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TROISIÈME VALLÎ, OU, LE CHAPITRE DE BHRIGU.
Harih, Om ! Puisse-t-il (le Brahman) nous protéger tous les deux ! Puisse-t-il nous réjouir tous les deux ! Puissions-nous acquérir de la force ensemble ! Puisse notre connaissance devenir brillante ! Puissions-nous ne jamais nous quereller ! Paix ! paix ! paix [1] !
Bhrigu Vâruni alla voir son père Varuna et lui dit :
« Monsieur, enseigne-moi Brahman. » Il lui dit ceci, à savoir : la nourriture, le souffle, l’œil, l’oreille, l’esprit, la parole.
Puis il lui dit encore : « Ce d’où naissent ces êtres, ce par quoi, à leur naissance, ils vivent, ce dans quoi ils entrent à leur mort, essaie de savoir cela. C’est Brahman. »
Il a fait pénitence. Ayant fait pénitence…
Il comprit que la nourriture est Brahman, car c’est de la nourriture que ces êtres sont produits ; par la nourriture, lorsqu’ils naissent, ils vivent ; et dans la nourriture ils entrent à leur mort.
Ayant compris cela, il retourna vers son père Varuna et lui dit : « Seigneur, enseigne-moi Brahman. » Il lui dit : « Essaie de connaître Brahman par la pénitence, car la pénitence est le moyen de connaître Brahman. »
Il a fait pénitence. Ayant fait pénitence…
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Il perçut que le souffle [2] est Brahman, car du souffle ces êtres naissent ; par le souffle, lorsqu’ils naissent, ils vivent ; dans le souffle ils entrent à leur mort.
Ayant compris cela, il retourna vers son père Varuna et lui dit : « Seigneur, enseigne-moi Brahman. » Il lui dit : « Essaie de connaître Brahman par la pénitence, car la pénitence est le moyen de connaître Brahman. »
Il a fait pénitence. Ayant fait pénitence…
Il a perçu que l’esprit (manas) est Brahman, car de l’esprit ces êtres naissent ; par l’esprit, lorsqu’ils naissent, ils vivent ; dans l’esprit ils entrent à leur mort.
Ayant compris cela, il retourna vers son père Varuna et lui dit : « Seigneur, enseigne-moi Brahman. » Il lui dit : « Essaie de connaître Brahman par la pénitence, car la pénitence est le moyen de connaître Brahman. »
Il a fait pénitence. Ayant fait pénitence…
Il percevait que la compréhension (vig_ñ_âna) était Brahman, car de la compréhension naissent ces êtres ; par la compréhension, lorsqu’ils naissent, ils vivent ; dans la compréhension ils entrent à leur mort.
Ayant compris cela, il retourna vers son père Varuna et lui dit : « Seigneur, enseigne-moi Brahman. » Il lui dit : « Essaie de connaître Brahman par la pénitence, car la pénitence est (le moyen de connaître) Brahman. »
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Il a fait pénitence. Ayant fait pénitence…
Il a perçu que la félicité est Brahman, car de la félicité naissent ces êtres ; par la félicité, lorsqu’ils naissent, ils vivent ; dans la félicité ils entrent à leur mort.
Telle est la connaissance de Bhrigu et Varuna 1, exaltés au plus haut des cieux (dans le cœur). Celui qui connaît cela devient exalté, devient riche en nourriture et capable de manger sainement, devient grand par sa descendance, son bétail et la splendeur de sa connaissance (de Brahman), grand par sa renommée.
Qu’il n’abuse jamais de la nourriture, c’est la règle.
Le souffle est nourriture 2, le corps mange la nourriture. Le corps repose sur le souffle, le souffle repose sur le corps. Telle est la nourriture qui repose sur la nourriture. Celui qui connaît cette nourriture qui repose sur la nourriture 3, demeure exalté, devient riche en nourriture et capable de manger (en bonne santé), devient grand par sa progéniture, son bétail et la splendeur de sa connaissance (de Brahman), grand par sa renommée.
Qu’il ne fuie jamais la nourriture, telle est la règle. L’eau est nourriture, la lumière mange la nourriture. La lumière repose sur l’eau, l’eau repose sur la lumière. Telle est la nourriture qui repose [ p. 67 ] sur la nourriture [3]. Celui qui connaît cette nourriture qui repose sur la nourriture, demeure exalté, devient riche en nourriture, et capable de manger de la nourriture (saine), devient grand par sa descendance, son bétail et la splendeur de sa connaissance (de Brahman), grand par sa renommée.
