Emil Schürer écrit (La littérature du peuple juif au temps de Jésus, pp. 329-331) :
Alors que cette explication plus courte sous forme catéchétique [Questions et réponses sur la Genèse] était destinée à des cercles plus larges, l’œuvre scientifique principale et spéciale de Philon est son grand commentaire allégorique sur la Genèse, Νομων ιερων αλληγοριαι (tel est le titre qui lui est donné dans Eusèbe Hist. eccl. ii. 18. 1, et Photius, Bibliotheca cod. 103. Comp. aussi Origène, Comment. in Matth. vol. xvii. c. 17 ; contra Celsum, iv. 51). Ces deux œuvres se rapprochent fréquemment quant à leur contenu. Car dans les Quaestiones et solutiones aussi, la signification allégorique plus profonde est donnée aussi bien que le sens littéral. Dans le grand commentaire allégorique, au contraire, l’interprétation allégorique prévaut exclusivement. Le sens allégorique profond de la lettre sacrée est établi dans une discussion longue et prolixe qui, en raison de l’ajout abondant de passages parallèles, semble souvent s’éloigner du texte. Ainsi, toute la méthode exégétique, avec son intégration des passages les plus hétérogènes pour éclaircir l’idée supposée se trouver dans le texte, rappelle fortement la méthode du Midrash rabbinique. Cette interprétation allégorique comporte cependant, malgré son arbitraire, ses règles et ses lois, le sens allégorique, autrefois établi pour certaines personnes, objets et événements, étant ensuite respecté avec une cohérence acceptable. C’est notamment une idée fondamentale, dont l’exposé est partout déduit, que l’histoire de l’humanité telle que relatée dans la Genèse n’est en réalité rien d’autre qu’un système de psychologie et d’éthique. Les différents individus qui apparaissent ici désignent les différents états d’âme (τροποι της ψυχης) qui se manifestent chez les hommes. Analyser ces états dans leur diversité et leurs relations, tant entre eux qu’avec la Divinité et le monde sensible, et en déduire des doctrines morales, tel est le but principal de ce grand commentaire allégorique. On perçoit ainsi que l’intérêt principal de Philon n’est pas – comme on pourrait le supposer d’après l’ensemble de son système – la théologie spéculative en soi, mais au contraire la psychologie et l’éthique. À en juger par son objectif ultime, il n’est pas un théologien spéculatif, mais un psychologue et un moraliste (cf. note 183).
Le commentaire suit d’abord le texte de la Genèse verset par verset. Ensuite, des sections isolées sont sélectionnées, et certaines d’entre elles sont traitées de manière si complète qu’elles deviennent de véritables monographies. Ainsi, Philon, par exemple, s’inspire de l’histoire de Noé pour écrire deux livres sur l’ivresse (περι μεθης), avec une telle minutie qu’un recueil des opinions d’autres philosophes sur ce sujet remplit le premier de ces livres perdus (Mangey, i. 357).
L’ouvrage, tel que nous le connaissons, commence à Gen. ii. 1 ; Και ετελεσθησαν οι ουρανοι και η γη. La création du monde n’est donc pas traitée. Car le texte De opificio mundi, qui le précède dans nos éditions, est un ouvrage d’un caractère entièrement différent, n’étant pas un commentaire allégorique sur l’histoire de la création, mais un récit de cette histoire elle-même. Le premier livre du Legum allegoriae ne rejoint en aucune façon l’ouvrage De opificio mundi ; car le premier commence à Gen. ii. 1, tandis que dans De opif. mundi, la création de l’homme aussi, selon Gen. ii, est déjà traitée. Ainsi, comme l’affirme à juste titre Gfrörer en réponse à Dähne, le commentaire allégorique ne peut être combiné avec De opif. mundi comme si les deux ne faisaient partie que d’une seule et même œuvre. On peut tout au plus se demander si Philon n’a pas également écrit un commentaire allégorique sur Gen. I. Cela est cependant improbable. Car le commentaire allégorique se propose de traiter de l’histoire de l’humanité, et celle-ci ne commence qu’à Gen. II. I. Le début abrupt de Leg. alleg. i ne paraît pas étrange, car cette manière de commencer immédiatement par le texte à expliquer correspond parfaitement à la méthode du Midrash rabbinique. Les livres ultérieurs du commentaire de Philon lui-même commencent d’ailleurs de la même manière abrupte. Dans nos manuscrits et éditions, seuls les premiers livres portent le titre propre à l’ouvrage entier : Νομων ιερων αλληγοριαι. Tous les livres ultérieurs portent des titres spécifiques, ce qui donne l’impression qu’il s’agit d’ouvrages indépendants. En réalité, tout le contenu du premier volume de Mangey, à savoir les ouvrages qui suivent, appartient au livre en question (à la seule exception de De opificio mundi).
Emil Schürer commente : « Περι του θεοπεμπτους ειναι τους ονειρους. De somniis, lib. i. (Mangey, i. 620-658). Sur le Gen. xxviii. 12 sqq. et xxxi. 11 sqq. (les deux rêves de Jacob). — Lib. ii du même ouvrage (Mangey, i. 659-699). — D’après Euseb. nous, vir. illustration 11, Philon a écrit cinq livres sur les rêves. Trois d’entre eux sont donc perdus. Ceux qui nous sont parvenus semblent, à en juger par leurs débuts, être les deuxième et troisième. Quoi qu’il en soit, notre premier livre était précédé d’un autre, qui traitait probablement du rêve d’Abimélech (Gen. xx, 3). Origène, contre Celse (VI, 21, fin.), mentionne déjà le paragraphe sur l’échelle de Jacob (Gen. xxviii, 12) (contenu dans le premier des livres conservés). (La Littérature du peuple juif au temps de Jésus (pp. 337-338)
FH Colson et GH Whitaker écrivent à propos du premier livre : « Ce traité, comme nous l’apprend sa première partie, est en réalité le deuxième de ceux qui traitent des rêves. Le premier, perdu, traitait de rêves dans lesquels les pensées du rêveur n’avaient aucune part. Ce second traité s’intéresse aux rêves dans lesquels l’esprit est inspiré et peut ainsi prévoir l’avenir. Les deux exemples de ce type sont tirés de l’histoire de Jacob. Le premier est l’histoire familière de l’échelle céleste à Béthel, qui, avec ses introductions et ses digressions, occupe les §§ 2 à 188. Le second est le rêve de Genèse XXXI, dans lequel il voit les différentes marques de son troupeau et est invité à retourner dans son pays natal. Ceci occupe le reste du traité. Le premier de ces rêves est cité au § 3, le second au § 189. » (Philon, vol. 5, p. 285)
FH Colson et GH Whitaker écrivent à propos du deuxième livre : « Ce long traité, dont la conclusion a été perdue, me semble d’une pauvreté de pensée qui en fait le plus faible de toute la série. Et, bien que ce ne soit peut-être qu’une simple coïncidence, il est curieux qu’il soit rarement cité ou mentionné par les auteurs ultérieurs. De plus, son autorité manuscrite est moindre que celle de tous les autres, à l’exception du De Posteritate Caini. Un seul manuscrit utilisé par Wendland le contient, et même celui-ci, comme le montrent les nombreuses notes de bas de page, présente un nombre assez inhabituel de corruptions et de lacunes. » (Philo, vol. 5, p. 433)
* Titre de Yonge, Un traité sur la doctrine selon laquelle les rêves sont envoyés par Dieu.
I. (1.1) Le traité précédent a exposé nos opinions sur les visions célestes classées dans la première espèce ; à ce sujet, nous avons exprimé notre opinion selon laquelle la Divinité a envoyé les apparitions que l’homme voit en rêve conformément aux suggestions de sa propre nature. Mais dans ce traité, nous décrirons, au mieux de nos possibilités, les rêves qui relèvent de la seconde espèce. (1.2) Or, la seconde espèce est celle dans laquelle notre esprit, mû simultanément par l’esprit de l’univers, a semblé emporté par lui-même et soumis à des impulsions divines, de sorte qu’il est devenu capable de comprendre à l’avance et de connaître par anticipation certains événements futurs. Or, le premier rêve apparenté à l’espèce que je viens de décrire est celui qui est apparu sur l’échelle qui montait au ciel, et qui était de ce genre. (1.3) Jacob songea : « Et voici, une échelle était solidement plantée sur la terre, dont la pointe atteignait le ciel ; et les anges de Dieu y montaient et y descendaient. Et voici, il y avait une échelle solidement plantée sur la terre, et l’Éternel se tenait fermement dessus ; et il dit : Je suis le Dieu d’Abraham, ton père, et le Dieu d’Isaac ; n’aie pas peur. La terre sur laquelle tu dors, je te la donnerai, à toi et à ta postérité ; et ta postérité sera comme la poussière de la terre, et elle se multipliera comme le sable du bord de la mer, et s’étendra au midi, au nord et à l’orient ; et toutes les familles de la terre seront bénies en toi, et en ta postérité aussi. Et voici, je suis avec toi, te gardant dans toutes tes voies, où que tu ailles, et je te ramènerai dans ce pays, car je ne t’abandonnerai pas que je n’aie accompli tout ce que je t’ai dit. Toi. »[1] (1.4) Mais les considérations précédentes sur les circonstances de cette vision exigent que nous les examinions avec précision, et alors peut-être serons-nous capables de comprendre ce qu’indique la vision. Quelles sont donc les circonstances précédentes ? L’Écriture nous dit : « Jacob remonta du puits du serment et arriva à Charran. Il entra dans un lieu et s’y coucha jusqu’au lever du soleil. Il prit une des pierres du lieu, la plaça sur sa tête et s’endormit en ce lieu. » Et immédiatement après vint le rêve. (1.5) Il est donc bon d’abord de se poser une question sur ces trois points : Premièrement, qu’était le puits du serment,[2] et pourquoi était-il appelé de ce nom ? Deuxièmement, qu’est-ce que Charran, et pourquoi, après que Jacob eut quitté le puits mentionné ci-dessus, se rendit-il immédiatement à Charran ? Troisièmement, quel était ce lieu, et pourquoi, lorsqu’il y fut, le soleil se coucha-t-il aussitôt et s’endormit-il ?
II. (1.6) Commençons donc par examiner le premier de ces points. Le puits me paraît donc être un symbole de connaissance ; car il n’est pas superficiel, mais très profond. Il ne se trouve pas non plus à découvert, mais aime se cacher quelque part, en secret. On ne le trouve pas facilement, mais seulement après beaucoup de travail et de difficultés ; et cela se vérifie également pour les sciences, non seulement pour celles qui ont des sujets de spéculation vastes et indescriptibles, mais même pour les plus insignifiantes. (1.7) Choisissez donc l’art qui vous plaît ; non pas le plus excellent, mais même le plus obscur de tous, que peut-être aucun homme élevé en homme libre dans toute la ville n’étudierait de lui-même, et auquel presque aucun serviteur sur le terrain ne s’intéresserait, esclave contre son gré d’un maître morose et colérique qui le contraignait à de nombreuses choses désagréables. (1.8) Car la matière se révélera non pas simple, mais plutôt complexe et variée, difficile à saisir, mais difficile à découvrir, difficile à maîtriser, hostile au retard, à l’indolence et à l’indifférence, pleine de sérieux, de disputes, de sueur et de soucis. C’est pourquoi « ceux qui creusent dans ce puits disent qu’ils n’y trouvent même pas d’eau » ; car les fins de la science sont non seulement difficiles à découvrir, mais totalement introuvables ; (1.9) et c’est pour cela qu’un homme est plus versé qu’un autre en grammaire ou en géométrie, car il est impossible de circonscrire, d’accroître et d’étendre une chose dans certaines limites ; car il y a toujours plus de choses qui restent que ce qui est appris ; et ce qui reste guette et attrape l’apprenant, de sorte que même celui qui s’imagine avoir compris et maîtrisé les extrémités mêmes de la connaissance ne serait considéré que comme à moitié parfait par un autre qui était son juge, et s’il était devant le tribunal de la vérité, il semblerait n’en être qu’au début de la connaissance ; (1.10) car la vie est courte, comme quelqu’un l’a dit, mais l’art est long ; dont l’homme comprend le mieux la grandeur, celui qui s’y plonge profondément avec sincérité et honnêteté, et qui le creuse comme un puits. Et un tel homme, lorsqu’il est sur le point de mourir, étant maintenant aux cheveux gris et extrêmement vieux, on dit qu’il pleurait, non pas qu’il craignait la mort comme un lâche, mais par désir d’instruction, comme sentant qu’il y entrait maintenant, pour la première fois, alors qu’il quittait définitivement la vie. (1.11) Car l’âme s’épanouit pour la poursuite de la connaissance lorsque la vigueur première du corps se dessèche avec le temps ; C’est pourquoi, avant d’avoir atteint son apogée et sa vigueur grâce à une compréhension plus précise des choses, il n’est pas difficile de trébucher. Mais cet accident est commun à tous les passionnés d’apprentissage, chez qui de nouveaux sujets de réflexion surgissent sans cesse et s’efforcent d’en acquérir d’anciens.L’âme elle-même produit de nombreux sujets de ce genre lorsqu’elle n’est pas stérile et improductive. La nature, elle aussi, en révèle spontanément un grand nombre à ceux qui sont doués d’une intelligence vive et pénétrante. Ainsi, la source de la connaissance est telle qu’elle est sans limite ni fin. (1.12) Il faut maintenant expliquer pourquoi on l’appelle la source du serment. Les questions douteuses sont tranchées par un serment, et celles qui sont incertaines sont confirmées de la même manière, de même que celles qui manquent de certification. De là découle cette conclusion : il n’existe aucun sujet sur lequel on puisse affirmer avec plus de certitude que le fait que la race de la sagesse est sans limite et sans fin. (1.13) Il est donc judicieux de s’inscrire sous la bannière de celui qui discute de ces questions sans serment ; Mais celui qui n’est pas très enclin à approuver les assertions d’autrui y souscrira au moins après avoir juré de leur exactitude. Mais que personne ne refuse de prêter un tel serment, sachant bien qu’il verra son nom inscrit sur des colonnes parmi ceux qui sont fidèles à leurs serments.
III. (1.14) Mais laissons cela de côté. Il faut maintenant examiner pourquoi, puisque quatre puits avaient été creusés par les serviteurs d’Abraham et d’Isaac, le quatrième et dernier fut appelé le puits du serment. (1.15) L’historien sacré ne voudrait-il pas ici représenter, au sens figuré, que, comme dans l’univers il y a quatre éléments qui composent ce monde, et comme il y en a un nombre égal en nous-mêmes, dont nous avons été façonnés avant d’être moulés dans notre forme humaine, trois d’entre eux sont susceptibles d’être compris d’une manière ou d’une autre, mais le quatrième est inintelligible à tous ceux qui se présentent comme juges ? (1.16) En conséquence, nous constatons que les quatre éléments du monde sont la terre, l’eau, l’air et le ciel, dont, même si certains sont difficiles à trouver, ils ne sont pas classés dans la partie totalement introuvable. (1.17) Car la terre, étant une substance lourde, indissoluble et solide, est divisée en montagnes et en plaines, et traversée par des fleuves et des mers, de sorte que certaines parties sont constituées d’îles, d’autres de continents. De plus, certaines parties ont un sol peu profond, d’autres profond ; d’autres sont rudes, escarpées, solides et totalement stériles ; d’autres encore sont lisses, délicates et extrêmement fertiles ; et outre tous ces faits, nous en connaissons un grand nombre d’autres relatifs à la terre. (1.18) De plus, il y a l’eau, dont nous savons qu’elle possède plusieurs des qualités susmentionnées en commun avec la terre, et plusieurs qui lui sont propres ; car certaines sont douces, d’autres saumâtres, d’autres encore sont mélangées de diverses caractéristiques ; certaines sont bonnes à boire, d’autres ne sont pas potables ; et, de plus, aucune de ces dernières qualités n’est invariable pour chaque créature, mais il y en a pour certaines pour lesquelles elle est l’une et non l’autre, et vice versa. De plus, certaines eaux sont naturellement froides, et d’autres naturellement chaudes ; (1.19) car il y a en toutes sortes de lieux une infinité de sources qui versent de l’eau chaude, non seulement sur la terre, mais même dans la mer : en tout cas, il est apparu auparavant des veines qui versent de l’eau chaude au milieu de la mer, que tout l’énorme efflux d’eau salée dans toute la mer qui entoure le monde, se déversant sur elles de toute éternité, n’a jamais pu éteindre, ni même diminuer en le moindre degré. (1.20) De plus, nous savons que l’air a une nature attractive, cédant aux corps qui l’entourent dans une altitude de résistance, étant l’organe de la vie, et du souffle, et de la vue, et de l’ouïe, et de tous les autres sens externes, admettant la raréfaction, et la condensation, et le mouvement, et la tranquillité, et les changements, et les variations de toute sorte, par lesquels il est altéré et modifié, et engendrant les étés et les hivers, et les saisons d’automne et de printemps, au moyen desquelles le cycle de l’année est le dernier amené à sa conclusion.
IV. (1.21) Nous ressentons donc toutes ces choses. Mais le ciel a une nature incompréhensible, et il ne nous a jamais donné d’indication précise permettant de comprendre sa nature. Car que pouvons-nous dire ? Qu’il est de la glace solide, comme certains ont choisi de l’affirmer ? Ou qu’il est du feu le plus pur ? Ou qu’il est un cinquième corps, se mouvant en cercle et ne participant à aucun des quatre éléments ? Car que pouvons-nous dire ? Cette sphère la plus éloignée des étoiles fixes a-t-elle une densité ascendante ? Ou est-elle simplement une surface dépourvue de toute profondeur, quelque chose comme une figure plane ? (1.22) Et que sont les étoiles ? Sont-elles des masses de terre pleines de feu ? Car certains ont dit que ce sont des collines, des vallées et des fourrés, des hommes dignes d’une prison et d’un tapis roulant, ou de tout lieu où se trouvent des instruments propres au châtiment des impies ; Ou sont-ils, comme quelqu’un les a définis, une harmonie continue et dense, la masse compacte et indissoluble de l’éther ? Sont-ils animés et intelligents ? Ou sont-ils également dépourvus d’esprit et de vitalité ? Leurs mouvements résultent-ils d’un choix personnel ? Ou simplement parce qu’ils sont obligatoires ? (1.23) Que dire encore de la lune ? Nous montre-t-elle une lumière qui lui est propre, ou une lumière empruntée et illégitime, seulement réfléchie par les rayons du soleil ? Ou bien aucune de ces deux affirmations n’est-elle vraie, mais est-elle quelque chose de mixte, pour ainsi dire, de sorte qu’elle soit une sorte de combinaison de sa propre lumière et de celle qui appartient à un autre corps ? Car toutes ces choses, et d’autres semblables, appartenant au quatrième et plus excellent des corps du monde, à savoir le ciel, sont incertaines et incompréhensibles, et sont évoquées selon des conjectures et des suppositions, et non selon le raisonnement solide et certain de la vérité (1.24), de sorte qu’on pourrait oser jurer qu’aucun mortel ne pourra jamais comprendre clairement aucune de ces choses. Quoi qu’il en soit, le quatrième puits, le puits sec, a été appelé le puits du serment pour cette raison, car la recherche du quatrième élément du monde, c’est-à-dire le ciel, est sans résultat et à tous égards stérile.
V. Voyons maintenant de quelle manière ce quatrième élément en nous est par nature, d’une manière si particulière et singulièrement incompréhensible. (1.25) Il y a donc en nous quatre éléments principaux : le corps, le sens externe, la parole et l’esprit. Or, trois d’entre eux ne sont ni incertains ni inintelligibles à tous égards, mais ils contiennent en eux-mêmes quelque indication par laquelle ils sont compris. (1.26) Or, que veux-je dire par là ? Nous savons déjà que le corps est divisible en trois parties, et qu’il est capable de mouvement dans six directions, puisqu’il a trois dimensions : longueur, profondeur, largeur ; et deux fois autant de mouvements, à savoir six : le mouvement vers le haut, le mouvement vers le bas, celui vers la droite, celui vers la gauche, le mouvement vers l’avant et le mouvement vers l’arrière. Mais, de plus, nous n’ignorons pas qu’il est le vaisseau de l’âme ; et nous sommes également conscients qu’il est sujet aux changements de la jeunesse, de la décadence, du vieillissement, de la mort, de la dissolution. (1.27) Et en ce qui concerne les sens extérieurs, nous ne sommes pas, en ce qui concerne cela, complètement ternes et mutilés, mais nous pouvons dire qu’ils sont également divisés en cinq divisions, et qu’il existe des organes appropriés au développement de chaque sens formé par la nature ; par exemple, les yeux pour la vue, les oreilles pour l’ouïe, les narines pour l’odorat, et les autres organes pour l’exercice des sens respectifs auxquels ils sont adaptés, et aussi que nous pouvons appeler ces sens extérieurs des messagers de l’esprit qui l’informent des couleurs, des formes et des sons, et des différences particulières des vapeurs et des saveurs, et, en bref, qui lui décrivent tous les corps et toutes les qualités distinctives qui existent en eux. Ils peuvent également être considérés comme des gardes du corps de l’âme, l’informant de tout ce qu’ils voient ou entendent ; et si quelque chose de nuisible l’attaque de l’extérieur, ils le prévoient et s’en prémunissent, afin qu’il ne puisse pas entrer par hasard et à l’improviste, et devenir ainsi la cause d’un désastre irrémédiable pour leur maîtresse. (1.28) De plus, la voix n’échappe pas entièrement à notre compréhension ; mais nous savons qu’une voix est aiguë et une autre grave ; que l’une est mélodieuse et harmonieuse, et une autre dissonante et très peu musicale ; et encore, une voix est plus puissante, et une autre moins. Et elles diffèrent aussi par dix mille autres détails, par le genre, par le teint, par la distance, par la tension combinée et séparée des tons, par les symphonies de quartes, de quintes et du diapason. (1.29) De plus, il y a certaines choses que nous savons aussi à propos de cette voix articulée qui a été attribuée à l’homme seul de tous les animaux, comme, par exemple, nous savons qu’elle est émise par l’esprit, qu’elle reçoit sa distinction articulée dans la bouche, que c’est par la frappe de la langue que l’énonciation articulée est imprimée sur les tons de la voix, et qui rend le son émis non seulement un bruit nu, nu, inutile, dépourvu de toute caractéristique,et qu’il remplit la fonction d’un héraut ou d’un interprète envers l’esprit qui le suggère.
VI. (1.30) Le quatrième élément qui existe en nous, l’esprit dominant, nous est-il donc compréhensible de la même manière que ces autres divisions ? Certainement pas ; car que pensons-nous qu’il soit dans son essence ? Le considérons-nous comme de l’esprit, ou du sang, ou, en bref, comme une substance corporelle ? Mais ce n’est pas une substance, mais il faut le déclarer incorporel. Est-il alors une limite, ou une espèce, ou un nombre, ou un acte continu, ou une harmonie, ou quelque chose d’existant quel qu’il soit ? (1.31) Est-il, dès le premier instant de notre naissance, infusé en nous de l’extérieur, ou est-ce une nature chaude en nous, refroidie par l’air qui se diffuse autour de nous, comme un morceau de fer chauffé à la forge, puis plongé dans l’eau froide, qui est ainsi trempé et durci ? (Et c’est peut-être du processus de refroidissement [psyxis] auquel il est ainsi soumis que l’âme [he— psyche—] tire son nom.) Que dirons-nous de plus ? Lorsque nous mourons, est-elle éteinte et détruite avec notre corps ? ou continue-t-elle à vivre longtemps ? ou, troisièmement, est-elle entièrement incorruptible et immortelle ? (1.32) De plus, où, dans quelle partie cet esprit se cache-t-il ? A-t-il reçu une habitation stable ? Car certains hommes l’ont dédié à notre tête, comme la citadelle principale, autour de laquelle tous les sens extérieurs ont leurs repaires ; pensant qu’il est naturel que ses gardes du corps soient postés près d’elle, comme près du palais d’un puissant roi. D’autres encore contestent avec ferveur la position qu’ils lui attribuent, croyant qu’il est enchâssé comme une statue dans le cœur. (1.33) C’est pourquoi le quatrième élément est incompréhensible dans le monde du ciel, en comparaison de la nature de la terre, de l’eau et de l’air ; et l’esprit dans l’homme, en comparaison du corps et du sens extérieur, et de la parole, qui est l’interprète de l’esprit ; ne se pourrait-il pas aussi que pour cette raison la quatrième année soit décrite comme sainte et louable dans les saintes écritures ? (1.34) Car parmi les choses créées, le ciel est saint dans le monde, selon lequel corps, les natures impérissables et indestructibles tournent ; et dans l’homme l’esprit est saint, étant une sorte de fragment de la Divinité, et spécialement selon la déclaration de Moïse, qui dit : « Dieu souffla sur son visage le souffle de vie, et l’homme devint une âme vivante. »[3] (1.35) Et il me semble que ce n’est pas sans raison que ces deux choses sont appelées louables ; Car ces deux êtres, le ciel et l’esprit, sont capables d’exprimer, avec toute la dignité qui convient, les louanges, les hymnes, la gloire et la béatitude du Père qui les a créés. Car l’homme a reçu un honneur particulier, plus que tous les autres animaux, celui de servir le Dieu vivant. Et le ciel chante sans cesse des mélodies, parachevant une harmonie musicale, en accord avec les mouvements de tous les corps qui y vivent ; (1.36) dont, si jamais le son parvenait à nos oreilles, l’amour, qui ne pourrait être retenu,et des désirs frénétiques et une impétuosité furieuse, auxquels on ne pourrait mettre fin ni apaiser, seraient engendrés et nous forceraient à renoncer même à ce qui est nécessaire, nous nourrissant non plus comme des mortels ordinaires de la nourriture et de la boisson que nous recevons au moyen de notre gorge, mais des chants inspirés de la musique dans sa plus haute perfection, comme des personnes sur le point d’être rendues immortelles par l’intermédiaire de leurs oreilles : et il est dit que Moïse[4] était un auditeur incorporel de ces mélodies, lorsqu’il alla pendant quarante jours et un nombre égal de nuits, sans toucher du tout au pain ni à l’eau.
VII. (1.37) Par conséquent, le ciel, qui est l’organe archétypique de la musique, semble avoir été arrangé d’une manière très parfaite, car aucun autre objet, si ce n’est que les hymnes chantés en l’honneur du Père de l’univers, ne pouvaient être accordés d’une manière musicale ; et nous entendons que la vertu, c’est-à-dire Léa, [5] après la naissance de son quatrième fils, n’était plus capable d’en enfanter davantage, mais restreinte, ou peut-être devrais-je dire, était restreinte, quant à ses pouvoirs générateurs ; car elle trouva, je le conçois, toute sa puissance génératrice sèche et stérile, après avoir donné naissance à Juda, c’est-à-dire à la « confession », le fruit parfait : (1.38) et la phrase « Léa cessa d’avoir des enfants » ne diffère en rien de l’affirmation selon laquelle les enfants d’Isaac ne trouvèrent pas d’eau au quatrième puits.[6] Puisqu’il ressort de ces deux expressions figurées que chaque créature a soif de Dieu, par qui toutes leurs naissances ont lieu, et de qui la nourriture leur est accordée lorsqu’elles naissent. (1.39) Peut-être donc que certains critiques mesquins et chicaniers imagineront que toute cette affirmation sur le creusement des puits est une prolixité superflue de la part du législateur : mais ceux qui méritent une classification plus large, étant citoyens non pas d’un petit État mais du vaste monde, étant des hommes d’une sagesse plus parfaite, sauront bien que la vraie question ne concerne pas les quatre puits, mais les parties de l’univers que les hommes qui sont doués de la vue, et Ils aiment la contemplation et exercent leurs facultés d’investigation, notamment sur la terre, l’eau, l’air et le ciel. (1.40) Après avoir examiné chacune de ces matières avec la plus grande précision, ils ont trouvé, dans trois d’entre elles, des choses à leur portée ; c’est pourquoi ils ont donné à ce qu’ils ont découvert les noms d’injustice, d’inimitié et de latitude. Mais dans le quatrième, c’est-à-dire dans le ciel, ils n’ont absolument rien trouvé qui puisse les comprendre, comme nous l’avons expliqué plus haut : le quatrième se révèle être un puits sec et sans eau ; et pour la raison mentionnée plus haut, on l’appelle puits.
VIII. (1.41) Nous allons maintenant examiner ce qui suit, et nous demander ce qu’est Charran, et pourquoi l’homme qui est sorti du puits y est arrivé. Charran est donc, me semble-t-il, une sorte de métropole des sens extérieurs : on l’interprète tantôt comme une fosse creusée, tantôt comme des trous ; ces deux noms impliquent un même fait ; (1.42) car nos corps sont en quelque sorte creusés pour fournir les organes des sens extérieurs, et chacun de ces organes est une sorte de trou pour le sens extérieur correspondant, dans lequel il s’abrite comme dans une caverne. Ainsi, lorsque quelqu’un sort du puits appelé le puits du serment, comme s’il quittait un port, il arrive immédiatement et nécessairement à Charran : car il est indispensable que les sens extérieurs accueillent celui qui vient en émigration de cette terre de connaissance si excellente, si vaste qu’elle soit, sans aucun guide. (1.43) Car notre âme est souvent mise en mouvement par elle-même après s’être libérée du poids du corps et avoir échappé à la multitude des sens extérieurs ; et souvent même alors qu’elle en est encore revêtue. C’est pourquoi, par son simple mouvement, elle est parvenue à la compréhension des choses qui ne sont appréciables que par l’intellect ; et par le mouvement du corps, elle a atteint la compréhension de celles qui sont perceptibles par les sens extérieurs. (1.44) C’est pourquoi, si quelqu’un est incapable de s’associer entièrement à l’esprit seul, il trouve alors un second refuge, à savoir les sens extérieurs ; et quiconque ne parvient pas à comprendre les choses qui ne sont intelligibles que par l’intellect est immédiatement attiré vers les objets des sens extérieurs ; car le second organe est toujours celui des sens extérieurs, lorsqu’il s’agit de choses qui ne peuvent pas en produire une jusqu’à l’esprit dominant. (1.45) Or, il est bon pour l’homme de ne pas vieillir ni de passer tout son temps dans cette voie, mais plutôt, comme s’il errait en terre étrangère, d’être toujours en quête d’une seconde migration et d’un retour à sa terre natale. C’est pourquoi Laban, ne connaissant absolument rien ni de l’espèce, ni du genre, ni de la forme, ni de la conception, ni de quoi que ce soit d’autre qui soit compris par l’intellect seul, et s’appuyant uniquement sur ce qui est visible extérieurement et sur ce qui est perçu par les yeux, les oreilles et les cent autres facultés, est jugé digne de Charran pour son pays, que Jacob, amoureux de la vertu, habite comme une terre étrangère pour un court instant, gardant toujours à l’esprit son retour chez lui. (1.46) C’est pourquoi sa mère, la persévérance, c’est-à-dire Rébecca, lui dit : « Lève-toi et fuis vers Laban, mon frère, à Charran, et demeure avec lui quelques jours. »[7] Ne perçois-tu pas alors que celui qui pratique la vertu ne supportera pas de vivre en permanence dans le pays des sens extérieurs, mais seulement d’y rester quelques jours et un court laps de temps,À cause des nécessités du corps auquel il est lié ? Mais un temps plus long et une vie entière lui sont alloués dans la cité, ce qui n’est appréciable que par l’intellect.
IX. (1.47) À ce propos, il me semble que son grand-père, Abraham, ainsi nommé d’après sa connaissance, ne resta pas longtemps à Charran, car il est dit dans les Écritures qu’« Abraham avait soixante-quinze ans lorsqu’il quitta Charran »[8], bien que son père Terah, dont le nom signifie « l’investigation d’une odeur », y ait vécu jusqu’au jour de sa mort[9]. (1.48) C’est pourquoi il est expressément indiqué dans les Écritures sacrées que « Terah mourut à Charran », car il n’était qu’un connaisseur de la vertu, non un citoyen. Et il profitait des odeurs, et non des plaisirs de la nourriture, car il n’était pas encore capable de se remplir de sagesse, ni même d’y goûter, mais seulement de la sentir ; (1.49) car, comme on dit que les chiens qui sont calculés pour la chasse peuvent, en exerçant leur faculté d’odorat, trouver les cachettes de leur gibier à une grande distance, étant par nature rendus merveilleusement aiguisés quant au sens extérieur de l’odorat ; de la même manière, l’amateur d’instruction traque la douce brise qui est émise par la justice, et par toute autre vertu, et est désireux d’observer les qualités d’où procède cette source la plus admirable de délice, et tandis qu’il est incapable de le faire, il tourne la tête tout autour, ne flairant rien d’autre, mais recherchant seulement ce parfum très sacré d’excellence et de nourriture, car il ne nie pas qu’il est avide de connaissance et de sagesse. (1.50) Heureux donc ceux à qui il est arrivé de jouir des délices de la sagesse, et de se repaître de ses spéculations et de ses doctrines, et même d’être encouragés par elles à toujours avoir soif de plus, ressentant un désir insatiable et croissant de connaissance. (1.51) Et ceux qui obtiendront la seconde place, ne seront pas tentés de savourer la table sacrée, mais qui néanmoins rafraîchiront leurs âmes par ses odeurs ; car ils seront excités par les parfums de la vertu comme ces malades languissants qui, parce qu’ils ne sont pas encore capables de prendre de la nourriture solide, se nourrissent néanmoins de l’odeur des mets que les fils des médecins préparent comme une sorte de remède à leur impuissance.
