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QUATRIÈME LEÇON, INTIGUÉE MODES DE PAROLE [^413].
Un moine ou une nonne, entendant et percevant ces usages de la parole, doit savoir que les suivants ne doivent pas être employés et n’ont pas été employés jusqu’à présent (par des personnes de conduite exemplaire) : ceux qui parlent par colère ou par orgueil, par tromperie ou par intérêt, qui prononcent, consciemment ou inconsciemment, des paroles dures. Ils doivent éviter tout cela, qui est blâmable. En faisant preuve de jugement, ils doivent savoir ce qui est certain et ce qui est incertain [^414] : (1) (NN) avoir reçu de la nourriture ou ne pas en avoir reçu, l’avoir mangée ou ne pas l’avoir mangée, est venu ou n’est pas venu, vient ou ne vient pas, viendra ou ne viendra pas. (2)
Bien considérant (ce qu’il faut dire), parlant avec précision, il faut employer le langage avec modération et retenue : le singulier, le duel, le pluriel ; le féminin, le masculin, le neutre ; louange, blâme, [ p. 150 ] louange mêlée de blâme, blâme mêlé de louange ; passé, présent ou futur (temps), la première et la deuxième, ou la troisième personne [^415]. Si l’on juge nécessaire de parler au singulier, il faut le faire au singulier ; si l’on juge nécessaire de parler au pluriel, il faut le faire au pluriel, etc. Considérant bien : ceci est une femme, ceci est un homme, ceci est un eunuque, ceci doit être appelé ainsi, ceci doit être appelé autrement, parlant avec précision, il faut employer le langage avec modération et retenue. (3)
Pour éviter ces occasions de pécher, un mendiant doit savoir qu’il y a quatre sortes de discours : le premier est la vérité ; le deuxième est le mensonge ; le troisième est la vérité mêlée de mensonge ; ce qui n’est ni vérité, ni mensonge, ni vérité mêlée de mensonge, c’est le quatrième genre de discours : ni vérité ni mensonge [^416]. Ainsi dis-je.
Tous les Arhats passés, présents et futurs ont enseigné et déclaré, enseignent et déclarent, enseigneront et déclareront ces quatre sortes de discours ; et ils ont expliqué toutes ces choses qui sont dépourvues d’intellect, qui possèdent la couleur, l’odeur, le goût, le toucher, qui sont sujettes à la décomposition et à l’augmentation, qui possèdent diverses qualités. (4)
Un moine (ou une nonne) devrait savoir qu’avant (l’énonciation) la parole est une parole dans la non-existence (antérieure) [^417] ; que tant qu’elle est prononcée, elle est une parole (réelle) ; [ p. 151 ] que l’instant après qu’elle a été prononcée, la parole parlée est une parole dans la non-existence (subséquente). (5)
Un moine ou une nonne, bien réfléchis, ne doit pas utiliser un langage, qu’il soit vrai ou faux, ou mêlé de vérité et de mensonge, s’il est pécheur, blâmable, rude, cinglant, grossier, dur, conduisant au péché, à la discorde et aux factions, au chagrin et à l’outrage, à la destruction des êtres vivants. (6)
Un moine ou une nonne, en y réfléchissant bien, devrait utiliser un discours vrai et précis, ou un discours qui n’est ni vérité ni mensonge (c’est-à-dire des injonctions) ; car un tel discours n’est pas pécheur, blâmable, rude, cinglant, etc. (7)
Un moine ou une nonne, s’adressant à un homme qui, si on l’interpelle, ne répond pas, ne devrait pas dire : « Espèce de fou ! espèce de rustre [^418] ! espèce de Sûdra ! espèce de misérable ! espèce d’esclave ! espèce de chien ! espèce de voleur ! espèce de brigand ! espèce de tricheur ! espèce de menteur ! etc. ; tu es tel et tel ! tes parents [1] sont tels et tels ! » En y réfléchissant bien, ils ne devraient pas tenir un discours aussi coupable, blâmable, etc. (8)
Mais dans ce cas, ils devraient dire : « NN ! Ô toi qui as vécu longtemps ! Ô toi qui as vécu longtemps ! Ô laïc ! Ô élève ! Ô fidèle ! Ô amoureux de la foi ! » En y réfléchissant bien, ils devraient utiliser un langage aussi pur, irréprochable, etc. (9)
Un moine ou une nonne, s’adressant à une femme qui, si on l’interpelle, ne répond pas, ne doit pas dire : « Sale coquine ! Espèce de fille ! etc. » (répéter la liste ci-dessus de [ p. 152 ] injures adaptées aux femmes). En y réfléchissant bien, ils ne doivent pas employer de tels propos coupables, blâmables, etc. (10)
