne peut atteindre un but juste. Ainsi, Veda Vyâs, le fils de Satyavati, soupira lourdement et perdit conscience. Il élabora divers plans et, finalement, parvenant à une conclusion définitive, se rendit au mont Sumeru pour accomplir Tapasyâ. Arrivé là, il se demanda quel Deva il adorerait ? Visnu, S’iva, Indra, Brahmâ, Surya, Ganes’a, Kârtikeya, Agni ou Varuna ? Qui lui accordera rapidement une faveur et comblera ainsi ses désirs ? Tandis qu’il réfléchissait ainsi, arriva par hasard au cours de son voyage, Muni Nârada, animé d’un même esprit et tenant un luth à la main. En voyant Nârada, Veda Vyâsa, le fils de Satyavati, lui fit un accueil chaleureux et joyeux, lui offrant Arghya et Âsan (siège) et s’enquit de son bien-être. Entendant cette question, Nârada Muni prit la parole : « Ô Dvaipâyan ! Pourquoi as-tu l’air si usé ! Dis-moi d’abord ceci. » [ p. 10 ] 28-30. Veda Vyâsa dit : « L’homme sans fils n’a pas de but ; par conséquent, il n’y a pas de bonheur dans mon esprit ; je suis toujours impatient d’avoir un fils et c’est pourquoi je suis très désolé. Aujourd’hui, mon esprit est profondément troublé par la seule idée de savoir quel Deva je peux satisfaire par ma tapasyâ, qui m’exaucera mes désirs ; maintenant je prends refuge auprès de toi. Ô Maharsi miséricordieux ! Tu es omniscient ; dis ceci rapidement ; quel Deva je prendrai pour refuge, qui m’accordera un fils".
31-37. Sûta dit : Ainsi interrogé par Krisna Dvaipâyan Veda Vyâsa, le noble Nârada Muni, bien versé dans les Védas, se réjouit et parla ainsi : Ô fils très fortuné de Parâs’arâ. La question que tu m’as posée aujourd’hui fut autrefois posée par mon père à Nârâyana. À ces mots, Nârâyana Vasudeva, le Deva des Devas, le Créateur, le Préservateur et le Destructeur de l’Univers, l’époux de Laksmî, aux quatre bras, vêtu d’un vêtement jaune, tenant une conque, un disque, une massue et portant la marque S’rîvatsa (une marque ou une boucle de cheveux sur le cœur de Visnu) ornant sa poitrine et décorée de Kaustuvagem, la Divinité elle-même, se fondit dans le grand Yoga ; à ces mots, mon Père fut grandement surpris et dit : « Ô Janârdana ! Tu es le Deva des Devas ; Seigneur du Présent, du Passé et du Futur, Seigneur de cet Univers ; pourquoi médites-tu en Yoga ? Et sur quoi médites-tu ? Ô meilleur des Dévas ! Tu es le Seigneur de l’Univers tout entier et pourtant, Tu es maintenant plongé dans une profonde méditation. Je suis profondément surpris (ma surprise n’est pas sans fondement ; Tu peux le constater toi-même). Quoi de plus merveilleux que cela ?
38-43. Ô Seigneur de Rama ! Je suis né du lotus de ton nombril et je suis devenu le Seigneur de tout cet univers. Qui donc, dans cet univers, te serait supérieur ? Dis-moi ceci. Ô Seigneur du monde ? Tu es l’Origine de tout, la Cause de toutes les causes, le Créateur, le Préservateur et le Destructeur, et l’Auteur capable de toute action. Ô Maharaja ! Par Ta volonté, je crée tout cet univers et Rudra détruit ce monde en temps voulu. Il est toujours sous Ton commandement. Ô Seigneur ! Par Ton commandement, le Soleil parcourt le ciel ; le vent souffle de diverses manières, favorables ou défavorables, le feu réchauffe et les nuages déversent la pluie. Je ne vois personne de supérieur à Toi dans les trois Lokas. Alors, qui médites-tu alors que son fils, très intelligent, S’uka Deva, t’interroge ? N’étant pas né de la manière habituelle du ventre maternel, Dvaipâyana exposa toutes les excellentes significations secrètes des Purâna et, par là même, je les connus. Ô saints ! Ainsi, S’uka Deva, sincèrement désireux de traverser cet océan sans fond et sans fin du S’amsara, goûta avec une grande impatience et un plaisir intense aux merveilleux traits du Véda, à l’arbre Kalpa, à ce S’rimad Bhâgavata et à ses nombreuses histoires et anecdotes. [ p. 11 ] 38-43. Oh ! Qui est là, en ce monde, qui ne soit libéré de cette terreur de Kali, après avoir entendu ce Bhâgavata. Même si le plus grand pécheur, dépourvu des voies justes et de l’Achara prescrites par les Védas, entend sous prétexte cet excellent Devî Bhâgavata, le chef des Purânas, il jouit de tous les grands plaisirs de ce monde et atteint finalement la place éternelle occupée par les Yogis. Celle qui est rare, dans son aspect Nirguna, même pour Hari et Hara, qui est très chère, en tant que Tattva Vidya, aux Jñanins dont la véritable nature ne peut être réalisée que dans le Samâdhi, réside toujours au plus profond du cœur de ceux qui écoutent le Bhâgavata Purâna. Celui qui, obtenant la naissance humaine pleinement qualifiée et recevant le récitant de ce Purâna, le bateau pour traverser, en quelque sorte, ce monde, n’entend pas ce Purâna bienheureux, est assurément privé par le Créateur. Comment se fait-il que les personnes obstinées et rebelles, ayant des oreilles vicieuses, puissent toujours entendre les fautes et les calomnies des autres, qui sont entièrement inutiles, et ne puissent pas entendre ce pur Purâna qui contient les quatre Vargas : Dharma, Artha, Kama et Mokhsa ?
C’est là mon principal doute. Ô Toi qui as fait de bons vœux ! Je suis Ton dévot ; sois miséricordieux envers moi et dis-moi ceci. Il n’y a presque rien de secret pour les Mahâpurusas ; c’est un fait bien connu.
44-50. Ainsi, entendant les paroles de Brahmâ, Bhagavan Nârâyana prit la parole : « Ô Brahmân ! Je t’exprime maintenant mon esprit ; écoute attentivement. Bien que les Dévas, les Dânavas, les hommes et tous les Lokas sachent que Tu es le Créateur, que Je suis le Préservateur et que Rudra est le Destructeur, il faut savoir que les saints, versés dans les Védas, sont arrivés à cette conclusion, par déduction des Védas, que la création, la préservation et la destruction sont accomplies par la force créatrice, la force conservatrice et la force destructive. La force créatrice rajasique résidant en toi, la force conservatrice sattvique résidant en moi, et la force destructive tamasique résidant en Rudra sont le tout en tout. Lorsque ces Saktis s’absentent, tu deviens inerte et incapable de créer, Moi de préserver et Rudra de détruire. »
Ô Suvrata intelligent ! Nous sommes tous constamment soumis à cette Force, directement ou indirectement ; écoutez des exemples que vous pouvez voir et déduire. Au moment de Pralaya, je m’allonge sur le lit d’Ananta, soumis à cette Force ; à nouveau, je m’éveille au temps de la création, dûment sous l’influence du Temps.
51-54. Je suis toujours soumis à cette Maha S’akti ; (sous son commandement) je suis engagé dans Tapasyâ pendant longtemps ; (par son commandement) je jouis parfois avec Lakshmî ; parfois je livre des batailles, terribles pour tous les Lokas, contre les Dânavas, impliquant de grands troubles physiques. Ô Connais le Dharma ! C’est en Ta présence que j’ai combattu au corps à corps pendant cinq mille ans sous Ta vue sur ce grand océan unique [ p. 12 ] dans les jours lointains avec les deux démons Madhu et Kaitabha, sortis de la cire de mon oreille, rendus fous par l’orgueil ; et par la grâce de la Devî, j’ai réussi à tuer les deux Dânavas.
55-61. Ô toi qui es si fortuné ! Tu as alors réalisé la grande Shakti, supérieure à la plus haute et cause de toutes les causes ; alors pourquoi me poses-tu sans cesse cette question ? Par la volonté de cette Shakti, j’ai acquis cette idée de l’homme et j’erre sur le vaste océan ; yuga après yuga, j’assume, par sa volonté, les incarnations de la Tortue, du Sanglier, de l’Homme-Lion et du Nain. Personne n’aime naître dans le ventre d’animaux inférieurs (surtout des oiseaux). Crois-tu que je prenne volontiers des naissances désagréables, comme dans le ventre d’un sanglier ou d’une tortue ? Certainement pas. Quel homme indépendant abandonne les plaisirs de Laksmi pour naître dans des animaux inférieurs comme des poissons, etc., ou quitte son siège sur le siège de Gaduda et s’engage dans de grands conflits guerriers ? Ô Svayambhu ! Dans les temps anciens, tu as vu devant tes yeux ma tête tranchée lorsque la corde de l’arc a soudainement cédé ; Et puis tu as apporté une tête de cheval et, grâce à elle, le divin artiste Visvakarma, l’a collée sur mon corps sans tête. Ô Brahmâ ! Depuis lors, je suis connu parmi les hommes sous le nom de « Hayagrîva ». Tu le sais bien. Dis donc, si j’étais indépendant, une telle ignominie me serait-elle arrivée ? Jamais. Par conséquent, je ne suis pas indépendant ; je suis en tout point sous cette S’akti. Ô Né du Lotus ! Je médite toujours sur cette S’akti ; et je n’en connais pas d’autre.
62-66. Nârada dit : Ainsi parla Visnu à Brahmâ. Ô Muni Vedavyâs ! Brahmâ me les a dit. Alors, toi aussi, médite calmement sur les pieds pareils-au-lotus de Bhâgavati dans le lotus de ton cœur pour la réussite de ton idée. Que Devî te donne tout ce que tu désires. Sûta dit : À ces paroles de Nârada, Veda Vyâsa, le fils de Satyavati, partit dans les collines pour Tapasyâ, confiant dans les pieds pareils-au-lotus de Devî comme le tout en ce monde.
Ainsi se termine le quatrième chapitre du premier Skandha sur l’excellence de la Devî dans le Mahapurâna S’rimad Devî Bhâgavatam de 18 000 versets.
Sur le récit d’Hayagrîva [ p. 12 ] 1-4. Les Risis dirent : — « Ô Sûta ! Nos esprits sont plongés dans la mer du doute, en entendant cette parole si merveilleuse, surprenante pour le monde entier. La tête de Janârdan Mâdhava, le Seigneur de tous, fut arrachée de son corps ! Et il fut plus tard connu sous le nom d’Hayagrîva, le cheval à face ! Oh ! quelle plus grande merveille peut-il y avoir ? Celui que les Védas louent, tous les Devas se reposent sur Lui, Lui qui est la Cause de toutes les causes, [ p. 13 ] l’Âdi Deva Jagannath (le Seigneur de l’univers), Oh ! comment se fait-il que Sa tête ait été tranchée ! Ô toi qui es très intelligent ! « Décrivez-moi tout cela en détail ».
