Chapitre XXIV : Questions relatives au service (Ijārāt) | Page de titre | Chapitre XXVI : Dons (Hibah et Waqf) |
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« Lorsque vous traitez entre vous pour une dette à durée déterminée, écrivez-la et laissez celui qui doit la dicter » (2:282).
« Et si vous êtes en voyage et que vous ne trouvez pas de scribe, alors un gage peut être pris en possession » (2:283).
« Allah a autorisé le commerce et interdit l’usure » (2:275).
« Et si le débiteur est dans la détresse, qu’il y ait un sursis jusqu’à ce qu’il soit à l’aise ; et si vous le remettez en aumône, ce serait mieux pour vous, si vous saviez » (2:280).
Le prêt et l’emprunt sont une condition nécessaire des transactions humaines, et les règles qui s’y rapportent sont établies dans le Saint Coran. Chaque transaction de ce type doit être écrite et l’écriture doit être dictée par la personne qui doit la dette (v. 1). Cette dernière directive préserve le débiteur contre toute injustice. L’hypothèque des biens est également autorisée (v. 2). Mais la condition apparente d’être en voyage ou de ne pas avoir de scribe n’est qu’une déclaration des difficultés dans lesquelles cela devient une nécessité. L’exercice d’un commerce et le fait d’en tirer un profit sont placés sur un pied d’égalité avec le prêt d’argent à intérêt, le premier étant le fruit du travail tandis que le second conduit à l’aisance et à l’amour immodéré de la richesse (v. 3). Un débiteur dans des circonstances difficiles doit être traité avec indulgence, et s’il est incapable de payer, la dette doit être annulée (v. 4).
Le fait de contracter des dettes était découragé et le Saint Prophète cherchait refuge dans ses prières contre les dettes et contre le péché (h. 1). Lorsqu’on lui apporta un cercueil et qu’on lui dit que le défunt était mort endetté et n’avait rien laissé pour le paiement, il refusa de diriger le service lui-même jusqu’à ce que quelqu’un se charge du paiement de sa dette (h. 2). Le fait de contracter une dette alors qu’un homme n’avait pas l’intention de la payer est dénoncé (h. 3). L’anxiété du Saint Prophète à payer ses dettes est montrée à la h. 4. Il est recommandé d’accorder un répit à un débiteur et la remise de la dette lorsque le débiteur se trouve dans une situation difficile (H. [p. 317] xxii:5). Le paiement d’une somme supérieure à la somme réellement due par une personne n’est pas un intérêt ; en revanche, il est considéré comme une bonté (h. 5). Le report du paiement par quelqu’un qui en a les moyens est condamné comme injuste (h. 6). et peut même être puni (h. 7). L’Etat musulman est tenu de payer les dettes de ceux qui contractent des dettes par nécessité, il doit même entretenir les familles abandonnées (h. 8). L’hypothèque des biens en guise de garantie pour le paiement des dettes est autorisée, et le créancier hypothécaire est autorisé à en tirer profit (h. 9, 10). Le cas d’insolvabilité est traité dans hh. 11, 12. L’usure, même l’intérêt, est interdite, mais il est prophétisé qu’un temps viendra où les gens s’y impliqueront en général (hh. 13-15).
1 'Ā’ishah dit,
Le Messager d’Allah (paix et bénédiction d’Allah sur lui) avait pour habitude de prier, tout en disant les prières, et de dire :
« Ô Allah, je cherche refuge auprès de Toi contre le péché et contre les dettes. »
Quelqu’un lui demanda : « O Messager d’Allah, combien de fois cherches-tu refuge contre les dettes ? » Il dit :
« Quand un homme est endetté, il parle et ment, et il promet et rompt sa promesse. »
(Bible 43:10.)
2 Salamah a rapporté :
On apporta un cercueil au Prophète (sur lui la paix et le salut) pour qu’il fasse des prières [p. 320] funéraires sur lui. Il dit : « Avait-il des dettes ? » Ils dirent : « Non. » Il fit donc des prières sur lui. On lui apporta un autre cercueil et il dit : « Avait-il des dettes ? » Ils dirent : « Oui. » Il dit : « Fais des prières sur ton compagnon. » Abu Qatadah dit : « Je paierai sa dette, ô Messager d’Allah ! » Il fit donc des prières funéraires sur lui.[1]
(Bible 39:3.)