X. (1.52) C’est pourquoi, ayant quitté le pays des Chaldéens, Térah aurait émigré à Charran, emmenant avec lui son fils Abraham et le reste de sa famille, qui partageaient son opinion. Non pas pour que l’on puisse lire dans les chroniques historiques que certains hommes étaient devenus émigrés, quittant leur pays natal pour s’installer dans une terre étrangère comme si c’était leur propre pays, mais pour qu’une leçon de la plus haute importance pour la vie, pleine de sagesse et adaptée à l’homme seul, ne soit pas négligée. (1.53) Et quelle est cette leçon ? Les Chaldéens sont de grands astronomes, et les habitants de Charran s’occupent des sujets relatifs aux sens externes. C’est pourquoi le récit sacré dit à l’enquêteur des choses de la nature : Pourquoi t’interroges-tu sur le soleil, et demandes-tu s’il a un pied de large, s’il est plus grand que la terre entière, ou même s’il est plusieurs fois plus grand ? Et pourquoi étudies-tu les causes de la lumière de la lune, et cherches-tu à savoir si elle est empruntée ou si elle provient uniquement d’elle-même ? Pourquoi, encore, cherches-tu à comprendre la nature des autres étoiles, leur mouvement, leur sympathie entre elles, et même avec les choses terrestres ? (1.54) Et pourquoi, marchant sur la terre, t’élèves-tu au-dessus des nuages ? Et pourquoi, enraciné dans la terre ferme, affirmes-tu pouvoir atteindre les choses du ciel ? Et pourquoi t’efforces-tu de former des conjectures sur des choses qui ne peuvent être déterminées par la conjecture ? Et pourquoi t’occupes-tu de sujets sublimes dont tu ne devrais pas te mêler ? Et pourquoi étends-tu ton désir de faire des découvertes en sciences mathématiques jusqu’au ciel ? Et pourquoi te consacres-tu à l’astronomie et ne parles-tu que de sujets élevés ? Mon cher, ne te préoccupe pas de ce qui se passe au-delà des océans, mais concentre-toi uniquement sur ce qui est proche de toi ; contente-toi plutôt de t’examiner toi-même sans flatterie. (1.55) Comment donc découvrirez-vous ce que vous cherchez, même si vous y parvenez ? Allez, avec toute votre intelligence, jusqu’à Charran, c’est-à-dire jusqu’à la tranchée creusée, dans les trous et les cavernes du corps, et examinez les yeux, les oreilles, les narines et les autres organes des sens externes. Si vous voulez être philosophe, étudiez philosophiquement la branche la plus indispensable et en même temps la plus convenable à l’homme, et recherchez ce qu’est la faculté de la vue, ce qu’est l’ouïe, ce qu’est le goût, ce qu’est l’odorat, ce qu’est le toucher, en un mot, ce qu’est le sens externe ; cherchez ensuite à comprendre ce que c’est que voir et comment vous voyez ; ce que c’est que d’entendre et comment vous entendez ; ce que c’est que de sentir, de goûter ou de toucher, et comment chacune de ces opérations s’effectue ordinairement. (1.56) Mais chercher à comprendre la demeure de l’univers n’est pas une extravagance de folie.Avant que votre propre demeure ne vous soit connue avec précision ? Mais je ne vous donne pas encore l’injonction, plus importante et plus complète, de vous familiariser avec votre âme et votre esprit, dont vous êtes si fiers ; car, en réalité, vous ne pourrez jamais les comprendre. (1.57) Montez donc au ciel et parlez avec arrogance des choses qui s’y trouvent, avant même d’être capable de les comprendre, selon les mots du poète :
« Tout le bien et tout le mal
Que contient ta propre demeure ;
et, faisant descendre du ciel votre messager et l’entraînant hors de ses recherches vers les choses qui existent là-bas, apprenez à vous connaître vous-même et travaillez soigneusement et diligemment à parvenir au bonheur qui est permis à l’homme. (1.58) Or, les Hébreux appelaient cette disposition Térah, et les Grecs Socrate ; car ils disent aussi que ce dernier a vieilli dans l’étude la plus précise par laquelle il pouvait espérer se connaître lui-même, sans jamais diriger ses spéculations philosophiques vers des sujets au-delà de lui-même. Mais il était vraiment un homme ; mais Térah est le principe même qui est proposé à chacun, selon lequel chacun doit se connaître lui-même, comme un arbre plein de bonnes branches, afin que les personnes qui aiment la vertu puissent sans difficulté cueillir le fruit de la pure moralité, et ainsi se rassasier de la nourriture la plus délicieuse et la plus salutaire. (1.59) Tels sont donc ces hommes qui reconnaissent pour nous les quartiers de la sagesse ; mais ceux qui sont réellement ses athlètes et qui pratiquent ses exercices sont plus parfaits. Car ces hommes jugent bon d’étudier avec une exactitude parfaite toute la question des sens externes, puis de passer à une autre spéculation plus importante, abandonnant toute considération des cavités du corps qu’ils appellent Charran. (1.60) Parmi eux se trouve Abraham, qui atteignit de grands progrès et une amélioration dans la compréhension de la connaissance complète ; car lorsqu’il en savait le plus, c’est alors qu’il renonça le plus complètement à lui-même afin d’atteindre la connaissance exacte de celui qui était le Dieu véritablement vivant. Et, en effet, c’est un cours tout naturel des événements ; car celui qui se comprend parfaitement renonce aussi, par sa profonde appréciation, au néant universel de la créature ; et celui qui renonce à lui-même apprend à comprendre le Dieu vivant.
XI. (1.61) Nous avons maintenant expliqué ce qu’est Charran, et pourquoi celui qui a quitté le puits du serment y est venu. Il nous faut maintenant examiner le troisième point, qui vient ensuite dans l’ordre, à savoir quel est le lieu où cet homme est venu ; car il est dit : « Il l’a rencontré en ce lieu. »[10] (1.62) Or, le lieu est considéré de trois manières : premièrement, comme une situation occupée par un corps ; deuxièmement, comme une parole divine que Dieu lui-même a remplie entièrement de pouvoirs incorporels ; car l’Écriture dit : « J’ai vu le lieu où se tenait le Dieu d’Israël »,[11] seul lieu où il a permis à son prophète de lui offrir un sacrifice, lui interdisant de le faire en d’autres lieux. Car il lui est ordonné de monter au lieu que le Seigneur Dieu choisira, d’y offrir des holocaustes et des sacrifices pour le salut, et d’apporter d’autres victimes sans tache. (1.63) Selon la troisième signification, Dieu lui-même est appelé un lieu, du fait qu’il entoure l’univers et n’est entouré de rien, et du fait qu’il est le refuge de tous les hommes, et qu’il est lui-même son propre territoire, se contenant et ressemblant à lui seul. (1.64) Je ne suis pas un lieu, mais je suis dans un lieu, et tout être existant l’est de la même manière. Ainsi, ce qui est entouré diffère de ce qui l’entoure ; mais la Divinité, n’étant entourée de rien, est nécessairement elle-même son propre lieu. Et il y a une preuve à l’appui de mon point de vue dans l’oracle sacré suivant, prononcé à propos d’Abraham : « Il arriva au lieu que le Seigneur Dieu lui avait indiqué ; et, ayant levé les yeux, il vit le lieu de loin. »[12] (1.65) Dites-moi, celui qui était venu à ce lieu l’a-t-il vu de loin ? Français Ou peut-être n’est-ce qu’une expression identique pour deux choses différentes, dont l’une est le monde divin, et l’autre, Dieu, qui existait avant le monde. (1.66) Mais celui qui a été conduit par la sagesse arrive au premier lieu, ayant découvert que la partie principale et la fin de la propitiation est la parole divine, dans laquelle celui qui est fixé n’atteint pas encore une hauteur telle qu’il pénètre dans l’essence de Dieu, mais le voit de loin ; ou, plutôt, devrais-je dire, il n’est pas capable même de le voir de loin, mais il discerne seulement ce fait, que Dieu est à distance de toute créature, et que toute compréhension de lui est éloignée de tout intellect humain. (1.67) Peut-être, cependant, l’historien, par cette forme allégorique d’expression, n’entend-il pas ici par son expression « lieu », la Cause de toutes choses ; mais l’idée qu’il entend transmettre peut être quelque chose de ce genre ; —il arriva à cet endroit, et levant les yeux, il vit l’endroit même où il était venu, qui était très loin du Dieu dont on ne peut ni le nommer ni en parler, et qui est en tout point incompréhensible.
XII. (1.68) Ces choses, donc, étant définies comme un préliminaire nécessaire, lorsque le pratiquant de la vertu parvient à Charran, le sens extérieur, il ne « rencontre » pas le lieu, ni celui qui est occupé par un corps mortel ; car tous ceux qui sont nés de la poussière, et qui occupent un lieu quelconque, et qui remplissent nécessairement une position, y participent ; ni le troisième et le plus excellent genre de lieu, dont il était à peine possible à l’homme de se faire une idée qui a fait sa demeure au puits qui était appelé le « puits du serment », où demeure la race autodidacte, Isaac, qui n’abandonne jamais sa foi en Dieu et sa compréhension invisible de lui, mais qui s’en tient à la parole divine intermédiaire, qui lui fournit les meilleures suggestions et lui enseigne tout ce qui convient aux temps. (1.69) Car Dieu, ne daignant pas descendre aux sens externes, envoie ses propres paroles ou anges pour porter assistance à ceux qui aiment la vertu. Français Mais ils s’occupent comme des médecins des maladies de l’âme et s’appliquent à les guérir, offrant des recommandations sacrées comme des lois sacrées, et invitant les hommes à pratiquer les devoirs qu’ils ont inculqués, et, comme les entraîneurs de lutteurs, implantant dans leurs élèves force, puissance et vigueur irrésistible. (1.70) Très justement donc, lorsqu’il est arrivé au sens externe, il est représenté non plus comme rencontrant Dieu, mais seulement la parole divine, tout comme son grand-père Abraham, le modèle de sagesse, l’a fait ; car l’Écriture nous dit : « Le Seigneur s’en alla lorsqu’il eut fini de converser avec Abraham, et Abraham retourna à sa place. »[13] De cette expression on déduit qu’il rencontra aussi les paroles sacrées dont Dieu, le père de l’univers, s’était précédemment éloigné, ne montrant plus de visions de lui-même mais seulement celles qui proviennent de ses puissances subordonnées. (1.71) Et c’est avec une beauté et une convenance extrêmes qu’il est dit, non pas qu’il est venu à l’endroit, mais qu’il a rencontré l’endroit : car venir est volontaire, mais rencontrer est très souvent involontaire ; de sorte que le Verbe divin apparaissant soudainement, procure une joie inattendue, plus grande qu’on aurait pu l’espérer, dans la mesure où il est sur le point de voyager en compagnie de l’âme solitaire ; car Moïse aussi « conduit le peuple à la rencontre de Dieu »,[14] sachant bien qu’il vient invisiblement vers ces âmes qui désirent ardemment le rencontrer.
XIII. (1.72) Il allègue ensuite une raison pour laquelle il « a rencontré ce lieu » ; car, dit-il, « le soleil était couché »[15]. Il ne s’agit pas du soleil qui nous apparaît, mais de la lumière la plus éclatante et la plus radieuse du Dieu invisible et tout-puissant. Lorsque cette lumière brille sur l’esprit, les rayons inférieurs des mots (c’est-à-dire des anges) se couchent. Et à plus forte raison, tous les lieux perceptibles par les sens extérieurs sont-ils éclipsés ; mais lorsqu’il s’éloigne dans une autre direction, alors ils se lèvent tous et brillent. (1.73) Et ne vous étonnez pas si, selon les règles de la description allégorique, le soleil est comparé au Père et au Gouverneur de l’univers ; car en réalité, rien n’est semblable à Dieu ; mais ces choses que la vaine opinion des hommes croit telles, ne sont que deux choses, l’une invisible et l’autre visible ; l’âme étant la chose invisible, et le soleil la chose visible. (1.74) Or, il a montré la similitude de l’âme dans un autre passage, où il dit : « Dieu fit l’homme, il le créa à l’image de Dieu. » Et encore, dans la loi édictée contre les homicides, il dit : « Quiconque verse le sang de l’homme, par l’homme son sang sera versé en rétribution de ce sang, car à l’image de Dieu je l’ai fait. »[16] Mais la ressemblance du soleil, il ne l’indique que par des symboles. (1.75) Et il est facile de le percevoir autrement par l’argumentation, puisque Dieu est la première lumière, « Car le Seigneur est ma lumière et mon Sauveur »,[17] est le langage des Psaumes ; et non seulement la lumière, mais il est aussi le modèle archétypique de toute autre lumière, ou plutôt il est plus ancien et plus sublime que le modèle archétypique même, bien qu’il soit appelé le modèle ; car le véritable modèle était sa propre parole la plus parfaite, la lumière, et lui-même ne ressemble à aucune chose créée. (1.76) Car, comme le soleil sépare le jour et la nuit, de même Moïse dit que Dieu a séparé la lumière des ténèbres ; car « Dieu a fait une séparation entre la lumière et les ténèbres ».[18] Et en plus de tout cela, comme le soleil, lorsqu’il se lève, découvre les choses cachées, de même Dieu, qui a créé toutes choses, non seulement les met toutes en lumière, mais il a même créé ce qui n’existait pas auparavant, n’étant pas leur seul auteur, mais aussi leur fondateur.
XIV. (1.77) Le soleil est également évoqué au sens figuré dans de nombreux passages des Écritures saintes. D’abord comme l’esprit humain, que les hommes construisent et meublent en une Cité[19], contraints de servir la créature de préférence au Dieu incréé. Il est dit de lui qu’ils « bâtirent des villes fortes pour Pharaon et Peitho[20] », c’est-à-dire pour la conversation ; à laquelle est attribuée la persuasion (to peithein), et ensuite Ramsès, ou le sens extérieur par lequel l’âme est dévorée comme par des mites ; car le nom Ramsès, interprété, signifie « le tremblement d’un papillon » ; et enfin On, l’esprit, qu’ils appelaient Héliopolis, car l’esprit, comme le soleil, domine toute la masse de notre corps et étend ses pouvoirs, comme les rayons du soleil, sur tout. (1.78) Mais celui qui s’approprie le gouvernement des choses corporelles, nommé Joseph, prend pour beau-père le prêtre et ministre de l’esprit ; car dit l’Écriture : « Il lui donna pour épouse Aséneth, fille de Peutephres, prêtre d’Héliopolis. »[19] (1.79) Et, utilisant un langage symbolique, il appelle le sens extérieur un second soleil, dans la mesure où il montre à l’intellect tous les objets dont il est capable de former un jugement, dont il parle ainsi : « Le soleil se leva sur lui lorsqu’il passa devant l’apparition de Dieu. »[20] Car en vérité réelle, lorsque nous ne pouvons plus supporter de passer tout notre temps avec les apparences les plus sacrées, et comme avec des images incorporelles, mais que nous nous détournons dans une autre direction et les abandonnons, nous utilisons une autre lumière, qui, à savoir, conformément au sens externe, qui est la vraie vérité, n’est en aucun cas différente des ténèbres, (1.80) qui, après s’être levées, réveillent comme du sommeil les sens de la vue, de l’ouïe, et aussi du goût, du toucher et de l’odorat, et endort les qualités intellectuelles de prudence, de justice, de science et de sagesse, qui étaient toutes en éveil. (1.81) C’est pourquoi l’Écriture sainte dit que nul ne peut être pur avant le soir, [21] car les mouvements désordonnés des sens extérieurs agitent et troublent l’intellect. De plus, elle établit également pour les prêtres une loi incontournable, assortie d’une opinion grave : « Il ne mangera des choses saintes qu’après s’être lavé le corps dans l’eau, et avant que le soleil ne se soit couché, et qu’il ne soit devenu pur. »[22] (1.82) Car ces mots montrent très clairement qu’il n’existe personne de complètement pur, au point d’être apte à être initié aux saints et sacrés mystères, à qui il est échu d’être honoré de ces gloires de la vie, appréciables par les sens externes. Mais si quelqu’un rejette ces gloires, il est rendu dignement visible par la lumière de la sagesse, au moyen de laquelle il pourra se laver des taches de la vaine opinion et devenir pur. (1.83) Ne voyez-vous pas que le soleil lui-même, à son coucher, produit des effets opposés à ceux qu’il provoque à son lever ? Car, à son lever, tout sur la terre brille, et les choses du ciel nous sont cachées ; mais, à son coucher, les étoiles apparaissent et les choses terrestres sont obscurcies. (1.84) De même, en nous, lorsque la lumière des sens extérieurs se lève comme le soleil, les sciences célestes et célestes sont réellement et véritablement cachées ; mais lorsque cette lumière est proche de son coucher, alors apparaît le rayonnement stellaire des vertus, lorsque l’esprit est pur et n’est caché par aucun objet des sens extérieurs.
XV. (1.85) Mais selon la troisième signification, quand il parle du soleil, il entend la parole divine, le modèle de ce soleil qui se meut dans le ciel, comme il a été dit précédemment, et à propos duquel il est dit : « Le soleil se leva sur la terre, et Lot entra dans Segor, et le Seigneur fit pleuvoir sur Sodome et Gomorrhe du soufre et du feu. » (1.86) Car la parole de Dieu, lorsqu’elle atteint notre constitution terrestre, aide et protège ceux qui sont apparentés à la vertu, ou dont les inclinations les conduisent à la vertu ; de sorte qu’elle leur fournit un refuge et un salut complets, mais sur leurs ennemis elle envoie un renversement et une destruction irrémédiables. (1.87) Et dans la quatrième signification, ce qui est entendu par le soleil est le Dieu et le souverain de l’univers lui-même, comme je l’ai déjà dit, par le moyen duquel les offenses qui sont irrémédiables et qui semblent être éclipsées et cachées, sont révélées ; car comme toutes choses sont possibles, de même, toutes choses sont connues de Dieu. (1.88) C’est à cause de cette faculté qu’il entraîne à la lumière du soleil les personnes qui vivent dans la débauche, la débauche et l’intempérance, vivant avec les filles de l’esprit, les sens extérieurs, comme des prostituées et des catins, afin de révéler leur véritable caractère. (1.89) Car l’Écriture dit : « Et le peuple demeura à Sittim » ; or, le nom Sittim signifie « les épines de la passion », qui piquent et blessent l’âme. « Et le peuple fut souillé, et commença à se prostituer avec les filles de Moab »[23] et celles qu’on appelle filles sont les sens extérieurs, car le nom Moab est interprété comme « d’un père » ; et l’Écriture ajoute : « Prenez tous les chefs du peuple, et faites-en un exemple pour l’Éternel, en face du soleil, et la colère de l’Éternel se détournera d’Israël. »[24] (1.90) Car non seulement il désire que les mauvaises actions qui sont cachées soient rendues manifestes, et c’est pourquoi il tourne sur elles les rayons du soleil, mais il appelle aussi, par ce langage symbolique, le père de l’univers le soleil, cet être par qui toutes choses sont vues à l’avance, et même toutes ces choses qui sont invisiblement cachées dans les recoins de l’esprit ; et quand elles sont rendues manifestes, alors il promet que celui qui est le seul être miséricordieux, deviendra miséricordieux envers le peuple. (1.91) Pourquoi donc ? Car, même si l’esprit, s’imaginant que, même en faisant le mal, il peut échapper à l’attention de la Divinité comme n’étant pas capable de tout voir, péchait secrètement et dans des lieux obscurs, et devait ensuite, soit en raison de ses propres notions, soit par les suggestions de quelqu’un d’autre, concevoir qu’il est impossible que quoi que ce soit ne soit pas clair pour Dieu, et devait se dévoiler lui-même et toutes ses actions, et les présenter, pour ainsi dire, hors de la lumière du soleil, et les exposer au gouverneur de l’univers, en disant :qu’elle se repent de la conduite perverse qu’elle a manifestée autrefois sous l’influence d’une opinion insensée (car rien n’est indistinct devant Dieu, mais toutes choses lui sont connues et claires, non seulement celles qui ont été faites, mais même celles qui sont simplement espérées ou conçues, en raison du caractère illimité de sa sagesse), elle est alors purifiée et bénéficie, et elle apaise le châtieur qui était prêt à la punir, à savoir la conscience, qui était auparavant remplie d’une juste colère à son égard, et qui admet maintenant la repentance comme le frère cadet de l’innocence parfaite et de la liberté du péché.
XVI. (1.92) De plus, il semble que Moïse ait également pris, dans d’autres passages, le soleil comme symbole de la grande Cause de toutes choses, comme en témoigne la loi édictée à l’égard de ceux qui empruntent sur gage : récitons la loi : « Si tu prends en gage le vêtement de ton prochain, tu le lui rendras avant le coucher du soleil ; car c’est sa couverture, c’est l’unique couverture de sa nudité dans laquelle il se couche. S’il m’invoque, je l’exaucerai, car je suis miséricordieux. »[25] (1.93) N’est-il pas naturel que ceux qui s’imaginent que le législateur fait preuve d’une telle sincérité à propos d’un vêtement, s’ils ne le lui reprochent pas, fassent au moins une suggestion, en disant : « Que dites-vous, mes bons ? Affirmez-vous que le Créateur et le souverain du monde se dit miséricordieux à l’égard d’une affaire aussi triviale que celle d’un vêtement non restitué à l’emprunteur par le prêteur ? » (1.94) Telles sont les opinions et les conceptions d’hommes qui n’ont jamais eu la moindre idée ni compréhension de la vertu du Dieu tout-puissant, et qui, contrairement à toute loi humaine et divine, attribuent la trivialité des choses humaines à la nature incréée et immortelle, pleine de bonheur, de béatitude et de perfection ; (1.95) En quoi, en effet, ces prêteurs agissent-ils déraisonnablement, eux qui retiennent en main les gages déposés chez eux en garantie, jusqu’à ce qu’ils aient récupéré les leurs ? Les débiteurs sont pauvres, dira-t-on peut-être, et il est juste de les plaindre : n’aurait-il pas été raisonnable et préférable de promulguer une loi prévoyant une contribution pour subvenir à leurs besoins, plutôt que de les laisser apparaître comme débiteurs, ou bien une loi interdisant tout prêt sur gage ? Mais la loi qui a permis le prêt sur gage ne peut pas s’indigner contre ceux qui refusent de restituer les gages reçus avant le terme, comme s’ils agissaient injustement. (1.96) Mais si quelqu’un, parvenu, pour ainsi dire, aux limites extrêmes de la pauvreté, et vêtu de haillons, s’accable de nouvelles dettes, négligeant la pitié que lui témoignent les spectateurs, et qui est généreusement accordée à ceux qui tombent dans de tels malheurs, dans leurs propres maisons, dans les temples, sur les places publiques, et partout ailleurs ; (1.97) un tel homme apporte et offre à son créancier le seul voile qu’il possédait pour sa honte, celui dont il avait coutume de couvrir les parties secrètes de sa nature, comme gage de quelque chose. Pour quoi, je vous prie ? Est-ce pour un autre vêtement, meilleur ? Car nul n’est privé de la nourriture nécessaire tant que les sources des fleuves jaillissent, que les torrents coulent abondamment et que la terre donne ses fruits annuels. (1.98) Existe-t-il encore un créancier assez avide de richesses, assez cruel, assez pervers pour ne pas vouloir donner un tétradrachme, ou même moins, à quelqu’un dans la détresse ? Ou quelqu’un assez avare pour vouloir prêter,Mais refuser de le donner ? Ou prendre en gage le seul vêtement que possède le pauvre ? Ce qui, sous un autre nom, peut être qualifié à juste titre de fuite avec les vêtements d’un homme ; [26] car ceux qui agissent ainsi ont l’habitude de revêtir les vêtements d’autrui, de les voler et de laisser nus leurs propriétaires. (1.99) Et pourquoi la loi a-t-elle si soigneusement prévu que le débiteur ne puisse pas être sans vêtements la nuit, ni se coucher sans eux, mais n’a-t-elle pas accordé la même attention au fait qu’il soit indécemment nu le jour ? Tout n’est-il pas caché la nuit et l’obscurité, afin de causer moins de honte, ou plutôt aucune du tout à ce moment-là, mais ne est-il pas dévoilé le jour et la lumière, afin de forcer les personnes à rougir plus librement ? (1.100) Et pourquoi la loi n’utilise-t-elle pas l’expression « donner », mais « restituer » ? Car la restitution a lieu à l’égard des biens d’autrui, mais les gages appartiennent plutôt à ceux qui les ont prêtés qu’à ceux qui les ont empruntés. De plus, ne voyez-vous pas que la loi n’a pas enjoint au débiteur, qui a reçu son vêtement pour qu’il serve de couverture, de le rapporter à son créancier au retour du jour ? (1.101) Et, en effet, si l’on considère la justesse exacte du langage, même la personne la plus stupide peut voir qu’il y a quelque chose de plus que ce qui est formellement exprimé. Car l’injonction ressemble plus à une maxime qu’à une recommandation. Car, si quelqu’un avait donné une recommandation, il aurait dit : « Rends à ton débiteur, à l’approche du soir, le vêtement qui t’a été donné en gage, si c’est le seul vêtement qu’il possède, afin qu’il ait de quoi se couvrir la nuit. » Mais celui qui énonçait une maxime parlerait ainsi : comme le fait d’ailleurs la loi ici : « Car c’est son vêtement, la seule couverture de sa nudité, dans lequel il se couchera pour dormir. »Ne voyez-vous pas que la loi n’a pas enjoint au débiteur, qui a récupéré son vêtement pour le servir de couverture, de le rapporter à son créancier au lever du jour ? (1.101) Et, en effet, si l’on considère la justesse du langage, même la personne la plus stupide peut voir qu’il y a quelque chose de plus que ce qui est formellement exprimé. Car l’injonction ressemble plus à une maxime qu’à une recommandation. Car, si quelqu’un avait fait une recommandation, il aurait dit : « Rends à ton débiteur, à l’approche du soir, le vêtement qui t’a été donné en gage, si c’est le seul vêtement qu’il possède, afin qu’il ait de quoi se couvrir la nuit. » Mais celui qui édicterait une maxime parlerait ainsi ; comme le fait d’ailleurs la loi ici : « Car c’est son vêtement, la seule couverture de sa nudité, dans laquelle il se couchera pour dormir. »Ne voyez-vous pas que la loi n’a pas enjoint au débiteur, qui a récupéré son vêtement pour le servir de couverture, de le rapporter à son créancier au lever du jour ? (1.101) Et, en effet, si l’on considère la justesse du langage, même la personne la plus stupide peut voir qu’il y a quelque chose de plus que ce qui est formellement exprimé. Car l’injonction ressemble plus à une maxime qu’à une recommandation. Car, si quelqu’un avait fait une recommandation, il aurait dit : « Rends à ton débiteur, à l’approche du soir, le vêtement qui t’a été donné en gage, si c’est le seul vêtement qu’il possède, afin qu’il ait de quoi se couvrir la nuit. » Mais celui qui édicterait une maxime parlerait ainsi ; comme le fait d’ailleurs la loi ici : « Car c’est son vêtement, la seule couverture de sa nudité, dans laquelle il se couchera pour dormir. »
XVII. (1.102) Ces arguments, et d’autres du même genre, peuvent donc être invoqués en réponse à ceux qui soutiennent le sens littéral d’un passage et qui rejettent avec dédain toute autre explication. Nous allons maintenant, conformément aux lois habituelles du discours allégorique, dire ce qui convient à ces sujets. Nous disons donc qu’un vêtement est ici symboliquement utilisé pour signifier la parole ; car les vêtements protègent le corps des blessures du froid et de la chaleur, et ils cachent également les parties indicibles de la nature. De plus, un manteau est un vêtement qui convient au corps. (1.103) De la même manière, la parole a été donnée à l’homme par Dieu, comme le plus excellent des dons ; car elle est avant tout une arme défensive contre ceux qui voudraient l’attaquer par des innovations. Car, de même que la nature a doté tous les autres animaux de moyens de défense particuliers et appropriés, grâce auxquels ils peuvent repousser ceux qui tentent de leur nuire, de même elle a conféré à l’homme cette plus grande défense et cette protection la plus imprenable : la parole. Avec elle, comme avec une panoplie, quiconque est entièrement vêtu aura une garde du corps domestique et très appropriée ; et, l’utilisant comme un champion, sera capable de parer à toutes les blessures que ses ennemis peuvent lui infliger. (1.104) En second lieu, c’est une défense très nécessaire contre la honte et le reproche ; car la parole est très bien faite pour cacher et obscurcir les défauts des hommes. En troisième lieu, elle contribue à tout l’ornement de la vie : car c’est ce qui améliore chacun et qui conduit chacun à ce qui est le meilleur ; (1.105) car il y a beaucoup d’hommes honteux et malveillants, qui prennent la conversation comme un gage, la privent de ses véritables propriétaires et suppriment complètement ce qu’ils devraient chercher à accroître ; (1.106) Car certains hommes mènent une guerre irréconciliable et sans fin contre la nature rationnelle, et extirpent complètement chaque pousse et chaque début, et détruisent toutes ses premières apparences de propagation, et la rendent, pour ainsi dire, totalement improductive et stérile de toutes bonnes pratiques. (1.107) Car parfois, lorsqu’elle est portée vers l’instruction sacrée avec une impétuosité irrésistible, et lorsqu’elle est frappée d’un amour pour les spéculations de la vraie philosophie, ils — par jalousie et envie, craignant que, lorsqu’elle a tiré sa force de ses nobles aspirations et a été élevée à une hauteur splendide, elle puisse submerger toutes leurs petites chicanes et leurs artifices plausibles contre la vérité, comme un torrent irrésistible — tournent son énergie dans une autre direction par leurs propres artifices maléfiques, la guidant dans un autre canal vers des actes vulgaires et illibéraux : et très souvent ils cherchent à l’émousser ou à l’encadrer,et ainsi laisser la noblesse de sa nature inculte, tout comme parfois de méchants gardiens d’enfants orphelins ont rendu stérile une terre profondément souillée et fertile. Et ces hommes les plus impitoyables de tous n’ont pas été empêchés par la honte de dépouiller l’homme de son seul vêtement, à savoir la parole ; « Car », dit l’Écriture, « c’est sa seule couverture. » — Quelle est la seule couverture de l’homme, sinon la parole ? (1.108) Car, comme le hennissement est l’attribut particulier d’un cheval, l’aboiement d’un chien, le mugissement d’un bœuf et le rugissement d’un lion, de même la parole, et la parole elle-même, est la propriété particulière de l’homme : car c’est ce que l’homme a reçu par-dessus tous les autres animaux comme son don particulier, comme une protection, un rempart, une panoplie et un mur de défense ; lui étant, de toutes les créatures vivantes, le plus aimé de Dieu.
XVIII. (1.109) C’est pourquoi l’Écriture ajoute : « C’est la seule couverture de sa nudité. » Car qu’est-ce qui peut aussi bien occulter et dissimuler les reproches et les hontes de la vie que la parole ? Car l’ignorance est une honte apparentée à la nature irrationnelle, mais l’éducation est la sœur de la parole et un ornement propre à l’homme. (1.110) Dans quoi donc un homme se reposera-t-il ? C’est-à-dire, dans quoi trouvera-t-il la tranquillité et un répit dans ses travaux, si ce n’est dans la parole ? Car la parole est un soulagement pour notre race la plus misérable et la plus affligée. Ainsi donc, lorsque les hommes ont été accablés par le chagrin, la peur ou tout autre mal, la tranquillité, la constance et la bonté des amis les ont souvent rétablis ; Il arrive donc, non pas souvent, mais invariablement, que la parole, seule véritable protection contre le mal, nous éloigne du fardeau si lourd que nous imposent les nécessités du corps auquel nous sommes liés, et les aléas imprévus des circonstances extérieures qui nous assaillent. (1.111) Car la parole est un ami, une connaissance, un parent, un compagnon, intimement lié à nous ; je dirais plutôt, intimement lié à nous par un ciment naturel indissoluble et invisible. C’est pourquoi elle nous prévient de ce qui nous sera utile, et lorsqu’un événement inattendu nous arrive, elle se présente d’elle-même pour nous secourir, non seulement en nous apportant un avantage d’un seul genre, comme celui que peut fournir un conseiller sans agir, ou un agent qui ne peut donner aucun conseil, mais des deux genres : (1.112) car elle ne déploie pas un pouvoir à moitié complet, mais un pouvoir parfait en tous points. Car, même si elle échouait dans ses efforts, dans ses conceptions et dans ses efforts, elle peut encore recourir à la troisième espèce de secours, à savoir la consolation. Car la parole est comme un remède aux blessures de l’âme et un remède salvateur pour ses passions, qu’il faut rétablir, « avant même le coucher du soleil », dit le législateur, c’est-à-dire avant que ne s’obscurcissent les rayons infinis du Dieu tout-puissant et glorieux, rayons qu’il envoie du ciel sur l’esprit humain par pitié pour notre race. (1.113) Car tant que cette lumière divine demeure dans l’âme, nous pourrons restituer la parole, qui a été déposée comme un gage, comme si c’était un vêtement, afin que celui qui a reçu cette possession particulière de l’homme, puisse par son moyen dissimuler les circonstances déshonorantes de la vie, et récolter le bénéfice du don divin, et se permettre un répit combiné de tranquillité, en conséquence de la présence d’un conseiller et d’un défenseur si utile, qui ne quittera jamais les rangs dans lesquels il a été stationné. (1.114) De plus, tandis que Dieu déverse sur vous la lumière de sarayons, hâtez-vous à la lumière du jour de restituer son gage au Seigneur ; car lorsque le soleil se sera couché, alors, comme toute la terre d’Égypte, [27] vous aurez une obscurité éternelle qui pourra être ressentie, et étant frappés d’aveuglement et d’ignorance, vous serez privés de toutes ces choses dont vous pensiez avoir une possession certaine, par cet Israël perspicace, dont vous détenez les gages, ayant fait de celui qui était par nature exempt de l’esclavage un esclave de la nécessité.