5-9. Sûta dit : — Ô Munis ! Écoutez attentivement les actes glorieux du suprêmement énergique Visnu, le Deva des Devas. Un jour, l’éternel Deva Janârdana se sentit fatigué après une terrible bataille incessante qui dura dix mille ans. Après cela, le Seigneur Nârâyana s’assit en Padmâsan (une sorte de posture) dans un endroit agréable, sur un terrain plat, et, plaçant sa tête sur le devant de son arc, l’arc bandé et posé droit sur le sol, il s’endormit profondément. Visnu, le Seigneur de Ramâ, était extrêmement fatigué et sombra bientôt dans un profond sommeil. À ce moment, Indra et les autres Devas, accompagnés de Brahmâ et Mahesâ, commencèrent un sacrifice.
10-13. Puis, soucieux de réussir au puits de Deva, ils se rendirent dans la région de Vaikuntha pour rencontrer le Deva Janârdana, le Seigneur des sacrifices. Là, les Devas, ne trouvant pas Visnu, découvrirent par leur Dhyân (méditation) où séjournait Bhagavân Visnu et s’y rendirent. Ils virent que le Seigneur Visnu, le Deva des Devas, gisait inconscient, sous les bras de Yoganidrâ (le sommeil yogique). Ils s’y assirent donc. Voyant le Seigneur de l’univers endormi, Brahmâ, Rudra et les autres Devas s’inquiétèrent.
14-18. Indra s’adressa alors aux Devas : « Ô la meilleure des sourates ! Que faire maintenant ! Comment tirerons-nous Bhagavân de son sommeil ? Réfléchissons maintenant aux moyens d’y parvenir. » En entendant les paroles d’Indra, S’ambhu dit : « Ô bons Devas ! Nous devons maintenant achever notre œuvre sacrificielle. Mais si le sommeil de Bhagavân est perturbé, il se mettrait en colère. » En entendant les paroles de S’ankara, Paramesthî Brahmâ créa des insectes Vamrî (sortes de fourmis blanches) afin qu’ils puissent dévorer la partie avant de l’arc qui gisait au sol, faisant se soulever l’autre extrémité et interrompant ainsi son sommeil. Ainsi, le dessein du Deva sera, sans aucun doute, accompli. Ainsi, se calmant, l’éternel Deva Brahmâ ordonna aux fourmis blanches Vamrîs de couper la corde de l’arc.
19-22. Entendant cet ordre de Brahmâ, Vamrî s’adressa à Brahmâ ainsi : « Ô Brahmân ! Comment puis-je troubler le sommeil du Devadeva, Seigneur de Laksmî, le Gourou du Monde ? Tirer quelqu’un de son profond sommeil, interrompre sa parole, rompre l’amour entre un couple mari et femme, séparer un enfant de sa mère, tout cela équivaut à Brahmâhatyâ (assassiner un Brahmân). Par conséquent, ô Deva ! comment puis-je interrompre le bonheur du sommeil du Devadeva ? Et quel bénéfice tirerais-je de manger la corde de l’arc, au point de commettre cet acte vicieux ? Mais un homme peut commettre un péché s’il y a un intérêt personnel ; je suis prêt à manger cela, si j’y trouve un intérêt personnel. » [ p. 14 ] 23-24. Brahmâ dit : « Nous te donnerons aussi une part de notre Yajña (sacrifice) ; alors écoute-moi ; accomplis notre œuvre et réveille Visnu de son sommeil. Pendant le Homa, tout ghee qui tombera en dehors du Homa-Kund (la fosse sacrificielle) reviendra à toi ; alors fais vite et fais ceci. »
25-30. Sûta dit : — Ainsi ordonné par Brahmâ, l’insecte Vamrî rongea bientôt l’extrémité de l’arc qui reposait sur le sol. Aussitôt la corde céda et l’arc s’éleva ; l’autre extrémité se libéra et un bruit terrible se fit entendre. Les Devas prirent peur ; l’univers entier s’agita ; la terre trembla. La mer se gonfla ; les animaux aquatiques furent effrayés ; un vent violent souffla ; les montagnes tremblèrent ; des météores menaçants tombèrent. Les régions prirent un aspect terrifiant ; le Soleil disparut à l’horizon. En ce temps de détresse, les Devas s’inquiétèrent du mal qui pourrait s’abattre. Ô ascètes ! tandis que les Devas réfléchissaient ainsi, la tête couronnée du Devadeva Visnu disparut ; personne ne sut où elle tomba.
31-36. Lorsque l’obscurité terrible disparut, Brahmâ et Mahâdeva virent le corps défiguré de Visnu, décapité. Voyant cette silhouette décapitée de Visnu, ils furent profondément surpris ; ils furent noyés dans un océan de soucis et, accablés de chagrin, se mirent à pleurer à haute voix. Ô Seigneur ! Ô Maître ! Ô Devadeva ! Ô Éternel ! quel malheur extraordinaire et imprévu nous est arrivé aujourd’hui ! Ô Déva ! Tu ne peux être ni percé ni coupé, ni brûlé ; comment se fait-il alors que Ta tête ait été enlevée ! Est-ce la Mâyâ (majic) de certains ? Déva ? Ô toi qui pénètres tout ! Les Devas ne peuvent vivre dans cet état ; nous ignorons quelle affection Tu as pour nous. Nous pleurons à cause de nos fins égoïstes ; peut-être est-ce pour cela que cela s’est produit. Les Daityas, les Yaksas ou les Râkhsasas n’ont pas fait cela ; Ô Seigneur de Laksmî ! À qui attribuerons-nous cette faute ? Les Dévas eux-mêmes ont commis cette perte ?
37-41. Ô Seigneur des Dévas ! Les Dévas sont désormais dépendants ! Ils sont sous Ta domination. Où allons-nous maintenant ? Que ferons-nous ? Personne ne peut sauver ces Dévas stupides et bornés !
À ce moment-là, voyant S’iva et les autres Devas pleurer, Brihaspati, suprêmement versé dans les Védas, les consola ainsi : « Ô toi qui es très fortuné ! À quoi bon pleurer et te repentir ainsi ? Il te faut maintenant réfléchir aux moyens que tu devrais adopter pour redresser tes calamités. Ô Seigneur des Devas ! Le destin, les efforts et l’intelligence de chacun sont égaux ; si le succès ne vient pas du destin (chance ou hasard), il faut certainement montrer ses prouesses et son mérite. » [ p. 15 ] 42-46. Indra dit : « Fi de vos efforts alors que, sous nos yeux, la tête de Bhagavân Visnu Lui-même a été emportée ! Fi, fi de vos prouesses et de votre intelligence ! Le destin est à mon avis, le pouvoir suprême.
Brahmâ dit : — Quel que soit le destin (Daiva), qu’il soit de bon ou de mauvais augure, chacun doit le supporter ; nul ne peut aller au-delà du Daiva. Lorsqu’on a pris un corps, on doit éprouver plaisir et douleur ; il n’y a aucun doute là-dessus. Voyez, autrefois, par l’ironie du destin, S’ambhu m’a tranché la tête ; son organe génital, lui aussi, est tombé par malédiction. De même, la tête de Hari est tombée aujourd’hui dans l’océan salé. Par l’influence du temps, Indra, le Seigneur de Sachi, avait mille marques génitales sur son corps, fut expulsé du Ciel et dut vivre dans le Mânas sarovar parmi les lotus et subir bien d’autres souffrances.
47-50. Ô Glorieux ! Quand de tels personnages ont souffert, qui d’autre au monde n’en souffre pas ? Alors, cessez tous vos chagrins et méditez sur l’Éternel Mahâmâyâ ; qui est la Mère de tous, qui soutient tout, qui est de la nature de Brahmâvidyâ (la Connaissance Suprême) et qui est au-delà des Gunas, qui est la Première Prâkriti, et qui imprègne les trois Lokas, l’univers entier, mobile et immobile ; Elle pourvoira à notre bien-être. Sûta dit : — Ainsi parlant aux Devas, Brahmâ ordonna à tous les Védas, incarnés là sous leurs formes, d’accomplir l’œuvre du Deva.
51-54. Brahmâ dit : « Ô Védas ! Allez maintenant chanter des hymnes à la Sacrée et Très Haute Devî Mahâmâyâ, qui est Brahmâvidyâ, qui mène toutes les issues à leur issue heureuse, qui est caché dans toutes les formes. » En entendant Ses paroles, les Védas, si beaux, commencèrent à chanter des hymnes à Mahâmâyâ qui peut être compris par Jñân, et qui imprègne le monde.
Les Védas disent : Obéissance à la Devî ! à la Mahâmâyâ ! à l’Auspicieux ! à la Créatrice de l’Univers ! Nous nous inclinons devant Toi, qui es au-delà des Gunas, la Souveraine de tous les Êtres ! Ô Mère ! Tu donnes à S’ankara même Ses désirs. Tu es le réceptacle de toutes choses ; Tu es le Prâna de tous les êtres vivants ; Tu es Buddhi, Laksmî (la richesse), S’obhâ, Ks’hamâ (le pardon), S’ânti (la paix), Sraddhâ (la foi), Medhâ (l’intellect), Dhriti (la force d’âme) et Smriti (le souvenir).
55. Tu es le vindu (m) sur le Prânava (om) et tu es de la nature de la demi-lune ; Tu es Gâyattri, Tu es Vyârhiti ; Tu es Jayâ, Vijayâ, Dhâtri (la supportrice), Lajjâ (la modestie), Kîrti (la renommée), Ichchâ (la volonté) et Dayâ (la miséricorde) dans tous les êtres.
56-57. Ô Mère ! Tu es la Mère miséricordieuse des trois mondes ; Tu es [ p. 16 ] l’adorable Vidyâ (connaissance) propice bénéficiant à tous les Lokas ; Tu détruis l’Univers et Tu résides habilement (cachée) dans les mantras Vîja. C’est pourquoi nous Te louons. Ô Mère ! Brahmâ, Visnu, Mahes’vara, Indra, Sûrya, le Feu, Sarasvatî et les autres Régents de l’Univers sont tous Tes créations ; aucun d’eux ne Te surpasse donc. Tu es la Mère de toutes choses, mouvantes et immobiles.
