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VÂGASANEYI-SAMHITÂ-UPANISHAD, PARFOIS APPELÉ ÎSÂVÂSYA OU ÎSÂ-UPANISHAD
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VAGASANEYI-SAMHIT-UPANISHAD.
1. Tout ce qui se meut sur terre doit être caché dans le Seigneur (le Soi). Lorsque tu auras abandonné tout cela, alors tu pourras en jouir. Ne convoite pas les richesses d’autrui !
2. Même si un homme désire vivre cent ans en accomplissant des œuvres, il en sera ainsi pour lui ; mais pas d’une autre manière : le travail ne s’attachera pas ainsi à l’homme.
3. Il y a les mondes des Asuras [^763] couverts d’une obscurité aveuglante. Ceux qui ont détruit leur moi (ceux qui accomplissent des œuvres sans avoir atteint la connaissance du vrai Soi) se rendent après la mort dans ces mondes.
4. Celui-là (le Soi), bien que ne bougeant jamais, est plus rapide que la pensée. Les Devas (sens) ne l’atteignent jamais, il marchait [^764] devant eux. Bien qu’immobile, il dépasse les autres qui courent. Mâtarisvan (le vent, l’esprit moteur) lui confère des pouvoirs [1]. [ p. 312 ] 5. Il bouge et il ne bouge pas ; il est loin, et pareillement proche [2]. Il est à l’intérieur de tout cela, et il est à l’extérieur de tout cela.
6. Et celui qui voit tous les êtres dans le Soi, et le Soi dans tous les êtres, ne s’en détourne jamais [3].
7. Quand, pour un homme qui comprend, le Soi est devenu toutes choses, quelle tristesse, quel trouble peut-il y avoir pour celui qui a une fois contemplé cette unité ?
8. Il [4] (le Soi) encerclait tout, brillant, incorporel, sans blessure, sans muscles, pur, intouchable par le mal ; un voyant, sage, omniprésent, existant par lui-même, il disposait toutes choses correctement pour les années éternelles.
9. Tous ceux qui adorent ce qui n’est pas la vraie connaissance (les bonnes œuvres), entrent dans des ténèbres aveugles ; ceux qui se délectent de la vraie connaissance, entrent, pour ainsi dire, dans des ténèbres plus grandes.
10. On dit que la connaissance véritable donne une chose, et que ce n’est pas la connaissance une autre. C’est ce que nous avons entendu du sage qui nous a enseigné [5].
11. Celui qui connaît en même temps la connaissance et la non-connaissance, surmonte la mort par la non-connaissance, et obtient l’immortalité par la connaissance.
12. Tous ceux qui adorent ce qui n’est pas la vraie cause, [ p. 313 ] entrent dans des ténèbres aveugles ; ceux qui se délectent de la vraie cause, entrent, pour ainsi dire, dans des ténèbres plus grandes.
13. Une chose, disent-ils, est obtenue par la connaissance de la cause ; une autre, disent-ils, par la connaissance de ce qui n’est pas la cause. C’est ce que nous avons entendu du sage qui nous a enseigné cela.
14. Celui qui connaît en même temps la cause et la destruction (le corps périssable), surmonte la mort par la destruction (le corps périssable), et obtient l’immortalité par (la connaissance de) la vraie cause.
15. La porte du Vrai est recouverte d’un disque d’or [6]. Ouvre-le, ô Pûshan, afin que nous puissions voir la nature du Vrai [7].
16. Ô Pûshan, seul voyant, Yama (juge), Sûrya (soleil), fils de Pragâpati, répands tes rayons et rassemble-les ! La lumière qui est ta plus belle forme, je la vois. Je suis ce qu’Il est (c’est-à-dire la personne dans le soleil) [8].
17. Souffle [9] à l’air, et à l’immortel ! Alors ce corps finira en cendres. Om ! Esprit, souviens-toi ! Souviens-toi de tes actes ! Esprit, souviens-toi ! Souviens-toi de tes actes [10] !
18. Agni, conduis-nous vers la richesse (béatitude) par un bon chemin, ô Dieu, qui sais toutes choses ! [ p. 314 ] Éloigne de nous le mal tortueux, et nous t’offrirons la plus grande louange ! (Ap. I, 189, 1.)