XIX. (1.115) Nous avons longuement discuté ce sujet sans autre but que d’enseigner que l’esprit, qui est enclin à pratiquer la vertu, ayant des mouvements irréguliers vers la prolificité et la stérilité, et comme on peut dire, étant en quelque sorte toujours ascendant et descendant, lorsqu’il devient prolifique et s’élève à une certaine hauteur, est illuminé par les rayons archétypiques et incorporels de la source rationnelle du soleil qui perfectionne tout ; mais lorsqu’il descend et devient improductif, alors il est de nouveau illuminé par ces images de ces rayons, les paroles immortelles qu’il est coutume d’appeler anges. (1.116) C’est pourquoi nous lisons maintenant dans l’Écriture : « Il rencontra le lieu ; car le soleil était couché. »[28] Car lorsque ces rayons de Dieu abandonnent l’âme au moyen desquels les compréhensions les plus claires des affaires sont engendrées en elle, alors surgit cette seconde et plus faible lumière des paroles, et la lumière des choses n’est plus vue, tout comme c’est le cas dans ce monde inférieur. Car la lune, qui occupe le second rang après le soleil, lorsque ce corps s’est couché, répand sur la terre une lumière un peu plus faible que la sienne ; (1.117) et rencontrer un lieu ou une parole est un don très suffisant pour ceux qui ne peuvent discerner que Dieu est supérieur à tout lieu ou à toute parole ; car ils n’ont pas une âme entièrement dépourvue de lumière, mais parce que, depuis que cette lumière la plus pure et la plus brillante s’est couchée, ils ont été favorisés par une lumière qui est alliée. « Car les enfants d’Israël avaient de la lumière dans toutes leurs demeures »,[29] dit l’historien sacré dans le livre de l’Exode, de sorte que la nuit et les ténèbres étaient continuellement bannies d’eux, bien que ce soit dans la nuit et les ténèbres que vivent les hommes qui ont perdu les yeux de l’âme plutôt que ceux du corps, n’ayant aucune expérience des rayons de la vertu. (1.118) Mais certaines personnes – supposant que ce que l’on entend ici par l’expression figurée du soleil est le sens externe et l’esprit, qui sont considérés comme les choses qui ont le pouvoir de juger ; et ce qui est entendu par lieu est la parole divine — comprenez l’allégorie de cette manière : le pratiquant de la vertu rencontra la parole divine, après que la lumière mortelle et humaine se fut couchée ; (1.119) car aussi longtemps que l’esprit pense qu’il atteint une compréhension ferme des objets de l’intellect, et que le sens extérieur conçoit qu’il a une compréhension similaire de ses objets appropriés, et qu’il demeure parmi des objets sublimes, la parole divine se tient à distance ; mais lorsque chacun d’eux vient confesser sa propre faiblesse, et se fixe d’une manière tout en profitant de la dissimulation, alors immédiatement la bonne raison d’une âme bien exercée dans la vertu vient d’une manière bienvenue à leur secours, lorsqu’ils ont commencé à désespérer de leur propre force, et attendent l’aide qui leur vient invisiblement de l’extérieur.
XX. (1.120) C’est pourquoi l’Écriture dit dans les versets suivants : « Qu’il prit une des pierres du lieu et la plaça à sa tête, et s’endormit en ce lieu. »[30] N’importe qui peut s’étonner non seulement de la doctrine intérieure et mystique contenue dans ces mots, mais aussi de l’affirmation distincte, qui nous donne une leçon de travail et d’endurance : (1.121) car l’historien ne pense pas qu’il convienne à l’homme qui se consacre à l’étude de la vertu d’adopter une vie luxueuse et de vivre dans la douceur, imitant les poursuites et les rivalités de ceux qui sont appelés en effet heureux, mais qui sont en réalité pleins de tout malheur ; dont la vie entière est un sommeil et un rêve, selon le saint législateur. (1.122) Ces hommes, après avoir pendant toute la journée commis toutes sortes d’injustices envers les autres, dans les tribunaux, les salles de conseil, les théâtres, et partout, retournent ensuite chez eux, comme des hommes misérables qu’ils sont, pour renverser leur propre maison. Je ne parle pas de la maison qui relève de la catégorie des bâtiments, mais de celle qui est apparentée à l’âme, je parle du corps. Introduisant une nourriture immodérée et incessante, et l’arrosant d’une abondance de vin pur, jusqu’à ce que la raison soit submergée et disparaisse ; et les passions qui ont leur siège sous le ventre, fruit de la satiété, surgissent, emportées par une frénésie effrénée, s’abattent sur tout ce qu’elles rencontrent et l’attaquent avec véhémence, et ne sont finalement apaisées qu’après avoir dissipé leur excitation excessive. (1.123) Mais la nuit, lorsqu’il est temps de se tourner vers le repos, après avoir préparé des lits somptueux et des lits des plus raffinés, ils s’allongent dans la plus grande douceur, imitant le luxe des femmes, à qui la nature a permis de se livrer à un mode de vie plus détendu, puisque leur créateur, le Créateur de l’univers, a créé des corps d’une nature plus délicate. (1.124) Or, nul homme de ce genre n’est un disciple de la parole sacrée. Seuls en sont les disciples les hommes authentiques, aimant la tempérance, l’ordre et la modestie, qui ont fait de la continence, de la frugalité et de la force une sorte de base et de fondement pour toute la vie ; des lieux sûrs pour l’âme, où elle peut s’ancrer sans danger et sans instabilité. Car, supérieurs à l’argent, aux plaisirs et à la gloire, ils méprisent les aliments, les boissons et tout ce qui s’y rapporte, au-delà de ce qui est nécessaire pour conjurer la faim ; ils sont tout à fait prêts à supporter la faim, la soif, la chaleur, le froid et toutes les autres souffrances, si pénibles soient-elles, pour acquérir la vertu. Et, admirateurs de ce qui est le plus facile à se procurer, afin de ne pas avoir honte de vêtements aussi bon marché ou miteux, ils pensent plutôt, d’un autre côté, que les vêtements somptueux sont un opprobre et un grand scandale pour la vie. (1.125) Pour ces hommes, la terre meuble est leur couche la plus coûteuse ; leur lit est fait de buissons, d’herbe et d’herbage,et une épaisse couche de feuilles ; et les oreillers pour leur tête sont quelques pierres, ou de petits monticules qui s’élèvent un peu au-dessus de la surface de la plaine. Une telle vie est, par les hommes luxueux, qualifiée de vie de difficultés, mais par ceux qui vivent pour la vertu, elle est qualifiée de très agréable ; car elle est bien adaptée, non pas à ceux qu’on appelle des hommes, à ceux qui le sont vraiment. (1.126) Ne voyez-vous pas que même maintenant, l’historien sacré représente l’exerçant des activités honorables, qui abonde en tous les matériaux et distinctions royaux, comme dormant à même le sol et utilisant une pierre comme oreiller ; et un peu plus loin, il parle de lui-même comme demandant dans ses prières du pain et un manteau, les richesses nécessaires de la nature ? comme quelqu’un qui a toujours tenu en mépris, l’homme qui vit parmi les vaines opinions, et qui est enclin à vilipender tous ceux qui sont disposés à l’admirer ; cet homme est le modèle archétypal de l’âme qui se consacre à la pratique de la vertu, et un ennemi de toute personne efféminée.
XXI. (1.127) Jusqu’ici, j’ai vanté l’homme dévoué au travail et à la vertu, comme cela m’est venu naturellement à l’esprit ; mais il nous faut maintenant examiner ce que signifient symboliquement les expressions employées. Or, il est bon de savoir que le lieu divin et la région sacrée sont remplis d’intelligences incorporelles ; et ces intelligences sont des âmes immortelles. (1.128) Prenant donc l’une de ces intelligences, et en choisissant celle qui lui paraît la plus excellente, cet amoureux de la vertu dont nous parlons l’applique à notre propre esprit, à lui comme à la tête d’un corps uni ; car, en effet, l’esprit est en quelque sorte la tête de l’âme ; et il le fait, en prétextant, certes, qu’il s’endort, mais, en réalité, comme s’il allait se reposer sur la parole de Dieu et y placer toute sa vie comme le fardeau le plus léger possible ; (1.129) et il l’écoute avec joie, et reçoit d’abord le travailleur dans les sentiers de la vertu, comme s’il allait devenir un disciple ; puis quand il a montré son approbation de la dextérité de sa nature, il lui donne la main, comme un entraîneur de gymnastique, et l’invite aux gymnases, et se tenant fermement, le force à lutter avec lui, jusqu’à ce qu’il ait rendu sa force si grande qu’elle soit irrésistible, changeant ses oreilles par les influences divines en yeux, et appelant cette disposition nouvellement modelée Israël, c’est-à-dire l’homme qui voit.[31] (1.130) Alors aussi il le couronne de la guirlande de la victoire. Mais cette guirlande a un nom singulier et étranger, et peut-être pas tout à fait de bon augure, car le président des jeux l’appelle torpeur, car il est dit que la largeur est devenue torpide[32] de toutes les récompenses et des proclamations des hérauts, et de tous ces prix les plus merveilleux pour l’excellence prééminente qui sont en honneur ; (1.131) car l’âme qui a reçu une part de pouvoir irrésistible, et qui a été rendue parfaite dans les concours de vertu, et qui est arrivée à la limite la plus éloignée de ce qui est honorable, ne sera jamais indûment exaltée ou gonflée d’arrogance, ni ne se tiendra sur la pointe des pieds, et ne se vantera pas comme s’il était bon de faire de grandes enjambées pieds nus ; mais l’étendue qui a été étendue largement par l’opinion, deviendra torpide et contractée, et alors succombera volontairement et cédera à la docilité, de sorte qu’étant classée dans un ordre inférieur à celui des natures incorporelles, elle peut remporter la victoire tout en paraissant vaincue ; (1.132) car il est considéré comme une chose très honorable de céder la palme à ceux qui sont supérieurs à soi-même, volontairement plutôt que par contrainte ; car il est incroyable à quel point le deuxième prix de ce concours est supérieur en dignité et en importance réelles au premier prix des autres.
XXII. (1.133) Voilà donc ce que l’on peut dire, en guise d’introduction, à la description des visions envoyées par Dieu. Mais il est temps maintenant d’aborder le sujet lui-même et d’en examiner attentivement chaque partie. L’Écriture dit donc : « Et il fit un songe. Et voici, une échelle était solidement plantée sur le sol, dont la tête atteignait le ciel, et les anges de Dieu montaient et descendaient par elle. »[33] (1.134) Par l’échelle, dans ce qu’on appelle le monde, on entend figurément l’air, dont le fondement est la terre, et la tête le ciel ; car le vaste espace intérieur, qui s’étend dans toutes les directions, s’étend de l’astre lunaire, décrit comme le plus éloigné de l’ordre céleste, mais le plus proche de nous par ceux qui contemplent les objets sublimes, jusqu’à la terre, qui est le plus bas de ces corps, c’est l’air. (1.135) Cet air est le séjour des âmes incorporelles, car il a semblé bon au Créateur de l’univers de remplir toutes les parties du monde d’êtres vivants. C’est pourquoi il a préparé les animaux terrestres pour la terre, les animaux aquatiques pour la mer et les fleuves, et les étoiles pour le ciel ; car chacun de ces corps n’est pas seulement un animal vivant, mais est aussi, à juste titre, décrit comme l’esprit le plus pur et le plus universel qui s’étend à travers l’univers ; de sorte qu’il y a des êtres vivants dans cette autre partie de l’univers, l’air. Et si ces choses ne sont pas compréhensibles par les sens extérieurs, qu’en est-il ? Car l’âme est aussi invisible. (1.136) Et pourtant, il est probable que l’air nourrisse les animaux vivants encore plus que la terre ou l’eau. Pourquoi ? Parce que c’est l’air qui a donné la vie aux animaux qui vivent sur la terre et dans l’eau. Car le Créateur de l’univers a formé l’air pour qu’il soit l’habitacle des corps immobiles, la nature de ceux qui se meuvent de manière invisible, et l’âme de ceux qui sont capables d’exercer une impulsion et un sens visibles. (1.137) N’est-il pas absurde que l’élément, par lequel les autres éléments ont été remplis de vitalité, soit lui-même dépourvu d’êtres vivants ? Que personne donc ne prive la nature la plus excellente des créatures vivantes du plus excellent des éléments qui entourent la terre, c’est-à-dire de l’air. Car non seulement il est déserté de tout, mais, telle une cité populeuse, il est rempli de citoyens impérissables et immortels, des âmes aussi nombreuses que les étoiles. (1.138) Or, parmi ces âmes, certaines descendent sur la terre pour s’enraciner dans des corps mortels, celles qui sont les plus étroitement liées à la terre et qui aiment le corps. Mais certains s’élèvent vers le haut, étant à nouveau distingués selon les définitions et les temps qui ont été fixés par la nature. (1.139) Parmi ceux-ci, ceux qui sont influencés par un désir de vie mortelle,et qui s’y sont habitués, y reviennent. Mais d’autres, condamnant le corps de grande folie et de légèreté, l’ont déclaré prison et tombe, et, s’enfuyant comme d’une maison de correction ou d’un tombeau, se sont élevés sur des ailes légères vers l’éther, et ont consacré toute leur vie à de sublimes spéculations. (1.140) Il y en a d’autres, les plus purs et les plus excellents de tous, qui ont reçu une intelligence plus grande et plus divine, ne désirant jamais, par hasard, quoi que ce soit de terrestre, mais étant pour ainsi dire les lieutenants du Souverain de l’univers, comme s’ils étaient les yeux et les oreilles du grand roi, voyant et écoutant tout. (1.141) Or, les philosophes en général ont coutume d’appeler ces démons, mais l’Écriture sainte les appelle anges, utilisant un nom plus conforme à la nature. Car en effet, ils rapportent (diangellousi) les injonctions du père à ses enfants, et les besoins des enfants au père. (1.142) Et c’est en référence à cet emploi qu’ils font que l’Écriture sainte les a représentés comme montant et descendant, non pas parce que Dieu, qui sait tout avant tout autre être, a besoin d’interprètes ; mais parce que c’est le lot de nous, misérables mortels, d’utiliser la parole comme médiateur et intercesseur ; à cause de notre crainte et de notre crainte du Souverain de l’univers, et de la toute-puissance de son autorité ; (1.143) ayant reçu une idée dont il a un jour supplié l’un de ces médiateurs, en disant : « Parle pour nous, et ne laisse pas Dieu nous parler, de peur que nous ne mourions. »[34] Car non seulement nous sommes incapables de supporter ses châtiments, mais nous ne pouvons même pas supporter ses bienfaits excessifs et non modifiés, qu’il nous offre lui-même de son propre chef, sans recourir aux services d’autres êtres. (1.144) C’est donc avec une grande admirable admiration que Moïse représente l’air sous le symbole figuratif d’une échelle, solidement ancrée dans la terre et s’élevant jusqu’au ciel. Car il arrive que les vapeurs produites par la raréfaction de la terre se dissolvent dans l’air, de sorte que la terre est le fondement et la racine de l’air, et que le ciel en est la tête. (1.145) C’est pourquoi on dit que la lune n’est pas une fusion pure d’éther pur, comme le sont toutes les autres étoiles, mais plutôt une combinaison de l’essence éther et de l’essence air. Car la tache noire qui y apparaît, que certains appellent une face, n’est autre que l’air mêlé à elle, qui est noir par nature et s’étend jusqu’au ciel.Français qui ont reçu des intellects plus grands et plus divins, ne désirant jamais par hasard quoi que ce soit de terrestre, mais étant comme des lieutenants du Souverain de l’univers, comme s’ils étaient les yeux et les oreilles du grand roi, voyant et écoutant tout. (1.141) Or, les philosophes en général ont coutume d’appeler ces démons, mais l’Écriture sainte les appelle anges, utilisant un nom plus conforme à la nature. Car en effet, ils rapportent (diangellousi) les injonctions du père à ses enfants, et les besoins des enfants au père. (1.142) Et c’est en référence à cet emploi de leur part que la sainte Écriture les a représentés comme ascendants et descendants, non pas que Dieu, qui sait tout avant tout autre être, ait besoin d’interprètes ; mais parce que c’est le lot de nous, misérables mortels, d’utiliser la parole comme médiateur et intercesseur ; À cause de notre crainte et de notre respect pour le Souverain de l’univers, et de la toute-puissance de son autorité ; (1.143) ayant reçu une idée à ce sujet, il supplia un jour l’un de ces médiateurs, en disant : « Parle pour nous, et que Dieu ne nous parle pas, de peur que nous ne mourions. »[34:1] Car non seulement nous sommes incapables de supporter ses châtiments, mais nous ne pouvons même pas supporter ses bienfaits excessifs et inaltérés, qu’il nous offre lui-même de son plein gré, sans recourir aux soins d’aucun autre être. (1.144) C’est donc très admirablement que Moïse représente l’air sous le symbole figuratif d’une échelle, solidement plantée dans la terre et atteignant le ciel. Car il arrive que les vapeurs produites par la raréfaction de la terre se dissolvent dans l’air, de sorte que la terre est le fondement et la racine de l’air, et que le ciel en est la tête. (1.145) On dit donc que la Lune n’est pas une fusion pure d’éther pur, comme le sont toutes les autres étoiles, mais plutôt une combinaison d’essences semblables à l’éther et à l’air. Car la tache noire qui apparaît en elle, que certains appellent un visage, n’est rien d’autre que l’air mêlé à elle, qui est noir par nature et s’étend jusqu’au ciel.Français qui ont reçu des intellects plus grands et plus divins, ne désirant jamais par hasard quoi que ce soit de terrestre, mais étant comme des lieutenants du Souverain de l’univers, comme s’ils étaient les yeux et les oreilles du grand roi, voyant et écoutant tout. (1.141) Or, les philosophes en général ont coutume d’appeler ces démons, mais l’Écriture sainte les appelle anges, utilisant un nom plus conforme à la nature. Car en effet, ils rapportent (diangellousi) les injonctions du père à ses enfants, et les besoins des enfants au père. (1.142) Et c’est en référence à cet emploi de leur part que la sainte Écriture les a représentés comme ascendants et descendants, non pas que Dieu, qui sait tout avant tout autre être, ait besoin d’interprètes ; mais parce que c’est le lot de nous, misérables mortels, d’utiliser la parole comme médiateur et intercesseur ; À cause de notre crainte et de notre respect pour le Souverain de l’univers, et de la toute-puissance de son autorité ; (1.143) ayant reçu une idée à ce sujet, il supplia un jour l’un de ces médiateurs, en disant : « Parle pour nous, et que Dieu ne nous parle pas, de peur que nous ne mourions. »[34:2] Car non seulement nous sommes incapables de supporter ses châtiments, mais nous ne pouvons même pas supporter ses bienfaits excessifs et inaltérés, qu’il nous offre lui-même de son plein gré, sans recourir aux soins d’aucun autre être. (1.144) C’est donc très admirablement que Moïse représente l’air sous le symbole figuratif d’une échelle, solidement plantée dans la terre et atteignant le ciel. Car il arrive que les vapeurs produites par la raréfaction de la terre se dissolvent dans l’air, de sorte que la terre est le fondement et la racine de l’air, et que le ciel en est la tête. (1.145) On dit donc que la Lune n’est pas une fusion pure d’éther pur, comme le sont toutes les autres étoiles, mais plutôt une combinaison d’essences semblables à l’éther et à l’air. Car la tache noire qui apparaît en elle, que certains appellent un visage, n’est rien d’autre que l’air mêlé à elle, qui est noir par nature et s’étend jusqu’au ciel.Français n’a besoin d’interprètes ; mais parce que c’est le lot de nous, misérables mortels, d’utiliser la parole comme médiateur et intercesseur ; à cause de notre crainte et de notre crainte du Souverain de l’univers, et de la toute-puissance de son autorité ; (1.143) ayant reçu une idée dont il supplia un jour l’un de ces médiateurs, en disant : « Parle pour nous, et que Dieu ne nous parle pas, de peur que nous ne mourions. »[34:3] Car non seulement nous sommes incapables de supporter ses châtiments, mais nous ne pouvons même pas supporter ses bienfaits excessifs et non modifiés, qu’il nous offre lui-même de son propre chef, sans employer les services d’aucun autre être. (1.144) C’est donc très admirablement que Moïse représente l’air sous le symbole figuratif d’une échelle, comme solidement plantée dans la terre et atteignant le ciel. Car il arrive que les vapeurs produites par la raréfaction de la terre se dissolvent dans l’air, de sorte que la terre est le fondement et la racine de l’air, et que le ciel en est la tête. (1.145) C’est pourquoi on dit que la lune n’est pas une fusion pure d’éther pur, comme chacune des autres étoiles, mais plutôt une combinaison de l’essence éther et de l’essence air. Car la tache noire qui apparaît en elle, que certains appellent un visage, n’est rien d’autre que l’air mêlé à elle, qui est noir par nature, et qui s’étend jusqu’au ciel.Français n’a besoin d’interprètes ; mais parce que c’est le lot de nous, misérables mortels, d’utiliser la parole comme médiateur et intercesseur ; à cause de notre crainte et de notre crainte du Souverain de l’univers, et de la toute-puissance de son autorité ; (1.143) ayant reçu une idée dont il supplia un jour l’un de ces médiateurs, en disant : « Parle pour nous, et que Dieu ne nous parle pas, de peur que nous ne mourions. »[34:4] Car non seulement nous sommes incapables de supporter ses châtiments, mais nous ne pouvons même pas supporter ses bienfaits excessifs et non modifiés, qu’il nous offre lui-même de son propre chef, sans employer les ministères d’aucun autre être. (1.144) C’est donc très admirablement que Moïse représente l’air sous le symbole figuratif d’une échelle, comme solidement plantée dans la terre et atteignant le ciel. Car il arrive que les vapeurs produites par la raréfaction de la terre se dissolvent dans l’air, de sorte que la terre est le fondement et la racine de l’air, et que le ciel en est la tête. (1.145) C’est pourquoi on dit que la lune n’est pas une fusion pure d’éther pur, comme chacune des autres étoiles, mais plutôt une combinaison de l’essence éther et de l’essence air. Car la tache noire qui apparaît en elle, que certains appellent un visage, n’est rien d’autre que l’air mêlé à elle, qui est noir par nature, et qui s’étend jusqu’au ciel.
XXIII. (1.146) L’échelle du monde, dont il est ici question symboliquement, était donc de ce genre. Mais si nous examinons attentivement l’âme humaine, dont le fondement est quelque chose de corporel, et comme terrestre, nous trouverons que le fondement est le sens extérieur, et la tête quelque chose de céleste, comme l’esprit le plus pur. (1.147) Or, toutes les paroles de Dieu la parcourent sans cesse, de haut en bas, l’entraînant avec elles chaque fois qu’elles s’élèvent, la séparant de tout ce qui est mortel, lui offrant le spectacle des seules choses dignes d’être contemplées ; mais ne la renversant pas lorsqu’elles descendent. Car ni Dieu lui-même, ni la parole de Dieu ne sont à blâmer. Mais ils se joignent à eux dans leur descendance, en raison de leur amour pour l’humanité et de leur compassion pour notre race, afin d’être leurs alliés et de leur porter secours, afin que, par un souffle salvateur, ils puissent ramener à la vie l’âme qui était encore ballottée dans le corps comme dans le fleuve. (1.148) Or, le Dieu et gouverneur de l’univers se promène seul, invisible et silencieux, dans l’esprit de ceux qui sont purifiés au plus haut degré. Car il existe une prophétie qui a été donnée au sage, dans laquelle il est dit : « Je marcherai parmi vous, et je serai votre Dieu. »[35] Mais les anges – les paroles de Dieu – se déplacent dans l’esprit de ceux qui sont encore en cours de purification, mais qui ne se sont pas encore complètement lavés de la vie qui les souille et qui est polluée par le contact de leur corps lourd, les faisant paraître purs et brillants aux yeux de la vertu. (1.149) Mais il est évident que tant de maux sont chassés, et quelle multitude d’habitants méchants est chassée pour qu’un homme de bien puisse y habiter. Ô mon âme, hâte-toi donc de devenir la demeure de Dieu, son saint temple, de devenir forte après avoir été très faible, puissante après avoir été impuissante, sage après avoir été folle, et très raisonnable après avoir été gamine et sans enfants. (1.150) Et peut-être aussi celui qui pratique la vertu se représente-t-il sa propre vie comme une échelle ; car la pratique de toute chose est naturellement une anomalie, car tantôt elle s’élève vers le haut, tantôt elle s’incline vers le bas dans une direction opposée ; et tantôt elle fait un beau voyage comme un navire, tantôt elle n’a qu’un passage défavorable ; car, comme le dit quelqu’un, la vie de ceux qui pratiquent la vertu est pleine de vicissitudes : être tantôt vivant et éveillé, tantôt mort ou endormi. (1.151) Et peut-être que cette affirmation n’est pas incorrecte ; car les sages ont obtenu le pays céleste et céleste comme habitation, ayant appris à s’élever continuellement, mais les méchants ont reçu comme part les recoins sombres de l’enfer,(1.152) Mais les pratiquants de la vertu, car ils sont à la limite entre deux extrémités, montent et descendent fréquemment comme sur une échelle, soit attirés vers le haut par un destin plus puissant, soit entraînés vers le bas par quelque chose de pire ; jusqu’à ce que l’arbitre de cette dispute et de ce conflit, à savoir Dieu, attribue la victoire à la classe la plus excellente et détruise complètement l’autre.
XXIV. (1.153) Il y a aussi dans ce rêve une autre sorte de similitude ou de comparaison apparente, qu’il ne faut pas passer sous silence ; les affaires de l’humanité sont naturellement comparées à une échelle, en raison de leur mouvement et de leur progression irréguliers : (1.154) car, comme l’a dit quelqu’un : « Un jour a précipité un homme d’en haut et l’a détruit, et un autre l’a relevé, rien de ce qui appartient à notre race humaine n’étant formé par la nature de manière à rester longtemps dans le même état, mais toutes ces choses changeant avec toutes sortes d’altérations. (1.155) Les hommes ne deviennent-ils pas des dirigeants pour avoir été des particuliers, et les particuliers pour avoir été des dirigeants, pauvres pour avoir été riches, et très riches pour avoir été très pauvres ; glorieux pour avoir été méprisés, et très illustres pour avoir été infâmes ? » […] Une très belle façon de vivre : car il est très possible que l’être dont l’habitation est le monde entier, puisse aussi habiter avec vous, et prendre soin de votre maison, afin qu’elle soit complètement protégée et exempte de tout dommage pour toujours ; (1.156) et il existe une telle manière par laquelle les affaires humaines montent et descendent, rencontrant une fortune instable et variable, dont le caractère anormal, le temps infaillible le prouve par des preuves qui ne sont pas indistinctes mais manifestes et lisibles.
XXV. (1.157) Mais le songe représentait aussi l’archange, c’est-à-dire le Seigneur lui-même, fermement planté sur l’échelle ; car nous devons imaginer que le Dieu vivant se tient au-dessus de toutes choses, comme le cocher d’un char, ou le pilote d’un navire, c’est-à-dire au-dessus des corps, et au-dessus des âmes, et au-dessus de toutes les créatures, et au-dessus de la terre, et au-dessus de l’air, et au-dessus du ciel, et au-dessus de toutes les puissances des sens extérieurs, et au-dessus des natures invisibles, en un mot, au-dessus de toutes choses, qu’elles soient visibles ou invisibles ; car ayant fait dépendre le tout de lui-même, il le gouverne ainsi que toute l’immensité de la nature. (1.158) Mais que celui qui entend dire qu’il a été fermement planté ainsi ne pense pas que quelque chose puisse aider Dieu, de manière à lui permettre de se tenir fermement, mais qu’il considère plutôt ce fait que ce qui est indiqué ici équivaut à l’affirmation que la position la plus ferme, et le rempart, et la force, et la stabilité de toute chose, c’est le Dieu immobile, qui imprime le caractère d’immobilité à tout ce qu’il veut ; car, en conséquence de son soutien et de sa consolidation des choses, celles qu’il combine restent fermes et indestructibles. (1.159) C’est pourquoi celui qui se tient sur l’échelle du ciel dit à celui qui voit le rêve : « Je suis le Seigneur, le Dieu d’Abraham, ton père, et le Dieu d’Isaac ; n’aie pas peur. »[36] Cet oracle et cette vision étaient aussi le plus ferme soutien de l’âme vouée à la pratique de la vertu, dans la mesure où ils lui enseignaient que le Seigneur et Dieu de l’univers est également ces deux choses pour sa propre race, étant intitulé à la fois Seigneur et Dieu de tous les hommes, de ses grands-pères et ancêtres, et étant appelé par les deux noms afin que le monde entier et l’homme voué à la vertu puissent avoir le même héritage ; car il est aussi dit : « Le Seigneur lui-même est son héritage. »[37]
XXVI. (1.160) Mais ne croyez pas que ce soit un hasard s’il est appelé ici le Dieu et Seigneur d’Abraham, mais seulement le Dieu d’Isaac ; car ce dernier est le symbole de la connaissance qui existe par nature, qui s’entend elle-même, s’enseigne elle-même et apprend d’elle-même ; mais Abraham est le symbole de ce qui est dérivé de l’enseignement des autres ; et l’un est un habitant indigène et natif de son pays, mais l’autre n’est qu’un colon et un étranger ; (1.161) car ayant abandonné le langage de ceux qui se livrent à de sublimes conversations sur l’astronomie, un langage imitant celui des Chaldéens, étranger et barbare, il a été amené à ce qui convenait à un être raisonnable, à savoir, au service de la grande Cause de toutes choses. (1.162) Or, cette disposition a besoin de deux pouvoirs pour la maintenir : le pouvoir d’autorité et celui de conférer des bienfaits, afin que, conformément à l’autorité du gouverneur, elle obéisse aux avertissements qu’elle reçoit, et qu’elle bénéficie grandement de sa bienfaisance. Mais l’autre disposition n’a besoin que du pouvoir de bienfaisance ; car elle n’a tiré aucun progrès de l’autorité qui l’exhorte, puisqu’elle revendique naturellement la vertu comme sienne, mais, en raison de la bonté qui lui est accordée d’en haut, elle était bonne et parfaite dès le commencement ; (1.163) donc, Dieu est le nom de la puissance bienfaisante, et Seigneur est le titre de la puissance royale. Quel bien peut-on donc appeler plus ancien et plus important que d’être jugé digne d’une bienfaisance sans mélange et sans mélange ? Et quoi de moins précieux que de recevoir un mélange d’autorité et de libéralité ? Et il me semble que c’est parce que le pratiquant de la vertu vit qu’il prononça cette prière admirable que « le Seigneur soit pour lui comme Dieu »[38] ; car il ne désirait plus le craindre comme un gouverneur, mais l’honorer et l’aimer comme un bienfaiteur. (1.164) Or, n’est-il pas juste que même les aveugles acquièrent une vision aiguë de ces choses et d’autres semblables, étant dotés du pouvoir de la vue par les oracles les plus sacrés, afin de pouvoir contempler les gloires de la nature et de ne pas se limiter à la simple compréhension des mots ? Mais même si nous fermons volontairement les yeux de notre âme et ne nous soucions pas de comprendre de tels mystères, ou si nous sommes incapables de les regarder, le hiérophante lui-même se tient là et nous incite. Et ne cesse jamais, par lassitude, d’oindre tes yeux jusqu’à ce que tu aies introduit ceux qui sont dûment initiés à la lumière secrète des écritures sacrées, et que tu leur aies dévoilé les choses cachées qu’elles contiennent, et leur réalité, qui est invisible à ceux qui ne sont pas initiés. (1.165) Il vous convient donc d’agir ainsi ; mais quant à vous, ô âmes, qui avez goûté une fois à l’amour divin, comme si vous vous étiez réveillés d’un profond sommeil,Dissipez la brume qui est devant vous et hâtez-vous vers ce beau spectacle, mettant de côté la peur lente et hésitante, afin de comprendre tous les beaux sons et toutes les belles images que le président des jeux a préparés pour votre avantage.
XXVII. (1.166) Il y a donc une infinité de choses dignes d’être exposées et démontrées ; et parmi elles, une que j’ai mentionnée il y a un instant. Car les oracles appellent celui qui était réellement son grand-père, père de celui qui pratique la vertu, et à celui qui était réellement son père, ils n’ont donné aucun titre de ce genre. En effet, les Écritures disent : « Je suis le Seigneur, le Dieu d’Abraham, ton père », mais en réalité Abraham était son grand-père ; puis elles poursuivent : « Et le Dieu d’Isaac », et dans ce cas, elles n’ajoutent pas : « ton père » : (1.167) N’est-il pas utile d’examiner la cause de cette différence ? Sans aucun doute ; appliquons-nous donc soigneusement à l’examiner. Les philosophes disent que la vertu existe parmi les hommes, soit par nature, soit par pratique, soit par savoir. C’est pourquoi les Écritures saintes représentent les trois fondateurs de la nation des Israélites comme des hommes sages ; certes, ils n’étaient pas doués à l’origine de la même sagesse, mais ils parvinrent rapidement au même but. (1.168) L’aîné d’entre eux, Abraham, fut guidé par l’instruction sur le chemin qui le conduisit à la vertu, comme nous le montrerons dans un autre traité, au mieux de nos capacités. Isaac, qui est le deuxième des trois, était autodidacte et autodidacte. Jacob, le troisième, parvint à ce point par l’industrie et la pratique, conformément auxquelles se déroulèrent ses efforts de lutte et de dispute. (1.169) Puisqu’il existe donc trois manières différentes par lesquelles la sagesse existe parmi les hommes, il arrive que les deux extrêmes soient les plus étroitement et les plus fréquemment unis. Car la vertu acquise par la pratique est le fruit de celle qui découle de l’apprentissage. Mais celle qui est implantée par la nature est en effet apparentée aux autres, car elle est placée au-dessous d’elles, comme leur racine à toutes. Mais elle a obtenu son prix sans rivalité ni difficulté. (1.170) Il est donc tout naturel qu’Abraham, perfectionné par l’instruction, soit appelé le père de Jacob, parvenu à l’apogée de sa vertu par la pratique. Cette expression indique non pas tant la parenté d’un homme avec l’autre, mais plutôt que la faculté qui aime écouter est très prompte à apprendre ; la faculté qui se consacre à la pratique est aussi bien préparée à la lutte. (1.171) Si, cependant, cet homme vertueux poursuit avec vigueur vers la fin et apprend à voir clairement ce dont il rêvait auparavant de manière confuse, étant transformé et re-marqué d’un meilleur caractère, et étant appelé Israël, c’est-à-dire « l’homme qui voit Dieu », au lieu de Jacob, c’est-à-dire « le supplanteur », il n’est alors plus considéré comme le fils d’Abraham, comme son père, celui qui tira la sagesse de l’instruction, mais comme le fils d’Israël, né excellent par nature. (1.172) Ces déclarations ne sont pas des fables de mon invention, mais l’oracle inscrit sur les colonnes sacrées. Car, dit l’Écriture : « Israël étant parti,« Lui et tout ce qui lui appartenait vinrent à la source du serment, et là il sacrifia un sacrifice au Dieu de son père Isaac. »[39] Ne comprenez-vous pas maintenant que cette affirmation ne se rapporte pas à la relation entre les hommes mortels, mais, comme nous l’avons dit précédemment, à la nature des choses ? Car regardez ce qui est devant nous. Tantôt Jacob est présenté comme le fils de son père Abraham, et tantôt il est appelé Israël, le fils d’Isaac, en raison de la raison que nous avons ainsi étudiée avec précision.