58-61. Ô Mère ! Quand Tu veux créer cet Univers visible, Tu crées d’abord Brahmâ, Visnu et Mahes’vara, et Tu les fais créer, préserver et détruire cet univers ; mais Tu demeures totalement détachée du monde. Tu demeures toujours constante dans Ta forme unique. Nul dans cet Univers ne peut connaître Ta nature ; et nul ne peut énumérer Tes noms. Comment peut-il promettre de sauter par-dessus l’océan illimité, celui qui ne peut sauter par-dessus un puits ordinaire ?
Ô Bhagavatî ! Nul parmi les Devas ne connaît particulièrement Ta puissance et Ta gloire infinies. Toi seule es la Souveraine de l’Univers et la Mère du monde.
62-68. Les Védas témoignent tous que toi seul as créé cet univers irréel et fugace. Ô Devî ! Sans effort ni désir, tu es devenue la cause de ce monde visible, demeurant toi-même inchangée. C’est une grande merveille. Nous ne pouvons concevoir cette combinaison de variétés contraires. Ô Mère ! Comment pouvons-nous comprendre ta puissance, même inconnue de tous les Védas, alors que toi-même tu ignores ta nature ! Cela nous laisse perplexes. Ô Mère ! C’est que tu ignores tout de la chute de la tête de Visnu ! Ou bien tu as sciemment voulu examiner les prouesses de Visnu. Hari a-t-il commis un péché odieux ? Comment cela est-il possible ! Où est le péché pour tes disciples qui te servent ! Ô Mère ! Pourquoi es-tu si indifférente aux Devas ! C’est une grande merveille que la tête de Visnu soit coupée ! Vraiment, nous sommes plongés dans de grands malheurs. Tu es habile à apaiser les chagrins de tes fidèles. Pourquoi tardes-tu à refixer la tête sur le corps de Visnu ?
Ô Devî ! Est-ce parce que tu t’es offensé des dieux que tu as jeté cela sur Visnu ? Ou est-ce parce que Visnu est devenu orgueilleux et que, pour le calmer, tu as agi ainsi ? Ou est-ce parce que les Daityas, vaincus par Visnu, sont allés pratiquer de sévères tapasya dans quelque magnifique lieu saint, et ont obtenu des faveurs ; et ainsi la tête de Visnu est tombée ?
Ou bien, ô Bhagavatî ! Étais-Tu ardemment intéressé à voir le corps décapité de Visnu et c’est pourquoi Tu as vu ainsi ! Ô Force Première ! Serais-Tu en colère contre Laksmî Devî, la fille du Sindhu ? Sinon, pourquoi L’as-Tu privée de Son époux ? Laksmî est née comme une partie de Toi ; Tu devrais donc lui pardonner Son offense.
[ p. 17 ]
C’est pourquoi tu la réjouis en lui rendant la vie de son mari.
Les principaux Dévas, engagés à Ton service, se prosternent toujours devant Toi. Ô Devî ! Tu es assez bienveillante pour rendre la vie au Deva Visnu, le Seigneur de tous, et nous faire traverser cet océan de douleurs. Ô Mère ! Nous ne pouvons absolument rien distinguer de l’endroit où la tête de Hari a disparu. N’avons-nous pas d’autre protectrice que Toi pour lui rendre la vie ? Ô Devî ! Donnes-tu la vie au monde entier comme le nectar donne la vie à tous les Dévas.
69-73. Sûta dit : — Ainsi loué par les Védas avec leurs Angas, avec les Sâmagânas (les chants du Sâma Veda), le Nirgunâ Mahes’vari Devî Mahâmâyâ fut satisfait. Alors la voix de bon augure leur parvint des Cieux, réjouissant tous, et agréable à l’oreille bien qu’aucune forme ne fût visible : « Ô Sourates ! Ne vous en souciez pas ; vous êtes immortels (quelle peur pouvez-vous avoir ?). Revenez à la raison. Je suis très satisfait des louanges chantées par les Védas. Il n’y a aucun doute là-dessus. Parmi les hommes, quiconque lira ce stotra avec dévotion, obtiendra tout ce qu’il désire. Quiconque l’écoutera avec dévotion, pendant les trois Sandhyas, sera libéré des troubles et deviendra heureux. Lorsque ce stotra aura été chanté par les Védas, il sera équivalent aux Védas.
74-75. Quelque chose arrive-t-il en ce monde sans raison ? Écoutez maintenant pourquoi la tête de Hari fut coupée. Un jour, voyant le beau visage de sa chère épouse Laksmî Devî, Hari rit en sa présence.
76-82. Laksmî Devî comprit alors : « Il a sûrement vu quelque chose de laid sur mon visage et c’est pourquoi Il a ri ; sinon, pourquoi mon Mari rirait-il en me voyant ? Mais quelle raison peut-il y avoir de voir de la laideur sur mon visage après si longtemps ? Et pourquoi rirait-Il sans voir quelque chose de laid, sans aucune raison ? Ou peut-être a-t-Il fait d’une autre belle femme ma coépouse ? » Ainsi, se disputant mentalement, Mahâ Laksmî se mit peu à peu en colère et Tamo guna la posséda peu à peu. Puis, par un tour du destin, afin que l’œuvre divine soit achevée, la très féroce Tamas Sakti entra en son corps. Elle se mit en colère et dit lentement : « Que ta tête tombe. » Ainsi, en raison de sa nature féminine et du destin de Bhagvan, Laksmî jura sans aucune pensée de bien ou de mal, provoquant sa propre souffrance. Par la S’akti Tâmasî La possédant, elle pensa qu’une coépouse serait plus douloureuse que Son veuvage et ainsi Elle Le maudit.
83-86. Le mensonge, la vaine audace, la ruse, la stupidité, l’impatience, l’avidité excessive, l’impureté et la dureté sont les qualités naturelles des femmes. À cause de cette malédiction, la tête de Vasudeva est tombée dans l’océan salé. Maintenant, je vais [ p. 18 ] fixer la tête sur son corps comme auparavant. Ô Sura Sattamas ! Il y a aussi une autre cause à cette affaire. Elle vous apportera un grand succès. Autrefois, un célèbre Daitya, nommé Hayagrîva, pratiquait une tapasya sévère sur les rives de la rivière Sarasvatî.
87-92. Abandonnant toute sorte de jouissance, maîtrisant ses sens et se privant de toute nourriture, le Daitya fit le Japam du mantra monosyllabique Mâyâ-Vija (répété) et, méditant sur la forme de Ma Sakti Suprême, paré de tous les ornements, pratiqua de terribles austérités pendant mille ans. Moi aussi, je me rendis au lieu d’austérités sous Ma forme Tâmasî, méditai auprès du Daitya et apparus devant lui. Là, assis sur le dos du lion, éprouvant de la compassion pour sa tapasya, je lui parlai : « Ô Glorieux ! Ô Toi aux bons vœux ! Je suis venu T’accorder une faveur ! » En entendant les paroles de la Devî, le Daitya se leva aussitôt et, tombant avec dévotion à Ses pieds, fit le tour d’Elle. Regardant Ma forme, ses grands yeux s’égayèrent d’un sentiment d’amour et se remplirent de larmes ; Versant des larmes, il commença alors à chanter des hymnes pour moi.
93-95. Hayagrîva dit : « Obéissance à la Devî Mahâmaye ! Je m’incline devant Toi, la Créatrice, la Préservatrice et la Destructrice de l’univers ! Habile à témoigner sa faveur à Tes fidèles ! Donatrice des désirs du fidèle ! Obéissance à Toi ! Ô Toi, le dispensateur de la libération ! Ô Toi ! Celui qui est propice ! Je m’incline devant Toi. Tu es la cause des cinq éléments : la terre, l’eau, le feu, l’air et l’Akasha ! Tu es la cause de la forme, du goût, de l’odorat, du son et du toucher. Ô Mahes’vari ! les cinq jñânendriyas (organes de perception) : les yeux, les oreilles, le nez, la langue et la peau, et les cinq organes d’action Karmendriyas : les mains, les pieds, la parole, les bras et l’organe de génération sont tous créés par Toi. »
96-100. La Devî dit : « Ô enfant ! Je suis très satisfaite de ta merveilleuse tapasya et de ta dévotion. Maintenant, dis-moi quel bienfait tu désires. Je te l’accorderai. » Hayagrîva dit : « Ô Mère ! accorde-moi ce bienfait qui me préservera de la mort, et je serai invincible par les sourates et les asuras, je pourrai être un yogi et immortel. »
La Devî dit : « La mort engendre la naissance et la naissance engendre la mort ; cela est inévitable. » Cet ordre de choses existe en ce monde ; jamais il n’est violé. Ô le meilleur des Râksasas ! Sachant ainsi que la mort est certaine, réfléchis en ton esprit et demande un autre bienfait.
Hayagrîva dit : « Ô Mère de l’univers ! Si Tu ne veux absolument pas m’accorder l’immortalité, accorde-moi donc ce bienfait que ma mort ne survienne que d’un être à tête de cheval. Sois miséricordieuse et accorde-moi ce bienfait que je désire. »
101-105. Ô toi qui es si fortuné ! « Rentre chez toi et gouverne ton royaume à ton aise ; la mort ne te surviendra que par celui qui a la tête de cheval. » Ainsi, accordant ce don, la Devî disparut. Très heureux de l’avoir obtenu, Hayagrîva regagna sa résidence. Depuis lors, le Daitya malfaisant trouble profondément tous les Devas et les Munis. Personne dans les trois mondes ne peut le tuer. Que Visvakarmâ prenne donc une tête de cheval et la fixe sur le corps sans tête de Visnu. Alors Bhagavân Hayagrîva tuera le cruel Asura, pour le bien des Devas.
106-112. Sûta dit : — S’adressant ainsi aux Devas, Bhagavatî S’arvânî resta silencieux. Les Devas furent très heureux et dirent ceci à Visvakarmâ : — Veuillez accomplir ce travail de Deva et réparer la tête de Visnu. Il deviendra Hayagrîva et tuera l’indomptable Dânava. Sûta dit : — En entendant ces mots, Visvakarmâ coupa rapidement avec sa hache la tête d’un cheval, l’apporta devant les Devas et la fixa sur le corps sans tête de Visnu. Par la grâce de Mahâmâyâ, Bhagavân devint Hayagrîva, ou tête de cheval. Puis, quelques jours plus tard, Bhagavân Hayagrîva tua de force ce fier Dânava, l’ennemi du Deva. Tout homme, entendant cette excellente anecdote, se libère, certainement, de toutes sortes de difficultés. Entendre ou lire les actes glorieux de Mahâmâyâ, purs et destructeurs de péchés, donne toutes sortes de richesses.
Ainsi se termine le cinquième chapitre du premier Skandha sur la description du récit d’Hayagrîva dans le Mahâ Purâna S’rimad Devî Bhâgavatam de 18 000 vers.
