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Ton tapis de prière est taché de vin, si c’est le cas
Tu peux gagner la faveur du mage,
Les voyageurs dans le pays doivent savoir
Les us et coutumes de l’auberge.
HAFIZ.
Le vers cité ci-dessus, comme la plupart des écrits poétiques orientaux, est susceptible d’une interprétation mystique et beaucoup plus élevée que ne le laisse paraître une lecture purement superficielle. Il illustre particulièrement la forme allégorique sous laquelle la vie intellectuelle du philosophe religieux est traitée par les Perses, à savoir celle d’un voyage dont l’objet ultime est la connaissance de la Majesté infinie de Dieu ; un plan semblable à celui adopté à propos de la vie morale par notre propre John Bunyan dans le Voyage du pèlerin. Au début de leurs traités, le terme de voyageur est appliqué uniquement à l’homme intellectuel, mais le mot est ensuite utilisé d’une manière plus générale.
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Dans le sens général, de même que dans les écrits chrétiens l’homme est souvent appelé Voyageur ; il devient souvent identique à Disciple. M. Garcia de Tassy, dans un ouvrage déjà cité dans la préface, a très justement cité un verset de saint Thomas pour illustrer ce point :
Ecce panis angelorum
Fait cibus viatorum.
Les pages qui suivent sont consacrées à l’élucidation de ce système et des termes techniques qui y sont employés. Mais pour éviter de rompre la continuité de l’exposé, j’ai essayé de présenter un résumé de la philosophie mystique orientale du point de vue des auteurs musulmans, dont je tire principalement mes informations. Je dois donc partir du principe que les déclarations dogmatiques qui peuvent survenir au cours de l’ouvrage ne doivent pas être considérées comme des énonciations de ma propre opinion, mais comme une exposition des vues de ceux dont je tente d’exposer le système.
La première partie contiendra une explication de, 1, Les termes Voyageur, Route, Auberges ou Étapes et But. 2, Les mots Loi, Doctrine, Vérité et l’Homme Parfait, selon la définition orientale de ceux-ci. 3, Ce que l’on entend par Fraternité, Renonce, Attraction et Dévotion.
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Le deuxième, le récit soufiiste de, 1, la nature; 2, les attributs; 3, les œuvres de Dieu; 4, les quatre sources universelles.
Le troisième, une définition de, 1, Le Saint; 2, L’Office Prophétique.
Le quatrième, une dissertation sur l’influence des préjugés précoces sur la croyance.
Le cinquième, l’étude de l’homme.
Pour le bénéfice de ceux qui étudient la poésie orientale, j’ai ajouté une annexe contenant un glossaire des termes allégoriques et techniques en usage parmi les écrivains soufis.