XVIII. (1.173) Ayant dit : « Je suis le Seigneur, le Dieu d’Abraham, le père et le Dieu d’Isaac », il ajoute : « N’aie pas peur », avec beaucoup de cohérence. Car comment pourrions-nous encore avoir peur, toi, ô Dieu, qui es notre armure et notre défenseur ? Toi, le libérateur de la peur et de toute douleur ? Toi, qui as aussi façonné les formes archétypiques de notre instruction, alors qu’elles étaient encore floues, afin de les rendre visibles, enseignant la sagesse à Abraham et engendrant Isaac, qui était sage dès sa naissance. Car tu as daigné être appelé le guide de l’un et le père de l’autre, attribuant à l’un le rang d’élève et à l’autre celui de fils. (1.174) C’est aussi pour cette raison que Dieu a promis qu’il ne lui donnerait pas le pays. J’entends par ce pays la vertu prolifique, sur laquelle celui qui la pratique se repose de ses luttes et de son sommeil, du fait que la vie, selon les sens extérieurs, s’endort et que l’âme s’éveille. Il y trouve joyeusement un repos paisible, qu’il n’a pas obtenu sans la guerre et les afflictions qui en découlent, non pas en portant les armes et en tuant des hommes ; à bas toute idée pareille ! mais en renversant la multitude de vices et de passions qui sont les adversaires de la vertu. (1.175) Mais la race de la sagesse est comparée au sable de la mer, en raison de son nombre infini, et parce que le sable, tel un cordon, arrête les incursions de la mer ; comme les raisonnements de l’instruction repoussent la violence de la méchanceté et de l’iniquité. Et ces raisonnements, conformément aux promesses divines, s’étendent jusqu’aux extrémités de l’univers. Et ils montrent que celui qui les possède est l’héritier de toutes les parties du monde, pénétrant partout, à l’est et à l’ouest, au sud et au nord. Car il est dit dans l’Écriture : « Il s’étendra vers la mer, vers le sud, vers le nord et vers l’est. »[40] (1.176) Mais l’homme sage et vertueux n’est pas seulement une bénédiction pour lui-même, il est aussi un bien commun à tous les hommes, diffusant des avantages sur tous grâce à son propre trésor. Car, de même que le soleil est la lumière de tous les êtres dotés d’yeux, de même le sage est la lumière de tous ceux qui participent à la nature rationnelle.
XXIX. (1.177) « Car en toi seront bénies toutes les nations de la terre. » Et cet oracle s’applique au sage par rapport à lui-même, et aussi par rapport aux autres.[41] Car si l’esprit qui est en moi est purifié par la vertu parfaite, et si les tribus de cette partie terrestre qui m’entoure sont purifiées en même temps, lesquelles tribus sont tombées sous le sort des sens externes, et du plus grand canal de tous, à savoir le corps ; et si quelqu’un, soit dans sa maison, soit dans sa ville, soit dans son pays, soit dans sa nation, devient un amoureux de la sagesse, il est inévitable que cette maison, et cette ville, et ce pays, et cette nation, doivent atteindre une vie meilleure. (1.178) Car, comme les épices qui sont enflammées remplissent de leur parfum toutes les personnes qui sont proches d’elles, de même toutes les personnes qui sont voisines et contiguës aux sages captent certaines des exhalaisons qui parviennent à une certaine distance de lui, et deviennent ainsi améliorées dans leurs caractères.
XXX. (1.179) Et c’est le plus grand de tous les avantages pour une âme engagée dans les travaux et les luttes, d’avoir pour compagnon de route Dieu, qui pénètre partout. « Car voici, dit Dieu, je suis avec toi. »[42] De quoi donc pourrions-nous avoir besoin si nous avons pour richesse toi, qui es la seule vraie et réelle richesse, qui nous maintiens sur le chemin qui mène à la vertu dans toutes ses différentes divisions ? Car ce n’est pas une seule portion de la vie rationnelle qui conduit à la justice et à toutes les autres vertus, mais les parties sont en nombre infini, d’où peuvent partir ceux qui désirent parvenir à la vertu.
XXXI. (1.180) C’est donc fort admirablement qu’il est dit dans l’Écriture : « Je te ramènerai en ce pays. » Car il convenait que la raison demeure en elle-même et ne s’éloigne pas vers les sens extérieurs. Et si elle s’en est allée, le mieux est qu’elle y retourne. (1.181) Et peut-être aussi une doctrine portant sur l’immortalité de l’âme est-elle figurée par cette expression. Car l’âme, ayant quitté la région du ciel, comme mentionné précédemment, est venue dans le corps comme une terre étrangère. C’est pourquoi le père qui l’a engendrée promet qu’il ne permettra pas qu’elle soit tenue éternellement en esclavage, mais qu’il aura compassion d’elle, qu’il déliera ses chaînes, qu’il la conduira en sécurité et en liberté jusqu’à la métropole, et qu’il ne cessera de l’assister que lorsque les promesses qu’il a faites en paroles seront confirmées par la vérité des actes. Car c’est assurément le propre de Dieu de prédire ce qui doit arriver. (1.182) Et pourquoi disons-nous cela ? Car ses paroles ne diffèrent pas de ses actions ; c’est pourquoi l’âme qui se consacre à la pratique de la vertu, étant mise en mouvement et excitée aux investigations relatives au Dieu vivant, soupçonna d’abord que le Dieu vivant existait en un lieu ; mais après un court espace de temps, elle devint perplexe devant la difficulté de la question, et commença à changer d’avis. (1.183) « Car », dit l’Écriture, « Jacob s’éveilla et dit : Certainement le Seigneur est en ce lieu, et je ne le savais pas ; » et il aurait mieux valu, aurais-je dit, ne pas le savoir, que de s’imaginer que Dieu existait en un lieu quelconque, lui qui lui-même contient toutes choses dans un cercle.
XXXII. (1.184) Tout naturellement, Jacob fut effrayé et dit avec admiration : « Que ce lieu est redoutable ! »[43] Car, en vérité, de tous les sujets ou lieux de la philosophie naturelle, le plus redoutable est celui où l’on se demande où est le Dieu vivant, et s’il est en quelque lieu que ce soit. Car certains affirment que tout ce qui existe occupe un lieu ou un autre, tandis que d’autres assignent à chaque chose une place différente, soit dans le monde, soit hors du monde, dans un espace entre les différents corps de l’univers. D’autres encore affirment que le Dieu incréé ne ressemble à aucun être créé, mais qu’il est supérieur à tout, de sorte que la conception la plus rapide est dépassée par lui, et confessent qu’elle est bien inférieure à sa compréhension ; (1.185) c’est pourquoi on s’écrie aussitôt : « Ce n’est pas ce que j’attendais, car le Seigneur est en ce lieu ; car il entoure tout, mais en vérité et en raison, il n’est entouré de rien. Et ce monde visible et manifeste, ce monde perceptible par les sens extérieurs, n’est autre que la maison de Dieu, la demeure d’une des puissances du vrai Dieu, en vertu de laquelle il est bon ; (1.186) et il appelle ce monde une demeure, et il l’a aussi déclaré avec une grande vérité comme la porte du ciel. Or, qu’est-ce que cela signifie ? Nous ne pouvons comprendre le monde composé de diverses espèces, dans ce qui est façonné selon les règles divines, appréciable seulement par l’intellect, autrement qu’en effectuant une migration vers le haut depuis cet autre monde perceptible par les sens extérieurs et visible ; (1.187) car il est impossible non plus de percevoir un autre être existant incorporel, sans dériver nos principes de jugement des corps. Car lorsqu’ils sont immobiles, nous percevons leur lieu, et lorsqu’ils sont en mouvement, nous jugeons de leur temps ; mais les points, les lignes, les surfaces, et en bref les limites. […][44] comme d’un vêtement qui l’enveloppe extérieurement. (1.188) Par analogie, la connaissance du monde appréciable par l’intellect s’obtient par la connaissance de ce qui est perceptible par les sens extérieurs, qui est comme une porte vers l’autre. Car, de même que les hommes qui souhaitent voir les villes entrer par leurs portes, de même ceux qui souhaitent comprendre le monde invisible sont guidés dans leur recherche par l’apparence du monde visible. Et le monde de cette essence, qui n’est accessible qu’à l’intellect, sans aucune apparence ni figure visible, et qui n’existe que dans l’idée archétypale présente dans l’esprit, façonnée selon son apparence, sera amené sans aucune ombre ; tous les murs et toutes les portes qui pourraient entraver sa progression étant supprimés, de sorte qu’il n’est contemplé par aucun autre moyen, mais par lui-même, dégageant une beauté inaltérable.présentant un spectacle indescriptible et exquis.
XXXIII. (1.189) Mais assez de cela. Il y a un autre rêve qui appartient à la même catégorie, celui du troupeau tacheté, que la personne qui l’a vu raconte après s’être réveillée, en disant : « L’ange de Dieu me parla en songe et dit : Jacob ! Je dis : Qu’est-ce ? Il me dit : Lève les yeux, et vois les boucs et les béliers monter sur les troupeaux et les chèvres, les uns blancs, les autres tachetés, les autres rayés et les autres tachetés ; car j’ai vu tout ce que Laban te fait. Je suis ce Dieu qui t’a été vu dans le lieu de Dieu, où tu as oint la colonne et m’as fait un vœu. Maintenant donc, lève-toi, sors du pays, et va dans le pays de ta naissance, et je serai avec toi. »[45] (1.190) Vous voyez ici que la parole divine parle des rêves comme envoyés par Dieu ; En incluant dans cette affirmation non seulement celles qui apparaissent par l’intermédiaire de la cause principale elle-même, mais aussi celles qui sont perçues par l’action de ses interprètes et des anges qui les accompagnent, que le père qui les a créés considère comme dignes d’un sort divin et béni : (1.191) Considérez cependant ce qui vient ensuite. La parole sacrée enjoint à certains ce qu’ils doivent faire par un commandement positif, tel un roi ; à d’autres, elle suggère ce qui sera à leur avantage, comme le fait un précepteur à ses élèves ; à d’autres encore, elle est comme un conseiller suggérant les plans les plus sages ; et de cette manière aussi, elle est d’un grand avantage pour ceux qui ne savent pas par eux-mêmes ce qui est opportun ; à d’autres, elle est comme un ami, d’une manière douce et persuasive, révélant de nombreux secrets qu’aucun non-initié ne peut légitimement entendre. (1.192) Car parfois, elle demande à certaines personnes, comme par exemple à Adam : « Où es-tu ? » Et chacun peut répondre à une telle question : « Nullement où ? » Car toutes les affaires humaines ne demeurent jamais longtemps inchangées, mais sont mouvantes et changeantes, qu’il s’agisse de leur âme, de leur corps ou de leurs circonstances extérieures. Car leurs esprits sont instables, ne recevant pas toujours les mêmes impressions des mêmes choses, mais des impressions diamétralement opposées à celles qu’ils avaient auparavant. Le corps aussi est instable, comme le montrent tous les changements des différents âges, de l’enfance à la vieillesse ; leurs circonstances extérieures sont également variables, ballottées par l’impulsion d’une fortune toujours agitée.
XXXIV. (1.193) Cependant, lorsqu’il entre dans une assemblée d’amis, il ne commence pas à parler avant d’avoir d’abord abordé chacun d’eux individuellement et de l’avoir appelé par son nom, afin qu’ils dressent l’oreille, soient silencieux et attentifs, écoutant les oracles ainsi délivrés, afin de ne jamais les oublier ou les laisser échapper à leur mémoire : car dans un autre passage de l’Écriture nous lisons : « Soyez silencieux et écoutez. »[46] (1.194) De même, Moïse est appelé au buisson. Car, dit l’Écriture, « Lorsqu’il vit qu’il se détournait pour voir, Dieu l’appela hors du buisson et dit : Moïse, Moïse ! Et il dit : Qu’est-ce, Seigneur ? »[47] Et Abraham aussi, à l’occasion d’offrir son fils bien-aimé et unique en holocauste, alors qu’il commençait à le sacrifier, et après avoir fait preuve de sa piété, il lui fut interdit de détruire la race autodidacte, nommée Isaac, parmi les hommes ; (1.195) car au début de son récit de cette transaction, Moïse dit que « Dieu tenta Abraham, et lui dit : Abraham, Abraham ! Et il dit : Me voici. Et il lui dit : Prends maintenant ton fils bien-aimé Isaac, que tu aimes, et offre-le. » Et lorsqu’il eut amené la victime à l’autel, alors l’ange du Seigneur l’appela du ciel, en disant : « Abraham, Abraham ! » Et il répondit : « Me voici. Et il dit : N’étends pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien. »[48] (1.196) De plus, celui qui pratique la vertu est aussi appelé l’un de ces chers à Dieu, étant à juste titre considéré comme digne du même honneur ; car, dit l’Écriture, « L’ange de Dieu m’a dit dans mon sommeil : Jacob ! Et je répondis : Qu’est-ce ? »[49] (1.197) Mais après avoir été appelé, il exerce son attention, s’efforçant d’arriver à une connaissance précise des symboles qui lui sont présentés ; et ces symboles sont la connexion et la génération des raisonnements, comme les troupeaux et les bœufs. Car, dit l’Écriture, « Jacob, levant les yeux, vit les boucs et les béliers sauter sur les chèvres et sur les brebis. » (1.198) Or, le bouc est le conducteur du troupeau de chèvres, et le bélier est le conducteur du troupeau de brebis, et ces deux animaux sont des symboles de raisonnements parfaits, dont l’un purifie et purifie l’âme des péchés, et l’autre la nourrit et la rend pleine de bonnes actions. Tels sont donc les conducteurs des troupeaux en nous, à savoir les raisons ; Et les troupeaux eux-mêmes, semblables aux brebis et aux chèvres dont ils portent les noms, s’élancent et se hâtent avec zèle et ferveur vers la justice. (1.199) C’est pourquoi, levant les yeux de son esprit, jusqu’alors fermé, il vit les raisons parfaites et parfaitement aiguisées, analogues aux boucs et aux béliers, préparées pour la diminution des offenses et l’augmentation des bonnes actions. Et il les vit bondir sur les brebis et les chèvres, c’est-à-dire sur ces âmes encore jeunes et tendres, dans la vigueur de la jeunesse.et belles dans la fleur de l’âge ; ne poursuivant pas de plaisir irrationnel, mais se livrant aux semailles invisibles des doctrines de la prudence. (1.200) Car c’est un mariage qui est béni dans ses enfants ; n’unissant pas les corps, mais adaptant les vertus parfaites aux âmes bien disposées. C’est pourquoi, vous toutes, justes raisons de sagesse, bondissez, formez des liens, semez la semence, et ne laissez passer aucune âme que vous voyez riche et fertile, et bien disposée, et vierge ; mais en l’invitant à s’associer et à se connecter avec vous, rendez-la parfaite et féconde ; car ainsi vous deviendrez les parents de toutes sortes de bonnes choses, d’une progéniture mâle, blanche, panachée, rayée et tachetée.
XXXV. (1.201) Mais il nous faut maintenant examiner quel pouvoir possède chacun de ces rejetons. Or, ceux qui sont purement blancs (dialeukoi) sont les plus beaux et les plus remarquables : le mot dia étant souvent préfixé dans la composition pour lui donner plus de force, de sorte que les mots diade (lon) et diase (mion) sont couramment utilisés pour signifier ce qui est très remarquable (de (lon)) et très remarquable (epise (mon) ; (1.202) donc, le sens ici est que le rejeton premier-né de l’âme qui a reçu la semence sacrée est purement blanc ; il est comme une lumière sans obscurité, comme le rayonnement le plus éclatant : comme le rayon sans nuages qui pourrait émaner des rayons du soleil par beau temps à midi. De plus, en affirmant que certains sont bigarrés, on ne veut pas dire que les troupeaux sont marqués par des taches si multiformes et variées qu’elles ressemblent à la lèpre impure, emblème d’une vie instable et ballottée dans tous les sens en raison de l’inconstance de l’esprit, mais seulement qu’ils ont des marques dessinées en lignes régulières et de caractères différents, façonnées et imprimées de toutes sortes de formes bien approuvées, dont les particularités, multipliées et combinées avec soin, produiront une harmonie musicale. (1.203) Car certains ont considéré l’art du bigarrage comme une matière si aléatoire et obscure qu’ils l’ont attribué aux tisserands. Mais j’admire non seulement l’art lui-même, mais aussi le nom, et plus particulièrement lorsque je considère les divisions de la terre et des sphères célestes, et les différences entre les diverses plantes et les divers animaux, et cette texture si variée, je veux dire le monde ; (1.204) car je suis obligé de supposer que le fabricant de ce tissu textile universel était aussi l’inventeur de toutes les sciences variées et variées ; et je regarde avec révérence l’inventeur, et j’honore l’art qu’il a inventé, et je suis étonné du travail qui en est le résultat, et cela aussi, bien que ce ne soit qu’une très petite partie que j’ai pu voir, mais néanmoins, à partir de la partie qui m’a été dévoilée, si je puis dire qu’elle a été dévoilée, j’espère former un jugement assez précis de l’ensemble, guidant mes conjectures par la lumière de l’analogie. (1.205) Néanmoins, j’admire l’amant de la sagesse pour avoir étudié le même art, rassemblant et pensant pouvoir tisser ensemble plusieurs choses, bien que différentes, et provenant de sources différentes, dans la même toile ; pour prendre les deux premiers éléments de la connaissance grammaticale transmise aux enfants, c’est-à-dire la lecture et l’écriture, et prendre de la croissance plus parfaite de la connaissance l’habileté que l’on trouve chez les poètes, et la compréhension de l’histoire ancienne, et tirer la certitude et l’absence de tromperie de l’arithmétique et de la géométrie, dans lesquelles sciences il y a besoin de proportions et de calculs ; et emprunter à la musique la rime, et la métrique, et les harmonies, et la chromatique, et la diatonique,et des mélodies combinées et disjointes ; et ayant tiré de l’invention rhétorique, et du langage, et de l’arrangement, et de la mémoire, et de l’action ; et de la philosophie, tout ce qui a été omis dans l’une de ces branches séparées, et toutes les autres choses dont consiste la vie humaine, il l’a rassemblé dans une œuvre des plus admirablement arrangée, combinant une grande érudition d’un genre avec une grande érudition d’un autre genre. (1.206) Or, l’Écriture sainte appelle l’auteur de cette œuvre composée Besaleel, ce nom, interprété, signifie « à l’ombre de Dieu » ; car il fait toutes les copies, et l’homme nommé Moïse fait tous les modèles, en tant qu’architecte principal ; et c’est pour cette raison que l’un ne dessine que des contours pour ainsi dire, mais l’autre ne se contente pas de telles esquisses, (1.207) mais fait les natures archétypales elles-mêmes, et a déjà orné les lieux saints de son art varié ; mais l’homme sage est appelé le seul orneur du lieu de la sagesse dans les oracles délivrés dans les écritures sacrées.
XXXVI. Et l’œuvre la plus belle et la plus variée de Dieu, ce monde, a été créée dans son état actuel de perfection par une connaissance omnisciente ; et comment ne pas recevoir l’art de la variété comme un noble effort de connaissance ? (1.208) dont la copie la plus sacrée est la parole de sagesse tout entière, qui porte en son sein les choses du ciel et de la terre, à partir desquelles le pratiquant de la vertu élabore ses notions de diverses choses. Car après la brebis blanche, il vit immédiatement les animaux bigarrés, marqués de l’empreinte de l’instruction. (1.209) La troisième espèce est celle des brebis rayées et des brebis tachetées ; et quel homme sensé nierait que celles-ci soient également, quant à leur genre, bigarrées ? Mais il ne s’intéresse pas tant aux variétés des membres du troupeau qu’à la voie qui mène à la vertu et à l’excellence ; (1.210) car le prophète veut que celui qui s’engage sur cette voie soit aspergé de poussière et d’eau ; Français car il est rapporté que la terre et l’eau étant pétries ensemble et façonnées par le Créateur de l’homme, furent formées en un seul corps, n’étant pas fait de main, mais étant l’ouvrage d’une nature invisible. (1.211) C’est donc le premier principe de la sagesse de ne pas s’oublier soi-même et de toujours garder devant les yeux les matériaux dont on a été composé ; car de cette façon, l’homme se débarrassera de la vantardise et de l’arrogance, qui de tous les maux est le plus haï par Dieu ; car qui, s’il admet jamais dans son esprit le souvenir que les premiers principes de sa formation sont la poussière et l’eau, serait jamais enflé de vanité au point d’être indûment enthousiasmé ? (1.212) C’est pourquoi le prophète a jugé bon que ceux qui sont sur le point d’offrir un sacrifice soient aspergés des choses susmentionnées ; pensant que nul n’est digne de paraître à un sacrifice s’il n’a pas d’abord appris à se connaître lui-même et à comprendre le néant de l’humanité et les éléments dont il est composé, en conjecturant d’eux qu’il est lui-même tout à fait insignifiant.
XXXVII. (1.213) Ces trois signes, le blanc, le bigarré, le rayé et le moucheté, sont encore imparfaits chez le vertueux, qui n’a pas encore atteint la perfection. Mais, chez celui qui est parfait, ils apparaissent aussi parfaits. Et nous examinerons comment ils apparaissent. (1.214) L’Écriture sainte a ordonné que le grand prêtre, lorsqu’il s’apprêtait à accomplir les ministères prescrits par la loi, soit d’abord aspergé d’eau et de cendre, afin qu’il se souvienne de lui-même. Car le sage Abraham aussi, lorsqu’il alla s’entretenir avec Dieu, déclara qu’il était poussière et cendre. En second lieu, elle lui enjoint de revêtir une tunique qui lui descendait jusqu’aux pieds, et ce vêtement aux broderies variées qu’on appelait sa cuirasse, image et représentation des étoiles lumineuses qui apparaissent dans le ciel. (1.215) Car il y a, semble-t-il, deux temples appartenant à Dieu : l’un est ce monde, où le grand prêtre est le Verbe divin, son propre fils premier-né. L’autre est l’âme raisonnable, dont le prêtre est l’homme véritable, dont la copie, perceptible aux sens, est celui qui accomplit ses vœux et ses sacrifices paternels, à qui il est enjoint de revêtir la tunique susmentionnée, représentation du ciel universel, afin que le monde s’associe à l’homme dans l’offrande du sacrifice, et que l’homme puisse également coopérer avec l’univers. (1.216) Il est donc maintenant démontré qu’il possède ces deux caractéristiques, le caractère tacheté et le caractère bigarré. Nous allons maintenant expliquer le troisième type, le plus parfait, appelé entièrement blanc. Lorsque ce même grand prêtre pénètre dans les parties les plus intimes du saint temple, il est revêtu du vêtement bigarré et revêt également une autre robe de lin, faite du lin le plus fin. (1.217) Et ceci est un emblème de vigueur, d’incorruptibilité et de la plus éclatante lumière. Car un tel voile est très difficile à briser, et il n’est fait d’aucun élément mortel, et lorsqu’il est correctement et soigneusement purifié, il a une apparence très claire et éclatante. (1.218) Et ces injonctions contiennent ce sens figuré que de ceux qui, dans un esprit pur et sans malice, servent le Dieu vivant, il n’est personne qui ne s’appuie d’abord sur la fermeté et l’obstination de son esprit, méprisant toutes les affaires humaines, qui séduisent les hommes par leurs appâts spécieux, les nuisent et les affaiblissent. Ensuite, il vise l’immortalité, se moquant des inventions aveugles avec lesquelles les mortels se trompent. Et enfin, il brille de la lumière pure et éclatante de la vérité, ne désirant plus rien de ce qui appartient à la fausse opinion, qui préfère les ténèbres à la lumière.
XXXVIII. (1.219) Le grand prêtre de la confession a donc été suffisamment décrit par nous, marqué des empreintes mentionnées ci-dessus : le blanc, le bigarré, le strié et le moucheté. Mais celui qui désire l’administration des affaires humaines, nommé Joseph, ne revendique, semble-t-il, aucune des caractéristiques extrêmes, mais seulement celle bigarrée qui se situe au milieu des autres. (1.220) Car nous lisons que Joseph portait un « manteau multicolore »,[50] n’étant pas aspergé des purifications sacrées, grâce auxquelles il aurait pu savoir qu’il n’était lui-même qu’un composé de poussière et d’eau, et incapable de toucher ce vêtement parfaitement blanc et si brillant qu’est la vertu. Mais étant revêtu du tissu très bigarré des affaires politiques, auquel se mêle la plus petite part possible de vérité ; et aussi de nombreuses et grandes portions de mensonges plausibles, probables et vraisemblables, d’où proviennent tous les sophistes d’Égypte, et tous les augures, et ventriloques, et sorciers ; hommes habiles à la jonglerie, et aux incantations, et aux tours de toutes sortes, dont il est très difficile d’échapper aux arts perfides. (1.221) Et c’est pour cette raison que Moïse représente très naturellement cette robe comme tachée de sang ; puisque toute la vie de l’homme qui est mêlé aux affaires politiques est souillée, faisant la guerre aux autres et étant combattu, et étant visé, attaqué, et tiré sur lui par tous les hasards inattendus qui lui arrivent. (1.222) Examinez maintenant l’homme qui a une grande influence sur le peuple, de qui dépendent les affaires de la ville. Ne vous alarmez pas de ceux qui le regardent avec admiration ; et vous trouverez de nombreuses maladies qui se cachent en lui, et vous verrez qu’il est empêtré dans de nombreux désastres, et que la fortune l’entraîne violemment dans des directions différentes, bien qu’il penche le cou de l’autre côté, et résiste, bien qu’invisiblement, et en fait que la fortune cherche à le renverser et à le détruire ; ou bien le peuple lui-même est impatient de sa suprématie, ou bien il est exposé aux attaques de quelque rival plus puissant. (1.223) Et l’envie est un ennemi redoutable, et difficile à secouer, s’accrochant aussi à tout ce qu’on appelle la bonne fortune, et il n’est pas facile d’y échapper.
XXXIX. (1.224) Quelle raison y a-t-il donc de nous féliciter de l’administration des affaires politiques, comme si nous étions vêtus d’un vêtement multicolore, trompés par sa splendeur extérieure, et ne percevant pas sa laideur, qui est cachée et cachée, et pleine de trahison et de ruse ? (1.225) Déposons donc cette robe fleurie, et revêtons cette robe sacrée tissée des broderies de la vertu ; car ainsi nous échapperons aux pièges que nous tendent le manque d’habileté, l’ignorance, le manque de connaissance et d’éducation, dont Laban est le compagnon. (1.226) Car lorsque la parole sacrée nous a purifiés par les aspersions préparées d’avance pour la purification, et lorsqu’elle nous a ornés des raisonnements choisis de la vraie philosophie, et, nous ayant conduits à cet homme qui a résisté à l’épreuve, nous a rendus authentiques, remarquables et brillants, elle blâme la disposition perfide qui cherche à s’élever pour invalider ce qui est dit. (1.227) Car l’Écriture dit : « J’ai vu ce que Laban te fait »,[51] c’est-à-dire des choses contraires aux bienfaits que je t’ai conférés, des choses impures, mauvaises et tout à fait propices aux ténèbres. Mais il ne convient pas que l’homme qui s’appuie sur l’espérance de l’alliance de Dieu se courbe et tremble, à qui Dieu dit : « Je suis le Dieu qui a été vu par toi à la place de Dieu. » (1.228) Quelle gloire pour l’âme que Dieu juge bon de lui apparaître et de converser avec elle. Et ne négligez pas ce qui est dit ici, mais examinez-le attentivement et voyez s’il y a réellement deux Dieux. Car il est dit : « Je suis le Dieu que tu as vu », non pas à ma place, mais à la place de Dieu, comme s’il parlait d’un autre Dieu. (1.229) Que devons-nous donc dire ? Il n’y a qu’un seul vrai Dieu ; mais ceux qu’on appelle dieux, par abus de langage, sont nombreux ; c’est pourquoi l’Écriture sainte indique, en l’occurrence, que c’est le vrai Dieu qui est visé par l’emploi de l’article, l’expression étant : « Je suis le Dieu (ho Theos) » ; mais lorsque le mot est employé incorrectement, il est mis sans l’article, l’expression étant : « Celui que tu as vu à la place », non pas de Dieu (tou Theou), mais simplement de Dieu (Theou) ; (1.230) et ce qu’il appelle ici Dieu est son mot le plus ancien, n’ayant aucun égard superstitieux à la position des noms, mais se proposant seulement un but, à savoir, donner un compte rendu véridique de la question ; car dans d’autres passages l’historien sacré, lorsqu’il considérait s’il y avait réellement un nom appartenant au Dieu vivant, montrait qu’il savait qu’il n’y en avait aucun qui lui appartienne proprement ; mais que quelle que soit l’appellation que l’on puisse lui donner, ce sera un abus de termes ; car le Dieu vivant n’est pas d’une nature à être décrit, mais seulement à être.
XL. (1.231) Et une preuve de cela peut être trouvée dans la réponse oraculaire donnée par Dieu à la personne qui demandait quel nom il avait : « Je suis celui qui suis »,[52] afin que le questionneur puisse connaître l’existence de ces choses qu’il n’était pas possible à l’homme de concevoir sans être liées à Dieu. (1.232) En conséquence, aux âmes incorporelles qui sont occupées à son service, il est naturel qu’il apparaisse tel qu’il est, conversant avec elles comme un ami avec ses amis ; mais à ces âmes qui sont encore dans le corps, il doit apparaître à la ressemblance des anges, sans toutefois changer sa nature (car il est immuable), mais simplement implanter dans ceux qui le voient l’idée qu’il a une autre forme, de sorte qu’ils s’imaginent que c’est son image, non une imitation de lui, mais l’apparence archétypique elle-même. (1.233) Il y a ensuite une vieille histoire très célèbre, selon laquelle la Divinité, assumant la ressemblance d’hommes de différents pays, parcourt les différentes villes des hommes, à la recherche des actes d’iniquité et d’iniquité ; et peut-être, bien que la fable ne soit pas vraie, est-elle appropriée et profitable. (1.234) Mais l’Écriture, qui avance toujours ses conceptions à l’égard de la Divinité, sur un ton plus révérencieux et plus saint, et qui désire également instruire la vie des insensés, a parlé de Dieu sous la ressemblance d’un homme, bien que non d’un homme en particulier ; (1.235) lui attribuant, dans cette optique, la possession d’un visage, de mains, de pieds, d’une bouche et d’une voix, ainsi que de la colère et de la passion, et de plus, des armes défensives, des entrées et des sorties, des mouvements de haut en bas et dans toutes les directions, n’utilisant pas toutes ces expressions avec une stricte vérité, mais ayant égard à l’avantage de ceux qui doivent en tirer des leçons ; (1.236) car les auteurs savaient que certains hommes sont très lents dans leur nature, de sorte qu’ils sont totalement incapables de former une quelconque conception de Dieu en dehors d’un corps, qu’il serait impossible d’avertir s’ils devaient parler dans un autre style que celui existant, en représentant Dieu comme venant et partant comme un homme ; et comme descendant et montant, et comme utilisant sa voix, et comme étant en colère contre les pécheurs, et étant implacable dans sa colère ; et parlant aussi de ses dards et de ses épées, et de tous les autres instruments qui conviennent pour être employés contre les méchants, comme étant tous prêts à l’avance. (1.237) Car nous devons être satisfaits si de tels hommes peuvent être amenés à un état convenable, par la crainte qui est suspendue sur eux par de telles descriptions ; et beaucoup disent presque que ce sont les deux seuls chemins empruntés, dans toute l’histoire de la loi ; l’un menant à la vérité évidente, grâce à laquelle nous avons des affirmations telles que : « Dieu n’est pas comme un homme »[53] ; l’autre, celui qui a égard aux opinions des hommes insensés, à propos desquels il est dit : « Le Seigneur Dieu vous instruira, comme si un homme instruisait son Fils. »[54]
XLI. (1.238) Pourquoi donc nous étonnons-nous encore si Dieu prend parfois la ressemblance des anges, comme il prend parfois même celle des hommes, pour aider ceux qui lui adressent leurs supplications ? Ainsi, lorsqu’il dit : « Je suis le Dieu que tu as vu à la place de Dieu »[55], nous devons comprendre qu’en cette occasion il a pris la place d’un ange, quant à l’apparence, sans changer sa propre nature réelle, pour l’avantage de celui qui n’était pas encore capable de supporter la vue du vrai Dieu ; (1.239) car, de même que ceux qui ne peuvent pas regarder le soleil lui-même, regardent les rayons réfléchis du soleil comme le soleil lui-même, et le halo autour de la lune comme si c’était la lune elle-même ; de même aussi ceux qui ne peuvent supporter la vue de Dieu, regardent son image, sa parole angélique, comme lui-même. (1.240) Ne voyez-vous pas que l’instruction encyclique, c’est-à-dire Agar, dit à l’ange : « Es-tu Dieu qui me voit ? »[56] car elle n’était pas capable de contempler la cause la plus ancienne, d’autant qu’elle était de naissance égyptienne. Mais maintenant l’esprit commence à se perfectionner, de manière à pouvoir contempler le gouverneur de toutes les puissances ; (1.241) c’est pourquoi il dit lui-même : « Je suis le Seigneur Dieu »,[57] moi dont vous avez autrefois contemplé l’image à ma place, et dont vous avez élevé la colonne, y gravant une inscription très sacrée ; et cette inscription indiquait que je me tenais seul, et que j’ai établi la nature de toutes choses, ramenant le désordre et l’irrégularité à l’ordre et à la régularité, et soutenant fermement l’univers afin qu’il puisse reposer sur un fondement ferme et solide, ma propre parole ministérielle.
