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TRENTE-QUATRIÈME CONFÉRENCE. SUR LÊSYÂ [^548].
Je donnerai dans l’ordre la conférence sur Lêsyâ ; écoutez la nature des six Lêsyâs (produite par) Karman. (1)
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Écoutez 1. les noms, 2. les couleurs, 3. les goûts, 4. les odeurs, 5. les touches, 6. les degrés, 7. le caractère, 8. la variété, 9. la durée, 10. le résultat et 11. la vie des Lêsyâs. (2)
1. Ils sont nommés dans l’ordre suivant : noir, bleu, gris, rouge, jaune et blanc. (3)
2. Le Lêsyâ noir a la couleur d’un nuage de pluie, d’une corne de buffle, (du fruit de) Rishtaka [^549], ou de l’œil de la bergeronnette. (4)
Le Lêsyâ bleu a la couleur de l’Asôka bleu [^550], de la queue du Kasha [1], ou du lapis-lazuli. (5)
Le Lêsyâ gris a la couleur de la fleur d’Atasî [^552], des plumes du Kôkila, ou du collier des pigeons. (6)
Le Lêsyâ rouge a la couleur du vermillon, du soleil levant ou du bec d’un perroquet. (7)
Le Lêsyâ jaune a la couleur de l’orpiment, du curcuma ou des fleurs de Sana [2] et d’Asana [3]. (8)
Le Lêsyâ blanc a la couleur d’une conque, de la pierre aṅka [4], des fleurs de Kunda [5], du lait qui coule, de l’argent ou d’un collier de perles. (9)
3. Le goût du Lêsyâ noir est infiniment plus amer que celui du Tumbaka [6], (du fruit du) Nimb-tree [^558], ou du Rôhinî. (10)
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Le goût du Lêsyâ bleu est infiniment plus piquant que celui du Trikatuka [7] et du Hastipippalî. (11)
Le goût du Lêsyâ gris est infiniment plus acide que celui de la mangue verte et du Kapittha [^560]. (12)
Le goût du Lêsyâ rouge est infiniment plus agréable que celui de la mangue mûre et du Kapittha. (13)
Le goût du Lêsyâ jaune est infiniment meilleur que celui d’un excellent vin et de diverses liqueurs, du miel et du Mairêyaka [^561]. (14)
Le goût du Lêsyâ blanc est infiniment meilleur que celui des dattes, du raisin, du lait, du sucre confit et pilé. (15)
L’odeur des mauvais Lêsyâs (c’est-à-dire des trois premiers) est infiniment pire que celle du cadavre d’une vache, d’un chien ou d’un serpent. (16)
L’odeur des trois bonnes Lêsyâs est infiniment plus agréable que celle des fleurs odorantes et des parfums lorsqu’on les pile. (17)
5. Le contact du mauvais Lêsyâs est infiniment pire que celui d’une scie, de la langue d’une vache ou d’une feuille de teck. (18)
Le toucher des trois bons Lêsyâs est infiniment plus agréable que celui du coton, du beurre ou des fleurs de Sirîsha [8]. (19)
6. Les degrés [^563] des Lêsyâs sont trois, ou neuf, [ p. 199 ] ou vingt-sept, ou quatre-vingt-un, ou deux cent quarante-trois. (20)
7. Un homme qui agit sous l’impulsion des cinq Âsravas [9], ne possède pas les trois Guptis, n’a cessé de nuire aux six (espèces d’êtres vivants), commet des actes cruels, est méchant et violent, ne craint aucune conséquence [10], est malveillant et ne maîtrise pas ses sens — un homme avec de telles habitudes développe la Lêsyâ noire. (21, 22)
Un homme présentant les qualités suivantes : envie, colère, manque de maîtrise de soi, ignorance, tromperie, manque de modestie, cupidité, haine, méchanceté, insouciance, amour du plaisir ; un homme qui poursuit les plaisirs et ne s’abstient pas d’entreprises pécheresses, qui est méchant et violent – un homme ayant de telles habitudes développe la Lêsyâ bleue. (23, 24)
Un homme malhonnête en paroles et en actes, qui est vil, pas droit, un dissimulateur et un trompeur [11], un hérétique, un homme vil, un bavard de choses nuisibles et pécheresses, un voleur et plein de jalousie — un homme avec de telles habitudes développe la Lêsyâ grise. (25, 26)
Un homme humble, constant, exempt de tromperie et de curiosité, bien discipliné, retenu, attentif à ses études et à ses devoirs [12], qui aime la Loi et la respecte, qui a peur des choses interdites et s’efforce d’atteindre le plus grand bien — un homme de telles habitudes développe la Lêsyâ rouge. (27, 28)
Un homme qui a peu de colère, d’orgueil, de tromperie et d’avidité, dont l’esprit est tranquille, qui se contrôle, [ p. 200 ] qui est attentif à ses études et à ses devoirs, qui parle peu, est calme et maîtrise ses sens, un homme avec de telles habitudes développe le Lêsyâ jaune. (29, 30)
Un homme qui s’abstient de penser constamment à sa misère et à ses actes pécheurs, mais s’engage dans la méditation sur la Loi et la vérité seulement [13], dont l’esprit est apaisé, qui se contrôle, qui pratique les Samitis et les Guptis, qu’il soit encore soumis à la passion ou libre de passion, est calme et soumet ses sens — un homme de telles habitudes développe la Lêsyâ blanche. (31, 32)