Sur la préparation à la guerre par Madhu Kaitabha [ p. 19 ] 1-44. Les Risis dirent : — « Ô Saumya ! Tu viens de parler du combat qui a duré cinq mille ans, dans ce grand océan, entre Bhagavân S’auri et Madhu Kaitabha. Comment se fait-il que les deux Dânavas si puissants, invincibles parmi les Devas, soient nés là ? Et pourquoi Bhagavân Hari les a-t-il tués ? Ô toi qui es très intelligent ! Veuille bien décrire cet événement si merveilleux. Nous sommes tous extrêmement impatients de l’entendre, et tu es le grand Pundit et orateur, présent devant nous. C’est une chance pour nous de t’avoir rencontré ici. Comme le contact avec l’illettré est très douloureux, de même le contact avec l’alphabétisé est très heureux comme le nectar. Les animaux de ce monde vivent comme des illettrés ; Ils mangent, réclament leur nature, urinent et excrètent, et connaissent à merveille les rapports sexuels. Seulement, ils désirent une connaissance distincte du bien et du mal, de la réalité.
et irréel, et une connaissance du discernement, menant à Moksa, ou libération finale ; c’est là le seul point de différence. Par conséquent, ceux qui n’aiment pas entendre parler du Bhâgavata et d’autres ouvrages similaires sont comme des bêtes ; cela ne fait aucun doute. Voyez ! Les cerfs et certains autres animaux peuvent jouir pleinement de l’ouïe comme les hommes ; et les serpents, bien que dépourvus de l’organe de l’ouïe, sont charmés tout comme les hommes, comme s’ils goûtaient au plaisir d’entendre de doux sons. En vérité, parmi les cinq organes de perception, l’organe de l’ouïe et l’organe de la vue sont bénéfiques, car la connaissance des choses naît de l’ouïe et le cœur se réjouit de la vue. C’est pourquoi les pandits divisent les objets de l’ouïe en trois catégories : (1) Sâttvik, (2) Râjasik et (3) Tâmasik. Les Védas et autres S’âstras sont Sâttvik ; la littérature Sahitya est Râjasik, et les nouvelles de guerre et critiquer les autres sont Tâmasik. Les sages subdivisent à nouveau le Sâttvik en trois sous-classes : bon, moyen et pire. Ce qui donne Moksa est bon ou excellent ; ce qui donne le Ciel est moyen, et ce qui procure les plaisirs terrestres est pire. De même, la littérature Sahitya est de trois sortes : celle qui décrit les gens vivant avec leurs épouses légitimes est la meilleure ; celle qui décrit les prostituées est moyenne ; et celle qui oblige les gens à vivre avec les épouses d’autrui est la pire.
Les sages des Sâstras, les érudits, divisent les sujets de l’audition Tâmasik en trois catégories : le meilleur est celui qui décrit le combat avec les ennemis ; le combat, comme celui des Pandavas, avec les ennemis par haine et ressentiment, est moyen ; et le pire est celui qui décrit le combat sans motif. Ô toi, ô homme d’une grande intelligence ! Écouter les Purânas est bien supérieur à écouter les autres S’âstras, car cela détruit les péchés, accroît l’intellect et accumule les Punyam (bons mérites). Alors, ô homme d’une grande intelligence ! Veuille nous décrire les Purânas, qui répondent à toutes les exigences de la vie, que tu as entendus auparavant de la bouche de Krishna Dvaipâyana. En entendant ces paroles des Risis, Sûta dit : « Ô toi, très fortunés ! Lorsque vous serez tous désireux d’entendre les Purânas et que je serai prêt à les communiquer, alors nous serons tous deux bénis sur la surface de la terre. »
Autrefois, à l’époque du Pralaya (dissolution universelle), lorsque les trois lokas et l’univers entier se dissolvèrent dans l’eau, alors que Devadeva Janârdana dormait sur le lit d’Ananta, le serpent aux mille têtes, surgit du creux de l’oreille de Bhagavân Visnu, les deux puissants Daityas Madhu et Kaitabha. Ils grandirent dans les eaux de l’océan et s’y amusèrent, passant ainsi une partie de leur temps. Un jour, alors que les deux Dânavas aux corps immenses jouaient l’un avec l’autre comme deux frères, ils pensèrent que la règle générale de l’univers est qu’aucun effet n’a lieu sans cause et que rien ne peut reposer sans son réceptacle. Mais nous ne pouvons comprendre quel est notre réceptacle ni qui repose sur nous. Où repose cette agréable étendue du vaste océan ? Qui a créé cela ? Comment cela a-t-il été créé ? Pourquoi vivons-nous ici, noyés dans l’eau ? Qui nous a créés ? Et qui sont notre père et notre mère ? Nous n’en savons rien. Pensant ainsi, ne parvenant à aucune conclusion, Kaitabha s’adressa à Madhu, à côté de lui, dans les eaux : « Ô frère ! Il me semble que la grande force immuable qui nous maintient dans cette eau est la cause de tout. Cette masse d’eau, imprégnée de cette force, repose sur elle ; cette Devî suprême doit être notre cause. »
Lorsque les deux Asuras, absorbés par cette pensée, comprirent cela, ils entendirent dans l’air le magnifique Vâgvîja (le mantra-germe de Vâk, la parole, la Devî Sarasvatî). Ils commencèrent alors à prononcer et répéter le mantra Vâgvîja et le pratiquèrent avec une grande constance. Puis ils virent, s’élevant très haut dans les airs, l’éclair propice et pensèrent que certainement notre mantra que nous répétons s’est rendu visible sous cette forme de lumière et ainsi nous avons certainement vu dans l’air, la forme saguna (forme avec attributs) de Sarasvatî, la déesse de la Parole. Ainsi, pensant dans leur esprit, sans aucune nourriture, avec leur esprit contrôlé, ils pensaient constamment à cela, avec tout leur esprit concentré sur cela, et répétant et méditant le mantra ne faisaient qu’un avec cela. Ainsi, ils passèrent mille ans à pratiquer ce grand tapas ; Lorsque la plus haute Âdyâ S’akti fut satisfaite d’eux et voyant les deux Dânavas, résolus à pratiquer le Tapas, fatigués, il leur adressa, invisiblement, d’une voix céleste, ces mots : « Ô deux Dânavas ! Je suis extrêmement satisfait de votre tapasyâ ; demandez donc ce que vous désirez ; je vous l’accorderai. » Entendant alors la voix céleste, les deux Dânavas dirent : « Ô Devî ! Ô Suvrate ! Accorde-nous de mourir quand nous le voudrons. » En entendant cela, Vagdevî dit : « Ô deux Dânavas ! Certain par Ma grâce, vous mourrez tous les deux quand vous le voudrez et vous deux frères serez invincibles de toutes les Suras et de tous les Asuras. Il n’y a aucun doute là-dessus. »
Sûta dit : — Lorsque la Devî leur accorda ce don, les deux Dânavas, gonflés d’orgueil, commencèrent à jouer avec les animaux aquatiques de l’océan. Ô Brahmanes ! Quelques jours s’écoulèrent ainsi lorsque les deux puissants Dânavas virent le Brahmâ, le Prajâpati, assis sur le lotus du nombril de Hari. Le doute les envahit et ils lui dirent, en vue du combat : — « Ô Suvrata ! Combats avec nous, ou quitte ce siège de lotus et va où tu veux. Si tu es si faible, ce siège de lotus propice ne te convient pas. Car il devrait être apprécié par les héros. Alors, si tu es un lâche, quitte-le vite. » En entendant ces paroles des Dânavas, Prajâpati, engagé dans la pratique de Tapasyâ, vit les deux grands héros puissants et commença à penser avec anxiété « Que faut-il faire maintenant » et attendit là.
Ainsi se termine le sixième chapitre du premier Skandha sur la préparation à la guerre par Madhu Kaitabha dans le Mahâpurâna S’rîmad Devî Bhâgavatam du Maharsi Veda Vyâsa.
Sur la louange de la Devî [ p. 22 ] 1-26. Sûta dit : — Voyant les deux Dânavas très puissants, Brahmâ, le connaisseur de tous les S’âstras, pensa aux moyens Sâma, Dâna, Bheda, Danda (conciliation, dons, pot-de-vin, ou semer la dissension et guerre ou punition) ; lequel de ces quatre il devait appliquer. Il pensa ainsi : — « Je ne connais pas leur force et il n’est pas conseillé d’entrer en guerre sans connaître leur force. De plus, si je leur offre des louanges en étant gonflé d’orgueil, ce ne sera qu’afficher ma propre faiblesse ; et lorsqu’ils le sauront, un seul d’entre eux suffira à me tuer et ils le feront certainement. Offrir des pots-de-vin n’est pas non plus conseillé ; et comment puis-je semer la dissension. Il est donc préférable que je réveille Janârdana Visnu, le très puissant Janârdana à quatre bras, de son sommeil sur le serpent Ananta à mille têtes. Il me soulagera.
Ainsi pensant en son esprit, Bhagavân Brahmâ, né du lotus, resta dans la tige tubulaire du lotus du nombril de Visnu et de là prit refuge mentalement en Visnu, celui qui dissipe les difficultés, et commença à chanter des hymnes de bon augure composés de mesures variées à Jagannâth Nârâyana, plongé dans un profond Yoganidrâ (sommeil méditatif). Il dit : — « Ô Refuge des pauvres ! Ô Hari ! Ô Visnu ! Ô Vâmana ! Ô Mâdhava, Tu es le Seigneur de l’univers et omniprésent. Ô Hrisikes’a ! Tu dissipes toutes les difficultés de Tes dévots ; quitte donc ton Yoganidrâ et lève-toi. Ô Vâsudeva ! Ô Seigneur de l’Univers ! Tu résides dans le cœur de tous et connais leurs désirs.