XLII. (1.242) Car la colonne est le symbole de trois choses : de la position, de la dédicace et d’une inscription : maintenant la position et l’inscription ont été décrites, mais la dédicace doit être expliquée à tous les hommes. (1.243) Car le ciel et le monde sont une offrande dédiée à Dieu qui les a créés ; et toutes les âmes cosmopolites et aimant Dieu, qui se consacrent à lui et se dévouent à lui, ne permettant à aucune chose mortelle de les entraîner dans une direction opposée, ne se lassent jamais de sanctifier leur propre vie et de l’orner de toute sorte de beauté comme une offrande digne de lui. (1.244) Et il est un homme insensé qui n’élève pas de colonne à Dieu, mais qui s’en élève une à lui-même, attribuant la stabilité aux choses de la création, qui sont ballottées dans tous les sens, et pensant dignes d’inscriptions et de panégyriques ces choses qui sont en réalité pleines de matière à blâme et à accusation, et qui, en tant que telles, auraient mieux fait de ne jamais être mentionnées dans une inscription du tout, ou si elles l’avaient été, auraient mieux fait d’être rapidement effacées à nouveau. (1.245) C’est pourquoi la sainte Écriture dit clairement : « Tu ne t’élèveras pas de colonne »[58] ; car en vérité, il n’y a rien qui appartienne à l’homme qui soit stable, non, pas même si certains persistent même avec autant d’obstination à l’affirmer. (1.246) Mais ils pensent non seulement qu’ils sont fermement établis, mais aussi qu’ils sont dignes d’honneurs et d’inscriptions, oubliant celui qui est seul digne d’honneur, qui est seul fermement fixé ; car tandis qu’ils se détournent et s’égarent du chemin qui mène à la vertu, le sens extérieur les égare encore plus, c’est-à-dire la femme qui leur est apparentée, elle aussi les oblige à courir à terre ; (1.247) c’est pourquoi l’âme entière, comme un navire, [59] étant fermée de tous côtés, est offerte comme un pilier ; car les écritures sacrées nous disent que la femme de Lot s’étant retournée pour regarder derrière elle, devint une colonne de sel, (1.248) et cela est dit très naturellement et à juste titre ; car si quelqu’un ne regarde pas en avant ces choses qui méritent d’être vues et entendues (et ces choses sont les vertus et les actions faites en accord avec la vertu), mais regarde en arrière les choses qui sont derrière lui, la gloire sourde, et les richesses aveugles, et la vigueur insensée du corps, et une élégance vide d’esprit, poursuivant seulement ces objets, et ceux qui leur sont apparentés, il restera comme un pilier sans vie se fondant de lui-même ; car le sel n’est pas une chose qui préserve sa fermeté.
XLIII. (1.249) C’est donc très admirablement que le pratiquant de la vertu, ayant appris par une étude continue que la création est une chose en sa propre nature mobile, mais que le Dieu incréé est immuable et immobile, érige une colonne à Dieu, et l’oint après l’avoir érigée ; car Dieu dit : « Tu as oint ma colonne. »[60] (1.250) Mais ne vous imaginez pas que cette pierre ait été ointe d’huile, mais comprenez plutôt que cette opinion, que Dieu est le seul être qui se tienne fermement, a été complètement endurcie par l’exercice, et établie dans l’âme par la science de la lutte, non pas cette science par laquelle les corps s’engraissent, mais celle par laquelle l’esprit acquiert force et vigueur irrésistible ; (1.251) car l’homme qui est ardent dans la poursuite de bonnes études et d’objets vertueux aime les travaux, et aime les exercices ; de sorte que, tout naturellement, ayant développé la science de l’éducation, sœur de l’art de la médecine, il oint et perfectionne tous les raisonnements de la vertu et de la piété, et les consacre à Dieu comme une offrande très belle et durable. (1.252) C’est pourquoi, après avoir mentionné la dédicace de la colonne, Dieu ajoute : « Tu m’as fait un vœu. » Or, un vœu est aussi, à proprement parler, une dédicace, car on dit que celui qui fait un vœu offre, en don à Dieu, non seulement ses propres biens.ses fonctions, mais lui-même également, qui en est le propriétaire ; (1.253) car dit l’Écriture : « Est saint l’homme qui nourrit les mèches de cheveux de sa tête ; celui qui a fait un vœu. » Mais s’il est saint, il est sans aucun doute une offrande à Dieu, ne se mêlant plus de quoi que ce soit d’impur ou de profane ; (1.254) et il y a une preuve en faveur de mon argument, dans la conduite de la prophétesse et mère d’un prophète, Anne, dont le nom étant traduit, signifie grâce ; car elle dit qu’elle donne son fils, « Samuel, en don au Saint »,[61] ne le consacrant pas plus comme un être humain, que comme une disposition pleine d’inspiration et possédée par une impulsion envoyée par Dieu ; et le nom Samuel étant interprété signifie « désigné à Dieu ». (1.255) Pourquoi alors, ô mon âme, te perds-tu encore en vaines spéculations et en vaines labeurs ? Et pourquoi n’allez-vous pas, comme élève, vers celui qui pratique la vertu, en combattant les passions et les vaines opinions, pour apprendre de lui comment les combattre ? Car, dès que vous aurez appris cet art, vous deviendrez le chef d’un troupeau, non pas dépourvu de qualités, de raison et de docilité, mais d’un troupeau reconnu, rationnel et beau. (1.256) Si vous devenez le chef, vous plaindrez la misérable race humaine et ne cesserez pas de révérer la Divinité ; vous ne vous lasserez jamais de bénir Dieu, et de plus, vous graverez sur des colonnes des hymnes adaptés à votre sujet sacré, afin de pouvoir non seulement parler couramment, mais aussi chanter en musique les vertus du Dieu vivant ; car ainsi, vous pourrez retourner à la maison de votre père, délivré d’un long et inutile voyage en terre étrangère.
I. (2.1) Pour décrire la troisième espèce de rêves envoyés par Dieu, nous invoquons tout naturellement Moïse comme allié, afin que, comme il a appris, alors qu’il était auparavant ignorant, il puisse nous instruire, nous qui sommes également ignorants, au sujet de ces signes, en illustrant chacun d’eux séparément. Or, cette troisième espèce de rêves existe chaque fois que, dans le sommeil, l’esprit, mis en mouvement et s’agitant, est rempli de frénésie et d’inspiration, de manière à prédire des événements futurs par une certaine puissance prophétique. (2.2) Car le premier genre de rêves que nous avons mentionné était celui qui procédait de Dieu comme auteur de son mouvement, et, d’une manière invisible, nous inspirait ce qui nous était indistinct, mais bien connu de lui. Le second genre se produisait lorsque notre propre intellect était mis en mouvement simultanément avec l’âme de l’univers, et était rempli d’une folie divine au moyen de laquelle il lui est permis de pronostiquer des événements qui sont sur le point de se produire ; (2.3) C’est pourquoi l’interprète de la sainte volonté parle très clairement et clairement de rêves, désignant ainsi les visions de la première espèce, comme si Dieu, par le moyen des rêves, donnait des suggestions équivalant à des oracles précis et précis. Quant aux visions de la seconde espèce, il ne les décrit ni très clairement ni très obscurément ; la vision de l’échelle qui montait au ciel en est un exemple ; car cette version était énigmatique ; néanmoins, le sens n’était pas caché à ceux qui avaient une vision assez perçante. (2.4) Mais ces visions de la troisième espèce, moins claires que les deux premières en raison de leur signification énigmatique, profondément ancrée et richement colorée, requièrent la science d’un interprète des rêves. En tout état de cause, tous les rêves de cette catégorie, consignés par le législateur, sont interprétés par des hommes versés dans l’art précité. (2.5) De quels rêves suis-je donc ici question ? Chacun doit certainement voir ceux de Joseph, de Pharaon, roi d’Égypte, et ceux que le chef des panetiers et le chef des échansons ont eux-mêmes vus ; (2.6) et il est toujours bon de commencer notre instruction par les premiers exemples. Or, les premiers rêves sont ceux que Joseph a eus, recevant deux visions des deux parties du monde, le ciel et la terre. De la terre, le rêve concernant la moisson ; et il est le suivant : « Je pensais que nous étions tous en train de lier des gerbes au milieu du champ ; et ma gerbe s’est dressée. »[62] (2.7) Et l’autre se rapporte au cercle du zodiaque, et est : « Ils m’ont adoré comme le soleil, la lune et les onze étoiles. » Et l’interprétation du premier, qui fut donnée avec une grande violence de réprimande, est la suivante : « Seras-tu roi et régneras-tu sur nous ? Ou seras-tu seigneur et nous domineras-tu ? » L’interprétation de la seconde est à nouveau pleine d’une juste indignation : « Est-ce que moi et ta mère,et tes frères viennent se prosterner à terre et t’adorent ?
II. (2.8) Que ces choses soient d’abord posées comme fondement ; et sur ce fondement, élevons le reste de l’édifice, suivant les règles de ce sage architecte, l’allégorie, et examinant avec précision chaque détail des rêves ; mais nous devons d’abord mentionner ce qu’il est nécessaire de considérer avant les rêves. Certains ont étendu la nature du bien à de nombreuses choses, et d’autres l’ont attribuée à l’Être le plus excellent seul ; d’autres encore l’ont mêlée à d’autres choses, tandis que d’autres l’ont qualifiée de pure. (2.9) Ceux donc qui n’ont appelé bien que ce qui est honorable, ont préservé cette nature de tout alliage et ne l’ont attribuée qu’à ce qu’il y a de plus excellent, à savoir à la raison qui est en nous ; mais ceux qui l’ont mêlée l’ont combinée à trois choses : l’âme, le corps et les circonstances extérieures. Ceux qui agissent ainsi sont des hommes au mode de vie plutôt efféminé et luxueux, élevés la majeure partie de leur temps, dès leur plus tendre enfance, dans des appartements de femmes et parmi la race efféminée qui y vit. Mais ceux qui argumentent différemment sont des hommes enclins à un régime plus dur, élevés dès leur enfance parmi les hommes, et étant eux-mêmes des hommes dans leur esprit, privilégiant le bien à l’agréable, et se consacrant à une nourriture digne des athlètes pour la force et la vigueur, non pour le plaisir. (2.10) Moïse représente d’ailleurs deux personnes comme chefs de ces deux groupes. Le chef du groupe noble et bon est Isaac, autodidacte et autodidacte ; Français car il raconte qu’il fut sevré, ne choisissant aucune nourriture tendre, laiteuse, enfantine et infantile, mais seulement celle qui était vigoureuse et parfaite, car il était naturellement formé, dès sa plus tendre enfance, pour les actes de vertu, et était toujours dans la force de l’âge et de l’énergie. Mais le chef de la compagnie, qui cède et qui est enclin à des mesures plus douces, est Joseph ; (2.11) car il ne néglige certes pas les vertus de l’âme, mais il se soucie également de la stabilité et de la permanence du corps, et désire aussi une abondance de trésors terrestres ; et c’est en stricte conformité avec la vérité naturelle qu’il est représenté comme attiré dans des directions différentes, puisqu’il se propose de nombreux objectifs différents dans la vie ; et, attiré par chacun d’eux, il est maintenu dans un état de commotion et d’agitation, sans pouvoir tenir bon. (2.12) Et son cas n’est pas comme celui des villes qui, après avoir fait une trêve, jouissent de la paix, et qui pourtant, après un certain temps, sont de nouveau attaquées, de manière à remporter la victoire et à être vaincues alternativement ; car parfois un grand afflux de richesses et de gloire venant sur elles, dompte tous leurs soucis du corps et de l’âme, mais ensuite, repoussées par ces deux choses, elles sont conquises par l’adversaire ; (2.13) et de la même manière tous les plaisirs du corps venant sur l’âme en un ordre compact submergent et effacent tous les objets de l’intellect l’un après l’autre ; et puis, après un court laps de temps, la sagesse, changeant son cours et soufflant dans la direction opposée avec une brise fraîche et violente, fait ralentir le courant des plaisirs, et modère complètement toute l’ardeur, l’impétuosité et la rivalité des sens extérieurs. (2.14) Un tel cercle de guerre sans fin tourne donc autour de l’âme, soumise comme elle l’est à tant de changements ; car lorsqu’un ennemi a été détruit, alors il en surgit immédiatement un autre plus puissant, à la manière de l’hydre à plusieurs têtes ; car ils disent que dans le cas de ce monstre, au lieu de la tête qui a été coupée, une autre a surgi, par cette déclaration ils veulent indiquer le caractère multiforme, prolifique et presque invincible de la méchanceté éternelle. (2.15) Ne répondez donc pas à Joseph, mais sachez qu’il est l’image d’une connaissance multiforme et mêlée. Car apparaît en lui une espèce de continence rationnelle, de type masculin, façonnée selon son père Jacob ; (2.16) et aussi celle qui est dépourvue de raison est également visible, celle du sens extérieur, étant faite à l’image de sa race maternelle, selon Rachel. Apparaît aussi en lui la semence des plaisirs corporels, que sa fréquentation des chefs échansons, des chefs boulangers et des chefs cuisiniers a imprimée en lui. Est également visible la semence d’une vaine opinion, sur laquelle il monte comme sur un char en raison de sa légèreté, étant enflé d’orgueil et d’orgueil, et s’élevant à une hauteur qui détruit l’égalité.Selon Rachel. On y trouve aussi la semence des plaisirs charnels, que sa fréquentation des chefs des échansons, des chefs des boulangers et des chefs des cuisiniers a imprimée en lui. On y voit aussi la semence d’une vaine opinion, sur laquelle il monte comme sur un char, en raison de sa légèreté, s’enorgueillissant et s’élevant jusqu’à détruire l’égalité.Selon Rachel. On y trouve aussi la semence des plaisirs charnels, que sa fréquentation des chefs des échansons, des chefs des boulangers et des chefs des cuisiniers a imprimée en lui. On y voit aussi la semence d’une vaine opinion, sur laquelle il monte comme sur un char, en raison de sa légèreté, s’enorgueillissant et s’élevant jusqu’à détruire l’égalité.
III. (2.17) Le caractère de Joseph est maintenant esquissé par les grandes lignes précédentes. Mais chacun de ses rêves doit être examiné avec précision ; et tout d’abord, nous devons examiner celui des gerbes. « Je pensais, dit-il, que nous étions tous en train de lier des gerbes. » L’expression « Je pensais » est clairement celle d’une personne incertaine, hésitante et supposant avec une certaine imprécision, et non celle de quelqu’un qui voit clairement et positivement ; (2.18) car il est tout naturel pour des personnes qui s’éveillent d’un profond sommeil et qui sommeillent encore de dire : « Je pensais » ; mais il n’en va pas de même pour des personnes parfaitement éveillées et qui voient distinctement. (2.19) Et Jacob, celui qui pratique la vertu, ne dit pas : « J’ai pensé », mais son langage est : « Voici une échelle solidement établie, dont la tête atteignait le ciel. »[63] Et il dit encore : « Quand les brebis conçurent, je les vis de mes yeux dans mon sommeil, et voici que les boucs et les béliers sautèrent sur les brebis et sur les chèvres, blancs, et panachés, et rayés, et tachetés. »[64] (2.20) Car il arrive nécessairement que les conceptions endormies aussi de ceux qui pensent ce qui est honorable et éligible pour lui-même et plus distinct et plus pur, tout comme leurs actions éveillées, soient aussi plus dignes d’approbation.
IV. (2.21) Mais quand j’entends Jacob raconter son rêve, je m’étonne qu’il ait imaginé qu’il liait les gerbes et non qu’il moissonnait le blé ; car l’une est la tâche des classes inférieures et des serviteurs, mais l’autre est l’occupation des employeurs et des hommes plus habiles en agriculture. (2.22) Car être capable de distinguer ce qui est nécessaire de ce qui est nuisible, et ce qui est nutritif de ce qui ne l’est pas, et ce qui est vrai de ce qui est faux, et un fruit utile d’une racine sans valeur, non seulement par rapport à ce que la terre porte, mais aussi dans ce que l’intellect porte, est l’œuvre de la vertu la plus parfaite. (2.23) En conséquence, la sainte Écriture représente ceux qui voient, c’est-à-dire les fils d’Israël, comme moissonnant, et ce qui est une chose très extraordinaire, comme moissonnant non pas l’orge ou le blé, mais la moisson elle-même ; Français en conséquence, le langage de Moïse est : « Quand tu moissonneras ta moisson, tu ne moissonneras pas entièrement les coins de ta moisson. »[65] (2.24) Car il veut dire ici que l’homme vertueux n’est pas simplement le juge des choses qui diffèrent les unes des autres, et qu’il ne distingue pas seulement les choses dont un produit est dérivé du produit lui-même ; mais qu’il est également capable de distinguer tout en moissonnant la moisson, d’éliminer cette opinion de sa capacité à distinguer, et d’éradiquer la propre opinion d’un homme sur lui-même ; parce qu’il est fermement persuadé et croit Moïse lorsqu’il affirme que « le jugement appartient à Dieu seul »,[66] à qui sont les comparaisons et les distinctions entre toutes choses ; à qui il est bon pour un homme de confesser qu’il est inférieur, une confession plus glorieuse que la victoire la plus renommée. (2.25) Or, moissonner une moisson, c’est comme couper une seconde fois ce qui a déjà été coupé ; Français à laquelle, lorsque quelques personnes avides de nouveauté s’appliquèrent, elles trouvèrent une circoncision de la circoncision et une purification de la purification ; [67] c’est-à-dire qu’elles trouvèrent que la purification de l’âme était elle-même purifiée, attribuant à Dieu le pouvoir de rendre brillante, et ne s’imaginant jamais qu’elles étaient elles-mêmes compétentes, sans l’aide de la sagesse divine, pour laver et purifier une vie pleine de taches. (2.26) Apparentée à cela est la double caverne, qui est un symbole des doubles et excellents souvenirs (l’un existant en référence à la créature, et l’autre au Créateur), dans lesquels l’homme vertueux est élevé, contemplant les choses qui sont dans le monde, et aimant aussi s’enquérir du père qui les a faites ; (2.27) et c’est à cause de ces doubles souvenirs, à mon avis, que la double symphonie en musique, celle du double diapason, a été inventée. (2.28) Car il était nécessaire que l’œuvre et le créateur soient comblés par deux mélodies parfaites, et non par une seule. Car, puisque les excellences qu’elles devaient célébrer différaient, il s’ensuivait nécessairement que les mélodies et les symphonies différaient également.Français La symphonie combinée étant assignée au monde, qui est une création composée, composée de nombreuses parties différentes ; et la mélodie disjointe étant appropriée à celui qui, quant à son essence, est séparé de toute créature, à savoir, à Dieu. (2.29) De plus, l’interprète de la sainte volonté énonce à nouveau une opinion favorable à la vertu, disant qu’il ne convient pas « de moissonner complètement chaque coin du champ de moisson » ; se souvenant de la proposition originale, selon laquelle « le tribut appartenait au Seigneur »,[68] à qui appartiennent aussi l’autorité et la conformation de ces choses ; (2.30) mais celui qui n’est pas initié à la moisson se vante, jusqu’à dire : « Je pensais être avec les autres en train de lier les gerbes que j’avais moissonnées. »[69] Et il ne considère pas que c’est l’occupation des serviteurs et des mains inexpérimentées, comme je l’ai dit tout à l’heure. (2.31) Mais ce mot gerbes est une expression allégorique par laquelle on entend réellement les affaires, telles que chaque homme les prend en main pour l’entretien de sa maison, dans laquelle il espère vivre et habiter pour toujours.
V. (2.32) Il existe donc une infinité de différences entre les gerbes, c’est-à-dire entre les choses qui soutiennent une maison. Il existe aussi une multitude innombrable de différences entre ceux qui ramassent et prennent les gerbes dans leurs mains, de sorte qu’il est impossible de les mentionner ou même de les imaginer toutes. Il n’est cependant pas superflu d’en décrire quelques-unes à titre d’exemple, qu’il a lui aussi mentionnées lorsqu’il racontait son rêve. (2.33) Car il dit à ses frères : « Je croyais que nous étions en train de lier des gerbes. » Or, parmi ses frères, il en a dix, fils du même père que lui, et un de la même mère ; et le nom de chacun d’entre eux est l’emblème d’une chose essentielle. Ruben est l’emblème de la perspicacité naturelle, car il est appelé « le fils qui voit », car, dans la mesure où il est un fils, il n’est pas parfait, mais dans la mesure où il est doué de la faculté de voir et voit avec perspicacité, il est naturellement bien qualifié. (2.34) Siméon est un emblème de l’érudition, car son nom, interprété comme signifiant « écoute ». Lévi est un symbole d’énergies et d’actions vertueuses, et de ministères saints. Judas est un emblème des chants et des hymnes adressés à Dieu. Issacar, du salaire donné pour un bon travail ; mais peut-être les œuvres elles-mêmes sont-elles leur propre récompense parfaite. Zabulon est un symbole de lumière, car son nom signifie le départ de la nuit ; et lorsque la nuit s’en va et nous quitte, alors nécessairement la lumière se lève. (2.35) Dan est un symbole de la distinction et de la division des différentes choses. Gad est un emblème de l’invasion des pirates et d’une contre-attaque menée contre eux. Asser est un symbole de la richesse naturelle, car son nom, interprété comme signifiant « un appel béni », puisque la richesse est considérée comme une possession bénie. (2.36) Nephtali est un symbole de paix, car toutes choses sont ouvertes et étendues par la paix, comme à l’inverse elles sont fermées par la guerre ; et son nom étant interprété signifie « élargir » ou « ce qui est ouvert ». Benjamin est un emblème des temps jeunes et vieux ; car étant interprété son nom signifie « le fils des jours », et les temps jeunes et vieux sont tous deux mesurés par les jours et les nuits. (2.37) En conséquence, chacun d’eux prend dans sa main ce qui lui appartient ; et l’ayant pris, lie toutes les parties ensemble ; l’homme bien doué par la nature prenant les parties de dextérité, de persévérance et de mémoire, dont consistent les bonnes dotations naturelles ; l’homme qui a bien appris prend les parties d’écoute, de tranquillité et d’attention ; l’homme disposé à l’effort prend le courage et une heureuse confiance qui ne recule pas devant le danger ; (2.38) l’homme enclin à la gratitude prend les louanges, les panégyriques, les hymnes et les bénédictions, à la fois en parlant et en chantant ; l’homme qui est avide de salaire prend une industrie sans hésitation, une gratitude très durable et des soins, armé d’une promptitude qui ne doit pas être méprisée ; (2.39) Celui qui poursuit la lumière plutôt que les ténèbres acquiert la vigilance et la perspicacité de la vue ; l’homme qui est un admirateur de la division et de la distinction entre les choses acquiert des raisons bien aiguisées pour ne pas être trompé par des choses semblables entre elles comme si elles étaient identiques, l’impartialité pour ne pas être trompé par la faveur, et l’incorruptibilité ; (2.40) Celui qui, d’une manière quelque peu pirate, tend des embuscades à ceux qui complotent contre lui, acquiert la tromperie, la cajolerie, la ruse, le sophisme, la prétention et l’hypocrisie, qui étant de leur nature blâmables, sont néanmoins louées lorsqu’elles sont employées contre l’ennemi ; celui qui s’efforce d’être riche des richesses de la nature acquiert la tempérance et la frugalité ; celui qui aime la paix acquiert l’obéissance à la loi, une bonne réputation, l’absence d’orgueil et l’égalité.
VI. (2.41) C’est donc de ces choses que sont composées et liées les gerbes de ses frères issus du même père ; mais la gerbe de son frère utérin est composée de jours et de temps, causes de rien, comme si elles étaient causes de toutes choses. (2.42) Mais le rêveur et l’interprète des rêves lui-même, car il a réuni les deux caractères, fabrique une gerbe d’opinions vaines comme des biens les plus grands, les plus brillants et les plus utiles à la vie. C’est pourquoi c’est initialement par ses rêves, qui sont des choses chères à la nuit, qu’il est révélé au roi du pays physique, et non par l’accomplissement d’actions visibles, qui nécessitent le jour pour être manifestées. (2.43) Après cela, il est nommé surveillant ou gouverneur de toute l’Égypte, et est honoré du second rang dans le royaume, n’étant inférieur en honneur qu’au roi. Toutes choses sont aux yeux de la sagesse, si elle en était juge, plus ignobles et plus ridicules que la défaite et le déshonneur. (2.44) Après cela, il met un collier d’or, un licou des plus illustres, le cercle et la roue d’une interminable nécessité, non pas la conséquence et l’ordre régulier des choses dans la vie, ni la connexion des affaires de la nature comme l’était Thamar ; car son ornement n’était pas un collier, mais un bracelet. De plus, il prend une bague, un cadeau royal qui n’est pas un cadeau, un gage dénué de bonne foi, le cadeau tout à fait contraire à celui qui a été donné à ce même Thamar par Juda, fils du roi voyant, Israël ; (2.45) Car Dieu donne à l’âme un sceau, un don très beau, pour montrer qu’il a investi de forme l’essence de toutes choses qui était auparavant dépourvue de forme, et qu’il a marqué d’un caractère particulier ce qui auparavant n’avait pas de caractère, et qu’il a doté de forme ce qui auparavant n’avait pas de forme distinctive, et qu’ayant perfectionné le monde entier, il lui a imprimé une image et une apparence, à savoir sa propre parole. (2.46) Mais Joseph aussi monte sur le second char, gonflé d’exaltation et d’une vaine arrogance. Et il est régulateur des provisions, amassant et préservant les trésors pour le corps, et le pourvoyant de nourriture de toutes parts : et c’est une fortification très redoutable contre l’âme. (2.47) De plus, son choix délibéré de vie, et la vie qu’il admire, sont attestés dans une large mesure par son nom ; car Joseph, étant interprété, signifie « addition » ; et l’opinion vaine ajoute toujours le faux au vrai, le bien d’autrui au sien, le faux au vrai, le superflu à l’adéquat, le luxe à ce qui suffit à l’existence, et l’orgueil à la vie.
VII. (2.48) Considérez maintenant ce que je désire démontrer ici. Nous nous nourrissons de viande et de boisson, même si la viande est du blé le plus ordinaire et la boisson de l’eau pure du ruisseau. De plus, une vaine opinion y a ajouté une infinité de variétés de gâteaux, de gâteaux au fromage, de confiseries, ainsi que des mélanges coûteux et variés d’une multitude indescriptible de vins, pour le plaisir plutôt que pour participer à une nourriture nécessaire et correctement préparée. (2.49) De plus, les assaisonnements nécessaires à la consommation sont les poireaux, [70] les légumes, de nombreux fruits des arbres, le fromage et d’autres choses de ce genre ; et si l’on veut inclure les hommes carnivores, il faut en outre y ajouter le poisson et la viande. (2.50) N’aurait-il pas suffi, alors, de griller ces aliments sur des charbons ardents ou de les rôtir au feu, puis de les manger aussitôt, à la manière de ces véritables héros d’autrefois ? Mais l’épicurien est non seulement avide de telles choses, mais il prend pour alliée la vaine opinion, excite les passions gloutonnes qui l’habitent, et recherche et traque partout des confiseurs et des pâtissiers réputés dans leur art. (2.51) Et ceux-ci, apportant à son estomac misérable les différents appâts, inventés après de longues réflexions, et préparant toutes sortes de saveurs particulières, et les disposant avec ordre, chatouillent, séduisent et domptent la langue. Alors, aussitôt, ils contournent ce fondement des sens extérieurs, le goût, par lequel le chasseur de banquets devient en très peu de temps un esclave au lieu d’être un homme libre. (2.52) Car qui ignore que les vêtements étaient à l’origine faits pour se protéger des blessures que le froid et le chaud pouvaient causer au corps ? Comme le disent les poètes quelque part :
« Apprivoiser le vent en hiver. »
(2.53) Qui donc pense à de coûteux vêtements pourpres ? Qui se soucie de robes d’été transparentes et fines ? Qui désire un vêtement délicat comme une toile d’araignée ? Qui est désireux de se faire broder des vêtements fleuris de teintures et de figures brochées, par ceux qui sont habiles à coudre et à tisser des broderies astucieuses, et dont le travail manuel surpasse l’habileté imitative du peintre ? Qui, dis-je ? Qui, sinon une vaine opinion.
VIII. (2.54) Et, en effet, c’est pour les mêmes raisons que nous avions besoin de maisons, notamment pour nous protéger des attaques des bêtes sauvages, ou d’hommes plus sauvages encore. Pourquoi donc ornons-nous les pavés et les sols de pierres précieuses ? Et pourquoi parcourons-nous l’Asie, l’Afrique, toute l’Europe et les îles, à la recherche de piliers, de chapiteaux et d’architraves, et les choisissons-nous en fonction de leur beauté supérieure ? (2.55) Et pourquoi sommes-nous si désireux et pourquoi rivalisons-nous de sculptures doriques, ioniques et corinthiennes, et de tous les raffinements que les hommes luxueux ont inventés, en plus des coutumes existantes, pour orner les chapiteaux de leurs piliers ? Et pourquoi garnissons-nous nos chambres, hommes et femmes, d’ornements d’or ? N’est-ce pas dû à notre vaine opinion ? (2.56) Et pourtant, pour un sommeil profond, le simple sol suffisait (puisque, même de nos jours, les récits nous disent que les gymnosophistes, parmi les Indiens, dorment à même le sol conformément à leurs anciennes coutumes) ; et si ce n’était pas le cas, en tout cas un lit fait de pierres soigneusement choisies ou de simples morceaux de bois, serait un lit suffisant ; (2.57) mais maintenant les poteaux de nos échelles sont ornés de pieds en ivoire, et les ouvriers incrustent nos lits de nacre précieuse et d’écaille de tortue bigarrée, au prix de grands efforts, d’argent et de temps ; et certains lits sont même faits d’argent massif ou d’or massif, et incrustés de pierres précieuses, de toutes sortes de travaux floraux, et d’ornements en or repoussé parsemés tout autour, comme pour la simple ostentation et la magnificence, et non pour un usage quotidien. L’inventeur de tout cela est encore la même vaine opinion. (2.58) De plus, pourquoi chercher d’autres onguents que le jus pressé de l’olivier ? Car il adoucit les membres, soulage le corps et procure une bonne condition physique. Si quelque chose s’est relâché ou flasque, il le rattache, le rend ferme et solide, et nous remplit de vigueur et de force musculaire, non moins que tout autre onguent. (2.59) Mais les onguents agréables de la vaine opinion s’opposent à ceux qui sont simplement utiles, sur lesquels travaillent les parfumeurs et auxquels contribuent de vastes régions, telles que la Syrie, Babylone, les Indiens et les Scythes ; chez lesquelles se trouvent les origines de tous les parfums.
IX. (2.60) Quant à la boisson, de quoi l’homme aurait-il réellement besoin de plus que de la coupe naturelle, façonnée avec la perfection de l’art ? Or, nos propres mains nous fournissent une telle coupe, que si quelqu’un la rassemble et la creuse en l’appliquant étroitement à sa bouche, tandis qu’un autre y verse le liquide à boire, il obtient non seulement un remède à sa soif, mais aussi un plaisir indescriptible. (2.61) Pourtant, si l’on avait absolument besoin d’autre chose, la coupe de lierre de l’ouvrier agricole ne suffirait-elle pas ? Et pourquoi faudrait-il recourir aux arts d’autres artistes éminents ? Et à quoi bon se procurer une multitude innombrable de coupes d’or et d’argent, si ce n’est pour satisfaire une arrogance vaniteuse et vaniteuse, et pour élever une opinion vaine à une hauteur excessive ? (2.62) De même, lorsque les hommes portent des couronnes, ils ne se contentent pas de guirlandes parfumées de laurier, de lierre, de violettes, de lys, de roses, ou de trois fleurs quelconques, négligeant tous les dons de Dieu qu’il nous accorde comme les différentes saisons de l’année. Ils mettent sur leurs têtes des couronnes d’or, qui sont un poids très lourd, et les portent sans honte au milieu d’une place publique bondée. Et que pouvons-nous penser de tels hommes, sinon qu’ils sont esclaves d’une vaine opinion, bien qu’ils se prétendent non seulement libres, mais même dirigeants de nombreuses autres personnes ? (2.63) Le jour me manquerait si je devais passer en revue toutes les variétés de la vie humaine ; et pourtant, pourquoi m’étendre sur ce sujet avec prolixité ? Car qui n’a entendu parler, ou qui n’a vu, de tels hommes ? Qui ne les fréquente et ne les connaît pas ? Français De sorte que l’Écriture sainte a très justement nommé « addition » l’ennemi de la simplicité et le compagnon de l’orgueil ; (2.64) car, comme des pousses superflues poussent sur les arbres, ce qui est un grand dommage aux branches véritablement utiles, et que les cultivateurs détruisent et coupent par une prescience prudente de ce qui est nécessaire : de même la vie de mensonge et d’arrogance grandit souvent à côté de la vraie vie dépourvue d’orgueil, dont, à ce jour, aucun cultivateur n’a été trouvé qui ait pu couper les pousses superflues nuisibles par les racines. (2.65) C’est pourquoi les sages, sachant cela d’abord par leurs sens extérieurs, et ensuite par leur esprit, crient à haute voix : « Une bête féroce s’est emparée de Joseph et l’a dévoré. »[71] (2.66) Mais cette bête féroce, l’orgueil varié qui surgit dans la vie des hommes vivant dans l’irrégularité et la confusion, et dont les principaux artisans sont la cupidité et la ruse sans scrupules, ne dévore-t-elle pas quiconque passe à sa portée ? C’est pourquoi la douleur leur sera ajoutée, même de leur vivant, comme s’ils étaient morts, car ils ont une vie digne de lamentations et de deuil, car Jacob pleure Joseph, même de son vivant. (2.67)67) Mais Moïse ne permettra pas que les raisonnements sacrés sur Nadab soient pleurés ; [72] car ils n’ont pas été emportés par une bête sauvage, mais ont été emportés par une violence inextinguible et une lumière impérissable ; car, ayant rejeté toute crainte et hésitation, ils avaient dûment consacré le zèle fervent et ardent, consumant la chair, et très facilement et véhémentement excités vers la piété, qui n’est pas liée à la création, mais est apparentée à Dieu, ne montant pas à l’autel par les marches régulières, car cela était interdit par la loi, mais avançant rapidement avec un vent favorable, et étant conduits jusqu’au seuil du ciel, se dissolvant en rayons éthérés comme un holocauste entier.