Cette Upanishad, bien qu’apparemment simple et intelligible, est en réalité l’une des plus difficiles à comprendre. Venant à la fin du Vâgasaneyi-samhitâ, où sont décrits les sacrifices et les hymnes des prêtres officiants, elle commence par déclarer que tout doit être soumis au Seigneur. Le nom « seigneur » est particulier, car il a une connotation bien plus personnelle qu’Âtman, Soi ou Brahman, les noms usuels donnés par les Upanishads à ce qui est l’objet de la connaissance suprême.
Vient ensuite la permission de poursuivre les sacrifices, à condition que tous les désirs aient été abandonnés. Et c’est ici que surgit notre première difficulté, qui a déconcerté les commentateurs anciens comme modernes.
Je vais d’abord tenter de justifier ma propre traduction. Je soutiens que l’Upanishad souhaite enseigner l’inutilité en soi de toute bonne œuvre, qu’on la qualifie de sacrificielle, légale ou morale, et pourtant, en même temps, reconnaître, sinon la nécessité, du moins l’innocuité des bonnes œuvres, à condition qu’elles soient accomplies sans motivation égoïste, sans désir de récompense, mais simplement comme une préparation à la connaissance supérieure, comme un moyen, en fait, de maîtriser toutes les passions et d’obtenir cette sérénité d’esprit sans laquelle l’homme est incapable d’accéder à la connaissance suprême. De ce point de vue, l’Upanishad pourrait bien dire : « Que l’homme veuille vivre ici-bas son temps, qu’il accomplisse même toutes les œuvres. » S’il sait seulement que tout doit être soumis au Seigneur, alors l’œuvre qu’il accomplit ne s’attachera pas à lui. Elle ne produira pas d’effets successifs, ni ne l’impliquera dans une succession de nouvelles naissances où il jouira de la récompense de ses œuvres, mais elle le laissera libre de jouir des bienfaits de la connaissance suprême. Cela aura servi de préparation à cette connaissance supérieure que l’Upanishad transmet et qui assure la liberté de nouvelles naissances.
L’expression « na karma lipyate nare » me semble n’admettre qu’une seule explication : le travail accompli ne s’attache pas à l’homme, pourvu qu’il ait acquis la plus haute connaissance. Des expressions similaires reviennent sans cesse. Lip fut sans doute utilisé à l’origine pour désigner les mauvaises actions qui s’enracinèrent en l’homme ; mais ensuite pour désigner tout travail, même le bon, s’il est accompli avec le désir d’une récompense. La doctrine des Upanishads est partout que l’orthodoxie et le sacrifice ne peuvent procurer qu’une béatitude limitée, [ p. 315 ], et qu’ils constituent un obstacle au véritable salut, qui ne peut être obtenu que par la connaissance. Dans notre passage, nous ne pouvons donc reconnaître qu’une seule signification : le travail ne s’attache pas à l’homme et ne le souille pas, pourvu qu’il sache, c’est-à-dire qu’il ait été éclairé par les Upanishads.
Saṅkara, dans son commentaire sur les Vedânta-sûtras III, 4, 7 ; 13 ; 14, adopte le même point de vue sur ce passage. L’adversaire de Bâdarâyana, en l’occurrence Gaimini lui-même, soutient que le karma, le travail, est indispensable à la connaissance, et entre autres arguments, il dit, III, 4, 7, qu’il est ainsi « Niyamât », « parce que la loi le prescrit ainsi ». Le passage auquel il est ici fait référence est, selon Saṅkara, notre verset même, qui, selon lui, devrait être traduit ainsi : « Que l’homme veuille vivre cent ans ici (dans ce corps) en accomplissant des œuvres ; ainsi, une mauvaise action ne s’attachera pas à toi, tant que tu seras un homme ; il n’y a pas d’autre moyen que celui-ci pour échapper à l’influence des œuvres. » En réponse à cela, Bâdarâyana dit, tout d’abord, III, 4, 13, que cette règle peut se référer à tous les hommes en général, et non à celui qui sait ; ou, III, 4, 14, si elle se réfère à un homme qui sait, qu’alors la permission d’accomplir des œuvres n’a pour but que d’exalter la valeur de la connaissance, le sens étant que même à un homme qui accomplit des sacrifices toute sa vie, le travail ne s’attache pas, s’il sait seulement ; — telle est la puissance de la connaissance.