Ô Toi, détenteur du disque et de la massue ! Tu détruis toujours les ennemis de Tes fidèles ; Ô Omniscient ! Tu es le Seigneur de tous les Lokas et tout-puissant ; nul ne peut connaître Ta forme ; Ô Seigneur des Devas ! Tu es le destructeur de toutes douleurs et de toutes souffrances ! Alors, lève-toi et protège-moi. Ô Protecteur de l’Univers ! Rien n’est caché à Tes yeux ! Chacun devient pur en entendant et en chantant Ton nom. Tu es Nirâkâra (sans aucune forme) ; pourtant Tu crées, préserves et détruis l’Univers. Ô Cause du monde ! Ô Soutien de tous ! Tu brilles comme le roi des rois sur tous, et pourtant Tu ne comprends pas que les deux Dânavas, gonflés d’orgueil, sont prêts à me tuer. Si tu me négliges, me voyant si affligé et sous ta protection, ton nom de Sauveur deviendra tout à fait inutile. Ainsi loué, comme Visnu ne se levait pas, Brahmâ pensa : « Bhagavân Visnu est sûrement sous l’influence du sommeil de la Force Primordiale Âdyâ S’akti et ne se lève donc pas ; que faire maintenant, si affligé ! Ces deux Dânavas, enivrés d’orgueil, sont prêts à me tuer ; que faire maintenant et où aller ? Je ne trouve personne qui puisse me protéger, où que ce soit. » Ainsi pensant, Brahmâ parvint à sa conclusion et décida de chanter des hymnes à Yoga Nidrâ Elle-même, d’un cœur uni. Discutant intérieurement, il pensa que cette Âdyâ S’akti (la Force Première) qui maintenait Bhagavân Visnu insensible et immobile serait seule capable de le sauver. De même qu’un mort n’entend aucun son, Hari, plongée dans un profond sommeil, ne sait rien. Quand je L’ai tant loué et qu’Il ne s’est pas réveillé, il est certain que le sommeil n’est pas sous Hari, mais Hari est sous le sommeil, et celui qui est sous un autre devient son esclave ; ainsi cette Yoga Nidrâ exerce maintenant son emprise sur Hari. De même, elle aussi, qui a maîtrisé Hari, cette fille de l’océan de Krsîra (lait), est maintenant sous l’emprise de Yoga Nidrâ ; il semble donc que cette Bhagavatî Mahâmâyâ ait maîtrisé l’Univers tout entier.
Que ce soit moi, Visnu, S’ambhu, Sâvitrî, Ramâ ou Umâ, tous sont sous son contrôle ; il n’y a là aucun doute. Que dire des autres êtres dotés d’une âme élevée ! Je vais maintenant chanter des hymnes à Yoga Nidrâ, sous l’influence duquel Bhagavân Hari lui-même repose, plongé dans un profond sommeil, inerte comme un homme ordinaire. Lorsque l’éternel Vâsudeva Janârdana sera dépossédé par elle, il combattra sans aucun doute les Dânavas. Ainsi décidé, Bhagavân Brahmâ, assis sur la tige tubulaire du lotus, commença à chanter des hymnes à Yoga Nidrâ, résidant sur le corps de Visnu, ainsi :
27-32. Brahmâ dit : « Ô Devî ! J’ai compris, grâce à toutes les paroles des Védas, que Tu es la seule Cause de ce Brahmânda Universel. D’autant plus que Tu as placé le meilleur Purusa Visnu, doué d’un discernement supérieur à tous les êtres, sous le contrôle du sommeil, alors cette remarque s’impose d’elle-même. »
Ô Toi, l’Acteur dans l’esprit de tous les êtres ! Ô Mère ! J’ignore profondément Ta nature ; quand Bhagavân Hari dort, inerte par Ton pouvoir, qui est alors parmi les Kotis et les Kotis de sages, qui peut comprendre complètement le Passe-temps, Leelâ, empli de Ta Mâyâ, qui est au-delà des Gunas. Les philosophes Sânkhya disent (que le Purusa (l’aspect masculin de S’akti) [ p. 24 ] est l’être pur et conscient et que Tu es la Prakriti, sans aucune conscience, matériellement inerte, Créatrice de l’univers ; mais, ô Mère ! es-Tu vraiment inerte comme cela ? Jamais comme cela ; s’il en avait été ainsi, comment se fait-il que Tu aies rendu Bhagavân Hari, le réceptacle du monde, tout à fait inconscient comme cela ? Ô Bhavâni ! Toi, étant au-delà des Gunas, tu déploies comme une performance dramatique ces diverses pièces dramatiques par la conjonction avec les trois Gunas. Ce sont Tes trois qualités, Sattva, Rajas et Tamas, que les Munis méditent chaque jour, le matin, à midi et le soir, les trois Sandhyâ ; mais personne n’est conscient de Tes manières d’agir. Ô Devî ! Tu es de la nature du Jugement et compréhension donnant naissance à la connaissance de tous les êtres de l’Univers ; Tu es toujours le S’ri (richesse et prospérité) qui procure des plaisirs aux Devas. Ô Mère ! Tu règnes en tout en tant que Kîrti (renommée), mati (intellect), Dhriti (force), Kânti (beauté), S’raddhâ (foi) et Rati (plaisir). Ô Mère ! Maintenant, je suis confronté à de grandes difficultés et c’est pourquoi j’ai obtenu un témoignage visuel de Ta nature ; inutile de raisonner et de discuter davantage à ce sujet.
27-50. J’ai maintenant su qu’en vérité, en vérité, Tu es la seule Mère de tous les mondes, car Tu as plongé Hari dans le sommeil. Ô Devî ! Maintenant qu’il est évident que tous les mondes, etc., viennent de Toi, alors les Védas viennent aussi de Toi ; quel doute y a-t-il ? Ainsi, les Védas, eux aussi, ne connaissent pas pleinement Ta nature, car l’effet ne peut jamais connaître sa cause. Il est donc bien vrai que Tu es incompréhensible des Védas, ô Mère ! Si moi, Hari, Hara et les autres Devas, mon fils Nârada et les autres Munis ne parvenons pas à réaliser pleinement Ta nature, alors qui d’autre peut être assez intelligent en ce monde pour réaliser Ta nature tout entière ? Ainsi, Ta gloire dépasse le discours de tous les êtres. Ô Devî ! Si, sur le lieu du sacrifice, les ritualistes, les connaisseurs des Védas, ne prononcent pas Ton nom Svâhâ, alors les Dévas, participants aux offrandes du Yajña, n’obtiennent pas leur part, même si des centaines d’oblations sont offertes ; ainsi, Tu es aussi le dispensateur de subsistance des Dévas. Ô Bhagavatî ! Au cours des kalpas précédents, Tu m’avais sauvé, terrifié, de la peur des Dânavas. Ô Devî Varade ! maintenant aussi, je suis terrifié à la vue des formes terribles de Madhu et de Kaitabha et je prends Ton refuge. Ô toi au cœur élevé ! Maintenant, je vois parfaitement que par Toi, par Ton pouvoir Yoganidrâ, le corps entier de Bhagavân Visnu est insensible ; mais comment se fait-il que Tu ne réalises pas mes souffrances ? Alors, soit tu abandonnes la possession de cet Âdi-Deva, soit tu détruis ces deux Danavendras – perdus, fais l’un ou l’autre comme tu veux. Ô Devî ! Ceux qui ignorent tes pouvoirs extraordinaires, ces stupides, méditent Hari, Hara, etc. Mais, ô Mère ! Par ta grâce, je réalise aujourd’hui, en tant que témoin oculaire, que Visnu lui-même gît aujourd’hui, inconscient, dans un profond sommeil, totalement inconscient de quoi que ce soit.
À l’extérieur, par Ta force. Ô Bhagavatî ! Maintenant, lorsque Kamalâ, la fille de Sindhu, est incapable de réveiller son mari Hari par ses efforts, ou plutôt que Tu l’as forcée à s’endormir inconsciemment, il semble qu’elle soit sans effort et ignore tout de ce qui se passe à l’extérieur. Ô Devî ! En vérité, bienheureux sont ceux qui adorent Tes pieds pareils-au-lotus, le cœur empli de dévotion et sans aucun espoir de récompense, abandonnant le culte des autres Devas et Te connaissant comme la Créatrice du monde entier et la dispensatrice de tous les désirs. Hélas ! maintenant, l’intelligence, la beauté, la renommée et toutes les qualités ont abandonné Hari et se sont enfuies vers des contrées inconnues. Ô Bhagavatî ! Tu es vraiment adorable dans les trois mondes car, par Ton pouvoir de Yoganidrâ, Hari a été retenu en prison, pour ainsi dire, de cette façon. Ô Mère ! Tu es la Shakti de tout cet univers, doté de toute prouesse et de toute énergie ; tout le reste est Ta création. Comme un acteur dramatique, bien qu’unique, joue au théâtre, revêtant de multiples formes, ainsi Toi aussi, étant unique, tu joues toujours dans ce charmant théâtre du monde, créé par Tes Gunas, sous diverses formes.
Ô Mère ! Au commencement des Yugas, tu manifestes d’abord la forme de Visnu et lui donnes la pure Sattrik Shakti, libre de toute obscurité, lui permettant ainsi de préserver l’Univers ; et maintenant, c’est Toi-même qui l’as maintenu ainsi inconscient ; c’est donc un fait indéniable que Tu fais tout ce que Tu veux, ô Bhagavatî ! Je suis maintenant en danger ; si Tu ne désires pas me tuer, alors brise le silence, regarde-moi et montre-moi Ta miséricorde. Ô Bhavâni ! Si Tu ne désires pas me tuer, alors pourquoi as-Tu créé ces deux Dânavas, ma mort incarnée ? Ou bien voulais-Tu me ridiculiser ? J’ai pris connaissance de Tes actes merveilleux ; Tu as créé tout cet Univers, et Toi-même, restant à l’écart, Tu joues toujours et, au temps de Pralaya, Tu ramènes tout en Toi. Alors, ô Bhavâni, qu’y a-t-il d’étonnant à ce que Tu veuilles me tuer ainsi ? Mais, ô Mère ! Je ne souffrirai pas si Tu me tues volontairement, mais c’est pour mon grand déshonneur qu’ayant le pouvoir sur ces êtres, je sois alors l’objet de la mort des Daityas ; c’est vraiment dur pour moi. Alors, ô Toi Leelâmayî, telle une jeune fille enjouée ! Lève-toi ! Ô Devî ! Prends Ta merveilleuse forme et tue-moi ou les deux Daityas, à Ta guise ; ou réveille Hari qui tuera alors les Daityas. Tout cela est entre Tes mains.
Sûta dit : Ainsi louée par Brahmâ, la Nidrâ Devî (la déesse du sommeil), de la nature de Tamo Gunas, quitta le corps de Bhagavân Hari et se tint à ses côtés. Lorsqu’elle fut ainsi complètement abandonnée par la Devî Yoga Nidrâ, d’une brillance et d’une splendeur inégalées, pour la destruction de Madhu Kaitabha, Visnu commença à bouger son corps et Brahmâ en fut très heureux.
[ p. 26 ]
Ainsi se termine le septième chapitre du Premier Skandha sur la louange de la Devî dans le Mahâ Purânam S’rimad Devî Bhâgavatam de 18 000 versets, par Maharsi Vedavyâs.
Sur la décision de qui doit être adoré [ p. 26 ] 1-7. Les Risis dirent : — « Ô toi qui es très fortuné ! Un grand doute a surgi sur ta déclaration. Ceci est établi par tous les sages comme il est écrit dans les Védas, les Purânas et autres Sâstras que Brahmâ, Visnu et Mahes’var, ces trois Devas sont éternels. Aucun ne leur est supérieur dans ce Brahmânda. Brahmâ crée tous les êtres, Visnu préserve et Mahes’var détruit tout en temps voulu. Telles sont les causes de la création, de la préservation et de la destruction. La Trinité Brahmâ, Visnu et Mahes’a ne sont en réalité qu’une seule forme, en effet, Trinité dans l’Unité et Unité dans la Trinité.