X. (2.68) C’est pourquoi, ô toi, âme qui es obéissante à ton maître, tu dois couper ta main et ton pouvoir lorsqu’il commence à s’emparer des parties de la génération, c’est-à-dire des choses créées ou des activités humaines ; (2.69) car très souvent… couper la main qui s’est emparée des parties intimes,[73] d’abord parce qu’elle a accepté avec joie le plaisir qu’elle aurait plutôt dû détester ; ensuite parce qu’elle a cru que la faculté de propager la semence était en notre pouvoir, et aussi parce qu’elle a attribué à la créature le pouvoir qui appartient au Créateur. (2.70) Ne vois-tu pas que la masse terrestre, Adam, lorsqu’elle pose ses mains sur les deux arbres, meurt, parce qu’elle a préféré le nombre deux à l’unité, et parce qu’elle a admiré la créature de préférence au Créateur ? Mais sors hors de portée de la fumée et de la tempête, et fuis les poursuites ridicules de la vie mortelle comme un tourbillon effrayant, et ne les touche même pas, comme le dit le proverbe, du bout du doigt. (2.71) Et lorsque tu te seras ceint pour les ministères sacrés, ayant élargi tes Si tu as toute ta main et toute ta puissance, saisis fermement les spéculations de l’instruction et de la sagesse ; car le commandement est de ce genre : « Si une âme apporte un don ou un sacrifice, le don sera de fleur de farine. »[74] Après cela, le législateur ajoute : « Et lorsqu’il a pris une pleine poignée de fleur de farine, avec l’huile et tout l’encens, il place le mémorial sur l’autel du sacrifice. » (2.72) N’est-ce pas une expression très belle et appropriée de Moïse, d’appeler incorporelle l’âme qui s’apprête à offrir un sacrifice, mais de ne pas appeler par un tel nom la double masse qui consiste en mortalité et en immortalité ? Car ce qui fait le vœu, ce qui est plein de gratitude, ce qui offre des sacrifices véritablement sans tache, n’est qu’une seule chose, à savoir l’âme. (2.73) Qu’est-ce donc que l’offrande de l’âme incorporelle ? Français Qu’est-ce que la fine farine de froment, symbole de l’esprit purifié par les suggestions de l’instruction, qui est capable de rendre l’ami de l’éducation libre de toute maladie, et une vie libre de tout reproche ? (2.74) De laquelle le prêtre prenant une poignée dans toute sa main, c’est-à-dire, avec toute la prise de son esprit, est commandé d’offrir l’âme entière elle-même, pleine des doctrines les plus pures et les plus pures, comme le plus excellent des sacrifices, grasse et en bon état, se réjouissant de la lumière divine, et parfumée des exhalaisons qui sont émises par la justice, et par les autres vertus, afin de jouir toujours d’une vie très parfumée, délicieuse et heureuse ; car l’huile et l’encens, dont le prêtre prend une poignée avec la viande blanche, contiennent une affirmation figurative de cela.
XI. (2.75) C’est pour cette raison que Moïse a consacré une fête spéciale à la gerbe ; toutefois, non pas à chaque gerbe, mais à celle qui provenait de la terre sainte. « Car, dit-il, lorsque vous entrerez dans le pays que je vous donne, et que vous en ferez la moisson, vous apporterez au prêtre des gerbes comme prémices de votre moisson. »[75] (2.76) Et le sens de cette injonction est : lorsque, ô esprit, vous entrerez dans le pays de la vertu, il convient qu’il soit offert à Dieu.
seul, étant une terre bonne pour le pâturage, une terre de sol riche, une terre qui porte du fruit, et lorsque vous récoltez le fruit (soit celui offert par la terre spontanément, soit celui que vous avez semé), qui a été amené à la perfection par le Dieu qui donne la perfection ; ne le rapportez pas chez vous ; c’est-à-dire, ne le stockez pas, et ne vous attribuez pas la cause de la récolte qui vous est venue, avant d’avoir offert les prémices à la Cause de toute richesse, et à celui qui vous a persuadé d’étudier les opérations qui confèrent la richesse. (2.77) Et il vous est enjoint d’offrir les « prémices de votre propre récolte » ; non de la récolte de la terre, afin que nous puissions récolter et rassembler la récolte pour nous-mêmes ; consacrant à Dieu tous les fruits bons, nutritifs et bénéfiques.
XII. (2.78) Mais l’homme qui est en même temps initié aux rêves et aussi interprète des rêves, ose dire que sa gerbe s’est levée et s’est tenue droite ; car en vérité, comme les chevaux fougueux lèvent haut leur cou, ainsi tous ceux qui sont compagnons d’opinion vaine se placent au-dessus de toutes choses, au-dessus de toutes les villes, et des lois, et des coutumes nationales, et au-dessus de toutes les circonstances qui affectent chacun d’eux individuellement. (2.79) Puis, passant du statut de démagogues à celui de chefs du peuple, et renversant les choses qui appartiennent à leurs voisins, et établissant et établissant sur une base solide ce qui appartient à eux-mêmes, c’est-à-dire toutes les dispositions qui sont libres et par nature impatientes de l’esclavage, ils tentent de réduire celles-ci aussi sous leur pouvoir ; (2.80) C’est pourquoi le rêveur ajoute : « Et vos gerbes, se tournant vers ma gerbe, lui rendirent hommage. »[76] Car l’amant de la modestie s’émerveille et craint l’homme au cou raide, et l’homme prudent craint l’homme entêté, et celui qui révère la sainteté craint l’impie, tant pour lui-même que pour les autres. (2.81) Et cela n’est-il pas raisonnable ? Car, dans la mesure où l’homme de bien est spectateur, non seulement de la vie humaine, mais aussi de toutes les choses qui existent dans le monde, il sait combien de choses sont habituellement causées par la nécessité, le hasard, l’opportunité, la violence et l’autorité ; et combien de propositions, et quels grands exemples de prospérité progressant avec rapidité vers le ciel, ces mêmes causes ont ébranlé et renversé ; (2.82) de sorte qu’il prendra nécessairement la prudence comme bouclier, comme protection pour éviter de subir un mal soudain et inattendu ; Car, de même que je me figure ce qu’est un mur à une ville, la prudence l’est à un individu. (2.83) Ces hommes ne parlent-ils pas bêtement, ne sont-ils pas fous, ceux qui veulent étaler leur inexpérience et leur liberté de parole aux rois et aux tyrans, osant parfois parler et agir contre leur volonté ? Ne comprennent-ils pas qu’ils ont non seulement soumis leur cou au joug comme des bêtes brutes, mais qu’ils ont aussi livré et trahi tout leur corps et leur âme, ainsi que leurs femmes, leurs enfants, leurs parents, et toute leur nombreuse parenté et la communauté de leurs autres parents ? Et n’est-il pas permis au cocher, comme au passager, d’éperonner, de pousser, de freiner et de retenir, selon qu’il veut arranger les choses pour les rendre plus ou moins grandes. (2.84) C’est pourquoi, après avoir été piqués d’aiguillons, fouettés, mutilés, et avoir subi toutes les cruautés qui peuvent être infligées d’une manière inhumaine et impitoyable avant la mort, tous ensemble, ils sont emmenés au supplice et mis à mort.
XIII. (2.85) Voilà les récompenses d’une liberté de parole inconvenante, non pas celle que les juges sensés considèrent comme telle, mais celle d’une licence pleine de folie, de démence et de maladies incurables. Que voulez-vous dire ? Quelqu’un, voyant une tempête à son comble, un vent violent s’abattre sur lui, un ouragan déchaîné et la mer déferlante, alors qu’il devrait jeter l’ancre, lève-t-il l’ancre et prend-il la mer à ce moment-là ? (2.86) Quel pilote, quel capitaine de navire, fut jamais assez ivre et intoxiqué pour, alors que tous les dangers que je viens d’énumérer le menaçaient, accepter de lever l’ancre, de peur que, si son navire était englouti par la mer déferlante, il ne soit englouti avec tout son équipage ? Car, s’il avait été disposé à affronter une navigation sans danger, il était en son pouvoir d’attendre un temps calme et une brise douce et favorable. (2.87) Que dirait-on, si quelqu’un voyait un ours ou un lion s’approcher avec violence, et, tout en pouvant l’apaiser et l’apprivoiser, le provoquait et le rendait sauvage, afin de se livrer lui-même en nourriture et en festin impitoyables à ces monstres voraces ? (2.88) À moins que quelqu’un n’affirme qu’il ne sert à rien de s’opposer aux aspics et aux serpents d’Égypte, et à toutes les autres choses qui … venin destructeur … infligent une mort inévitable à ceux qui sont une fois mordus par eux ; car les hommes doivent se contenter d’utiliser des incantations, et ainsi apprivoiser ces bêtes, et par ces moyens éviter de souffrir d’elles aucun mal. (2.89) De plus, n’y a-t-il pas des hommes qui sont plus sauvages et plus traîtres que les sangliers, les serpents ou les aspics ? Dont il est impossible d’échapper à la perfidie et à la malice autrement que par la douceur et les caresses ? C’est pourquoi le sage Abraham offrira son adoration aux fils de Cheth, et leur nom, interprété comme signifiant « admiration », parce que l’occasion le persuade de le faire. (2.90) Car il n’en est pas venu à cet acte d’adoration pour honorer des personnes qui, par nature, par leurs qualités héréditaires et par leurs propres habitudes, sont ennemies de la raison et qui gaspillent misérablement la monnaie de l’âme, à savoir l’instruction, la corrompant, la falsifiant et la rognant. Mais parce qu’il craint leur puissance présente et leur force difficilement conquérante, et qu’il se garde de les provoquer, il se réfugie dans cette grande et puissante possession et arme de la vertu, ce lieu de résidence par excellence pour les âmes sages, la double caverne, qu’il ne pouvait occuper en combattant, mais seulement en se faisant le champion et le serviteur de la raison. (2.91) Quoi ? Nous aussi, lorsque nous passons notre temps sur la place publique, ne nous étonnons-nous pas souvent des maîtres et des bêtes de somme ? Or, nous étonnons ces deux catégories de personnes avec des sentiments différents. Car nous regardons les maîtres avec honneur, et les bêtes de somme avec crainte.(2.92) Et quand l’occasion se présente, il est bon d’attaquer nos ennemis et de vaincre leur puissance ; mais quand nous n’avons pas cette occasion, il vaut mieux se taire ; mais si nous voulons trouver une sécurité parfaite à leur égard, il est avantageux de les caresser.
XIV. (2.93) C’est pourquoi il convient dès maintenant de louer ceux qui ne cèdent pas au président de la vaine opinion, mais qui lui résistent et disent : « Seras-tu roi et gouverneras-tu sur nous ? »[77] Car ils ne le voient pas réellement en possession du pouvoir royal, ils ne le voient pas encore allumé comme une flamme, brillant et flamboyant dans un combustible illimité, mais seulement couvant comme une étincelle, rêvant de gloire, sans y être visiblement parvenu ; (2.94) car ils se suggèrent aussi des espoirs favorables comme s’ils ne pouvaient être vaincus par lui ; c’est pourquoi ils disent : « Régneras-tu sur nous ? » Ce qui revient à dire : Espères-tu être notre roi alors que nous sommes vivants, existants, forts et respirants ? Peut-être, en effet, te rendras-tu maître des faibles, mais à l’égard de nous qui sommes forts, tu seras considéré comme un sujet. (2.95) Et, en effet, c’est la situation naturelle. Car lorsque la raison droite est puissante dans l’âme, l’opinion vaine est abolie ; mais lorsque la raison droite est faible, l’opinion vaine est forte. Aussi longtemps que l’âme conserve sa propre puissance et qu’elle n’est mutilée en aucune partie, elle peut attaquer et viser avec assurance l’orgueil qui lui résiste, et s’autoriser une liberté de parole, en disant : « Tu ne seras pas roi, tu ne seras pas seigneur ni sur nous, ni de notre vivant sur les autres ; » (2.96) mais nous, avec nos gardes du corps et nos porteurs de boucliers, fils de la sagesse, nous déjouerons tes attaques et déjouerons tes menaces d’une seule de nos saillies. À ce propos, il est dit : « Ils commencèrent à le haïr à cause de ses rêves et de ses paroles. » (2.97) Mais toutes les images que l’orgueil élève et adore ne sont-elles pas de simples mots et rêves, alors qu’au contraire, seules méritent d’être qualifiées d’actions et d’énergies réelles celles qui relèvent d’une vie juste et d’une raison droite ? Les uns méritent la haine car ils sont faux, et les autres méritent l’amitié car ils sont remplis de désirs. (2.98) Que personne donc n’ose accuser les vertus de tels hommes, comme s’ils présentaient un exemple d’une disposition inhumaine et antifraternelle ; mais que quiconque est disposé à le faire sache que ce n’est pas un homme qui est maintenant jugé, mais la disposition qui existe dans l’âme de chaque individu, qui est folle du sujet de la gloire et de l’orgueil arrogant ; qu’il embrasse ces hommes qui ont adopté une inimitié et une haine irréconciliables envers cette disposition, et qu’il n’aime jamais ce qu’ils détestent. (2.99) Sachant parfaitement que de tels juges ne sont jamais trompés au point de s’écarter d’une opinion saine, mais qu’ayant appris dès le début à comprendre qui est le vrai roi, à savoir le Seigneur, ils refusent avec indignation d’adorer celui qui prive Dieu de son honneur, cherche à se l’approprier et invite ses compagnons de service à le servir.
XV. (2.100) C’est pourquoi ils disent avec assurance : « Seras-tu roi et régneras-tu sur nous ? » Ignores-tu que nous ne sommes pas indépendants, mais que nous sommes sous le gouvernement d’un roi immortel, le seul Dieu ? Et pourquoi serais-tu notre seigneur et notre maître ? Car ne sommes-nous pas sous domination, et n’avons-nous pas maintenant, et n’aurons-nous pas pour toujours et à jamais le même Seigneur unique ? Nous nous réjouissons d’être ses serviteurs plus que quiconque ne peut le faire dans sa liberté ; car être serviteur de Dieu est la plus excellente de toutes les choses honorées dans la création. (2.101) Je prierais donc pour pouvoir moi aussi demeurer fermement dans les choses qui ont été décidées par ces hommes, surveillants des choses, non des corps, et justes et sobres toute leur vie, afin de ne jamais être trompé par aucune de ces choses qui ont coutume de tromper l’humanité. (2.102) Mais jusqu’à présent, je suis dans un état d’ivresse, et je souffre d’une grande incertitude, et j’ai besoin d’un bâton et d’un guide comme un aveugle ; car si j’avais un bâton pour me soutenir, alors, peut-être, je ne trébucherais ni ne tomberais. (2.103) Mais si des personnes conscientes d’être inconsidérées et précipitées ne prêtent aucune attention et ne se soucient pas de suivre ceux qui ont examiné toutes les questions nécessaires avec diligence et circonspection, et ne se soumettent pas, bien qu’elles ignorent elles-mêmes le chemin, aux conseils de ceux qui le connaissent, qu’elles sachent qu’elles sont entrées dans une voie très difficile à parcourir, qu’elles s’y sont empêtrées et ne pourront plus avancer ; (2.104) mais je suis tellement lié par des traités avec ces hommes, dès que je serai un peu remis de mon ivresse, que je considère la même personne à la fois comme un ami et un ennemi. Mais pour l’instant, je chasserai de moi et haïrai ce rêveur autant qu’eux ; car personne de sensé ne pourrait me blâmer pour cela, que la majorité des opinions et des votes prévaut toujours ; (2.105) mais quand il change de mode de vie, et ne rêve plus, et ne s’inquiète plus en s’empêtrant dans les vaines imaginations des esclaves de la vaine opinion, et quand il ne rêve plus de nuit, et d’obscurité, et des changements de choses incertaines qui ne peuvent être devinées ; (2.106) Alors, s’étant réveillé d’un profond sommeil, il demeure éveillé et reçoit la certitude au lieu de l’imprécision, la vérité au lieu des fausses conceptions, le jour au lieu de la nuit, la lumière au lieu des ténèbres. Il rejette une épouse égyptienne, c’est-à-dire le plaisir du corps, lorsqu’elle l’invite à entrer chez elle et à profiter de sa conversation, par un amour indescriptible de la continence et une admiration pour la piété. (2.107) Il revendique son droit à une part des bienfaits héréditaires dont il semblait aliéné, désirant à nouveau recouvrer la part de vertu qui lui revient. Car, procédant par petites améliorations progressives,Comme s’il était désormais établi au sommet et à la perfection de sa propre vie, il s’écrie, ce qu’il sait avec certitude par ce qui lui est arrivé, qu’il « appartient à Dieu »[78] et qu’il n’appartient plus à aucun objet des sens extérieurs qui puisse affecter une créature ; (2.108) et alors ses frères se réconcilieront définitivement avec lui, changeant leur haine en amitié et leur malignité en bienveillance. Mais moi, qui suis le disciple de ces hommes, car j’ai appris à leur obéir comme un serviteur obéit à son maître, je ne cesserai jamais de le louer pour son changement d’avis. (2.109) Car Moïse aussi, ce prêtre des choses sacrées, préserve son changement d’esprit comme quelque chose de digne d’amour et d’être conservé dans la mémoire des hommes, de l’oubli, par le symbole des Ossements[79] qu’il n’a pas jugé bon d’enterrer en Égypte pour toujours, regardant comme une chose difficile, si l’âme produit une belle fleur, de la laisser se faner et être submergée et détruite par les torrents que le fleuve égyptien des passions, à savoir le corps, qui coule sans cesse à travers tous les sens extérieurs, envoie.
XVI. (2.110) La vision qui apparut de la terre, concernant les gerbes et son interprétation, a donc été suffisamment discutée. Il est temps maintenant d’examiner l’autre vision et d’examiner comment elle est interprétée par l’art de l’explication des rêves. (2.111) « Il vit alors », dit l’Écriture, « un second songe, et il le raconta à son père et à ses frères, et il dit : J’ai vu que le soleil, la lune et les onze étoiles m’adoraient. Et son père le réprimanda et dit : Quel est ce songe que tu as eu ? Devrions-nous, moi, ta mère et tes frères, avancer, nous prosterner à terre et t’adorer ? Et ses frères le jalousèrent ; mais son père écouta ses paroles. »[80] (2.112) Les étudiants de la sagesse sublime disent maintenant que le zodiaque, le plus grand de tous les cercles du ciel, est constellé de douze animaux (zo—dia), d’où son nom. Et que le soleil et la lune tournent toujours autour de lui, et passent par chacun des animaux, non pas avec la même rapidité, mais en nombres et à des périodes inégaux ; L’un le fit en trente jours, et l’autre en près d’un douzième de ce temps, soit en deux jours et demi. (2.113) Par conséquent, celui qui eut cette vision céleste pensa être adoré par onze étoiles, se classant parmi elles comme le douzième, complétant ainsi le cercle du zodiaque. (2.114) Et je me souviens avoir déjà entendu un homme, appliqué à l’étude sans insouciance ni paresse, dire que les hommes n’étaient pas les seuls à s’égarer dans de vaines opinions, mais que les étoiles aussi. Et elles aussi, dit-il, se disputent la préséance, et celles qui sont les plus grandes prétendent être accompagnées par les étoiles mineures comme leurs gardiennes. (2.115) Cependant, nous pouvons laisser ces questions aux étudiants de sujets sublimes le soin d’examiner et de déterminer la part de vérité et la part d’affirmations aléatoires qu’elles contiennent. Mais nous disons que l’amateur d’études aveugles, de disputes déraisonnables et d’opinions vaines, toujours enflé d’orgueil, veut s’arroger une préséance, non seulement sur les hommes, mais aussi sur la nature de tous les êtres existants ; (2.116) et il pense que toutes choses ont été créées pour lui, et qu’il est nécessaire que tout, terre, ciel, eau ou air, lui apporte un tribut ; et il est allé jusqu’à un tel degré de folie qu’il est incapable de raisonner sur des sujets que même un jeune enfant pourrait comprendre, et de voir qu’aucun artiste ne crée jamais le tout pour la partie, mais plutôt la partie pour le tout. Or, la partie du tout est l’homme, de sorte qu’il est à juste titre affirmé qu’il a été créé pour parfaire le monde dans lequel il est justement classé.
XVII. (2.117) Mais certaines personnes sont pleines d’une telle folie extrême, qu’elles s’indignent si le monde entier ne suit pas leurs intentions : c’est pourquoi Xerxès, roi de Perse, voulant effrayer ses ennemis, fit un étalage d’entreprises très puissantes, changeant toute la face de la nature ; (2.118) car il changea la nature des éléments de la terre et de la mer, donnant la terre à la mer et la mer à la terre, en joignant l’Hellespont par un pont, et en brisant le mont Athos en golfes profonds, qui, étant remplis de mer, devinrent autant de mers nouvelles et artificiellement creusées, étant entièrement changées par rapport à l’ancien cours de la nature. (2.119) Et ayant fait des merveilles à l’égard de la terre, selon ses souhaits, il s’éleva sur des conceptions audacieuses, comme un homme misérable qu’il était, contractant le crime d’impiété, et cherchant à s’élever jusqu’au ciel, comme s’il voulait déplacer ce qui ne peut être déplacé, et subjuguer l’armée du ciel, et, comme le dit le proverbe, il commença par une chose sacrée. (2.120) Car il dirigea ses flèches vers le plus excellent des corps célestes, le soleil, le maître du jour, comme s’il n’avait pas été lui-même blessé par le dard invisible de la folie, non seulement à cause de ses désirs qui étaient impossibles, mais aussi très impies, ce qui est une grande honte pour celui qui les tente. (2.121) On raconte aussi que la nation très peuplée des Germains, dont la mer est soumise au flux et au reflux des marées, se précipita avec une grande impétuosité vers le reflux qui se produit dans leur pays, et, tirant leurs épées nues, chargea et affronta la mer houleuse comme s’il s’agissait d’une phalange d’ennemis. (2.122) Ces hommes méritent d’être haïs parce qu’ils osent impiement prendre les armes contre les parties libres et invincibles de la nature ; mais ils méritent aussi d’être ridiculisés pour avoir tenté l’impossible, comme s’ils pensaient possible de blesser l’eau comme un animal vivant, ou de la poignarder et de la tuer. De plus, il faut s’affliger à la vue de tels hommes, craindre, fuir par crainte devant leurs attaques, et se soumettre à toutes les affections de l’âme qui s’accordent avec les plaisirs et les souffrances.
XVIII. (2.123) De plus, il n’y a que très peu de temps que j’ai connu un homme de très haut rang, qui était préfet et gouverneur d’Égypte, qui, après avoir eu l’idée de changer nos institutions et coutumes nationales, et d’abroger d’une manière extraordinaire cette loi très sainte protégée par des peines si terribles, qui se rapporte au septième jour, et nous obligeait à lui obéir, et à faire d’autres choses contraires à notre coutume établie, pensant que ce serait le début de notre déviation des autres lois, et de notre violation de toutes nos coutumes nationales, s’il était une fois capable de détruire notre observance héréditaire et coutumière du septième jour. (2.124) Et comme il voyait que ceux à qui il offrait violence ne cédaient pas à ses injonctions, et que le reste de notre peuple n’était pas disposé à se soumettre en toute tranquillité, mais était indigné et furieux de l’affaire, et était en deuil et découragé comme s’il s’agissait de l’esclavage, du renversement et de la destruction totale de leur pays ; Français il jugea bon de s’efforcer par un discours de les persuader de transgresser, en disant : (2.125) « Si une invasion d’ennemis vous tombait dessus soudainement, ou la violence d’un déluge, du fait que le fleuve ait brisé toutes ses barrières par une inondation, ou un terrible incendie, ou un coup de foudre, ou une famine, ou une peste, ou un tremblement de terre, ou tout autre mal, qu’il soit causé par les hommes ou infligé par Dieu, resteriez-vous encore tranquilles et impassibles chez vous ? (2.126) Et continueriez-vous encore à votre manière habituelle, gardant votre main droite en arrière et tenant l’autre sous vos vêtements près de vos flancs, afin de ne rien faire, même sans le vouloir, pour contribuer à votre propre préservation ? (2.127) Et continueriez-vous à vous asseoir dans vos synagogues, à rassembler vos assemblées ordinaires, à lire vos livres sacrés en toute sécurité, à expliquer ce qui n’est pas tout à fait clair, et à consacrer tout votre temps et vos loisirs à de longues discussions sur la philosophie de vos ancêtres ? (2.128) Non : plutôt que de vous débarrasser de toutes ces idées, vous vous prépareriez à la préservation de vous-mêmes, de vos parents et de vos enfants, et, s’il faut dire la vérité, de vos biens et de vos trésors, pour les empêcher d’être complètement détruits. (2.129) Et, en effet, je suis moi-même, dit-il, tous les maux que je viens d’énumérer : je suis un tourbillon, je suis la guerre, et le déluge, et la foudre, et la calamité de la famine, et la misère de la peste, et un tremblement de terre qui ébranle et renverse ce qui était ferme auparavant, n’étant pas simplement le nom d’une nécessité du destin, mais une puissance réelle et visible, se tenant près de vous. (2.130) Que pouvons-nous donc dire d’un homme qui dit, ou qui pense simplement, de telles choses ? N’est-il pas un mal d’une nature extraordinaire ? Il doit sûrement être une calamité étrangère, venue d’outre-mer ou d’un autre monde, puisque lui, un homme misérable à tous égards, a osé se comparer au Dieu très béni. (2.131) Il faut ajouter qu’il ose blasphémer le soleil, la lune et les autres étoiles, chaque fois que quelque chose qu’on attendait selon les saisons de l’année ne se produit pas ou ne se produit qu’avec difficulté ; si, par exemple, l’été cause trop de chaleur, ou l’hiver un froid trop extrême, ou si le printemps ou l’automne sont hors saison, de sorte que l’un devient stérile et infructueux, et l’autre ne soit prolifique qu’en maladies. (2.132) C’est pourquoi, donnant toute licence imaginable à une bouche débridée et à une langue injurieuse, un tel homme reprochera aux étoiles de ne pas apporter leur tribut habituel, réclamant presque pour les choses de la terre la révérence et l’adoration des corps célestes, et pour lui-même au-dessus d’eux tous, dans la mesure où, en tant qu’homme, il se considère comme supérieur aux autres animaux.
XIX. (2.133) Nous considérons donc ces hommes comme les maîtres d’une opinion vaine. Observons maintenant leurs disciples. Ces hommes complotent sans cesse contre les pratiquants de la vertu, et lorsqu’ils les voient s’efforcer de purifier leur vie par une vérité candide, et de la présenter, pour ainsi dire, à la lumière de la lune ou du soleil, comme étant capable de résister à l’inspection, ils s’efforcent, par la tromperie, voire par la violence ouverte, de les en empêcher, essayant de les chasser dans le pays sans soleil des hommes impies, où règnent la nuit profonde, les ténèbres infinies, et des milliers de tribus d’images, d’apparences et de rêves. Puis, les y ayant précipités, ils les contraignent à se prosterner et à les adorer comme des maîtres. (2.134) Car nous considérons celui qui pratique la vertu comme le soleil, puisque l’un éclaire notre corps, et l’autre les choses qui appartiennent à l’âme : et l’éducation qu’un tel homme utilise, nous la considérons comme la lune, car l’usage de l’une et de l’autre est le plus pur et le plus utile dans la nuit ; et les frères sont ces raisonnements vertueux qui sont le fruit de l’instruction et d’une âme dévouée à la pratique de la vertu, qui tous aplanissent le droit chemin de la vie, et qu’ils cherchent donc, par toutes sortes de luttes prudentes et rusées, à vaincre, à faire trébucher, à renverser et à briser le cou, parce qu’ils n’ont décidé de ne rien penser ni de rien dire de sensé eux-mêmes. (2.135) C’est pourquoi son père réprimande ce jeune homme intraitable (je ne parle pas de Jacob, mais de la bonne raison, qui est même plus âgée que lui), en disant : (2.136) « Quel est ce rêve que tu as rêvé ? » mais tu n’as vu aucun rêve du tout ; As-tu imaginé que les choses naturellement libres soient nécessairement esclaves des choses humaines, et que les maîtres deviennent sujets ? Et, ce qui est plus paradoxal encore, soumises à rien d’autre qu’à celles-là mêmes qu’elles gouvernent ? Et n’être esclaves d’aucune autre chose que celles-là mêmes qui sont leurs propres esclaves ? À moins qu’un changement de toutes les choses établies en leurs contraires directs ne doive se produire, par la puissance de Dieu, qui peut tout faire, mouvoir ce qui est immobile et fixer ce qui est en état d’agitation constante. (2.137) Car sur quel principe peux-tu t’en prendre ou reprocher à un homme qui a une vision dans son sommeil ? Car il dira : Je ne l’ai pas vu intentionnellement, pourquoi m’accusez-vous d’erreurs que je n’ai pas commises délibérément ? Je vous ai raconté ce qui m’est tombé dessus et a marqué mon esprit soudainement, et sans que je le veuille. (2.138) Mais la présente question ne concerne pas les rêves, mais les choses qui ressemblent aux rêves ; qui, à ceux dont l’esprit n’est pas hautement purifié, paraissent grandes, belles et désirables, alors qu’elles sont, en réalité, insignifiantes, obscures et dignes de ridicule aux yeux des juges honnêtes de la vérité.
XX. (2.139) Devrais-je donc, dit-il, moi, c’est-à-dire la raison, venir à toi ? Et l’âme, qui est à la fois mère et nourrice de la compagnie vouée à l’apprentissage de la vertu, viendra-t-elle aussi à toi ? (2.140) Et nos enfants viendront-ils aussi ? Devons-nous tous nous tenir en rang, abandonnant toute notre dignité d’antan, levant les mains et te priant ? Devons-nous alors nous prosterner à terre et nous efforcer de te concilier et de t’adorer ? Mais que le soleil ne brille jamais sur de telles transactions, car l’obscurité profonde convient aux mauvaises actions et la lumière éclatante aux bonnes. Et quel plus grand mal pourrait-il y avoir que de louer et d’admirer l’orgueil, ce trompeur et ce séducteur, au lieu d’une simplicité sincère et honnête ? (2.141) Et c’est avec beaucoup de justesse que la déclaration est ajoutée : « Et son père prit note de ses paroles. » Français Car c’est l’occupation d’une âme qui n’est ni jeune, ni stérile, ni entièrement stérile, mais plutôt d’une âme qui est vraiment plus âgée et capable d’engendrer une descendance, de cohabiter avec une prudence prudente, et de ne mépriser ni négliger quoi que ce soit, mais d’avoir une crainte révérencieuse de la puissance de Dieu, à laquelle nous ne pouvons échapper, et que nous ne pouvons vaincre; et de regarder tout autour pour voir quelle sera sa fin même. (2.142) C’est pourquoi ils disent que la sœur de Moïse aussi (et elle est appelée Espérance par nous, lorsque nous parlons d’une manière figurée) était contemplée à distance par les saintes écritures, dans la mesure où elle gardait les yeux fixés sur la fin de la vie, espérant qu’une bonne fortune pourrait lui arriver, envoyée par le Donateur de tout bien d’en haut, du ciel; (2.143) Car il est souvent arrivé que beaucoup de gens, après avoir fait de longs voyages et avoir navigué sur une grande étendue de mer avec un vent favorable et sans aucun danger, ont soudainement fait naufrage dans le port même, alors qu’ils étaient sur le point de jeter l’ancre ; (2.144) et beaucoup de gens aussi, qui ont terminé avec succès des guerres formidables de longue durée, et en sont sortis indemnes au point de n’avoir jamais reçu même une égratignure à la surface de la peau, mais d’être sortis sains et saufs comme s’ils avaient été seulement à une assemblée populaire ou à une fête nationale, étant rentrés chez eux avec joie et gaieté, ont été complotés dans leurs maisons par ceux qui, de tout le monde, auraient le moins dû le faire ; étant, comme le dit le proverbe, comme des bœufs tués dans leur étable.
XXI. (2.145) De même que ces événements inattendus, que personne n’aurait pu prévoir, se produisent fréquemment de cette manière et bouleversent les hommes, de même ils poussent souvent les forces de l’âme dans une direction contraire à la sienne, l’entraînent dans une direction opposée, selon leur pouvoir, et la forcent à changer de cap. Car quel homme, ayant jamais descendu dans l’arène de la vie, en est sorti sans chute ? (2.146) Et qui n’a jamais trébuché dans cette lutte ? Heureux celui qui ne l’a pas souvent été. Et pour qui la fortune n’a-t-elle pas tendu des pièges, soufflant sur lui par intervalles, rassemblant ses forces pour s’enrouler autour de lui et l’emporter rapidement avant que son adversaire ne soit prêt à affronter la lutte ? (2.147) Ne savons-nous pas que certaines personnes, passées de l’enfance à la vieillesse, n’ont jamais ressenti la moindre irrégularité, soit par l’heureuse condition de leur nature, soit par les soins de ceux qui les ont élevées et éduquées, soit par les deux à la fois ? Mais alors, remplis d’une paix profonde en eux-mêmes, qui est la paix réelle et le modèle archétypique de celle qui règne dans les villes, et considérés comme heureux de ce fait, n’ayant jamais eu la moindre idée, même en rêve, de la guerre intestine qui naît de la violence des passions et qui est la plus pitoyable de toutes les guerres, ont finalement, à la fin de leur vie, échoué et fait naufrage, soit par intempérance de langage, soit par gourmandise insatiable, soit par licence incontinente des parties inférieures du ventre. (2.148) Car certains, tandis que…
« Toujours au seuil de l’extrême vieillesse »,
Français ont admiré la vie juvénile, sans honneur, détestable et honteuse des débauchés ; et d’autres ont cédé à la manière de vivre rusée, méchante, calomnieuse et désespérée des autres, poursuivant les prémices d’une curiosité querelleuse, alors qu’ils auraient plutôt dû abandonner de telles habitudes maintenant, même si elles leur avaient été familières. (2.149) C’est pourquoi il faut apaiser Dieu et le supplier avec persévérance, afin qu’il ne passe pas à côté de notre misérable race, mais qu’il permette que sa miséricorde salvatrice soit éternellement manifestée envers nous ; car il est difficile d’empêcher ceux qui ont goûté à la paix sans mélange de s’en gaver.