Le même Sankara, qui voit ici très clairement que ce verset se réfère à un homme qui sait, l’explique dans l’Upanishad comme se référant à un homme qui ne sait pas (itarasyânâtmagñatayâtmagrahanâsaktasya). Cela signifierait alors : « Qu’un tel, tout en accomplissant des œuvres ici-bas, souhaite vivre cent ans. De cette manière, il n’y a pas d’autre moyen pour lui que celui-ci (l’accomplissement de sacrifices), afin qu’une mauvaise action ne s’enracine pas, ou qu’il ne soit pas souillé par une telle action. » Les premier et deuxième versets de l’Upanishad représenteraient ainsi les deux voies de la vie, celle de la connaissance et celle des œuvres, et les versets suivants expliqueraient les récompenses attribuées à chacune.
Mahîdhara, dans son commentaire sur le Vâgasaneyi-samhitâ, emprunte d’abord une voie médiane. Il traduirait ainsi : « Que celui qui accomplit l’Agnihotra et d’autres sacrifices, sans aucun désir de récompense, souhaite vivre ici cent ans. Si tu le fais, tu seras sauvé, pas autrement. Il existe de nombreuses routes qui mènent au ciel, mais une seule mène au salut, à savoir l’accomplissement de bonnes œuvres, sans aucun désir de récompense, qui produit un cœur pur. Le travail ainsi accompli, simplement comme préparation au salut, ne s’attache pas à l’homme, c’est-à-dire qu’il produit un cœur pur, mais n’entraîne aucune conséquence ultérieure. » Jusque-là, il est d’accord avec l’explication d’Uvata [11]. Il admet cependant une autre explication, de sorte que la deuxième ligne transmettrait le sens : « Si un homme vit ainsi (en accomplissant de bonnes œuvres), alors il n’y a pas d’autre moyen par lequel une mauvaise action ne devrait pas être enracinée ; c’est-à-dire que pour échapper au pouvoir du péché, il doit toute sa vie accomplir des actes sacrés. »
Suit une description du sort de ceux qui, plongés dans leurs œuvres, n’ont pas atteint la connaissance suprême et n’ont pas retrouvé leur véritable moi dans le Soi suprême, ou Brahman. Ce Brahman, bien que son nom ne soit pas utilisé ici, est alors décrit, et le salut est promis à l’homme qui voit toutes choses dans le Soi et le Soi en toutes choses.
Les versets 9 à 14 sont à nouveau pleins de difficultés, non pas tant en eux-mêmes que dans leur relation avec le système de pensée général qui prévaut dans les Upanishads et qui constitue le fondement de la philosophie du Vedânta. Les commentateurs varient considérablement dans leurs interprétations. Saṅkara explique l’avidyâ, la non-connaissance, par les bonnes œuvres, en particulier le sacrifice, accompli dans l’espoir d’une récompense ; vidyâ, ou la connaissance, par la connaissance des dieux, mais pas encore du Brahman suprême. La première est généralement censée conduire le sacrifiant au pitriloka, le monde des pères, d’où il retourne à une série de nouvelles naissances ; la seconde au devaloka, le monde des dieux, d’où il peut soit accéder au Brahman, soit entrer dans un nouveau cycle d’existences. La question se pose alors de savoir comment, dans notre passage, la première pourrait être considérée comme conduisant à une obscurité aveugle, et la seconde à une obscurité encore plus grande. Sans cette affirmation, je ne doute pas que tous les commentateurs auraient, comme d’habitude, pris vidyâ pour la connaissance du Brahman suprême, et avidyâ pour la croyance orthodoxe dans les dieux et les bonnes œuvres, la première assurant l’immortalité dans le sens de la liberté de nouvelles naissances, tandis que la récompense de la seconde est la béatitude au ciel pour une période limitée, mais sans liberté de nouvelles naissances.