Dotés respectivement de Sattva, Raja et Tamo Gunas, ils accomplissent leurs œuvres respectives. Parmi eux, Purushottam Âdideva Jagannâth Hari, l’époux de Kamalâ, est le meilleur ; car il est capable de toutes les actions ; nul autre que Visnu, aux prouesses incomparables, n’en est capable. Comment se fait-il alors que Yogamâyâ ait assouvi Hari et l’ait rendu complètement inconscient ? Ô bienheureux ! Où sont donc passés cette extraordinaire connaissance de soi et ce pouvoir, etc., de Hari de son vivant ? C’est là notre plus grand doute ; veuillez donc nous conseiller de dissiper ce doute et d’assurer ainsi notre bien-être.
8-30. Quelle est cette S’aktî ? Celle que tu nous as mentionnée auparavant ; et par qui Visnu est-elle conquise ? D’où naît-elle ? Quel est le pouvoir de cette S’aktî et quelle est sa nature ? Ô Suvrata ! Explique-nous tout cela en détail.
Comment Yogamâyâ a-t-il pu dominer par le sommeil la Déité suprême Bhagavân Visnu, qui est la félicité de l’intelligence éternelle ! Qui est le Dieu de tous, le Guru du monde entier, le Créateur, le Préservateur et le Destructeur, qui est omniprésent, une incarnation de la pureté et de la sainteté, au-delà de Rajoguna ? Comment un tel personnage a-t-il pu être soumis au sommeil ? Ô Sûta ! Tu es très intelligent et l’élève de Vyasa Deva ; détruis ce doute par l’épée de la sagesse.
En entendant cela, Sûta dit : « Ô Munis très fortunés ! Il n’y a personne dans les trois Lokas qui puisse dissiper ce doute ; les fils nés de l’esprit de Brahmâ, Nârada, Kapila et d’autres fils éternels sont déconcertés par ces questions ; que puis-je donc dire sur ce point très difficile ! Voyez, certains appellent Bhagavân Visnu omniprésent, le conservateur de tous et le meilleur de tous les Devas ; selon eux, tout cet univers, mobile et immobile, est créé par Visnu ; ils s’inclinent devant [ p. 27 ] le Très-Haut Nârâyan Hrisikes’a Janârdana Vâsudeva et l’adorent, tandis que d’autres adorent Mahâdeva S’ankara, ayant Gauri pour l’autre moitié de son corps, doté de tous les pouvoirs, résidant à Kailâs’a, entouré d’armées de bhutas, qui a détruit le sacrifice du Daksha, qui est mentionné dans les Védas comme S’as’is’ekhara (ayant la lune sur son front), avec trois yeux et cinq visages et tenant un trident dans sa main et connu sous les noms de Vrisadhaja et Kaparddi. Ô êtres hautement intelligents ! Il y a d’autres personnes, qui connaissent les Védas et adorent le Soleil chaque jour, le matin, à midi et le soir, avec divers hymnes.
Dans tous les Védas, il est affirmé que le culte du soleil est excellent et ils ont nommé le soleil à l’âme élevée Paramâtmâ (la Déité suprême). D’autres Védavits (les connaisseurs des Védas) vénèrent les Dévas, le Feu, Indra et Varuna. Mais les Maharsis disent que, tout comme le Gange (le fleuve Gange), bien qu’unique, s’exprime par de multiples canaux, de même Visnu, l’unique, s’exprime dans toutes les formes de Dévas. Les grands pandits déclarent que la perception, l’inférence et le témoignage verbal sont les trois modes de preuve. Les pandits Naiyâyik ajoutent à ces trois preuves une quatrième preuve qu’ils appellent upamâ, ressemblance, similitude, et d’autres pandits intelligents en ajoutent une cinquième, appelée Arthâpatti, une inférence à partir des circonstances, une présomption, une implication. C’est la déduction d’une chose à partir de ce qui ne pourrait être autrement ; C’est l’hypothèse d’une chose, non perçue elle-même, mais nécessairement impliquée par une autre chose vue, entendue ou prouvée ; tandis que les auteurs des Purânas en ajoutent deux autres, appelées Sâksî et Aitijhya, préconisant ainsi sept modes de preuves. Or, le Vedânta S’âstra dit que l’Être suprême (Param Brahmâ), la cause première de l’Univers, ne peut être compris par les sept preuves mentionnées ci-dessus. Par conséquent, adoptez d’abord la raison menant à la croyance sûre, la Buddhi, selon les mots des Védas, et discriminez, discutez encore et encore et tirez vos conclusions sur Brahmâ. Et la personne intelligente devrait accepter ce qui est vu par la perception comme évident en soi et ce qui est déduit de l’observance d’une bonne conduite. Les sages disent, et il est également mentionné dans les Purânas, que la Force Première est présente en Brahmâ comme Force Créatrice ; est présente dans Hari comme Force Préservatrice ; est présente dans Hara comme Force Destructrice ; est présent dans Kurma (tortue) et dans Ananta (le serpent à mille têtes) comme la Force de soutien de la terre ; est présent dans le feu comme la Force brûlante, est présent dans l’air comme la Force motrice, et est donc présent partout dans diverses manifestations de forces.
31-51. Dans tout cet Univers, quel qu’il soit, chacun est incapable d’agir s’il est privé de sa force ; que dire de plus ? Si Shiva est privé de Kula Kundalinî S’aktî, il devient un cadavre sans vie ; Ô grand [ p. 28 ] ascète Risis ! Elle est présente partout, ainsi en toute chose dans cet univers, du plus haut Brahmâ au plus bas brin d’herbe, toutes choses mobiles et immobiles. En vérité, tout devient parfaitement inerte, privé de force ; que ce soit en conquérant ses ennemis, en se déplaçant d’un endroit à un autre ou en mangeant, on se trouve totalement incapable, privé de force. Ainsi, l’omniprésente S’aktî, les sages l’appellent Brahmâ. Ceux qui sont véritablement intelligents devraient toujours l’adorer de diverses manières et déterminer soigneusement sa réalité par tous les moyens. En Visnu réside la Sattviki S’aktî ; alors Il peut préserver ; sinon Il est parfaitement inutile ; ainsi en Brahmâ réside la Rajasi S’aktî et Il crée ; sinon Il est parfaitement inutile ; en S’iva réside la Tamasi S’aktî et Il détruit ; sinon Il est parfaitement inutile. Ainsi, en argumentant encore et encore dans son esprit, chacun devrait parvenir à comprendre que la Suprême Âdya S’aktî, par Sa seule volonté, crée et préserve cet Univers, et que c’est Elle qui détruit à nouveau, avec le temps, tout le Brahmânda, mobile et immobile ; nul n’est capable d’accomplir son œuvre respective, que ce soit Brahmâ, Visnu, Mahes’var, Indra, le Feu, le Soleil, Varuna ou toute autre personne ; en vérité, tous les Devas accomplissent leurs actions respectives par l’intermédiaire de cette Âdya S’aktî. Qu’Elle seule soit présente dans la cause et l’effet et accomplisse chaque action, et cela peut être constaté de manière vivante. Les êtres intelligents appellent cette S’aktî double : l’une est Sagunâ et l’autre Nirgunâ. Les êtres, attachés aux sens et aux objets, vénèrent l’aspect Sagunâ, et ceux qui n’y sont pas attachés vénèrent l’aspect Nirguna. Cette S’aktî consciente est la Dame des quatre buts de la vie : la religion, la richesse, les désirs et la libération. Lorsqu’elle est vénérée selon les règles, elle exauce toutes sortes de désirs. Les êtres mondains, charmés par la Mâyâ de ce monde, ne la connaissent pas du tout ; certains en savent peu et en charment d’autres ; tandis que des Pandits stupides et bornés, poussés par Kali, fondent des sectes d’hérétiques, des Pâsandas, pour nourrir leurs propres appétits. Ô Munis si fortunés ! Dans aucun autre Yuga, on n’a trouvé d’actes aussi répandus que dans ce Kali Yuga, fondés sur des opinions diverses et totalement contraires aux prescriptions védiques. Regarde encore, si Brahmâ, Visnu et Mahes’a sont les Déités suprêmes, pourquoi ces trois Dévas méditent-ils sur un autre Être au-delà de la parole, au-delà du mental, et pratiquent-ils, pendant des années, de dures austérités ? Et pourquoi accomplissent-ils des Yajñas (sacrifices) pour réussir dans la création, la préservation et la destruction ? Ils connaissent, en vérité, l’Être suprême, Brahmâni Devî S’aktî éternel,constant et c’est pourquoi ils la méditent toujours dans leur esprit. Par conséquent, le sage, sachant cela fermement, devrait servir en tout la S’aktî la plus élevée. Ô Munis ! Telle est la conclusion établie de tous les Sâstras. J’ai entendu ce grand secret caché de Bhagavân Krisna Dvaipâyan. Il l’a entendu de Nârada, et Nârada l’a entendu de [ p. 29 ] son propre père Brahmâ. Brahmâ l’a entendu de Visnu. Ô Munis, il est bon que même le sage n’entende ni ne pense rien de contraire provenant d’autres sources ; il devrait, avec son cœur concentré, servir la Brahmâ Sanâtanî S’aktî. Il est clairement constaté en ce monde que toute substance dans laquelle cette S’aktî consciente n’existe pas, devient inerte, totalement inutile. Sachez donc pleinement que c’est la Mère Divine la plus élevée de l’Univers qui joue ici, résidant dans chaque être.
Ainsi se termine le huitième chapitre du premier Skandha sur la décision de qui doit être adoré dans le Mahapurâna Sri Mad Devî Bhâgavatam de 18 000 versets du Maharsi Vedavyâsa.
Sur le meurtre de Madhu Kaitabha [ p. 29 ] 1-49. Sûta dit : — Ô Munis ! Lorsque l’excellente Tâmasi S’akti, la Déesse présidant au sommeil, sortit des yeux, de la bouche, du nez, du cœur, etc., du corps du Guru du Monde Visnu et reposa dans l’espace céleste, alors le puissant Seigneur Visnu se mit à bâiller et se leva. Il vit le Prajâpati Brahmâ, terrifié, et lui parla en des mots aussi profonds que le grondement des nuages : — « Ô Bhagavân Padmayone ! Qu’est-ce qui te fait venir ici et quitter ton tapasyâ ? Pourquoi as-tu l’air si terrifié et anxieux ? » En entendant cela, Brahmâ dit : « Ô Deva ! Les deux Daityas, Madhu Kaitabha, très puissants et terribles, sortis de la cire de Tes oreilles, se sont approchés pour me tuer ; terrifié, je suis venu à Toi. Ainsi, ô Seigneur de l’Univers ! Ô Vâsudeva ! Je suis maintenant complètement hors de moi et terrifié ; sauve-moi. Visnu dit alors : « Va maintenant et repose en paix, sans aucune crainte ; que ces deux stupides, dont la vie est presque épuisée, viennent à moi pour me combattre ; je les tuerai certainement. »
Sûta dit : — Tandis que Bhagavân Visnu, le Seigneur de tous les Devas, parlait ainsi, ces deux très puissants Dânavas, transportés d’orgueil, arrivèrent là, à la recherche de Brahmâ. Ô Munis ! Les deux fiers Daityas se tenaient là, au milieu de l’eau du Pralaya, sans aucun appui et avec une attitude calme. Ils parlèrent alors à Brahmâ ainsi : — Ô Tu as fui et tu es venu ici ? Tu ne peux pas t’échapper. Vas-y et combats. Je te tuerai avant celui-ci.
