TROISIÈME CHAPITRE.
Comme au moment de la bataille, le lâche regarde derrière lui un fossé, un fourré ou une autre cachette [^774], (pensant que) personne ne sait qui va gagner ; (1)
[ p. 266 ]
« Un instant nous fera prendre la décision ; si nous perdons, nous fuirons. » Ainsi pense le lâche. (2)
Ainsi certains Sramanas, se sachant faibles, ont recours aux sciences mondaines [^776] lorsqu’ils voient qu’ils vont souffrir du besoin. (3)
(Ils disent) : « Qui sait ce qui me fera perdre ma sainteté, les femmes ou l’eau ? Si on nous interroge, nous parlerons (c’est-à-dire montrerons notre savoir). Nous n’avons pas d’autre ressource (en cas de besoin) ! » (4)
Ils sont prudents, comme ceux qui guettent un fossé, etc. Ceux qui doutent (de leur capacité de contrôle) sont comme des hommes ignorants du chemin. (5)
Mais les guerriers célèbres, chefs des héros au moment de la bataille, ne regardent pas derrière eux ; (ils pensent) et si tout finissait par la mort ? (6)
Un moine qui s’efforce de la même manière devrait rompre les liens qui le lient à sa maison. Délaissant toute entreprise, il devrait errer pour le bien de son âme. (7)
Certains insultent un moine qui mène une vie sainte. Mais ces insulteurs sont loin de la perfection [^777]. (8)
(Les insulteurs disent) : « Vous vivez comme les laïcs, étant attachés les uns aux autres, car (par exemple) vous demandez l’aumône pour un malade et la lui donnez. » (9)
« C’est pourquoi vous avez encore un attachement, étant obéissants à la volonté des uns et des autres ; vous n’avez pas la pureté produite par le droit chemin, et n’avez pas dépassé le Cercle des Naissances. » (10)
Or, un moine qui connaît (la vérité sur) Môksha [ p. 267 ] devrait leur répondre [^778] : « Vous parlez ainsi, hésitant entre deux modes de vie (à savoir, celui des chefs de famille et celui des moines). » (11)
« Vous mangez dans les récipients [^779] (des chefs de famille, et vous leur faites apporter de la nourriture pour un frère malade ; vous mangez des graines et buvez de l’eau froide [^780], et ce qui a été spécialement préparé (pour vous en cas de maladie). » (12)
« Vous êtes infecté de graves défauts, vous manquez de discernement et vos résolutions sont mauvaises. Il n’est pas bon de trop gratter une blessure, car elle ne fera qu’empirer [1]. » (13)
Ils devraient être instruits dans la vérité par quelqu’un qui la connaît et qui est libre de passions [2] : « Votre voie n’est pas la bonne, vous parlez et agissez sans considération. » (14)
«Votre discours est faible, comme la cime d’un bambou, (quand vous dites : un frère malade) peut manger la nourriture apportée par un maître de maison, mais pas celle apportée par un moine ! (15)
« (Et quand vous dites que) nos préceptes religieux ne sont sains que pour les chefs de famille (et non pour les moines, nous répondons que notre prophète n’avait) pas de telles idées (incohérentes) lorsqu’il enseignait (sa Loi). » (16)
Lorsque (ces hérétiques) ne peuvent prouver (leur affirmation) par aucun argument, ils abandonnent la discussion et se rabattent sur leur (affirmation) audacieuse. (17)
[ p. 268 ]
Vaincus par leurs passions et infectés par le mensonge, (ces hommes) ont recours à un langage grossier, comme les (sauvages) Taṅkana [3] (quand ils sont battus) ont recours à leurs collines. (18)
L’argumentation d’un moine en paix [4] doit posséder de nombreuses qualités. Il doit procéder de manière à ne pas exaspérer son adversaire. (19)
Suivant cette loi qui a été proclamée par le Kâsyapa, un moine en bonne santé doit soigner attentivement un frère malade. (20)
Connaissant la belle Loi, un moine sage et parfaitement retenu devrait supporter toutes les difficultés et errer jusqu’à ce qu’il atteigne la libération finale. (21)
Ainsi je dis.
[^780] : 265:1 Nûma = prakkhannam, giriguhâdikam.
[^786] : 267:3 Bîgôdaka.
[^790] : 268:2 Attasamâhiê = âtmasamâdhika.