Cette antithèse entre vidyâ et avidyâ me paraît si fermement établie que je ne peux me résoudre à l’abandonner ici. Bien que cette Upanishad ait son caractère très particulier, son objectif est, après tout, de transmettre la connaissance du Soi suprême, et non d’inculquer simplement une différence entre la foi dans les dieux ordinaires et les bonnes œuvres. Il a été clairement dit précédemment (verset 3) que ceux qui ont détruit leur Soi, c’est-à-dire qui n’accomplissent que des œuvres, [ p. 317 ] et ne sont pas parvenus à la connaissance du vrai Soi, vont dans les mondes des Asuras, qui sont couverts d’une obscurité aveugle. Si donc la même obscurité aveugle est dite au verset 9 comme étant le lot de ceux qui adorent la non-connaissance, cela ne peut désigner que ceux qui n’ont pas découvert le vrai Soi, mais se satisfont de l’accomplissement de bonnes œuvres. Et si ceux qui accomplissent de bonnes œuvres s’opposent à d’autres qui se délectent de la vraie connaissance, cette connaissance ne peut être que la connaissance du vrai Soi.
La difficulté qui a donc laissé Saṅkara perplexe est la suivante : comment, alors que l’on dit que le croyant orthodoxe entre dans une obscurité aveugle, le véritable disciple, qui a acquis la connaissance du vrai Soi, pourrait-il être dit entrer dans une obscurité encore plus grande ? Si Saṅkara, dans ce cas, semble avoir à peine saisi le sens de l’Upanishad, Uvaṅtā et Mahādāra proposent une explication bien plus satisfaisante. Ils perçoivent que l’accent doit être mis principalement sur les mots ubhayam saha, « les deux ensemble », dans les versets 11 et 14. La doctrine de certains philosophes du Vedānta était que les œuvres, bien qu’elles ne puissent à elles seules conduire au salut, sont utiles pour préparer à la connaissance la plus élevée, et que ceux qui s’imaginent pouvoir atteindre la connaissance la plus élevée sans une telle préparation préalable se trompent complètement. De ce point de vue donc, l’auteur de l’Upanishad pourrait bien dire que ceux qui s’adonnent à ce qui n’est pas la connaissance, c’est-à-dire aux œuvres sacrificielles et autres bonnes œuvres, entrent dans les ténèbres, mais que ceux qui se délectent entièrement de la connaissance, méprisant la discipline antérieure des œuvres, se trompent eux-mêmes et entrent dans des ténèbres encore plus grandes.
Le verset suivant affirme simplement que, selon l’enseignement des sages, la récompense du savoir est une chose, celle de l’ignorance, c’est-à-dire la confiance dans le sacrifice, en est une autre. Ici encore, Mahîdhara a raison en assignant le pitriloka, le monde des pères, comme récompense de l’ignorant ; le devaloka, le monde des dieux, comme récompense de l’illuminé, à condition que du monde des dieux ils passent à la connaissance du Soi suprême ou Brahman.
Le troisième verset apporte la plus forte confirmation de la vision de Mahîdhara. Il y est clairement établi que seul celui qui connaît à la fois l’ignorance et la connaissance peut être sauvé, car par les bonnes œuvres il surmonte la mort, expliquée ici par les œuvres naturelles, et par la connaissance il obtient l’Immortel, expliqué ici par l’unité avec les dieux, dernière étape menant à l’unité avec Brahman.
Uvata, qui partage le même point de vue sur ces versets, explique d’emblée, [ p. 318 ] et même plus hardiment que Mahîdhara [12], la vidyâ, ou connaissance, par brahmavigñâna, la connaissance de Brahman, qui par elle-même, et si elle n’est pas précédée d’œuvres, conduit à des ténèbres encore plus grandes que ce qu’on appelle l’ignorance, c’est-à-dire le sacrifice et l’orthodoxie sans connaissance.
Les trois versets correspondants, traitant de sambhûti et d’asambhûti au lieu de vidyâ et d’avidyâ, figurent en premier dans le Vâgasaneyi-samhitâ. Ils doivent nécessairement être expliqués conformément à notre explication des versets précédents : sambhûti doit correspondre à vidyâ, il doit désigner la véritable cause, c’est-à-dire Brahman, tandis qu’asambhûti doit correspondre à avidyâ, comme nom de ce qui n’est pas réel, mais seulement phénoménal et périssable.
Mahîdhara pense que ces versets se réfèrent aux Bauddhas, ce qui est difficilement admis, à moins de prendre le bouddhisme dans un sens très général. Uvata met les Lokâyatas à leur place [13]. Il est également curieux d’observer que Mahîdhara, suivant Uvata, explique d’abord l’asambhûti par la négation de la résurrection du corps, alors qu’il prend à juste titre sambhûti pour Brahman. J’ai principalement suivi le commentaire d’Uvata, sauf dans sa première explication de l’asambhûti, la résurrection [14]. Dans ce qui suit, Uvata explique à juste titre sambhûti par la seule cause de l’origine du monde entier, c’est-à-dire Brahman [15], alors qu’il prend vinâsa, la destruction, comme nom du corps périssable [16].