8. Il y a autant de variétés [^569] de Lêsyâs qu’il y a de Samayas [^570] dans les innombrables Avasarpinîs et Utsarpinîs, et qu’il y a d’innombrables mondes. (33)
9. Un demi-muhûrta est la durée la plus courte, et trente-trois Sâgarôpamâs plus un muhûrta est la durée la plus longue du Lêsyâ noir. (34)
Un demi-muhûrta est la plus courte, et dix Sâgarôpamâs plus un Palyôpamâ et une partie d’Asamkhyêya est la plus longue durée du Lêsyâ bleu. (35)
Un demi-muhûrta est le plus court, et trois Sâgarôpamâs plus un Palyôpamâ et une partie d’Asamkhyêya constituent la durée la plus longue du Lêsyâ gris. (36)
Un demi-muhûrta est la plus courte, et deux Sâgarôpamâs plus un Palyôpamâ et une partie d’Asamkhyêya constituent la durée la plus longue du Lêsyâ rouge. (37)
Un demi-muhûrta est la durée la plus courte, et dix Sâgarôpamâs plus un muhûrta est la durée la plus longue du Lêsyâ jaune. (38)
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Un demi-muhûrta est la durée la plus courte, et trente-trois Sâgarôpamâs plus un muhûrta est la durée la plus longue du Lêsyâ blanc. (39)
J’ai décrit ci-dessus la durée des Lêsyâs en général ; je vais maintenant détailler leur durée dans les quatre chemins de l’existence mondaine [14]. (40)
La durée la plus courte du Lêsyâ gris (d’un habitant de l’enfer) est de dix mille ans, la plus longue de trois Sâgarôpamâ plus un Palyôpamâ et une partie d’un Asamkhyêya. (41)
La durée la plus courte du Lêsyâ bleu (d’un habitant de l’enfer) est de trois Sâgarôpamâs plus un Palyôpamâ et une partie d’un Asamkhyêya, la plus longue de dix Sâgarôpamâs plus un Palyôpamâ et une partie d’un Asamkhyêya. (42)
La durée la plus courte du Lêsyâ noir (d’un habitant de l’enfer) est de dix Sâgarôpamâs plus un Palyôpamâ et une partie d’un Asamkhyêya, la plus longue de trente-trois Sâgarôpamâs. (43)
J’ai décrit la durée des Lêsyâs des habitants de l’enfer ; je vais maintenant décrire celle des animaux, des hommes et des dieux. (44)
La durée de n’importe lequel des Lêsyâs, à l’exception du meilleur (à savoir le blanc), est inférieure à un muhûrta pour (les organismes les plus bas), les animaux et les hommes [15]. (45)
Un demi-muhûrta est la durée la plus courte du Lêsyâ blanc (des animaux et des hommes), et la plus longue un Krore des années antérieures [16] moins neuf ans. (46)
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J’ai décrit la durée des Lêsyâs des animaux et des hommes, je vais maintenant décrire celle des dieux. (47)
La durée la plus courte du Lêsyâ noir est de dix mille ans, la plus longue est un Palyôpamâ et (une partie d’un) Asamkhyêya. (48)
La durée la plus courte du Lêsyâ bleu est égale à la plus longue de celle du noir plus un Samaya ; la plus longue est un Palyôpamâ plus une (plus grande partie d’un) Asamkhyêya. (49)
La durée la plus courte du Lêsyâ gris est égale à la plus longue de celle du bleu plus un Samaya ; la plus longue est un Palyôpamâ plus (une partie encore plus grande) d’un Asamkhyêya. (50)
Je vais maintenant décrire le Lêsyâ rouge tel qu’il est avec les dieux, les Bhavanapatis, les Vyantaras, les Gyôtishkas et les Vaimânikas. (51)
La durée la plus courte du Lêsyâ rouge est d’un Palyôpamâ, la plus longue de deux Sâgarôpamâ plus un Palyôpamâ et une partie d’un Asamkhyêya [17]. (52)
La durée la plus courte du Lêsyâ rouge est de dix mille ans, la plus longue de deux Sâgarôpamâ plus un Palyôpamâ et une partie d’un Asamkhyêya. (53)
La durée la plus longue du Lêsyâ rouge plus un Samaya est égale à la plus courte du Lêsyâ jaune ; sa plus longue, cependant, est dix muhûrtas plus longue. (54)
La durée la plus longue du Lêsyâ jaune plus un Samaya est égale à la plus courte des Lêsyâ blanches ; la plus longue, cependant, est trente-trois muhûrtas plus longue. (55)
10. Les Lêsyâs noirs, bleus et gris sont les [ p. 203 ] Lêsyâs les plus basses ; c’est par eux que l’âme est entraînée dans des voies de vie misérables. (56)
Les Lêsyâs rouges, jaunes et blancs sont les bons Lêsyâs ; grâce à eux, l’âme est amenée vers des voies de vie heureuses. (57)
11. Au premier instant de ces Lêsyâs, lorsqu’ils sont unis (à l’âme), celle-ci ne naît pas à une nouvelle existence [18]. (58)
Au dernier moment de tous ces Lêsyâs lorsqu’ils sont joints (à l’âme), cette dernière ne naît pas dans une nouvelle existence. (59)
Tandis que le dernier muhûrta court et qu’une partie de celui-ci est encore à venir, les âmes avec leurs Lêsyâs développés, vont vers une nouvelle naissance. (60)
Un homme sage devrait donc connaître la nature de ces Lêsyâs ; il devrait éviter les mauvaises et obtenir les bonnes. (61)
Ainsi je dis.