XXII. (2.150) Mais, allons donc, cette faim est un mal plus léger que la soif, dans la mesure où elle a de l’amour et du désir pour ses consolateurs ; mais lorsque, par le désir de boire, il est nécessaire de se satisfaire de cette autre fontaine, dont l’eau est sale et malsaine, alors il est indispensable que les buveurs, étant remplis d’un plaisir doux-amer, vivent une vie peu enviable, se livrant à des choses pernicieuses comme si elles étaient avantageuses, par ignorance de ce qui est réellement désirable. (2.151) Mais le cours impétueux de ces maux est plus grave lorsque les puissances irrationnelles de l’âme attaquent les puissances de la raison et prennent le dessus ; (2.152) car tant que les troupeaux de bœufs obéissent à leurs conducteurs, et les troupeaux à leurs bergers, et les chèvres obéissent aux chevriers, les troupeaux et tout ce qui leur appartient se portent bien ; Mais lorsque les bergers chargés de surveiller le bétail deviennent plus faibles que les bêtes qui leur sont confiées, alors tout va mal, et au lieu de régularité, il y a irrégularité et désordre là où l’ordre était établi, et confusion au lieu de stabilité et perturbation là où le bon ordre était établi, puisqu’il n’y a plus de pouvoir de surveillance légitime correctement établi ; car s’il y avait eu un tel pouvoir, il aurait été détruit avant ce temps. (2.153) Quoi donc ? Ne pensons-nous pas qu’il existe en nous-mêmes un troupeau de bétail irrationnel, dans la mesure où la multitude irrationnelle de l’âme est privée de raison, et que le berger est l’esprit directeur ? Mais tant que celui-ci est vigoureux et compétent pour agir en tant que gestionnaire du troupeau, tout se déroule de manière juste, prospère et avantageuse ; (2.154) Mais lorsque survient une faiblesse ou un manque de pouvoir chez le roi, il s’ensuit nécessairement que les sujets souffrent également d’une infirmité similaire ; et lorsqu’ils semblent jouir pleinement de la liberté, ils constituent alors un butin, prêt à être conquis par quiconque veut se battre pour l’obtenir ; car il est naturel que l’anarchie soit traîtresse et que le gouvernement soit salutaire, surtout dans un État où la loi et la justice sont honorées. Et c’est un état de fait qui est conforme à la raison.
XXIII. (2.155) Nous avons donc parlé avec suffisamment de précision des rêves de la vaine opinion. Or, les différentes espèces de gloutonnerie s’adonnent à la boisson et à la nourriture. Mais l’une n’a pas besoin d’une grande variété, tandis que l’autre exige une quantité innombrable d’assaisonnements et de sauces. Ces choses sont donc confiées à deux intendants. Les questions relatives à l’excès de boisson sont confiées au maître d’hôtel, et celles relatives aux repas fastueux au chef boulanger. (2.156) Or, il est rapporté, avec une excessive convenance, que ces hommes ont eu des visions de rêves une nuit ; car chacun d’eux s’efforce de satisfaire le même besoin de son maître, fournissant non pas une nourriture simple, mais une nourriture accompagnée de plaisir et de satisfaction extraordinaire ; et chacun, séparément, travaille environ la moitié de la nourriture, mais les deux ensemble s’occupent de la totalité, et une partie attire l’autre ; (2.157) car les hommes, après avoir mangé, désirent immédiatement boire ; et ceux qui ont bu veulent immédiatement manger ; Français de sorte que ce n’est pas à un degré négligeable pour cette raison qu’une vision leur est attribuée à tous deux en même temps. (2.158) C’est pourquoi le chef des échansons a pour fonction de satisfaire l’appétit pour le vin, et le chef des boulangers de satisfaire la voracité. Et chacun d’eux voit dans sa vision ce qui se rapporte à sa propre affaire : l’un voit le vin et la plante qui engendre le vin, à savoir la vigne ; l’autre voit du pain blanc posé sur des plats, et lui-même servant les plats.[81] (2.159) Maintenant, peut-être convient-il d’examiner d’abord le premier rêve. Et voici ce qui suit : « Pendant mon sommeil, il y avait une vigne devant moi ; et sur la vigne il y avait trois sarments, et elle fleurit et produisit des rameaux, et il y avait dessus des grappes de raisin mûres. Et la coupe de Pharaon était dans ma main, et je pris la grappe de raisin, je la pressai dans la coupe, et je remis la coupe dans la main de Pharaon. »[82] (2.160) Il parle ici d’une manière admirable, et l’expression « pendant mon sommeil » est tout à fait juste. Car, en vérité, celui qui suit moins l’ivresse qui naît du vin que celle qui procède de la folie, s’indignant d’une position debout et éveillée, comme les gens endormis, est abattu et détendu, et ferme les yeux de son âme, ne pouvant ni voir ni entendre quoi que ce soit qui soit digne d’être vu ou entendu. (2.161) Et, renversé, il poursuit sa vie sur un chemin aveugle et sans guide (je ne dirai pas chemin, mais sans chemin), piqué par les épines et les ronces ; et parfois aussi, il tombe dans des endroits escarpés et s’écroule sur d’autres personnes, leur causant ainsi qu’à lui-même un dommage pitoyable. (2.162) Mais le sommeil profond et prolongé dans lequel tout homme méchant est maintenu, efface toute conception vraie et remplit l’esprit de toutes sortes d’images fausses et de visions sans substance, le persuadant d’embrasser ce qui est honteux comme louable. Car, tantôt il rêve de tristesse comme de joie, et ne s’aperçoit pas qu’il regarde la vigne,(2.163) « Car, dit le chef des échansons, la vigne était devant moi », l’objet désiré était devant celui qui le désirait, la méchanceté était devant l’homme méchant : que nous, hommes insensés que nous sommes, cultivons, sans nous rendre compte que nous le faisons à notre propre détriment, le fruit dont nous mangeons et buvons, le classant sous les deux espèces d’aliments, que, semble-t-il, nous nous approprions, non pas pour la moitié des maux qui nous affectent, mais pour la totalité de nos malheurs complets et entiers.
XXIV. (2.164) Il ne faut pas ignorer que l’ivresse qui provient de la vigne n’affecte pas tous ceux qui s’y adonnent de la même manière, mais affecte souvent des personnes différentes de manières opposées, de sorte qu’elle rend les uns meilleurs et les autres pires qu’ils ne le sont naturellement. (2.165) Car chez certains hommes, elle adoucit la rigueur et la morosité de leur caractère, les soulage de leurs soucis, apaise leur colère et leur chagrin, adoucit leurs dispositions et rend leur âme plus paisible. Mais chez d’autres, elle nourrit les passions colériques, enchaîne fermement leur douleur, excite leurs sentiments d’amour et stimule leur grossièreté ; rendant la bouche bavarde, la langue déchaînée, libérant leurs sens extérieurs de toute contrainte, rendant leurs passions furieuses et leur esprit tout entier violent et excité vers tout objet. (2.166) Ainsi, la condition des hommes mentionnés en premier lieu semble ressembler à un calme paisible par beau temps, ou à une tranquillité sans vagues en mer, ou à un état de choses des plus paisibles et stables dans une ville. Mais la condition de ceux que j’ai décrits en dernier lieu ressemble davantage à une tempête violente et incessante, ou à une mer soulevée par une tempête en de vastes vagues, ou à une sédition, un mal plus redoutable qu’une guerre interminable et irréconciliable. (2.167) C’est pourquoi, de ces deux banquets, l’un est rempli de rires, les hommes promettant de s’amuser, espérant la bonne fortune, et jouissant de la gaieté, des paroles agréables, de la gaieté, de la joie et de l’absence d’anxiété ; (2.168) mais l’autre est plein de mélancolie, de sérieux, de regards abattus, d’offenses, de reproches et de blessures ; d’hommes grinçant des dents, se regardant avec acharnement, aboyant, s’étranglant, se disputant de toutes les manières imaginables, se mutilant les oreilles, le nez et toutes les parties du corps qu’ils peuvent atteindre, affichant l’ivresse de toute leur vie et leur ivresse dans cette lutte impie, avec toutes sortes de comportements inconvenants.
XXV. (2.169) Il serait donc naturellement cohérent de considérer ensuite que la vigne est le symbole de deux choses : de la folie et de la gaieté. Et chacune de ces deux choses, bien qu’elle soit indiquée par de nombreuses circonstances, nous l’expliquerons en peu de mots, pour éviter la prolixité. (2.170) Lorsque quelqu’un nous conduisant sur la route, désertée par les passions et par les actes de méchanceté, la verge, c’est-à-dire la philosophie, a conduit la droite raison à une hauteur, et l’a placée comme un éclaireur sur une tour de guet, [83] et lui a ordonné de regarder autour de lui, et d’examiner tout le pays de la vertu, et de voir s’il est béni par un sol profond et riche, et productif d’herbe et de fruits, car un sol profond est bon pour faire croître la science qui y a été semée, et pour que les doctrines qui y ont été plantées, et qui sont devenues des arbres, forment des troncs solides, ou s’il est d’un caractère contraire ; Français et aussi d’examiner les actions, comme on le ferait dans les villes, et de voir si elles sont fortement fortifiées, ou si elles sont sans défense et privées de toute la sécurité que pourraient offrir des murs autour d’elles. Également de s’enquérir de la condition des habitants, s’ils sont considérables en nombre et en valeur, ou si leur courage est faible et leur nombre réduit, les deux causes agissant réciproquement l’une sur l’autre. (2.171) Alors, parce que nous n’étions pas capables de supporter le poids de tout le tronc de la sagesse, nous avons coupé une branche et une grappe de raisin, et les avons emportées avec nous comme une preuve indéniable de notre joie, et un fardeau très facile à porter, voulant montrer en même temps la branche et le fruit d’excellence à ceux qui sont doués d’une vue mentale aiguë, pour leur montrer, c’est-à-dire la vigne vigoureusement poussant et portant des raisins.
XXVI. (2.172) Ils comparent alors très justement cette vigne, dont nous n’avons pu prendre qu’une part, au bonheur. Et l’un des anciens prophètes rend témoignage en faveur de mon point de vue sur la question, lui qui, parlant sous l’inspiration divine, a dit : « La vigne du Seigneur Tout-Puissant, c’est la maison d’Israël. »[84] (2.173) Or, Israël est l’esprit enclin à la contemplation de Dieu et du monde ; car le nom Israël est interprété comme « voir Dieu », et la demeure de l’esprit est l’âme tout entière ; et c’est la vigne la plus sacrée, portant comme fruit le rameau divin, la vertu : (2.174) ainsi bien penser (to eu phronein) est la dérivation du mot joie (euphrosyne—), étant une chose grande et brillante, de sorte que, dit Moïse, Dieu lui-même ne dédaigne pas de la montrer ; et plus particulièrement à l’époque où la race humaine s’éloigne de ses péchés et s’incline et s’oriente vers la justice, suivant d’elle-même les lois et les institutions de la nature. (2.175) « Car », dit Moïse, « le Seigneur ton Dieu reviendra, pour se réjouir de toi pour ton bien comme il s’est réjoui de tes pères, si tu entends sa voix pour garder tous ses commandements, ses ordonnances et ses jugements qui sont écrits dans le livre de cette loi. »[85] (2.176) Qui pourrait implanter dans l’homme un désir de vertu et d’excellence plus fort qu’ici ? Désires-tu, dit l’Écriture, ô esprit, que Dieu se réjouisse ? Réjouis-toi toi-même de la vertu, et n’apporte aucune offrande coûteuse, (car quel besoin Dieu a-t-il de quoi que ce soit de toi ?) Mais, d’un autre côté, reçois avec joie tous les biens qu’il t’accorde ; (2.177) Car il se réjouit de donner, lorsque ceux qui reçoivent sont dignes de sa grâce ; à moins que vous ne pensiez que ceux qui vivent de manière blâmable puissent être justement dits d’indigner Dieu et d’exciter sa colère, mais que ceux qui vivent d’une manière louable ne le réjouissent pas. (2.178) Or, il n’y a rien qui procure autant de plaisir aux pères et aux mères, nos parents mortels, que les vertus de leurs enfants, même s’ils manquent de beaucoup de choses nécessaires ; et l’excellence de ces personnes ne réjouit-elle pas de la même manière le Créateur de l’univers, qui ne manque de rien ? (2.179) Toi donc, ô esprit, ayant appris combien est puissante la colère de Dieu, et combien grande est la joie de Dieu, ne fais rien qui soit digne d’exciter sa colère pour ta propre destruction, mais étudie seulement les choses qui peuvent être les moyens de plaire à Dieu. (2.180) Et vous constaterez que ces actions ne consistent pas à faire de longs et inhabituels voyages, ni à traverser des mers non navigables, ni à errer sans s’arrêter pour reprendre son souffle jusqu’aux confins de la terre et de la mer : car les bonnes actions ne demeurent pas au loin et n’ont pas été bannies au-delà des confins du monde habitable, mais, comme le dit Moïse, le bien est situé près de vous, et est planté avec vous, étant uni à vous en trois parties nécessaires, dans le cœur, dans la bouche,et dans les mains : c’est-à-dire dans l’esprit, dans la parole et dans les actions ; puisqu’il est nécessaire de penser et de dire et de faire de bonnes choses, qui sont rendues parfaites par l’union d’un bon dessein, d’une bonne exécution et d’un bon langage.
XXVII. (2.181) Je dis donc à celui dont l’occupation est de satisfaire une espèce de gloutonnerie, le penchant pour la boisson, à savoir le maître d’hôtel : « Pourquoi travailles-tu si dur, ô malheureux ? Car tu penses préparer des choses agréables pour donner du plaisir, mais en réalité tu attises une flamme de folie et d’intempérance, et tu y contribues en grande quantité. » (2.182) Mais peut-être répondra-t-il : Ne me blâmez pas précipitamment avant d’avoir examiné mon cas ; J’ai été désigné pour verser le vin, non pas pour un homme doué de tempérance, de piété et de toutes les autres vertus, mais pour un maître violent, intempérant et injuste, très fier de son impiété, qui a osé dire un jour : « Je ne connais pas le Seigneur »[86]. J’ai donc tout naturellement étudié ce qui pourrait lui procurer de la satisfaction. (2.183) Et ne vous étonnez pas que Dieu se réjouisse d’une chose, et l’esprit qui lui est hostile, à savoir Pharaon, du contraire. Qui est donc le principal échanson de Dieu ? Le prêtre qui lui offre des libations, le véritable grand prêtre, qui, après avoir reçu une gorgée de grâces éternelles, s’offre en retour, versant une libation entière pleine de vin pur. Vous voyez qu’il y a des différences entre les échansons proportionnelles aux différences qui existent entre ceux qu’ils servent ; (2.184) C’est pourquoi moi, l’échanson de Pharaon, qui use de sa raison obstinée et intempérante à tous égards pour satisfaire ses passions, je suis un eunuque, toutes les parties génératrices de mon âme ayant été enlevées, et contraint de migrer des appartements des hommes, et je suis également un fugitif des chambres des femmes, dans la mesure où je ne suis ni homme ni femme ; je ne suis pas non plus capable de disséminer la semence ni d’en recevoir, étant d’une nature ambiguë, ni l’une ni l’autre ; une simple fausse monnaie de monnaie humaine, dépourvue d’immortalité, qui est de temps à autre maintenue en vie par la succession constante d’enfants et de descendants ; étant également exclu de l’assemblée et de la réunion sacrée du peuple, car il est expressément interdit à quiconque ayant subi une blessure ou une mutilation comme la mienne d’y entrer.[87]
XXVIII. (2.185) Mais le grand prêtre dont nous parlons est un homme parfait, l’époux d’une vierge (une déclaration des plus extraordinaires), qui n’a jamais été fait femme; mais qui au contraire, a cessé d’être influencé par les coutumes des femmes en ce qui concerne ses relations avec son époux.[88] Et non seulement cet homme est capable de semer les graines d’opinions pures et vierges, mais il est aussi le père de raisonnements sacrés, (2.186) dont certains sont des surveillants et des surintendants des affaires de la nature, comme Éléazar et Ithamar; d’autres sont des ministres du culte de Dieu, sérieusement occupés à allumer et à brûler la flamme du ciel; car, comme ils prononcent toujours des discours relatifs à la sainteté, ils la font briller, faisant jaillir la forme de piété la plus divine comme le feu d’un silex; (2.187) et l’être qui est en même temps le guide et le père de ces hommes n’est pas une partie insignifiante de l’assemblée sacrée, mais il est plutôt la personne sans laquelle l’assemblée dûment convoquée des parties de l’âme ne pourrait jamais être rassemblée du tout ; il en est le président, le président, le créateur, qui, sans l’aide d’aucun autre être, est capable par lui seul de tout considérer et de tout faire. (2.188) Lui, pris en conjonction avec les autres, est insignifiant en point de vue du nombre, mais quand on le considère par lui-même, il devient nombreux ; il est un tribunal, un conseil tout entier, le peuple tout entier, une multitude complète, toute la race humaine, ou plutôt, si l’on veut dire la vraie vérité, il est une sorte de nature voisine de Dieu, inférieure certes à lui, mais supérieure à l’homme ; (2.189) « car », dit l’Écriture, « lorsque le grand prêtre entrera dans le Saint des Saints, il ne sera pas un homme. »[89] Que sera-t-il donc s’il n’est pas un homme ? Sera-t-il un Dieu ? Je n’oserais pas le dire (car le principal prophète, Moïse, reçut l’héritage de ce nom alors qu’il était encore en Égypte, étant appelé « le dieu de Pharaon »)[90] ; il n’est pas non plus un homme, mais il touche ces deux extrémités comme s’il touchait à la fois les pieds et la tête.
XXIX. (2.190) Ainsi, une espèce de vigne, qui a été assignée comme la part de la gaieté et de l’ivresse qui en résulte, à savoir la bonté sans mélange du conseil, et aussi l’échanson qui a tiré le vin de la coupe divine, que Dieu lui-même a remplie de vertus jusqu’aux lèvres, a été expliquée ; (2.191) mais l’autre espèce, celle de la folie, de la douleur et de l’ivresse, est aussi déjà décrite d’une manière, mais sous un autre caractère, par d’autres expressions qui sont employées dans le grand cantique ; « Car », dit l’Écriture, « leur vigne est de la vigne de Sodome, et leurs vrilles de la vigne de Gomorrhe ; leurs raisins sont des raisins de fiel ; leurs grappes sont pleines d’amertume même. Leur vin est la folie des dragons et la fureur incurable des aspics. »[91] (2.192) Vous voyez ici les grands effets produits par l’ivresse de la folie : amertume, mauvaise disposition, fiel excessif, colère excessive, implacabilité, caractère mordant et traître. Le législateur affirme avec force que le sarment de la vigne de la folie se trouve à Sodome ; et le nom Sodome, interprété, signifie « cécité » ou « stérilité », car la folie est une chose aveugle et aussi stérile de tout bien ; bien que, néanmoins, certains aient été si fortement influencés par elle qu’ils ont tout mesuré, pesé et compté en se référant uniquement à eux-mêmes. (2.193) Gomorrhe, interprété, signifie « mesure » ; mais Moïse concevait que Dieu était l’étalon du poids, de la mesure et du nombre dans l’univers, mais il n’avait pas la même opinion de l’esprit humain. Il le démontre dans le passage suivant, où il dit : « Il n’y aura pas dans ton sac un poids et un autre poids, un grand et un petit ; il n’y aura pas dans ta maison une mesure et une autre mesure, une grande et une petite ; (2.194) ton poids sera un poids véritable et juste. » Or, une mesure véritable et juste consiste à concevoir que c’est le seul Dieu juste qui mesure et pèse tout, et qui a circonscrit la nature de l’univers par des nombres, des limites et des frontières. Or, il est injuste et faux de croire que ces choses sont réglées selon l’esprit humain. (2.195) Mais l’eunuque et le chef des échansons de Pharaon, ayant vu la plante génératrice de folie, à savoir la vigne, ajoute encore à sa description ces ceps, afin de signifier les trois extrémités de l’erreur selon les trois temps différents ; car une racine équivaut à une extrémité.
XXX. (2.196) Lorsque donc la folie a couvert et occupé l’âme entière, et lorsqu’elle n’en a laissé aucune partie inoccupée ou libre, elle la force non seulement à commettre des erreurs qui sont remédiables, mais aussi des erreurs qui sont irrémédiables. (2.197) Or, celles qui admettent un remède sont placées comme les plus faciles et les premières ; mais celles qui sont irrémédiables sont tout à fait terribles, et sont les dernières de toutes, étant jusqu’à présent analogues à des racines. (2.198) Et comme, dans mes notions, la sagesse commence à profiter à l’homme dans les petites choses, et finit par la perfection absolue de toute bonne action, de même, de la même manière la folie, contraignant l’âme d’en haut et l’éloignant peu à peu de l’instruction, l’établit finalement à une grande distance de la droite raison, et la conduit finalement au point extrême, et la renverse complètement. (2.199) Et le rêve montra qu’après l’apparition des racines, la vigne fleurit, poussa des sarments et porta des fruits ; car, dit le chef des échansons, « elle était florissante et portait des sarments, autour desquels étaient des grappes de raisins. »[92] L’homme insensé a l’habitude d’afficher la stérilité, de ne jamais produire même de feuilles, et, en fait, d’être desséché toute sa vie ; (2.200) car quel plus grand mal pourrait-il y avoir que la folie fleurissant et portant des fruits ? Mais, dit-il, « la coupe de Pharaon », le vase qui est le réceptacle de la folie, de l’ivresse et de l’ivresse incessante de la vie, « est dans ma main » ; une expression qui équivaut à dire : dépend de mon administration, de mes efforts et de mes pouvoirs ; car sans mes artifices, la passion ne progressera pas correctement par ses propres efforts ; (2.201) Car, de même qu’il convient que les rênes soient entre les mains du cocher et le gouvernail entre les mains du pilote – car c’est la seule façon pour que la course du char et le voyage du navire se déroulent avec succès – de même, remplir la coupe de vin est entre les mains et dépend du pouvoir de celui qui, par son art, porte à la perfection l’une des deux sortes de gloutonnerie, à savoir la satiété du vin. (2.202) Mais pourquoi a-t-il persévéré à se vanter d’un fait qui méritait plutôt d’être nié que d’être confessé ? N’aurait-il pas mieux valu ne pas avouer du tout qu’il était un maître de l’intempérance, et ne pas admettre qu’il augmentait l’excitation des passions par le vin chez l’intempérant, étant l’inventeur et le producteur d’un mode de vie luxueux, débauché et des plus honteux ? (2.203) Tel est pourtant le cas. La folie se vante de ce qui devrait être caché ; et dans le cas présent, elle se vante, non seulement de tenir dans ses mains le réceptacle de l’âme intempérante, c’est-à-dire la coupe de vin, et de la montrer à tous les hommes, mais aussi d’y presser les raisins, c’est-à-dire de faire ce qui satisfait la passion, et de mettre en lumière ce qui est caché. (2.204) Car comme les enfants qui ont besoin de nourriture, lorsqu’ils sont sur le point de recevoir le lait,De même que l’ouvrier et la cause de l’intempérance pressent vigoureusement la fontaine d’où jaillit le mal de l’abondance du vin, afin de tirer de la nourriture de la manière la plus agréable des gouttes qui en sont extraites, il presse et expulse le sein de la nourrice qui les nourrit.
XXXI. (2.205) La description que j’ai donnée ici peut donc s’appliquer à l’homme rendu frénétique par l’influence des vins purs : c’est un ivrogne, un insensé, un mal irrémédiable. Il nous faut maintenant examiner le caractère du glouton, apparenté à l’ivrogne, compagnon invétéré de toutes sortes de voracité et d’avidité, s’efforçant sans retenue de satisfaire artificiellement son appétit. (2.206) Pourtant, il n’est pas nécessaire de beaucoup de soin pour parvenir à son véritable caractère ; car le rêve que nous avons vu est une représentation de lui ressemblant beaucoup à lui ; et après l’avoir examiné attentivement, regardons-le comme une image dans un miroir ; (2.207) « Je croyais », dit le chef cuisinier, « avoir trois paniers de pains de froment sur la tête. » Or, en utilisant le mot « tête » d’une manière allégorique, nous entendons par là la partie dominante de l’âme, c’est-à-dire l’esprit, et nous disons que tout repose ou dépend de cela ; car il s’est un jour exclamé à ce sujet : « Toutes ces choses étaient sous ma garde. » (2.208) C’est pourquoi, lorsqu’il eut achevé la préparation de ces choses qu’il avait imaginées contre le misérable ventre, il se montra aussi, et, comme un homme insensé qu’il était, il n’eut pas honte d’être alourdi d’un si lourd fardeau, à savoir, le poids de trois paniers ; c’est-à-dire de trois portions de temps. (2.209) Car ceux qui défendent la cause du plaisir affirment qu’il consiste en trois temps, du souvenir des délices passés, de la jouissance de ceux qui sont présents, et de l’espérance de ce qui est à venir ; (2.210) de sorte que les trois paniers sont comparés aux trois portions de temps, et les gâteaux sur les paniers aux circonstances qui conviennent à chacune des portions ; au souvenir des joies passées, à la jouissance des plaisirs présents, à l’espoir des délices futurs. Et celui qui porte tout cela est comparé à l’amateur de plaisirs, qui a rempli sa table infidèle, une table dénuée de tout sel hospitalier et amical, non pas d’une seule sorte de luxe, mais de presque toutes les formes et espèces d’intempérance ; (2.211) et le roi Pharaon seul en jouit, comme s’il était assis à un banquet public et se consacrait à la dispersion, à la destruction et à la défaite de la tempérance ; car le nom Pharaon, interprété, signifie « dispersion ». Et c’est une conduite magnifique et royale de sa part que de ne pas se réjouir des avantages spécieux de la sagesse, mais de s’enorgueillir de ces poursuites de débauche qu’il est inconvenant de mentionner, se ruinant dans un appétit insatiable, la gloutonnerie et la mollesse de la vie. (2.212) C’est pourquoi les oiseaux, c’est-à-dire les hasards qui n’auraient jamais pu être anticipés par conjecture, venant de l’extérieur et planant autour de lui, attaqueront et allumeront tout comme le feu, et détruiront tout avec leur puissance dévorante,de sorte qu’il ne reste pas un seul fragment au porteur des paniers pour son plaisir, bien qu’il ait espéré poursuivre ses inventions et ses artifices, les conservant éternellement en lieu sûr, afin qu’ils ne puissent jamais lui être enlevés. (2.213) Et grâces soient rendues à Dieu qui donne la victoire et qui rend les travaux de l’homme esclave de ses passions, même si soigneusement exécutés, toujours improductifs et inutiles, envoyant des natures ailées de manière invisible pour les détruire et les renverser. Par conséquent, l’esprit, étant privé de ce qu’il s’était fait, ayant, pour ainsi dire, le cou tranché, sera trouvé sans tête et sans vie, et comme ceux qui sont attachés à une croix, cloués pour ainsi dire à l’arbre de l’ignorance désespérée et impuissante. (2.214) Car tant qu’aucune de ces choses qui surviennent soudainement et de manière inattendue ne survient, alors les actes qui sont dirigés vers la jouissance du plaisir semblent réussir ; mais lorsque de tels maux s’abattent sur eux de manière inattendue, ils sont renversés et leur créateur est détruit avec eux.
XXXII. (2.215) Les rêves de ces hommes qui répartissent les substances gustatives selon chaque espèce d’aliment, qu’il s’agisse de viande ou de boisson, et de ce qui n’est pas nécessaire mais superflu et recherché seulement par les intempérants, ont donc été suffisamment expliqués. Mais ceux de Pharaon, qui semble exercer sa souveraineté sur ces hommes et sur toutes les facultés de l’âme, doivent maintenant être examinés si nous voulons procéder avec ordre et cohérence avec notre plan. (2.216) Pharaon dit : « Dans mon rêve, je pensais me tenir au bord d’un fleuve, et sept bœufs montèrent comme du fleuve, d’une chair particulièrement grasse et beaux à voir, et paissaient dans le marais verdoyant ; et voici, sept autres bœufs sortirent du fleuve après eux, laids à voir et d’apparence disgracieuse, et maigres de chair, tels que je n’en ai jamais vu de plus maigres dans toute l’Égypte ; (2.217) et les bœufs maigres et d’apparence disgracieuse dévorèrent les sept premiers bœufs qui étaient beaux et choisis, et ils entrèrent dans leurs estomacs, et leur apparence resta toujours disgracieuse, comme je l’ai décrit au début. (2.218) Et quand je me suis réveillé, je me suis rendormi ; et de nouveau je vis dans mon rêve, et comme si sept épis poussaient sur une seule tige, pleins et beaux. Et sept autres épis de blé montèrent aussi, maigres et battu par le vent, tout près d’eux, et ces sept derniers épis engloutirent les sept beaux et pleins Épis. »[93] (2.219) Vous voyez maintenant la préface de l’amoureux de soi qui, étant facilement ému, changeant et inconstant, tant dans son corps que dans son âme, dit : « Je pensais être debout », et n’a pas considéré que l’immuabilité et la stabilité appartiennent à Dieu seul, et à celui qui est cher à Dieu. (2.220) Et la preuve la plus évidente de la puissance immuable qui existe en lui est ce monde, qui est toujours au même endroit et dans le même état. Et si le monde est immobile, comment son Créateur pourrait-il être autre chose que ferme ? En second lieu, les Écritures sacrées sont également des témoins très infaillibles ; (2.221) Car il est dit dans ces passages, où les paroles sont mises dans la bouche de Dieu : « Je me tiens ici et là, avant que vous ne demeuriez sur le rocher », ce qui équivaut à : « Ainsi suis-je, moi qui vous suis visible, et qui suis ici ; et je suis là et partout, occupant tous les lieux, me tenant et demeurant dans le même état, étant immuable, avant que vous ou aucun des objets de la création n’existiez, étant contemplé sur la plus haute et la plus ancienne autorité de pouvoir, d’où la création de toutes choses existantes a été répandue, et le fleuve de la sagesse a coulé ; » (2.222) « Car je suis celui qui a fait sortir le fleuve d’eau du rocher solide », est dit ailleurs. Moïse témoigne également de l’immutabilité de la Divinité, lorsqu’il dit : « J’ai vu le lieu où se tenait le Dieu d’Israël » ;[94] insinuant énigmatiquement qu’il n’est pas sujet au changement en parlant ici de sa position et de son établissement ferme.
XXXIII. (2.223) Mais il y a dans la Divinité un tel degré excessif de stabilité et de fermeté, qu’il a donné même aux natures les plus excellentes une part de sa durabilité comme sa possession la plus excellente : et bientôt après lui, le plus ancien auteur de toutes choses, à savoir Dieu, dit qu’il est sur le point d’ériger fermement son alliance pleine de grâce (et cela signifie sa loi et sa parole) dans l’âme du juste comme sur un fondement solide, qui sera une image à la ressemblance de Dieu, quand il dit à Noé : « J’établirai mon alliance avec toi. »[95] (2.224) Et en plus de cela, il indique aussi deux autres choses, l’une que la justice n’est en aucun cas différente de l’alliance de Dieu, l’autre que les autres êtres accordent des dons qui sont différents des personnes qui les reçoivent ; mais Dieu ne donne pas seulement ces dons, mais il donne aussi les personnes mêmes qui les reçoivent à elles-mêmes, car il m’a donné à moi-même, et tout être vivant il s’est donné à lui-même ; car l’expression : « J’établirai mon alliance avec toi » équivaut à : je te donnerai à toi-même. (2.225) Et tous ceux qui aiment vraiment Dieu désirent ardemment échapper à la tempête des affaires et des affaires multipliées dans lesquelles il y a toujours un temps tempétueux, une mer agitée et de la confusion, et jeter l’ancre dans le havre calme et sûr de la vertu. (2.226) Ne voyez-vous pas ce qui est dit du sage Abraham qui « se tient devant le Seigneur ? »[96] Car quand était-il probable que l’esprit serait capable de se tenir debout, ne penchant plus vers différents côtés comme la balance d’une balance, sauf lorsqu’il est opposé à Dieu, le regardant et étant vu par lui ? (2.227) Car l’absence parfaite de mouvement lui vient de deux manières : soit de la contemplation de celui à qui rien ne peut être comparé, car il n’est attiré par rien qui lui ressemble, soit de son regard, car… ce qu’il a jugé digne, le souverain l’a assigné à lui seul comme le plus excellent des êtres. Et en effet, une exhortation divine fut donnée à Moïse en ces termes : « Tiens-toi ici avec moi »[102], injonction par laquelle ces deux choses semblent être suggérées : premièrement, le fait que l’homme bon n’est pas ému, et deuxièmement, la stabilité universelle du Dieu vivant.