3 Abu Hurairah a rapporté :
Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a dit :
« Quiconque contracte une dette avec l’intention de la rembourser, Allah la remboursera [p. 319] à sa place,2 et quiconque contracte une dette avec l’intention de la gaspiller, Allah le ruinera. »
(Bible 43:2.)
4 Abū Dharr dit : « J’étais avec le Prophète, paix et bénédictions d’Allah sur lui. » Lorsqu’il vit (le mont) Uhud, il dit :
« Je n’aime pas que cette (montagne) soit transformée en or pour moi, alors il devrait rester avec moi un dinar de cela au-delà de trois jours, sauf un dinar que je devrais garder pour le paiement d’une dette. »
Puis il dit :
« Les plus riches sont les plus pauvres, sauf celui qui distribue sa richesse de telle ou telle manière, et ils sont très peu nombreux. »[2]
(Bible 43:3.)
5 Jabir a dit,
Je suis venu voir le Prophète (paix et bénédictions d’Allah sur lui) alors qu’il était à la mosquée ; il a dit :
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« Dis deux rak’ahs de prière. » Et il avait une dette envers moi ; il me l’a donc payée et m’a donné plus (que ce qui était dû).[3]
(Bible 43:7.)
6 Abū Hurairah a dit :
Le Messager d’Allah (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a dit :
«Retarder le paiement d’une dette par une personne aisée est une injustice.»
(Bible 43:12.)
7 Il est rapporté que le Prophète, paix et bénédictions d’Allah sur lui, a dit :
« Le report du paiement par celui qui en a les moyens légalise sa peine et son honneur. »[4]
(Bible 43:11)
8 Abū Hurairah a rapporté :
Le Prophète (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a dit :
« Quiconque laisse des biens, ils appartiennent à ses héritiers et quiconque laisse une charge, elle sera à notre charge. »[5]
(Bible 43:11.)
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9 'A’ishah dit : Le Prophète, paix et bénédictions d’Allah sur lui, acheta de la nourriture à un Juif contre paiement à une date fixée, et il hypothéqua pour cela une cotte de mailles en fer.
(B. 43:l.)
10 Abū Hurairah a dit :
Le Messager d’Allah (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a dit :
« L’animal hypothéqué peut être utilisé pour monter, lorsqu’il est hypothéqué, en raison de ce qui est dépensé pour lui, et le lait d’un animal laitier peut être bu lorsqu’il est hypothéqué, et la dépense sera supportée par celui qui monte (l’animal) et boit (le lait). »[6]
(Bible 48:4.)
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11 Abū Huraira-dit, Le Messager d’Allah, paix et bénédiction d’Allah sur lui, a dit :
« Quiconque trouve son bien chez un homme devenu insolvable, a un droit plus grand sur lui que les autres. »
(B. 43:14)
12 Sa’id ibn al-Musayyib a dit :
'Uthmān a décidé que quiconque prend son dû avant qu’un homme ne devienne insolvable, il lui appartient, et quiconque reconnaît sa propriété elle-même avec un insolvable a un plus grand droit sur elle.[7]
(Bible 43:14.)
13 'A’ishah dit.
Lorsque les versets du chapitre al-Baqarah, relatifs à l’usure, furent révélés, le Prophète, paix et bénédictions d’Allah sur lui, sortit [p. 323] à la mosquée et les récita aux gens, puis il interdit le commerce des boissons alcoolisées.[8]
(Bible 8:73.)
14 Jābir a rapporté,
Le Messager d’Allah (sur lui la paix et le salut) a maudit l’usurier, l’usurier, le notaire et les deux témoins. Il a dit :
« Ils se ressemblent. »[9]
(M-Msh. 12:4.)
15 Abû Hurairah rapporte :
Le Messager d’Allah (paix et bénédiction d’Allah sur lui) a dit :
« Un temps viendra sur les hommes où il ne restera pas un seul homme qui n’avale
Le hadith cité ici condamne le payeur d’usure, le scribe et les témoins ainsi que l’usurier, car ils encouragent le crime.