Alors je tuerai aussi celui qui dort sur ce lit de serpent. Soit tu nous donnes la bataille, soit tu te reconnais comme notre serviteur. En entendant leurs paroles, Janârdan Visnu s’adressa à eux ainsi : « Ô deux Dânavas, fous de guerre ! Venez vous battre avec moi comme vous le souhaitez ; je réprimerai sûrement votre orgueil. Ô deux puissants ! Si vous me faites confiance, venez vous battre. » En entendant cela, les deux Dânavas, au milieu de cette masse d’eau reposant sans aucun soutien, s’approchèrent pour se battre, les yeux révulsés de colère. Le Daitya, nommé Madhu, devint très furieux et s’approcha rapidement pour combattre, tandis que Kaitabha restait là. Alors le combat au corps à corps s’engagea entre les deux athlètes fous ; Bhagavân Hari et Madhu furent fatigués ; Kaitabha s’approcha et commença le combat. Après cela, Madhu et Kaitabha s’unirent et, aveuglés par la rage, commencèrent à combattre sans relâche le puissant Visnu au corps à corps. Bhagavân Brahmâ et la Force Première Âdyâ S’akti en furent témoins depuis les Cieux. Le combat dura donc très longtemps ; pourtant, les deux Dânavas ne se sentaient pas le moins du monde fatigués ; Bhagavân Visnu le fut même. Ainsi s’écoulèrent cinq mille ans ; Hari commença alors à s’interroger sur leur mort. Il pensa : « J’ai combattu pendant cinq mille ans, mais les deux redoutables Dânavas ne se sont pas fatigués du tout ; je suis même fatigué ; c’est une grande surprise. Où est passée ma prouesse ? Et pourquoi les deux Dânavas n’étaient-ils pas fatigués ? Quelle en est la cause ? C’est une question qui mérite maintenant d’être sérieusement examinée. » Voyant Bhagavân Hari ainsi plongé dans ses soucis, les deux Dânavas hautains lui parlèrent avec une grande joie et d’une voix semblable à celle du grondement des nuages : « Ô Visnu ! Si tu te sens fatigué, si tu n’as pas la force de combattre avec nous, alors lève les mains jointes sur ta tête et reconnais que tu es notre serviteur ; ou, si tu le peux, continue le combat. Ô intelligent !
Nous allons d’abord vous ôter la vie, puis tuer ce Brahmâ aux quatre visages. Entendant les paroles des deux Dânavas, reposant sans aucun soutien dans le vaste océan, Visnu, au noble esprit, leur parla avec douceur et consolation : « Voyez, ô héros ! Personne ne combat jamais avec quelqu’un de fatigué, de craintif, de désarmé, de déchu et d’enfant ; tel est le Dharma des héros. Vous avez combattu à mes côtés pendant cinq mille ans. Mais je suis seul ; vous êtes deux, tous deux d’égale puissance, et vous vous êtes reposés par intervalles. Je vais donc me reposer un moment, puis combattre avec assurance. Vous êtes tous deux très puissants et ivres de vanité. Reposez-vous donc un moment. Après ce repos, je combattrai à vos côtés selon les justes règles de la guerre. » En entendant ces paroles de Hari, les deux principaux Dânavas prirent confiance et restèrent à distance, prêts à combattre à nouveau.
Alors, le Vâsudeva à quatre bras, les voyant à une distance suffisante, commença à réfléchir ainsi : « Comment leur mort peut-elle être effectuée ? » Réfléchissant un moment, il comprit que la Suprême S’akti Devî leur avait accordé la mort à leur guise (Ichchâmrityu) ; et qu’ils ne se fatiguaient donc pas. J’ai combattu si longtemps avec eux en vain ; mon travail a été vain. Comment puis-je donc combattre maintenant, avec cette certitude ? De plus, si je ne combats pas, comment ces deux Dânavas, exaltés par leur bienfait et [ p. 31 ] causant des ennuis à tous, pourraient-ils être détruits ? Lorsque le bienfait est accordé par la Devî, leur mort est également presque impraticable. Qui veut sa propre mort, même placé dans des circonstances très difficiles ? Attaqué par de terribles maladies, réduit à une indigence dénuée, personne ne veut mourir ; Comment peut-on alors s’attendre à ce que ces deux Dânavas hautains souhaitent eux-mêmes leur mort ? Il me convient donc de prendre refuge auprès de cette Âdyâ S’akti, la dispensatrice des fruits de tous les désirs. Aucun désir ne peut être fructifié sans qu’Elle ne soit pleinement satisfaite. Pensant ainsi, Bhagavân Visnu vit la belle Devî Yoga Nidra S’iva briller dans l’air. Alors le suprême Yogi, Bhagavân Visnu, à l’esprit incommensurable, se mit à louer, les paumes jointes, ce grand Bhuvanes’varî Mahâ Kâli, le dispensateur des bienfaits pour la destruction des Dânavas. « Ô Devî ! Je m’incline devant Toi, ô Mahâmâyâ, la Créatrice et la Destructrice ! Toi sans commencement et sans mort ! Ô Chandike propice ! Le dispensateur de joie et de libération, je ne connais pas Tes formes Saguna ou Nirguna ; Comment puis-je alors connaître Tes actes glorieux, aussi innombrables soient-ils ? Aujourd’hui, j’ai expérimenté Tes prouesses indescriptibles, rendu insensible et inconscient par Ton pouvoir du sommeil. Essayé maintes et maintes fois par Brahmâ avec tant de soin pour me ramener à la conscience, je n’ai pas pu reprendre conscience, tant mes sens étaient contractés. Ô Mère ! Par Ton pouvoir, Tu m’as maintenu inconscient et Tu m’as de nouveau libéré du sommeil, et j’ai aussi lutté tant de fois. Ô dispensateur d’honneur ! Maintenant, je suis fatigué ; mais Tu as accordé une faveur aux deux Dânavas et c’est pourquoi ils ne se fatiguent pas. Ces deux Dânavas, gonflés d’orgueil, étaient prêts à tuer Brahmâ ; c’est pourquoi je les ai mis au défi de se battre avec moi et eux aussi se battent férocement avec moi dans ce vaste océan. Mais Tu leur as accordé la merveilleuse faveur qu’ils mourront quand ils le voudront ; et c’est pourquoi je suis venu à Ton refuge, car Tu protèges ceux qui viennent sous Ton abri. C’est pourquoi, ô Mère, toi qui dissipes les ennuis des Dévas ! Ces deux Dânavas sont extrêmement exaltés par Ton bienfait, et moi aussi je suis fatigué. C’est pourquoi viens à mon secours maintenant. Vois-tu ! Ces deux pécheurs sont prêts à me tuer ; sans Ta grâce, que puis-je faire maintenant ? Et où aller ?
50-59. Ainsi louée par l’éternel Vâsudeva Jagannâtha Hari, avec humilité et pranams, la Devî Mahâ Kâli, se reposant dans les airs, dit en souriant : « Ô Deva deva Hari ! Combats encore ; Ô Visnu ! Ces deux héros, trompés par Ma Mâyâ, seraient tués par toi ; Je les tromperai certainement, par Mon long regard à mes côtés ; Ô Nârâyana ! alors tuez rapidement les deux Dânavas, invoqués par Ma mâyâ. »
Français : Sûta dit : — En entendant ces paroles affectueuses de Bhagavatî, Bhagavân Visnu se rendit sur le lieu de la bataille au milieu de cet océan, lorsque les deux puissants Dânavas au tempérament serein et désireux de s’en prendre à eux, se réjouirent en voyant Visnu dans la bataille et dirent : — « Ô toi qui as quatre bras ! nous voyons que ton désir est vraiment très élevé ; eh bien, tiens-toi debout ! Tiens-toi debout ! Sois maintenant prêt pour la bataille, sachant que la victoire ou la défaite dépend sûrement du Destin. Tu devrais penser maintenant ainsi : — Bien qu’il soit généralement vrai que le plus puissant remporte la victoire ; mais il arrive aussi parfois que le faible obtienne la victoire par un étrange tour du Destin ; ainsi les personnes à l’âme élevée ne devraient pas se réjouir de leurs victoires, ni exprimer leur tristesse face à leur défaite ; alors ne te réjouis pas en pensant qu’à de nombreuses occasions tu as combattu de nombreux Dânavas qui étaient tes ennemis et que tu as remporté la victoire ; Ne sois pas désolé d’être vaincu par les deux Dânavas. » Ainsi parlant, le puissant Madhu Kaitabha s’approcha pour combattre. Voyant cela, Bhagavân Visnu les frappa aussitôt du poing avec une grande violence ; les deux Dânavas, exaltés par leur force, frappèrent Hari en retour de leurs poings. Le combat continua ainsi avec vigueur.