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[^552] : 197 : 1 Détergents Sapindus.
[^558] : 197:7 Aṅka, manivisêsha.
[^560] : 197:9 La courge Lagenaria Vulgaris.
[^561] : 197:10 Azadirachta Indica.
[^563] : 198 : 2 Feronia Elephantum.
[^569] : 199:3 Paliuñkaga-uvahiya = pratikuñkaka-upadhika.
[^570] : 199:4 Yôgavân upadhânavân.
196:2 Les lêsyâs (adhyavasâya visêshâh) sont différentes conditions produites dans l’âme par l’influence de différents Karman ; elles ne dépendent donc pas de la nature de l’âme, mais du Karman qui accompagne l’âme, et sont, pour ainsi dire, le reflet du Karman sur l’âme, comme indiqué dans le verset suivant de l’Avakûri : krishnâdidravyasâkivyât parinâmô ya âtmanah | spatikasyêva tatrâyam lêsyâsabdah pravartate || L’altération produite sur l’âme, tout comme sur un cristal par la présence de choses noires, etc., est désignée par le mot lêsyâ. Le Lêsyâ, ou, selon l’explication ci-dessus, ce qui produit le Lêsyâ, est une substance subtile accompagnant l’âme ; on lui attribue les qualités décrites dans cette conférence. — Le mot lêsâ dérive de klêsa ; cette étymologie paraît plutôt fantaisiste, mais je pense qu’elle pourrait être juste. Car les Lêsyâ semblent être les Klêsas, qui affectent l’âme, conçue comme une sorte de substance. Le terme sanskrit Lêsyâ est bien sûr un mot hybride. Il faut cependant préciser que lêsâ apparaît également dans le sens de « couleur », par exemple dans Sûtrakrit. Moi, 6, 13, et que le Prâkrit de klêsa est kilêsa. ↩︎
197:2 Ce n’est pas l’Asôka commun, Jonesia Asoka, qui a des fleurs rouges. ↩︎
197:3 Corarias Indica, geai bleu ; selon certains, un martin-pêcheur. ↩︎
197:4 Linum Usitatissimum, dont les fleurs sont bleues. — Le mot pour gris est kâû = kâpôta ; dans la comm., cependant, il est décrit comme kimkit krishnâ, kimkil lôhitâ, ce qui serait plutôt brun. Mais la description donnée dans notre vers ne laisse aucun doute sur l’intention de couleur grise. ↩︎
197:5 Crotolaria Juncea. ↩︎
197:6 Terminalia Tomentosa. ↩︎
197:8 Jasmin multiflorum. ↩︎
198:1 L’ensemble de trois épices, etc., poivre noir et long et gingembre sec. ↩︎
198:3 Une sorte de boisson enivrante, extraite des fleurs de Lythrum Fructicosum, avec du sucre, etc. ↩︎
198:4 Acacia Sirisa. ↩︎
198:5 Les Lêsyâs peuvent posséder leurs qualités à un degré bas, moyen ou élevé ; chacun de ces degrés est à son tour triple, à savoir bas, moyen et élevé. De cette façon, la subdivision se poursuit jusqu’à 243. ↩︎
199:1 Ie commet les cinq grands péchés. — Les versets suivants donnent le caractère — lakshana — des Lêsyâs. ↩︎
199:2 C’est, selon la comm., le sens du mot niddhamdhasaparinâmô. ↩︎
200:1 Littéralement : qui évite les dhyânas ârta et raudra, et pratique les dhyânas dharma et sukla. Ces termes ne peuvent être traduits adéquatement ; le lecteur peut donc se référer pour plus de détails au Rapport de Bhandarkar, p. 110 et suivantes. ↩︎
200:2 Thânâim sthânâni. ↩︎
200:3 Samaya est la plus petite division du temps = instant, moment. ↩︎
201:1 À savoir, en tant qu’habitants de l’enfer, brutes, hommes et dieux. Seuls les trois premiers Lêsyâs conduisent à naître en enfer. ↩︎
201:2 La conséquence de cette affirmation semble être qu’à l’expiration de la Lêsyâ, une nouvelle est produite. Les commentateurs, cependant, ne sont pas explicites sur ce point. ↩︎