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'Isâ Ibn Hisham nous raconta : Je revenais du Yémen et je me dirigeais vers mon pays natal. Je voyageais dans une nuit où rien de bon augure ne passait par la gauche, ni rien de mal augure par la droite, si ce n’est un lion. Or, lorsque la lame de l’aube fut tirée et que le front de l’astre du jour apparut, un cavalier entièrement armé apparut devant moi sur la plaine nue. Il me saisit à cause de lui, ce qui saisit un homme désarmé lorsqu’il avance. Mais je pris un air hardi, me levai et dis : « Peurs ta mère ! Lève-toi ! Avant de pouvoir atteindre ton but, tu devras endurer des blessures d’acier, dépouiller la gomme adragante de ses feuilles et affronter l’orgueil d’un Azdite. [1] Je suis pour la paix [2] si tu le veux, mais qui es-tu ? » Il répondit : « Tu as trouvé la paix et un compagnon de voyage selon ton désir. » Je dis alors : « Tu as bien répondu. » Nous avons donc continué notre voyage et, lorsque nous fûmes devenus intimes et que nous échangâmes des confidences, l’histoire fut révélée à Abú’l Fatḥ al-Iskanderí, et il m’interrogea sur le plus généreux des rois que j’avais rencontré. Je mentionnai alors les rois de Syrie et les plus généreux d’entre eux, les rois d’Irak et les nobles d’entre eux, et les émirs de [173] les provinces, et j’étendis [3] l’énumération aux rois d’Égypte. Je lui racontai ce que j’avais vu et je lui racontai les actes bienveillants des rois du Yémen et les bienfaits des rois de Ṭá’if, et je conclus l’éloge de tous en mentionnant Saif ad-Daula. Puis il récita en disant :
« O voyageur nocturne [4] par les étoiles de la nuit, les louant,
S’il avait vu le soleil, il n’aurait pas considéré ces choses comme ayant une quelconque importance,
Et, ô loueur des courants, je reconnais que tu n’as pas visité l’océan qui l’entoure, mais n’en sais-tu rien ?
Celui qui a vu la perle ne comparera pas une pierre avec elle,
Et quiconque a vu un Khalaf ne pensera à aucun autre homme.
Visitez-le et vous visiterez un roi à qui on a donné quatre, [5]
Que personne n’a acquis, observe-le donc et tu verras,
Ses jours sont lumineux et son visage est comme la lune,
Sa détermination est comme le destin et ses dons comme la pluie ;
Je n’ai cessé de louer les gens que je pensais
Pour être la pureté de l’époque mais, comparés à lui, ils étaient troubles.
Said ‘Isá ibn Hishám : Je demandai alors : « Quel est ce roi compatissant et généreux ? » Il répondit : « Comment peut-il y avoir ce que l’imagination ne peut pas saisir, et comment puis-je exprimer ce que la raison n’accepte pas ? Or, quand y a-t-il eu un roi qui dédaignait les hommes nobles quand ils donnaient de l’argent [6] alors que l’or, mille pièces, est la chose la plus facile à donner pour lui et rien ne le vexe que les mauvaises paroles ? » [7] Et une montagne de collyre est [174] diminuée par le style, alors comment se fait-il que cette générosité n’affecte pas sa fortune ? Et peut-il y avoir un roi qui, en matière de générosité, soit rattachable à la dilapidation, et, en matière de caractère, à la sublimité, et, en matière de religion, à la dévotion, et, en matière de royauté, à l’empire universel, et, en matière d’origine, au plus ancien, et, en matière de descendance, au plus récent ?
« Si seulement je savais [8] ce que celui dont ce sont les gracieuses qualités espère obtenir de plus en atteignant les Pléiades. »
Pour obtenir le sens requis à la ligne 11, p. 229 (Texte) pour … lire ….
172:1 An Azdite : Azd le nom d’une célèbre tribu arabe à laquelle appartenaient les héros arabes typiques, Shanfara et Taabbata Sharrn, et l’érudit et poète accompli Ibn Duraid. ↩︎
172:2 Je suis pour la paix: Littéralement, je suis la paix. ↩︎
173:1 … extended: Littéralement, j’ai conduit. ↩︎
173:2 O voyageur nocturne : Mètre, basit. ↩︎
173:3 … Quatre : C’est-à-dire quatre choses. ↩︎
173:4 … Argent : Littéralement, dirhems. ↩︎
173:5 … Mots méchants : Pour ce sens du mot, cf. …, p. 174 Il s’est tu sur mille mots et a ensuite prononcé la mauvaise chose. Cf. Lettres, p. 339, et :
…
« Celui qui m’insulte avec de mauvaises paroles, sa récompense sera de cent mille (d’entre elles). »
Pour un autre éloge extraordinaire de Khalaf, voir p. 433 des Lettres et p. 58 du Diwan. Le traitement cruel de Khalaf envers ses fils, sa trahison envers le gouverneur de Kirman et le meurtre du Qáḍí Abú Yúsuf montrent qu’il n’était pas le modèle d’excellence que Hamadhání le fait paraître. Voir Ibn al-Athír, ix, 58-9. ↩︎
174:1 Si seulement je savais : Mètre. basít. ↩︎