Les œuvres
de
Philon d'Alexandrie
C. D. Yonge, traducteur
[1854–55]
James C. VanderKam écrit : « Bien que de nombreux écrits de Philon aient survécu, on sait peu de choses sur sa vie. Nous ne savons même pas quand il est né ou quand il est mort. Les quelques faits sur sa vie proviennent d’allusions occasionnelles dans ses propres livres et d’un petit nombre de références externes (par exemple, Josèphe le mentionne). Son frère Alexandre occupait le poste d’alabarque, apparemment une fonction élevée qui impliquait de superviser la collecte des revenus, et était si riche que le roi Agrippa Ier lui empruntait souvent de l’argent. Il est clair que Philon appartenait à une famille extrêmement importante dans la grande communauté juive d’Alexandrie. Le neveu de Philon, Tiberius Julius Alexander, le fils d’Alexandre, abandonna sa religion ancestrale, devint le procurateur romain en Judée en 46-48 de notre ère et joua un rôle important pour les Romains dans leur répression de la révolte juive de 66-70 de notre ère, une autre indication du statut dont jouissaient les membres de la famille de Philon. Josèphe le considérait comme important à tous égards. et compétent en philosophie. » (Une introduction au judaïsme primitif, p. 138)
Emil Schürer écrit : « Philon n’a donné nulle part un exposé systématique de son système. Il n’a développé que des points isolés, comme la doctrine de la création du monde, avec un certain degré de lien. En règle générale, il donne les idées qu’il a élaborées en les combinant avec le texte de l’Ancien Testament. Cela est cohérent avec le principe formel de toute sa théologie, à savoir l’hypothèse de l’autorité absolue de la loi mosaïque. La Thora de Moïse est pour lui, comme pour tout Juif, l’autorité suprême, voire l’unique et absolument décisive : une révélation parfaite de la sagesse divine. Chaque mot écrit dans la Sainte Écriture par Moïse est une déclaration divine. Par conséquent, aucun mot n’y est dépourvu de sens défini. Les Écritures des autres prophètes, en combinaison avec celles de Moïse, contiennent également des révélations divines. Car tous les prophètes sont des interprètes de Dieu, qui les utilise comme instruments pour la révélation de la volonté divine. A ce principe formel de l’autorité absolue de la Sainte Écriture et surtout de la loi mosaïque, est liée l’hypothèse supplémentaire que toute la vraie sagesse était effectivement contenue. C’est précisément dans cette source de toute connaissance que Philon déduit formellement de l’Ancien Testament toutes les doctrines philosophiques qu’il avait en fait empruntées aux philosophes grecs. Ce n’est pas chez Lato, Pythagore et Zénon, mais surtout dans les écrits de Moïse que se trouve l’enseignement le plus profond et le plus parfait sur les choses divines et humaines. En eux se trouvait déjà contenu tout ce qui était bon et vrai, ce que les philosophes grecs enseignèrent plus tard. Ainsi Moïse est le véritable maître de l’humanité, et c’est de lui — comme le supposent Philon et Aristobule — que les philosophes grecs ont puisé leur sagesse. » (La Littérature du peuple juif au temps de Jésus, pp. 366-367)
Martin McNamara écrit : « Bien qu’il traite de la signification littérale des textes dans ses « Questions et réponses », Philon s’intéresse principalement à l’interprétation allégorique des Écritures. Les titres de ses œuvres montrent que sa pensée s’est centrée sur le texte sacré ou en a découlé. Cependant, il peut être étudié à la fois comme philosophe et comme exégète. Au cœur de son enseignement sur la relation de Dieu au monde se trouve sa doctrine du Logos. Le terme lui-même apparaît à plusieurs reprises dans ses œuvres mais n’est jamais défini. Dans Qui est l’héritier des choses divines ?, chapitre 42 (§ 206), le Logos dit de lui-même : « Je me tiens entre le Seigneur et toi ; je ne suis ni incréé comme Dieu, ni créé comme toi, mais à mi-chemin entre les deux extrêmes, un otage des deux côtés. » On peut débattre de savoir si Philon considérait le Logos comme une réalité, comme une identité distincte ayant une existence réelle, ou comme rien de plus qu’une abstraction. » (Littérature intertestamentaire, pp. 232-233)
Raymond F. Surburg écrit : « Philon représente une étrange fusion. De par sa nature et son éducation, il était juif ; de par sa résidence à Alexandrie, il était mystique ; de par ses études supérieures, il était un humaniste grec ; de par ses contacts et sa position sociale, il était un allié de l’aristocratie romaine. Philon a tenté d’atteindre un double objectif par ses écrits : 1) Il s’est efforcé de justifier la religion juive auprès des gens cultivés de la société gréco-romaine. Compte tenu de la détérioration de la société et de la religion païennes, il avait une splendide occasion de présenter la foi juive comme accomplissant « le désir de toutes les nations ». D’autre part, il essaya de montrer et de persuader ses coreligionnaires stricts que la philosophie et l’érudition grecques n’étaient pas réellement hostiles et opposées aux principes de la religion hébraïque, mais que chacune défendait des principes pratiquement identiques. Philon adopta ainsi un point de vue éclectique, dans lequel il mélangeait les concepts théologiques de l’Ancien Testament avec les principes philosophiques grecs. Katz affirme que « Philon témoigne d’une évolution dans laquelle la philosophie est devenue religieuse et la religion philosophique ». Alors que Philon parlait de manière philosophique avec l’intention de faire passer des vérités dogmatiques et éthiques, ce faisant, il impliquait de sa part une dilution de la substance religieuse de la révélation divine. De même, ses convictions religieuses furent modifiées par l’héritage philosophique. » (Introduction à la période intertestamentaire, pp. 155-156)