60-87. Voyant alors les deux Dânavas aux pouvoirs immenses se battre sans relâche, Nârâyana Hari jeta un regard empreint de profonde détresse vers le visage de la Devî Mahâkâli. Voyant Visnu ainsi affligé, la Devî rit bruyamment et se mit à fixer constamment les deux Asuras de ses yeux légèrement rougeâtres, des regards obliques empreints d’amour et de sentiments amoureux, tels des flèches de Cupidon. Les deux Daityas vicieux furent fascinés par les regards obliques de la Devî et y prirent un grand plaisir ; Extrêmement agités par ces traits amoureux, ils fixèrent d’un regard fixe la Devî, à l’éclat immaculé. Bhagavân Hari, lui aussi, vit le merveilleux et enchanteur passe-temps de la Devî. Alors Hari, parfaitement expert dans l’adoption de moyens pour parvenir à des fins, commença à parler en souriant et d’une voix comme celle du nuage errant, connaissant les deux Dânavas enchantés par Mahâmâyâ, ainsi :
Ô deux héros ! Je suis ravi de votre façon de combattre. Demandez-moi donc des faveurs. Je vous les accorderai. J’ai déjà vu de nombreux Dânavas se battre ; mais je ne les ai jamais vus aussi experts que vous, ni entendu de telles choses. Je suis donc très satisfait de vos pouvoirs incomparables. Ô couple de Dânavas si puissants ! Je souhaite vous accorder à tous les deux toutes les faveurs que vous désirez. Voyant la Devî Mahâmâyâ, la source de joie de l’Univers, les deux Dânavas se sentirent amoureux ; et ils furent fiers d’entendre ces paroles de Visnu et lui dirent, les yeux grands ouverts comme des lotus :
Ô Hari ! Que veux-tu nous donner ? Nous ne sommes pas des mendiants ; nous ne voulons rien de toi. Ô Seigneur des Devas ! Au contraire, nous te donnerons tout ce que tu désires ; nous sommes des donateurs, non des receveurs. Alors, ô Vâsudeva ! Hrisi Kesa ! Nous sommes heureux de voir ton merveilleux combat ; alors demande-nous tout ce que tu désires. En entendant leurs paroles, Bhagavân Janârdan dit : « Si vous êtes tous les deux si satisfaits de moi, alors je désire que vous soyez tous les deux tués par moi. » En entendant ces paroles de Vishnu, Madhu Kaitabha fut profondément étonné et pensa : « Nous sommes maintenant trompés », resta un moment plongé dans le chagrin. Puis, réfléchissant qu’il y a de l’eau partout et de la terre ferme nulle part, ils dirent :
Ô Janârdana Hari ! Nous savons que tu es véridique ; c’est pourquoi nous désirons maintenant que tu nous accordes ce bienfait que tu voulais nous accorder auparavant. Accorde-nous maintenant ce bienfait que nous désirons tant. Ô Madhusûdana ! Nous serons tués par toi ; mais tue-nous, ô Mâdhava ! sur une terre ferme, exempte de toute eau ; et ainsi, tiens parole.
S’ri Bhagavân Hari rit et, se souvenant de son disque Sudarsan, dit : « Ô deux êtres si fortunés ! En vérité, je vous tuerai tous les deux sur cette vaste étendue solide, sans la moindre trace d’eau. » Ainsi parlant, le Devadeva Hari ouvrit ses cuisses et montra à ces Dânavas la vaste étendue de terre solide à la surface de l’eau, puis dit :
« Ô deux Dânavas ! Voyez, il n’y a pas d’eau ici. Placez vos deux têtes ici ; ainsi je tiendrai parole et vous tiendrez parole. » En entendant cela, Madhu Kaitabha réfléchit et étendit leurs corps jusqu’à dix mille Yojanas. Bhagavân Visnu Hari étendit également ses cuisses au double. Voyant cela, ils furent profondément surpris et posèrent leurs têtes sur les cuisses de Visnu. Visnu, aux prouesses prodigieuses, coupa alors rapidement avec son disque Sudarsan les deux très grosses têtes sur ses cuisses. Ainsi, les deux Dânavas Madhu Kaitabha moururent ; et leur moelle (meda) emplit l’océan. Ô Munis ! C’est pourquoi cette terre est appelée Medinî et qu’elle est impropre à la consommation.
Ainsi, je vous ai décrit tout ce que vous avez demandé. En résumé, les sages doivent servir Mahâmâyâ de tout leur cœur. La Œuvre suprême est vénérée par tous les Dévas. En vérité, je vous le dis, il est établi dans tous les Védas et autres S’astras qu’il n’existe rien de plus élevé que cette Œuvre Âdyâ. Par conséquent, cette Œuvre suprême doit être vénérée de toute façon, soit sous sa forme Saguna, soit sous son état Nirguna.
Ainsi se termine le neuvième chapitre du premier Skandha sur le meurtre de Madhu Kaitabha dans le Mahâpurana S’rimad Devî Bhâgavatam de 18 000 versets du Maharsi Veda Vyâs.
Sur les bienfaits accordés par S’iva [ p. 33 ] 1-37. Les Risis dirent : — « Ô Sûta ! Tu as dit auparavant que Vyâsa Deva, esprit sans égal, composa tous les Purânas et les enseigna à son propre S’uka Deva ; mais comment Vyâsadeva, qui était sans cesse engagé dans la tapasyâ, [ p. 34 ] procréa-t-il S’uka ? Décrivez-nous en détail ce que vous avez entendu directement de Krisna Dvaipâyana Vyâsa. » Sûta dit : — « Ô Risis ! Écoute comment S’uka Deva, le meilleur des Munis et le plus éminent des Yogis, est né de Vyâsa Deva, le fils de Satyavati.
Sur le magnifique sommet du mont Meru, Vyâsa, fils de Satyavati, fermement déterminé, pratiqua des austérités très sévères pour obtenir un fils. Ayant entendu Nârada, lui, le grand ascète, répéta le mantra monosyllabique de Vâk et vénéra le Très-Haut Mahâmayâ dans le but d’obtenir un fils. Il demanda : « Qu’un fils me naisse aussi pur, aussi spirituel et aussi puissant que le feu, l’air, la terre et l’Âkâs’a. » Il songea que l’homme doué de S’akti est vénéré en ce monde et que l’homme dépourvu de S’akti est blâmé ici-bas. Il en conclut que la S’akti est donc vénérée partout ; il vénéra donc Bhagavân Mahes’vara associé à l’auspicieuse Âdyâ S’akti et passa cent ans sans nourriture. Il commença sa tapasyâ sur ce sommet de montagne orné du jardin de Karnikâr, où jouent tous les Devas, et où vivent les Munis hautement ascétiques, les Âdityas, Vasus, Rudras, Marut, les deux As’vîns, et les autres Risis attentifs, les connaisseurs de Brahmâ et où les Kinnaras font toujours résonner l’air de leurs chants musicaux, etc. ; un tel endroit que Vyâsa Deva préférait pour sa tapasyâ.
L’univers entier était imprégné de l’esprit d’ascèse de Vyâsa Deva, fils de l’intelligent Parâsara ; ses cheveux étaient hérissés et paraissaient fauves, couleur de flammes. Voyant le feu de son ascèse, Indra, le seigneur de S’achi, fut extrêmement terrifié. Bhagavân Rudra, voyant Indra ainsi effrayé, fatigué et morose, lui demanda : « Ô Indra, pourquoi as-tu l’air si effrayé aujourd’hui ? Ô Seigneur des Devas ! Quelle est la cause de ton chagrin ? Ne montre jamais ta jalousie ni ta colère aux ascètes ; car les ascètes attentifs pratiquent toujours une ascèse sévère avec un but noble et M’adorent, sachant que Je possède la toute-puissante S’akti ; ils ne veulent jamais de mal de personne. » À ces mots de Bhagavân Rudra, Indra lui demanda : « Quel est son but ? » Français À ce moment-là, S’ankara dit : — Pour obtenir un fils, le fils de Prasâra pratique des austérités si sévères ; maintenant cent ans s’achèvent ; j’irai à lui et lui donnerai aujourd’hui le bienfait auspicieux d’un fils. S’adressant ainsi à Indra, Bhagavân Rudra, le Guru du monde, alla vers Vyâsa Deva et, avec un regard miséricordieux, dit : — — Ô fils sans péché de Vâsavi ! Lève-toi ; je t’accorde le bienfait d’obtenir un fils très ardent, lumineux et fougueux comme les cinq éléments feu, air, terre, eau et Âkâs’a, le Jñânî suprême, le trésor de toutes les qualités auspicieuses, de grande renommée, aimé de tous, orné de toutes les qualités sattvik, véridique et valeureux.
[ p. 35 ]
En entendant ces douces paroles de Bhagavân S’ûlapâni, Maharsi Krisna Dvaipâyana s’inclina devant Lui et retourna à son ermitage. Fatigué par le travail pénitentiel de nombreuses années, il voulut allumer un feu en frottant deux combustibles (Aranî) l’un contre l’autre. Ce faisant, l’homme à l’âme noble se mit soudain à penser intensément à la procréation d’un fils. Il pensa : « Mon fils naîtra-t-il, ce feu étant produit par le frottement de deux bâtons ? Je n’ai pas l’épouse que les Pandits appellent une « Putrârani », la jeune épouse dotée de beauté, issue d’une famille noble, la chaste que je n’ai pas avec moi. Mais l’épouse, bien que chaste et apte à engendrer un fils, est indéniablement une chaîne aux deux jambes, alors comment puis-je en trouver une pareille pour ma femme ? Chacun sait qu’une épouse chaste, bien qu’habile dans les tâches ménagères, belle et comblant les désirs, est pourtant toujours une sorte d’asservissement. Quoi de plus que le Bhagavân Mahes’vara, toujours sous l’emprise d’une femme ? Comment, sachant et entendant tout cela, puis-je accepter la vie difficile de ce maître de maison ? Tandis qu’il réfléchissait ainsi, l’extraordinairement belle Apsarâ Ghritâchi tomba à sa vue, tout près de lui, dans l’air céleste.
Bien que Vyâsa Deva fût un Brahmâchâri (détenant le pouvoir secret de génération) d’un ordre très élevé, voyant soudain l’agile Apsarâ (une nymphe céleste) s’approcher de lui et le regarder de travers, il fut bientôt frappé par les flèches de Cupidon et se sentant angoissé, commença à penser à ce qu’il devait faire dans ce moment critique.
D’insupportables sentiments amoureux m’envahissent maintenant ; si je prends cette nymphe céleste, sachant que le Dharma guette partout, et qu’une femme est venue me ravir le précieux feu spirituel acquis par ma tapasyâ, alors les Munis, ascètes à l’âme noble, se moqueront de moi, pensant que j’ai complètement perdu la raison. Hélas ! Pourquoi, moi qui ai pratiqué pendant cent ans l’ascétisme le plus terrible, suis-je devenu si impuissant à la seule vue de cette Apsarâ ? Les Pandits déclarent que la vie de famille est la source de la procréation, du désir le plus cher et de tout bonheur ; à tel point qu’elle conduit toutes les âmes vertueuses aux plaisirs du Ciel et confère la Moksa (libération) aux Jñânins ; et si j’obtiens un bonheur aussi incomparable de la vie de ce maître de maison, je peux avoir cette Deva Kanyâ (la nymphe céleste), bien que blâmable. Mais ce bonheur ne m’arrivera pas par elle ; il n’y a aucun doute là-dessus. Alors, comment puis-je la prendre ? J’ai entendu de Nârada comment, dans les temps anciens, un roi nommé Pururavâ tomba sous les griffes d’Urvas’î et finit par ressentir une grande douleur, vaincu par elle.
Ainsi se termine le dixième chapitre sur l’octroi de la bénédiction de S’iva dans le Mahapurâna S’rîmad Devî Bhâgavatam de 18 000 versets du Maharsi Veda Vyâs.