XXXIV. (2.228) Car, en vérité, tout ce qui est apparenté ou proche de Dieu est approprié par lui, devenant stable et stationnaire en raison de son immuabilité ; et l’esprit, étant au repos, sait bien combien le repos est une grande bénédiction, et admirant sa propre beauté, il conçoit qu’il est soit attribué à Dieu seul comme sien, soit à cette nature intermédiaire qui est entre la race mortelle et la race immortelle ; (2.229) en tout cas, il est dit : « Et je me tenais au milieu entre le Seigneur et toi »,[97] ne voulant pas par ces mots qu’il se tenait sur ses propres pieds, mais voulant indiquer que l’esprit de l’homme sage, étant délivré de toutes les tempêtes et de toutes les guerres, et jouissant d’un calme imperturbable et d’une paix profonde, est en effet supérieur à l’homme, mais inférieur à Dieu. (2.230) Car l’esprit humain ordinaire est influencé par l’opinion, et est jeté dans la confusion par toutes les circonstances passagères ; mais l’autre est béni et heureux, et libre de toute participation au mal. Français Et l’homme bon est aux frontières, de sorte qu’on peut dire à juste titre qu’il n’est ni Dieu ni homme, mais qu’il touche aux extrémités des deux, étant lié à la race mortelle par son humanité, et à la race immortelle par sa vertu. (2.231) Et il y a quelque chose qui ressemble beaucoup à cela dans le passage de l’Écriture concernant le grand prêtre : « Car », dit l’Écriture, « lorsque il entre dans le saint des saints, il ne sera pas un homme jusqu’à ce qu’il en soit ressorti. »[98] Mais si à ce moment-là il n’est pas un homme, il est clair qu’il n’est pas non plus Dieu, mais un ministre de Dieu, appartenant quant à sa nature mortelle à la création, mais quant à sa nature immortelle au Dieu incréé. (2.232) Et il est placé dans la classe moyenne jusqu’à ce qu’il ressorte parmi les choses qui appartiennent au corps et à la chair. Et tel est l’ordre des choses selon la nature : lorsque l’esprit, entièrement occupé de l’amour divin, se dirige vers le temple de Dieu et s’en approche avec toute l’ardeur et le zèle possibles, il est inspiré, oublie tout le reste et s’oublie lui-même. Il ne se souvient que de lui et ne dépend que de lui, qui est accompagné par lui comme par un garde du corps, qui reçoit ses soins, à qui il consacre et offre les vertus sacrées et pures. (2.233) Mais lorsque l’inspiration a cessé et que le désir excessif s’est relâché, alors il se détourne des choses divines et redevient homme, se mêlant aux affaires humaines qui l’attendaient dans le vestibule, afin de l’emporter en ne contemplant que les choses qui s’y trouvent.
XXXV. (2.234) Moïse décrit donc l’homme parfait comme n’étant ni Dieu ni homme, mais, comme je l’ai dit précédemment, quelque chose à la frontière entre la nature incréée et la nature périssable. De plus, il classe celui qui s’améliore et progresse vers la perfection dans la région intermédiaire entre les morts et les vivants, désignant par « vivants » ceux qui demeurent dans la sagesse, et par « morts » ceux qui se réjouissent de la folie ; (2.235) car il est dit d’Aaron : « Il se tint entre les morts et les vivants, et la plaie fut arrêtée. »[99] Car celui qui progresse n’est pas compté parmi les morts quant à la vie vertueuse, dans la mesure où il a le désir et l’admiration de ce qui est honorable, ni parmi ceux qui vivent dans une prospérité extrême et parfaite, car il manque encore quelque chose à la fin, mais il touche les deux extrêmes ; (2.236) C’est pourquoi l’expression « la peste fut arrêtée » est très justement employée plutôt que « la peste cessa » ; car chez ceux qui sont parfaits les choses qui brisent, écrasent et détruisent l’âme cessent ; mais chez ceux qui s’avancent vers la perfection, elles ne sont que diminuées, comme si elles étaient seulement interrompues et arrêtées.
XXXVI. (2.237) Puisque donc toute stabilité, toute stabilité, et le fait de demeurer éternellement au même lieu, immuablement et sans changement, se voient d’abord dans le Dieu vivant, puis dans la parole du Dieu vivant, qu’il a appelée son alliance ; et en troisième lieu dans le sage, et au quatrième degré dans celui qui s’avance vers la perfection, qu’est-ce qui pourrait inciter l’esprit méchant, qui est sujet à toutes sortes de malédictions, à penser qu’il est capable de se tenir debout par lui-même, alors qu’en réalité il est emporté comme dans un déluge, et entraîné çà et là par les tourbillons incessants des choses qui s’écoulent à travers le corps mort et agité ? (2.238) « Car je pensais », dit l’Écriture, « que je me tenais sur la rive du fleuve »[100] : et par le mot fleuve nous disons que la parole est signifiée symboliquement, puisque ces deux choses sont portées vers l’extérieur et s’écoulent avec une vitesse vigoureuse et soutenue. Et l’un est tantôt rempli d’une grande abondance d’eau, et l’autre d’une quantité de verbes et de noms, et tantôt ils sont à la fois vides et détendus, et dans un état de quiescence ; (2.239) encore, ils sont utiles dans la mesure où l’un irrigue les champs, et l’autre fertilise les âmes de ceux qui le reçoivent. Et parfois ils sont nuisibles en raison de débordements, comme alors l’un inonde la terre sur ses frontières, et l’autre trouble et embrouille la raison de ceux qui n’y prêtent pas attention. (2.240) C’est pourquoi la parole est comparée à une rivière, et la nature de la parole est double, l’une étant meilleure et l’autre pire ; c’est-à-dire, la meilleure sorte qui fait le bien, et celle nécessairement la pire qui fait le mal ; (2.241) et Moïse a donné des exemples très frappants de chaque sorte à ceux qui sont capables de voir, car il dit : « Car un fleuve sort d’Eden pour arroser le paradis, et de là il se divise en quatre branches : »[101] (2.242) et par le nom Eden il entend la sagesse du Dieu vivant, et l’interprétation du nom Eden est « délice », parce que j’imagine que la sagesse est le délice de Dieu, et Dieu est le délice de la sagesse, comme il est dit aussi dans les Psaumes : « Fais tes délices dans le Seigneur. »[102] Et la parole divine, comme un fleuve, coule de la sagesse comme d’une source, afin d’irriguer et de fertiliser les pousses et les plantes célestes et célestes des âmes qui aiment la vertu, comme si elles étaient un paradis. (2.243) Et cette parole sacrée est divisée en quatre commencements, par quoi j’entends qu’elle est divisée en quatre vertus, dont chacune est une princesse, car être divisé en commencements, [103] ne ressemble pas à des divisions de lieu, mais à un royaume, afin que quiconque, après avoir montré les vertus comme des limites, puisse immédiatement procéder à montrer l’homme sage qui les suit comme roi, étant élu tel, non par les hommes, mais par la seule nature libre qui ne peut se tromper et qui ne peut être corrompue ; (2.244) car ceux qui voient l’excellence d’Abraham lui disent : « Tu es un roi, envoyé de Dieu parmi nous »[104] proposant comme maxime,pour ceux qui étudient la philosophie, que seul le sage est un dirigeant et un roi, et que la vertu est la seule autorité et souveraineté irresponsable.
XXXVII. (2.245) C’est pourquoi un disciple de Moïse, ayant comparé ce discours à un fleuve, a dit dans les Psaumes : « Le fleuve de Dieu était rempli d’eau »[105] ; et il est absurde de donner un tel nom à l’un quelconque des fleuves qui coulent sur la terre. Mais il semble que le psalmiste parle ici de la parole divine, qui est pleine de ruisseaux et de sagesse, et dont aucune partie n’est vide ou désolée, ou plutôt, comme quelqu’un l’a dit, qui est répandue partout dans l’univers et s’élève en hauteur grâce à la rapidité continue et incessante de cette source intarissable. (2.246) On trouve aussi une autre expression dans les Psaumes, comme celle-ci : « Le cours du fleuve réjouit la cité de Dieu. »[106] Quelle cité ? Car la sainte cité qui existe à présent, dans laquelle est également établi le saint temple, est à une grande distance de toute mer ou rivière, de sorte qu’il est clair que l’auteur entend ici, au sens figuré, parler d’une autre cité que la cité visible de Dieu. (2.247) Car, en toute vérité, le flot continuel de la parole divine, étant porté sans cesse avec rapidité et régularité, se répand universellement sur tout, donnant de la joie à tous. (2.248) Et dans un sens, il appelle le monde la cité de Dieu, comme ayant reçu toute la coupe de la boisson divine, … et s’en étant réjoui, de sorte qu’il en a retiré une joie impérissable, dont il ne peut être privé à jamais. Mais dans un autre sens, il applique ce titre à l’âme du sage, dans laquelle Dieu est dit aussi marcher, comme dans une ville : « Car, dit Dieu, je marcherai en vous, et je serai votre Dieu en vous. »[107] (2.249) Et qui peut déverser sur l’âme heureuse qui offre sa propre raison comme la coupe la plus sacrée, les saints gobelets de la vraie joie, sinon l’échanson de Dieu, le maître du festin, la parole ? ne différant pas du breuvage lui-même, mais étant lui-même dans un état non mélangé, le pur délice et la douceur, et déversant, et la joie, et la médecine ambroisiale du plaisir et du bonheur ; si nous pouvons aussi, pour un instant, employer le langage des poètes.
XXXVIII. (2.250) Or, ce que les Hébreux appellent la cité de Dieu, c’est Jérusalem, nom qui, interprété, signifie « la vue de la paix ». Ils ne cherchent donc pas la cité du Dieu vivant dans la région de la terre, car elle n’est ni de bois ni de pierre, mais la cherchent dans l’âme qui est exempte de guerre, et qui propose à ceux qui sont doués d’une vue aiguë une vie contemplative et paisible ; (2.251) car où pourrait-on trouver une demeure plus vénérable et plus sainte pour Dieu parmi toutes les choses existantes, que l’esprit avide de contemplation, qui est avide de tout voir et qui, même en rêve, ne ressent aucun désir de sédition ou de trouble ? (2.252) Et de plus, l’esprit invisible qui a l’habitude de converser avec moi d’une manière invisible me suggère une suggestion et me dit : Ô mon ami, tu sembles ignorer une chose importante et très désirable que je vais t’expliquer complètement ; (2.253) Sache donc, ô homme excellent, que Dieu seul est la paix la plus vraie, la plus réelle et la plus authentique, et que toute essence créée et périssable est guerre continuelle. Car Dieu est quelque chose de volontaire, et l’essence mortelle est nécessité. Quiconque donc est capable de renoncer à la guerre, à la nécessité, à la création et à la destruction, et de passer à l’être incréé, au Dieu immortel, au principe volontaire et à la paix, peut à juste titre être appelé la demeure et la cité de Dieu. (2.254) Ne considère donc pas comme une chose différente de parler de la vue de la paix ou de la vue de Dieu, car c’est la même chose ; car la paix n’est pas seulement la compagne, mais aussi la principale des puissances du Dieu vivant, qui sont distinguées par de nombreux noms.
XXXIX. (2.255) De plus, il dit au sage Abraham : « Il lui donnera un héritage de terre depuis le fleuve d’Égypte jusqu’au grand fleuve, l’Euphrate »,[108] ne voulant pas tant parler d’une portion de terre que d’une meilleure portion par rapport à nous-mêmes. Car notre corps, et les passions qui y existent et qui sont engendrées par lui, sont comparés au fleuve d’Égypte, mais l’âme et les passions qui lui sont chères sont comparées au fleuve Euphrate. (2.256) Et ici est posée une doctrine, à la fois très utile à la vie et de la plus haute importance, selon laquelle l’homme de bien a reçu en héritage l’âme et les vertus de l’âme ; tout comme, au contraire, l’homme méchant a reçu en partage le corps, les vices du corps et ceux qui sont engendrés par le corps. (2.257) Et l’expression « de » a un double sens. L’une, celle qui inclut le point de départ ; l’autre, celle qui l’exclut. Car lorsque nous disons que du matin au soir il y a douze heures, ou de la nouvelle lune à la fin du mois il y a trente jours, nous incluons dans notre énumération à la fois la première heure et le jour de la nouvelle lune. Et lorsque quelqu’un dit que tel ou tel champ est à trois ou quatre stades de la ville, il entend clairement exclure la ville elle-même de cette mesure. (2.258) Il faut donc considérer maintenant que l’expression « du fleuve d’Égypte » doit être comprise comme incluant ce fleuve ; car l’auteur entend nous éloigner des choses du corps, qui semblent exister dans un flux et un cours constants, en voie de destruction et de destruction, afin que nous puissions recevoir l’héritage de l’âme avec les vertus impérissables, qui méritent, de plus, l’immortalité. (2.259) Ainsi, en l’examinant avec soin, nous avons découvert que la parole louable est comparée à un fleuve ; mais la parole blâmable est le fleuve d’Égypte lui-même, intraitable, peu disposé à apprendre, pour ainsi dire, une parole sans vie ; c’est pourquoi elle est aussi changée en sang, [109] comme incapable de fournir de la nourriture. Car la parole de l’ignorance n’est pas saine, et elle produit des grenouilles sans sang et sans vie, qui ne produisent qu’un son nouveau et rauque, un bruit douloureux à l’oreille. (2.260) Et il est dit, de même, que tous les poissons de ce fleuve furent détruits. Et par les poissons sont ici signifiées figurativement les conceptions ; car ces choses flottent et existent dans la parole comme dans un fleuve, ressemblant à des êtres vivants et remplissant le fleuve de vie. Mais dans la parole non instruite, toutes les conceptions meurent ; car on n’y trouve rien d’intelligent, mais seulement, comme quelqu’un l’a dit, quelques voix désordonnées et peu musicales de choucas.
XL. (2.261) Nous en avons donc assez dit sur ces sujets. Mais puisqu’il avoue avoir vu en rêve non seulement un lieu et un fleuve, mais aussi les rives d’un fleuve, comme il le dit : « Je croyais me tenir au bord (cheilos) du fleuve. »[110] Il convient également de dire quelques mots pertinents sur la rive. (2.262) Or, il semble y avoir deux raisons essentielles pour lesquelles la nature a adapté les lèvres (cheile—) à tous les animaux, et plus particulièrement aux hommes : l’une pour la tranquillité, car elles constituent le plus solide rempart et la meilleure défense de la voix ; l’autre pour la clarté, car c’est par elles que s’écoule le flot des paroles. Car lorsqu’elles sont fermées, la parole est freinée ; il est impossible qu’elle puisse se propager si elles ne sont pas séparées. (2.263) Et par ces moyens, la nature prépare et entraîne l’homme aux deux fins, la parole et le silence, en veillant au moment opportun pour chaque emploi. Par exemple, est-ce qu’une chose dite mérite d’être écoutée ? Alors, écoutez, sans faire obstacle, dans un silence parfait, selon l’injonction de Moïse : « Taisez-vous et écoutez. »[111] (2.264) Car parmi ceux qui se mêlent de discussions contentieuses, il n’en est aucun qui puisse être considéré comme parlant ou écoutant ; mais cela n’est avantageux que pour celui qui s’apprête à le faire. (2.265) De plus, lorsque vous voyez, au milieu des guerres et des désastres de la vie, la main miséricordieuse de Dieu et sa puissance favorable se tenir sur vous et vous défendre, taisez-vous vous-même ; car ce champion n’a besoin d’aucune aide. Et il y a des preuves de ce fait consignées dans les Écritures sacrées ; comme, par exemple, le verset : « Le Seigneur combattra pour nous, et vous resterez silencieux. »[112] (2.266) Et si vous voyez la véritable progéniture et le premier-né de l’Égypte détruits, à savoir le désir, les plaisirs, la douleur, la peur, l’iniquité, la joie, l’intempérance et toutes les autres qualités qui leur sont semblables et apparentées, alors émerveillez-vous et restez silencieux, redoutant la terrible puissance de Dieu ; (2.267) car, disent les Écritures, « Pas un chien ne remuera sa langue, ni rien, homme ou bête, ne prononcera un son »[113] ; ce qui équivaut à dire : Il ne convient ni à la langue impudente d’aboyer et de maudire, ni à l’homme qui est en nous, c’est-à-dire notre esprit dominant ; ni la bête semblable à du bétail qui est en nous, c’est-à-dire le sens extérieur, pour se vanter, lorsque tout le mal qui était en nous a été complètement détruit, et lorsqu’un allié de l’extérieur vient de son propre chef pour tenir son bouclier sur nous.
XLI. (2.268) Mais il y a bien des occasions qui se prêtent mal au silence ; et si nous nous tournons vers le langage de la prose ordinaire, dont nous pouvons encore voir des monuments commémoratifs, comment une participation inattendue au bien a-t-elle jamais eu lieu pour quelqu’un ? Il est donc bon de rendre grâce et de chanter des hymnes en l’honneur de celui qui l’a accordé. (2.269) Quel est donc le bien ? La passion qui nous attaque est morte et jetée à la renverse sans sépulture. Ne tardons pas, mais, immobiles, chantons cet hymne si sacré et si convenable, sentant que nous avons le commandement de dire à tous les hommes : « Chantons au Seigneur, car il a triomphé glorieusement ; il a jeté le cheval et son cavalier à la mer. »[114] (2.270) Mais la déroute et la destruction des passions sont certes un bien, mais pas un bien parfait ; mais la découverte de la sagesse est un bien surpassant, et quand elle sera trouvée, tout le peuple chantera des harmonies et des mélodies, non pas avec un seul genre de musique, mais avec toutes sortes ; (2.271) car alors, dit l’Écriture, « Israël a chanté ce chant au puits »[115] ; c’est-à-dire en triomphe du fait que la connaissance, qui avait longtemps été cachée mais qui était recherchée, avait enfin été trouvée par tous les hommes, bien que profondément enfouie par nature ; dont le devoir était d’irriguer les champs rationnels existant dans les âmes de ces hommes qui aiment la contemplation. (2.272) Que dirons-nous donc ? Lorsque nous rapportons à la maison le fruit légitime de l’esprit, l’Écriture sacrée ne nous enjoint-elle pas d’étaler dans notre raison, comme dans un panier sacré, les prémices de notre fertilité ; Un exemple des glorieuses fleurs, pousses et fruits que l’âme a produits, nous invitant à parler clairement et à prononcer des panégyriques sur le Dieu qui amène toutes choses à la perfection, et à dire : « J’ai ôté de ma maison les choses saintes et je les ai disposées dans la maison de Dieu »[116], en nommant comme intendants et gardiens des hommes choisis pour leur mérite supérieur, et en leur confiant la garde de ces choses sacrées ; (2.273) Ces personnes sont des Lévites, des prosélytes, des orphelins et des veuves. Mais certains sont des suppliants, d’autres des émigrants et des fugitifs, d’autres encore des veuves et des démunis de toute créature, mais inscrits comme appartenant à Dieu, véritable époux et père de l’âme encline à l’adoration.
XLII. (2.274) Ainsi donc, il convient parfaitement de parler et de se taire. Mais les méchants adoptent une conduite exactement opposée ; car ils sont admirateurs d’un silence blâmable et d’une interprétation sujette à reproche, pratiquant les deux lignes de conduite pour leur propre destruction et celle des autres. (2.275) Mais la plus grande partie de leur emploi consiste à dire ce qu’ils ne devraient pas ; car, ayant ouvert la bouche et l’ayant laissée déchaînée, comme un torrent sans frein, ils laissent leur parole couler sans discernement, comme le dit le poète, traînant mille paroles inutiles ; (2.276) C’est pourquoi ceux qui se sont consacrés à la défense du plaisir, de l’appétit et de toute sorte de désir excessif, édifiant des passions irrationnelles comme une fortification contre la raison dominante, et se préparant à une sorte de discussion conflictuelle, en sont finalement arrivés à une dispute régulière, espérant pouvoir aveugler la race douée de la faculté de voir, et la précipiter dans des précipices, et dans des abîmes d’où elle ne pourra plus jamais émerger. (2.277) Mais certains se sont non seulement présentés comme des rivaux de la vertu humaine, mais sont allés jusqu’à un tel degré de folie qu’ils s’opposent aussi à la vertu divine. C’est pourquoi Pharaon, le roi du pays d’Égypte, est présenté comme le chef de la compagnie qui s’adonne aux passions ; car il est dit au prophète : « Voici, il va vers le fleuve, et tu te tiendras sur la rive du fleuve pour le rencontrer »[117] (2.278) ; car c’est le propre du sage de s’avancer vers la rapidité et le déversement continuel de la passion irrationnelle ; et c’est aussi le propre d’un homme de s’avancer vers la passion irrationnelle ; et c’est aussi le propre du sage de s’opposer avec une vigueur extrême aux arguments en faveur du plaisir et du désir, non pas avec ses pieds, mais avec son esprit, fermement et immuablement, se tenant sur la rive du fleuve ; c’est-à-dire sur la bouche et sur la langue, qui sont les organes de la parole. Car s’appuyant fermement sur ces éléments, il sera capable de renverser et de réfuter les arguments spécieux et plausibles qui défendent la cause de la passion. (2.279) Mais l’ennemi de la race qui est douée du pouvoir de voir, c’est le peuple de Pharaon, qui n’a jamais cessé d’attaquer, de persécuter et d’asservir la vertu, jusqu’à ce qu’elle ait payé le prix des maux qu’elle a infligés, submergée par la mer d’iniquités qu’elle a suscitées. De sorte que cette période offrit un spectacle extraordinaire, une victoire qui ne faisait aucun doute, et une joie plus grande qu’on n’aurait pu l’espérer. (2.280) C’est pourquoi il est dit : « Et Israël vit les Égyptiens morts sur le rivage de la mer. »[118] Grande était en effet la main qui combattait pour eux, obligeant ceux qui avaient aiguisé ces organes contre la vérité à tomber par la bouche, les lèvres et la parole,afin que ceux qui avaient pris ces armes contre d’autres périssent par leurs propres armes et non par celles d’autrui. (2.281) Et cela annonce trois choses très glorieuses à l’âme : l’une, la destruction des passions de l’Égypte ; l’autre, que cela n’ait eu lieu nulle part ailleurs qu’aux sources salées et amères, comme au bord de la mer, par lesquelles se déverse la raison sophistique, ennemie de la vertu ; et, enfin, la vue du désastre. (2.282) Car rien de glorieux ne peut être invisible, mais devrait être porté à la lumière et à l’éclat du soleil. Car de même le contraire, à savoir le mal, devrait être plongé dans les ténèbres profondes et être jugé digne de la nuit. Et il peut certes arriver par hasard à quelqu’un de voir cela ; mais ce qui est réellement bon devrait toujours être vu par des yeux plus perçants. Et quoi de plus bon que la vie du bien et la mort du mal ?
XLIII. (2.283) Il y avait donc trois personnes qui prononçaient des paroles atroces qui devaient atteindre même le ciel ; ces hommes se consacraient à des études contre nature, ou plutôt contre leurs propres âmes, disant que cet univers était la seule chose qui fût perceptible aux sens extérieurs, et visible, n’ayant jamais été créé, et n’étant jamais destiné à être détruit, mais étant incréé et impérissable, n’exigeant aucune surveillance, ni soin, ni réglementation, ni gestion. (2.284) Ensuite, accumulant de nouvelles tentatives les unes sur les autres, ils édifièrent une doctrine qui ne fut pas approuvée, et l’élevèrent à une hauteur comme une tour ; car il est dit : « Et toute la terre parlait une seule langue »,[119] un accord inharmonieux de toutes les parties de l’âme, dans le but de renverser ce qui est le plus complet de tous les principes existants, à savoir l’autorité. (2.285) C’est pourquoi une main puissante et irrésistible les renversa alors qu’ils espéraient s’élever jusqu’au ciel par leurs ruses, dans le but de détruire le royaume éternel ; elle détruisit également la doctrine qu’ils avaient édifiée ; et ce lieu est appelé confusion : (2.286) un nom très approprié pour une tentative aussi audacieuse et perverse ; car quoi de plus générateur de confusion que l’anarchie ? Les maisons sans intendant ne sont-elles pas pleines de délits et de troubles ? (2.287) Et les villes privées de roi ne sont-elles pas détruites par la domination de la foule, le mal opposé au pouvoir royal, et en même temps le plus grand de tous les maux ? Et les pays, les nations et les régions de la terre, dont les gouvernements ont été renversés, n’ont-ils pas perdu toute leur ancienne et grande prospérité ? (2.288) Et pourquoi parler de l’histoire humaine ? Car même les autres espèces d’animaux, les bandes d’oiseaux, les troupeaux de bêtes terrestres et les bancs de créatures aquatiques, n’existent jamais sans un chef parmi eux ; mais ils désirent toujours et font toujours attention à leur propre chef, comme étant la seule cause des avantages qu’ils reçoivent ; en son absence ils sont dispersés et détruits. (2.289) Supposons-nous donc que dans le cas des créatures terrestres, qui sont la partie la plus insignifiante de l’univers, l’autorité soit la cause des biens et l’anarchie la cause des maux, mais que le monde lui-même ne soit pas rempli d’un bonheur extrême en raison de l’administration de Dieu son roi ? (2.290) C’est pourquoi ils ont subi un châtiment correspondant à leurs iniquités : car ayant souillé la doctrine sacrée, ils se sont vus souillés de la même manière, toute autorité leur étant ôtée ; et étant jetés dans la confusion, mais n’en ayant réellement causé aucune. Mais tant qu’ils furent laissés impunis, gonflés d’un orgueil insensé, ils cherchèrent à renverser l’autorité de l’univers par des discours impies ; et ils s’établirent comme dirigeants et rois,attribuant la puissance irrésistible de Dieu à des créatures qui sont perpétuellement en voie de disparition et de destruction.
XLIV. (2.291) C’est pourquoi ces hommes ridicules, se donnant des airs tragiques et usant d’un langage enflé, ont coutume de parler ainsi : « Nous sommes ceux qui sont les chefs ; nous sommes les rois ; nous sommes les héritiers ; nous sommes les héritiers. » De nous dépendent toutes choses. Qui, si ce n’est nous-mêmes, est la cause du bien et du mal ? À qui, si ce n’est à nous, peut-on vraiment attribuer le bien ou le mal ? Ils profèrent aussi des absurdités d’une autre manière, affirmant que tout dépend d’une puissance invisible, qui, selon eux, préside à toutes les affaires humaines et divines du monde entier. (2.292) En proférant des mensonges aussi insolents, si après l’ivresse ils sont redevenus sobres, et sont revenus à eux-mêmes, et se sentent honteux de l’ivresse à laquelle ils ont cédé en tombant sous la domination des sens externes, et s’ils se reprochent les mauvaises actions que la folie les a conduits à commettre, prêtant l’oreille à leur nouveau conseiller, qui ne flatte jamais, et qui ne peut être corrompu, à savoir la repentance, ayant propitié la puissance miséricordieuse du Dieu vivant par des hymnes sacrés de repentance au lieu de chants profanes, ils trouveront un pardon entier. (2.293) Mais s’ils sont rétifs et obstinés pour toujours, et se livrent à un comportement dévergondé, comme s’ils étaient indépendants, et libres, et les dirigeants des autres, alors par une nécessité qui est sourde à toutes les supplications et implacable, ils apprendront à sentir leur propre néant en toutes choses, petites et grandes ; (2.294) Car le cocher qui monte sur eux, bride ce monde comme un char ailé, tirant de toutes ses forces les rênes auparavant lâches et pressant violemment les mors, leur rappellera par le fouet et l’éperon son autorité de maître, qu’ils ont oubliée, tels de méchants serviteurs, à cause de la douceur et de la miséricorde de leur intendant ; (2.295) Car les mauvais serviteurs, considérant la douceur de leurs maîtres comme de l’anarchie, s’imaginent entièrement libres de tout pouvoir, jusqu’à ce que leur maître enraye leur grave et croissante maladie en appliquant le châtiment comme remède. (2.296) C’est pourquoi on parle d’« âme sans loi, qui distingue par ses lèvres le bien du mal, et qui ensuite annonce son propre péché ».[120] Que dis-tu, ô âme pleine d’insolence ? Car sais-tu ce que sont le vrai bien ou le vrai mal, la vraie justice ou la vraie sainteté ? Ou ce qui convient à quoi ? (2.297) La connaissance de ces choses et le pouvoir de les réguler appartiennent à Dieu seul et à tous ceux qui lui sont chers. Et l’Écriture en témoigne : « Je tuerai et je ferai vivre ; je frapperai et je guérirai. »[121] (2.298) Mais l’esprit, pourtant sage à ses propres yeux, n’avait même pas une vague idée des choses placées au-dessus de lui ; mais, misérable qu’il fût, il fut si complètement emporté par le vent de la vaine opinion qu’il jura que ces choses qu’il avait imaginées à tort étaient fermement et solidement établies. (2.299) Si,c’est pourquoi la violence et la convulsion de la maladie commencent à se relâcher, les étincelles de la santé qui revient se rallument peu à peu, et la forceront d’abord à confesser son erreur, c’est-à-dire à se faire des reproches, et ensuite à se faire suppliante à l’autel, implorant par des prières, des supplications et des sacrifices, qu’elle obtienne seulement le pardon.
XLV. (2.300) Après cela, qui peut légitimement se demander pourquoi l’historien des Écritures n’a parlé du fleuve d’Égypte que comme ayant des rives, sans mentionner l’Euphrate ni aucun autre fleuve sacré ? Car il dit ici : « Tu te tiendras sur le chemin pour le rencontrer sur la rive du fleuve. » (2.301) Pourtant, certains, par moquerie, diront peut-être qu’il n’est pas juste d’exposer de tels sujets à l’examen, car cela témoigne plutôt d’un esprit de chicane que d’un bienfait. Mais j’imagine que de telles choses, comme des friandises, sont préparées dans les Écritures sacrées pour l’amélioration de ceux qui les lisent, et que nous ne devrions pas condamner la curiosité de ceux qui étudient ces sujets, mais plutôt blâmer leur indolence s’ils ne les ont pas étudiés. (2.302) Car notre discussion actuelle ne porte pas sur l’histoire des fleuves, mais sur les modes de vie, comparés aux cours d’eau, coulant dans des directions opposées. Car la vie de l’homme de bien consiste en actions ; mais celle du méchant ne consiste que en paroles. Or, la parole est dans la langue, la bouche, les lèvres, et dans la vie.
Genèse 28:12. ↩︎
Genèse 26:33. ↩︎
Genèse 2:7. ↩︎
Exode 24:18. ↩︎
Genèse 29:35. ↩︎
Genèse 26:32. ↩︎
Genèse 27:43. ↩︎
Genèse 12:4. ↩︎
Genèse 17:32. ↩︎
Genèse 28:11. ↩︎
Exode 24:10. ↩︎
Genèse 22:4. ↩︎
Genèse 18:33. ↩︎
Exode 19:17. ↩︎
Genèse 28:11. ↩︎
Genèse 9:6. ↩︎
Psaumes 26:1. ↩︎
Genèse 1:4. ↩︎
Genèse 41:45. ↩︎
Genèse 32:31. ↩︎
Lévitique 4:31. ↩︎
Lévitique 22:6. ↩︎
Nombres 25:1. ↩︎
Nombres 25:4. ↩︎
Exode 22:26. ↩︎
le mot grec est lo—podyteo—. Un lo—podyte—s était quelqu’un qui fréquentait les bains dans le but de voler les vêtements des baigneurs. ↩︎
Exode 10:21. ↩︎
Genèse 28:11. ↩︎
Exode 10:23. ↩︎
Genèse 28:11. ↩︎
la note marginale de notre Bible traduit Israël par « un prince de Dieu ». ↩︎
Genèse 32:25; où, cependant, l’expression de la Bible est « la cavité de la cuisse de Jacob était déboîtée ». ↩︎
Genèse 28:12. ↩︎
Lévitique 26:12. ↩︎
Genèse 28:13. ↩︎
Deutéronome 10:9. ↩︎
Genèse 28:21. ↩︎
Genèse 46:1. ↩︎
Genèse 28:14. ↩︎
le texte est ici très corrompu. J’ai suivi la lecture et la traduction de Mangey. ↩︎
Genèse 28:15. ↩︎
Genèse 28:16. ↩︎
il y a ici une lacune qui ne peut être comblée de manière satisfaisante. Mangey juge le reste du chapitre obscur, corrompu et presque inintelligible. ↩︎
Genèse 31:11. ↩︎
Deutéronome 27:9. ↩︎
Exode 3:4. ↩︎
Genèse 22:1. ↩︎
Genèse 31:10. ↩︎
Genèse 37:3. ↩︎
Genèse 31:12. ↩︎
Exode 3:14. ↩︎
Nombres 23:19. ↩︎
Deutéronome 1:31. ↩︎
Genèse 31:13. ↩︎
Genèse 16:13. ↩︎
Genèse 31:13. ↩︎
Deutéronome 16:22. ↩︎
mangey pense que ce passage est corrompu et propose de changer naus en apnous, « mort », mais cela semble inutile. ↩︎
Genèse 31:13. ↩︎
1 Samuel 1:28. ↩︎
Genèse 37:7. ↩︎
Genèse 28:12. ↩︎
Genèse 31:10. ↩︎
Lévitique 19:9. ↩︎
Deutéronome 1:17. ↩︎
Nombres 6:2. ↩︎
Nombres 31:28. ↩︎
Genèse 37:7. ↩︎
Nombres 11:4. ↩︎
Genèse 37:33. ↩︎
Lévitique 10:6. ↩︎
Deutéronome 25:12. ↩︎
Lévitique 2:1. ↩︎
Lévitique 23:10. ↩︎
Genèse 37:7. ↩︎
Genèse 37:8. ↩︎
Genèse 50:19. ↩︎
Exode 13:19. ↩︎
Genèse 37:9. ↩︎
Genèse 40:16. ↩︎
Genèse 40:9. ↩︎
Nombres 13:18. ↩︎
Ésaïe 5:7. ↩︎
Deutéronome 30:9. ↩︎
Exode 5:2. ↩︎
Deutéronome 23:1. ↩︎
Genèse 18:11. ↩︎
Lévitique 16:17. ↩︎
Exode 7:1. ↩︎
Deutéronome 32:32. ↩︎
Genèse 40:10. ↩︎
Genèse 41:17. ↩︎
Exode 24:10. ↩︎
Genèse 9:10. ↩︎
Genèse 18:22. ↩︎
Deutéronome 10:10. ↩︎
Lévitique 16:17. ↩︎
Nombres 16:48. ↩︎
Genèse 41:17. ↩︎
Genèse 2:10. ↩︎
Psaumes 36:4. ↩︎
il y a ici une obscurité inévitable dans la traduction. Le mot grec archai, qui signifie commencements, ou principes, et aussi gouvernements. ↩︎
Genèse 23:6. ↩︎
Psaumes 65:10. ↩︎
Psaumes 45:5. ↩︎
Lévitique 26:12. ↩︎
Genèse 15:18. ↩︎
Exode 7:17. ↩︎
Genèse 41:17. ↩︎
Deutéronome 27:19. ↩︎
Exode 14:14. ↩︎
Exode 11:7. ↩︎
Exode 15:1. ↩︎
Nombres 21:17. ↩︎
Deutéronome 26:13. ↩︎
Exode 7:15. ↩︎
Exode 14:30. ↩︎
Genèse 11:1. ↩︎
Lévitique 5:4. ↩︎
Deutéronome 32:39. ↩︎