Saṅkara voit dans ces trois vers bien plus que Uvata. Il prend asambhûti comme nom de Prakriti, la cause non développée, et sambhûti comme nom du Brahman phénoménal ou Hiranyagarbha. Par l’adoration de ce dernier, l’homme acquiert des pouvoirs surnaturels, et par la dévotion au premier, il s’absorbe dans Prakriti.
Mahîdhara adopte également un point de vue similaire et admet, comme Sāṅkara, une autre interprétation : sambhûtim avinâsaṅm ka et avinâsena mrityum tîrtvâ. Dans ce cas, le sens serait : « Celui qui connaît l’adoration du développé et du non-développé surmonte la mort, c’est-à-dire le mal comme le péché, la passion, etc., par l’adoration du non-développé, tandis qu’il obtient par l’adoration du développé, c’est-à-dire de Hiraṅyagarbha, l’immortalité, l’absorption dans la Prakriṇi. »
Toutes ces explications forcées auxquelles recourent les commentateurs découlent des divergences d’opinions entre les diverses autorités quant à la valeur des œuvres. Notre Upanishad me semble affirmer la doctrine selon laquelle les œuvres, bien qu’inutiles en elles-mêmes, voire néfastes, si elles sont accomplies en vue d’une récompense présente ou future, sont nécessaires comme discipline préparatoire. C’est, ou fut longtemps, le point de vue orthodoxe. Chaque homme devait passer par les âsramas, ou stades d’étudiant et de chef de famille, avant d’être admis à la liberté d’un sannyâsin. Comme sur une échelle, aucun échelon ne devait être sauté. Ceux qui tentaient de le faire étaient considérés comme ayant enfreint l’ancienne loi et, à certains égards, peuvent être considérés comme les véritables précurseurs des bouddhistes.
Néanmoins, la doctrine opposée, selon laquelle un homme dont l’esprit était devenu éclairé pouvait immédiatement se libérer des chaînes de la loi, sans accomplir tous les devoirs fastidieux d’étudiant et de chef de famille, avait également de solides partisans parmi les philosophes orthodoxes. Des cas de conversion aussi rapide se produisent dans les traditions anciennes, et Bâdarâyana lui-même fut obligé d’admettre la possibilité de la liberté et du salut sans œuvres, tout en maintenant la supériorité de la voie habituelle, qui menait progressivement des œuvres à l’illumination et au salut [17]. C’est par réticence à adhérer à l’enseignement catégorique de l’Îsâ-upanishad que Saṅkara tenta d’expliquer vidyâ, la connaissance, dans un sens limité, comme la connaissance des dieux, et non pas encore la connaissance de Brahman. Il refusait d’admettre que la connaissance sans œuvres puisse conduire à l’obscurité, et même à une obscurité plus grande que les œuvres sans connaissance. Notre Upanishad semble avoir redouté le libertinage, la connaissance sans les œuvres, plus encore que le ritualisme, les œuvres sans la connaissance, et son véritable objet était de montrer que l’orthodoxie et le sacrifice, bien qu’inutiles en eux-mêmes, doivent toujours former la préparation à l’illumination supérieure.
À quel point l’explication de Saṅkara peut s’avérer trompeuse, nous pouvons le constater en lisant la traduction de cette Upanishad par Rammohun Roy. Il a suivi Saṅkara implicitement, et voici le sens qu’il a tiré du texte :
49. Ceux qui observent les rites religieux et qui n’accomplissent que le culte du feu sacré et les oblations aux sages, aux ancêtres, aux hommes et aux autres créatures, sans tenir compte du culte des dieux célestes, entreront dans la région obscure ; et ceux qui pratiquent les cérémonies religieuses et qui adorent habituellement les dieux célestes seulement, sans tenir compte du culte du feu sacré et des oblations aux sages, aux ancêtres, aux hommes et aux autres créatures, entreront dans une région encore plus obscure que la première.