Un moine ou une nonne, s’adressant à une femme qui, si on l’interpelle, ne répond pas, doit dire : « Ô femme de longue vie ! Ô sœur ! Madame ! Madame ! Ô sœur converse ! Ô élève ! Ô fidèle ! Ô amoureuse de la foi ! » Après mûre réflexion, ils doivent employer un langage sans péché, sans reproche, etc. (11)
Un moine ou une nonne ne devrait pas dire : « Le dieu [2] du ciel ! le dieu de l’orage ! le dieu de la foudre ! le dieu qui commence à pleuvoir ! le dieu qui cesse de pleuvoir ! Que la pluie tombe ou qu’elle ne tombe pas ! Que les récoltes poussent ou qu’elles ne poussent pas ! Que la nuit diminue ou qu’elle ne diminue pas ! Que le soleil se lève ou qu’il ne se lève pas ! Que le roi triomphe ou qu’il ne triomphe pas ! » Ils ne devraient pas utiliser un tel langage. (12)
Mais connaissant la nature des choses, il devrait dire : « L’air ; le disciple de Guhya ; un nuage s’est rassemblé ou est descendu ; le nuage a plu. »
C’est là tout le devoir, etc.
Ainsi je dis. (13)
Un moine ou une nonne, voyant une maladie quelconque, ne devrait pas en parler ainsi : « Il a des furoncles, ou la lèpre, etc. » (voir I, 6, 1, § 3) ; sa main est coupée, ou son pied, son nez, son oreille, sa lèvre sont coupés. » Car comme toutes ces personnes, à qui on parle dans un tel langage, se mettent en colère, il ne faut donc pas, à bien y réfléchir, leur parler dans un tel langage. (1)
Un moine ou une nonne, voyant une quelconque qualité, devrait dire : « Il est fort, puissant, vigoureux, célèbre, bien fait, bien proportionné, beau. » Car comme toutes ces personnes, à qui on parle ainsi, ne se mettent pas en colère, il faut, en y réfléchissant bien, leur parler ainsi. (2)
Un moine ou une nonne, voyant des choses comme des murs ou des fossés, etc. (voir II, 3, 2, § 14), ne devrait pas en parler de cette manière : « Ceci est bien exécuté, finement exécuté, beau, excellent, (ainsi fait) ou à faire » ; ils ne devraient pas utiliser un langage aussi pécheur, etc. (3)
Un moine ou une nonne, voyant des murs, etc., devrait en parler de cette manière : « Ceci a été exécuté avec beaucoup d’efforts, avec péché, avec beaucoup de travail ; c’est très magnifique, c’est très beau, c’est très raffiné, c’est très beau » ; considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi sans péché, etc. (4)
Un moine ou une nonne, voyant de la nourriture, etc., préparée, ne devrait pas en parler de cette manière : « Ceci est bien exécuté, finement exécuté, beau, excellent, (ainsi fait) ou à faire » ; considérant bien, ils ne devraient pas utiliser un langage aussi pécheur, etc. (5)
Un moine ou une nonne, voyant de la nourriture, etc., préparée, devrait en parler de cette manière : « Ceci a été exécuté avec beaucoup d’effort, avec péché, avec beaucoup de travail ; c’est très bon, c’est excellent, c’est bien assaisonné, c’est très délicieux, c’est très agréable » ; considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi sans péché, etc. (6)
Un moine ou une nonne, voyant un homme, une vache, un buffle, un cerf, du bétail, un oiseau, un serpent, un animal aquatique d’une masse accrue, ne devrait pas en parler ainsi : « Il (ou elle) est gras, rond, bon à tuer ou à cuire » ; à bien y réfléchir, ils ne devraient pas utiliser un langage aussi pécheur, etc. (7)
Un moine ou une nonne, voyant un homme, une vache, etc., de plus en plus gros, devrait parler d’eux de cette manière : « Il est de plus en plus gros, son corps est bien développé, bien compacté, sa chair et son sang sont abondants, ses membres sont pleinement développés » ; considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi sans péché, etc. (8)
Un moine ou une nonne, voyant une sorte de vache (ou de bœuf), ne devrait pas en parler de cette façon : « Ces vaches devraient être traites ou apprivoisées ou couvertes, devraient tirer un chariot ou une voiture » ; en considérant bien, ils ne devraient pas utiliser un langage aussi pécheur, etc. (9).