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l’usure, et si l’on ne l’avale pas, sa vapeur le surprendra. »[10]
(AD-Msh. 12:4.)
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Le Saint Prophète n’a pas interdit de dire des prières funéraires sur le cercueil d’une personne endettée. En refusant de dire lui-même des prières, il voulait seulement décourager l’habitude de contracter des dettes quand on n’avait pas les moyens de les payer. Selon une autre version du même hadith (B. 38:3), le Saint Prophète a fait des prières funéraires sur une personne endettée mais qui avait laissé des biens avec lesquels la dette pouvait être payée. Comme montré plus loin (h. 8), le Saint Prophète lui-même a entrepris le paiement des dettes de ceux qui sont morts endettés plus tard, lorsque le trésor public avait les moyens de les payer. ↩︎
Acquérir toujours plus de richesses devient une passion chez les gens riches, et cette passion les prive des sentiments humains les plus nobles. C’est pourquoi on dit qu’ils sont les plus pauvres. Le narrateur, tout en disant ceci et cela, agitait ses mains à droite et à gauche, pour montrer qu’il faut donner généreusement les richesses si l’on a la chance de les posséder. ↩︎
Ainsi, si le débiteur donne de son plein gré plus que ce qui lui est dû, ce n’est pas de l’usure ou de l’intérêt. ↩︎
La légalisation de 'irdz (honneur) est l’usage de paroles dures, et celle de 'uqūbah (punition) est l’emprisonnement (B. 43:13). Ainsi, seul l’homme riche peut être envoyé en prison pour avoir refusé de payer sa dette ; en ce qui concerne l’homme dans des circonstances difficiles, la loi de l’Islam est celle recommandée dans H. xxii:5 – la dette doit être remise. ↩︎
Kall (fardeau) comprend à la fois une famille à entretenir et des dettes à payer. C’est donc à l’État musulman qu’il incombe de prendre en charge à la fois l’entretien des familles délaissées et le paiement des dettes impayées. ↩︎
Les versets 9 et 10 montrent que la loi relative à l’hypothèque telle qu’elle est énoncée dans le Saint Coran (v. 2) ne se limite pas aux cas où l’on est en voyage ou lorsqu’il n’y a pas de scribe. La loi est générale, la seule limitation étant que le bien hypothéqué doit être en possession du créancier hypothécaire. Ce hadith montre que lorsqu’une personne doit dépenser de l’argent pour la chose hypothéquée, elle a le droit d’en tirer profit. Ainsi, une maison ou un terrain peut être hypothéqué à la condition que la possession soit transmise au créancier hypothécaire qui a le droit d’habiter la maison ou de la louer s’il effectue les réparations, et de cultiver la terre et d’en avoir le produit s’il dépense pour cela. ↩︎
Les règles énoncées dans hh. 11, 12 sont soumises à la condition qu’il n’y ait pas de collusion. ↩︎
Des parties des versets mentionnés ici sont citées dans le titre de ce chapitre (vv. 3, 4). Au v, 3. il est dit qu’Allah a permis le commerce et interdit l’usure, mais comme les boissons alcoolisées étaient interdites aux musulmans, le Saint Prophète a précisé, en récitant ce verset, que le commerce des boissons alcoolisées était également interdit. ↩︎
Le mot arabe traduit ici par usure est ribā (excès ou addition), et signifie une addition au-delà de la somme principale prêtée (LL), et comprend donc à la fois l’usure et l’intérêt. Le Saint Coran compare les dévoreurs d’usure à ceux que le Diable a prosternés par son toucher (2:275), p. 324 indiquant que l’usure conduit au pire égoïsme. L’Islam vise un système coopératif de commerce et de banque afin que le capitaliste partage le profit ainsi que la perte de l’emprunteur. L’idée sous-jacente à l’interdiction de l’intérêt sur l’argent est que le travail est un actif plus important que l’argent. ↩︎
Cette prophétie concerne l’époque actuelle. La civilisation matérielle a atteint son apogée et a amené un état de choses où aucune transaction ne peut être effectuée sans paiement d’intérêts. ↩︎