'11. Parmi ces observateurs de cérémonies, quiconque, sachant que l’adoration des dieux célestes, ainsi que le culte du feu sacré et l’oblation aux sages, aux ancêtres, aux hommes et aux autres créatures, doivent être observés de la même manière par le même individu, les accomplit tous les deux, surmontera, au moyen de ce dernier, les obstacles présentés par les tentations naturelles et atteindra l’état des dieux célestes par la pratique du premier.
'12. Les observateurs de rites religieux qui vénèrent Prakriti seule (Prakriti ou la nature, qui, bien qu’insensible, influencée par l’Esprit Suprême, opère dans tout l’univers) entreront dans la région obscure ; et les pratiquants de cérémonies religieuses qui se consacrent uniquement au culte de la particule sensible opérante antérieure, allégoriquement appelée Brahmá, entreront dans une région beaucoup plus obscure que la première.
‘14. Parmi ces observateurs de cérémonies, quiconque, sachant que l’adoration de Prakriti et celle de Brahma doivent être observées ensemble par le même individu, les accomplit toutes les deux, surmontera l’indigence grâce à cette dernière et atteindra l’état de Prakriti grâce à la pratique de la première.’
311:1 Asury`â, Vâg. Samhitâ; asûryâ, Upan. Dans les Upanishads, Asuryà, au sens d’appartenance aux Asuras, c’est-à-dire aux dieux, est exceptionnel. Je préférerais asûryá, sans soleil, comme on le trouve asûryé támasi dans le Rig-veda, V, 32, 6. ↩︎
311:2 Pûrvam arsat, Vâg. Samh.; pûrvam arshat, Upan. Mahîdhara suggère également arsat comme contraction de a-risat, qui ne périt pas. ↩︎
311:3 Apas est expliqué par karmâni, actes, auquel cas il serait destiné à ápas, opus. Mais le Vâg. Samhitâ accentue apás, c’est-à-dire 312 aquas, et Ânandagiri explique que l’eau représente les actes, car la plupart des actes sacrificiels sont accomplis avec de l’eau. ↩︎
312:1 Tad dans l’antiquité, Vâg. Samh.; tadvad antique, Upan. ↩︎
312:2 Vikiktsati, Vâg. Samh.; vigugupsate, Upan. ↩︎
312:3 Saṅkara prend le sujet pour le Soi et explique les adjectifs neutres comme masculins. Mahîdhara prend le sujet pour l’homme qui a acquis une connaissance du Soi et qui atteint le Brahman brillant et incorporel, etc. Mahîdhara, cependant, admet également la première explication. ↩︎
312:4 Cf. Talavak. En haut. Moi, 4; vidyâyah, avidyâyah, Vâg. Avec toi.; Vidyayâ, Avidyayâ, Upan. ↩︎
313:1 Mahîdhara sur le verset 17 : ‘Le visage du vrai (purusha dans le soleil) est couvert par un disque d’or.’ ↩︎
313:2 Cf. Maitr. Up. VI, 35. ↩︎
313:3 Asau purushah devrait probablement être omis. ↩︎
313:4 Ces lignes sont censées être prononcées par un homme à l’heure de la mort. ↩︎
313:5 Le Vâgasaneyi-samhitâ dit : Om, krato smara, klibe smara, kritam smara. Uvata soutient qu’Agni, le feu, qui a été adoré dans la jeunesse et l’âge adulte, est ici invoqué sous la forme de l’esprit, ou que kratu est destiné au sacrifice. « Agni, souviens-toi de moi ! Pense au monde ! Souviens-toi de mes actes ! » ↩︎
316:1 Uvata explique gigîshivisheh pour gigîvishet comme un purushavyatayah. ↩︎
318:1 Mahîdhara décide en fin de compte que vidyâ et amritam doivent ici être pris dans un sens limité ou relatif, tasmâd vidyopâsanâmritam kâpekshikam iti dik, et est donc globalement d’accord avec Saṅkara, pp. 25-27. ↩︎
318:2 Shad anushtubhah, lokâyatikâh prastûyante yesham etad daranam. ↩︎
318:3 Mon Seigneur, je t’ai envoyé mon âme, et je t’ai envoyé mon amour, car je t’ai envoyé mon amour, car je t’ai envoyé mon amour. ↩︎
318:4 Samastasya gagatah sambhavaikkahetu brahma. ↩︎