Un moine ou une nonne, voyant une sorte de vache (ou de bœuf), devrait en parler de cette manière : « C’est une jeune vache, une vache laitière, elle donne beaucoup de lait, elle est petite ou grande, une bête de somme » ; en considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi exempt de péché, etc. (10)
Un moine ou une nonne, voyant de grands arbres dans les parcs, sur les collines ou dans les bois, devrait en parler de cette manière : « Ces (arbres) sont bons pour les palais, les portes, les maisons, les bancs, les verrous, les bateaux, les seaux, les tabourets, les plateaux, les charrues, les pioches (?), les machines, les poteaux, le moyeu d’une roue (?), les gandî [3], les sièges, les lits, les voitures, les hangars » ; en considérant bien, ils ne devraient pas utiliser un langage aussi pécheur, etc. (11).
Un moine ou une nonne, voyant de grands arbres dans les parcs, sur les collines ou dans les bois, devrait en parler de cette manière : « Ces arbres sont nobles, hauts et ronds, grands ; ils ont de nombreuses branches, des branches étendues, ils sont très magnifiques », etc. (voir § 4) ; en considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi pur, etc. (12)
Un moine ou une nonne, voyant beaucoup de fruits sauvages, ne devrait pas en parler ainsi : « Ils sont mûrs, ils doivent être cuits ou mangés, ils sont juste de saison, ou mous, ou ils viennent de se fendre » ; en considérant bien, ils ne devraient pas utiliser un langage aussi pécheur, etc. (13)
Un moine ou une nonne, voyant beaucoup de fruits sauvages, devrait en parler de cette manière : « Ils sont très abondants, ils contiennent beaucoup de graines, ils sont complètement développés, ils ont développé leur forme appropriée » ; en considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi sans péché, etc. (14)
Un moine ou une nonne, voyant beaucoup de légumes, ne devrait pas en parler de cette manière : « Ils sont mûrs, ils sont de couleur foncée, brillants, bons à être frits, rôtis ou mangés » ; en considérant bien, ils ne devraient pas utiliser un langage aussi pécheur, etc. (15)
Un moine ou une nonne, voyant beaucoup de légumes, devrait en parler de cette manière : « Ils sont grands, ils sont pleinement développés, ils sont forts, ils sont excellents, ils ont monté en graines, ils ont répandu leur graine, ils sont pleins de sève » ; considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi sans péché, etc. (16)
Un moine ou une nonne, entendant des sons de quelque sorte que ce soit, ne devrait pas en parler ainsi : « Ceci est un bon son, ceci est un mauvais son » ; considérant bien, ils ne devraient pas utiliser un langage aussi sans péché, etc. ; mais ils devraient les appeler bons, s’ils sont bons ; mauvais, s’ils sont mauvais ; considérant bien, ils devraient utiliser un langage aussi sans péché, etc. (17)
De la même manière, ils devraient parler des [ p. 156 ] (cinq) couleurs, comme le noir, etc. ; des (deux) odeurs, comme agréables ou désagréables ; des (cinq) goûts, comme piquants, etc. ; des (cinq) sortes de toucher, comme durs, etc. (18)
Un moine ou une nonne, mettant de côté la colère, l’orgueil, la tromperie et la cupidité, considérant bien, parlant avec précision, ce qu’il a entendu, pas trop vite, avec discernement, doit employer le langage avec modération et retenue.
C’est là tout le devoir, etc.
Ainsi je dis. (19)
Fin de la quatrième leçon, intitulée Modes de parole.
149:1 Bhâsagâya. ↩︎
149:2 Le commentateur comprend ce passage et le paragraphe suivant d’une manière différente : un homme de jugement mûr ne devrait pas émettre de telles affirmations positives, par exemple il est certain (qu’il pleuvra), ou ce n’est pas certain, etc. Il semble avoir été d’avis que l’interdiction de la dernière phrase, savvam etam sâvaggam vaggeggâ, s’étend également à la phrase suivante. Mais cela n’est pas probable, car etam se réfère généralement à ce qui précède, et imam à ce qui suit. ↩︎
150:1 Pakkakkhavayanam, parokkhavayanam. ↩︎