Qu’il acquière beaucoup de nourriture, telle est la règle. La terre est nourriture, l’éther mange la nourriture. L’éther repose sur la terre, la terre repose sur l’éther. Telle est la nourriture reposant sur la nourriture. Celui qui connaît cette nourriture reposant sur la nourriture, demeure exalté, devient riche en nourriture et capable de manger (sain), devient grand par sa descendance, son bétail et la splendeur de sa connaissance (de Brahman), grand par sa renommée.
1. Qu’il ne repousse jamais (un étranger) de sa maison, telle est la règle. C’est pourquoi un homme doit absolument se procurer beaucoup de nourriture, car les gens (bienveillants) disent (à l’étranger) : « Il y a de la nourriture prête pour lui. » S’il donne de la nourriture en abondance, la nourriture lui sera donnée en abondance. S’il donne de la nourriture équitablement, la nourriture lui sera donnée équitablement. S’il donne de la nourriture modestement, la nourriture lui sera donnée modestement.
2. Celui qui sait cela (reconnaît et vénère Brahman [4]) comme possession dans la parole, comme acquisition et possession dans l’inspiration (prâna) et l’expiration (apâna) ; comme action dans les mains ; comme marche dans les pieds ; comme évacuation dans l’anus. Telles sont les reconnaissances humaines (de Brahman tel que manifesté dans les actions humaines). Viennent ensuite les reconnaissances (de [ p. 68 ] Brahman) en référence aux Devas, à savoir : comme satisfaction dans la pluie ; comme puissance dans la foudre ;
3. Comme la gloire du bétail ; comme la lumière des étoiles ; comme la procréation, l’immortalité et la félicité dans le membre ; comme tout dans l’éther. Qu’il adore cela (Brahman) comme support, et il devient support. Qu’il adore cela (Brahman) comme grandeur (mahah), et il devient grand. Qu’il adore cela (Brahman) comme esprit, et il devient doté d’esprit.
4. Qu’il adore cela (Brahman) par adoration, et tous ses désirs s’inclinent devant lui en adoration. Qu’il adore cela (Brahman) comme Brahman, et il sera possédé par Brahman. Qu’il adore cela comme l’absorption des dieux [5] en Brahman, et les ennemis qui le haïssent périront tout autour de lui, tout autour de lui mourront les ennemis qu’il n’aime pas.
Celui [6] qui est ceci (Brahman) dans l’homme, et celui qui est cela (Brahman) dans le soleil, tous deux sont un.
5. Celui qui sait cela, lorsqu’il a quitté ce monde, après avoir atteint et compris le Soi qui consiste en nourriture, le Soi qui consiste en souffle, le Soi qui consiste en esprit, le Soi qui consiste en compréhension, le Soi qui consiste en félicité, entre et prend possession de ces mondes, et ayant autant de nourriture qu’il le souhaite, et assumant autant de formes qu’il le souhaite, il s’assoit en chantant ce Sâman (de Brahman) : 'Hâvu, hâvu, hâvu ! [ p. 69 ] 6. 'Je suis nourriture (objet), je suis nourriture, je suis nourriture ! Je suis le mangeur de nourriture (sujet), je suis le mangeur de nourriture, je suis le mangeur de nourriture ! Je suis le poète (qui joint les deux ensemble), je suis le poète, je suis le poète ! Je suis le premier-né du Droit (rita). Devant les Dévas, j’étais au centre de tout ce qui est immortel. Celui qui me donne, seul, me préserve : celui qui mange de la nourriture, je la mange comme nourriture.
« Je surmonte le monde entier, moi, doté de lumière dorée [7]. Quiconque sait cela, (atteint tout cela). » Telle est l’Upanishad [8].
64:1 Le même paragraphe, comme précédemment (II, 1), apparaît à la fin de la Katha-upanishad, et ailleurs. ↩︎
65:1 Ou vie ; voir Brih. Âr. Up. IV, 1, 3. ↩︎
67:1 L’interdépendance de l’eau et de la lumière. ↩︎
67:2 Brâhmanaupâsanaprakâtrah. ↩︎
68:1 Cf. Kaush. Up. II, 12. Ici est décrite l’absorption des dieux du feu, du soleil, de la lune et de la foudre dans le dieu de l’air (vâyu). Saṅkara ajoute le dieu de la pluie et montre que l’air est identique à l’éther. ↩︎
68:2 Cf. II, 8. ↩︎
69:1 Si nous lisons suvarnagyotih. Le commentateur lit suvar na gyotih. c’est-à-dire que la lumière est comme le soleil. ↩︎
69:2 Après l’Anukramanî suit la même invocation qu’au début de la troisième Vallî, « Qu’elle nous protège tous les deux », etc. ↩︎