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Les ennuis de Genji s’aggravaient de jour en jour, et le monde lui devenait pénible. Un incident, cependant, mérite d’être brièvement mentionné avant d’aborder les principales conséquences de ces troubles.
Il y avait une dame qui avait été Niogo à la cour de l’ancien empereur, et qui s’appelait Reikeiden-Niogo, du nom de sa chambre. Elle n’avait pas eu d’enfant de lui et, après sa mort, elle vivait, avec sa sœur cadette, dans la précarité. Genji les connaissait tous deux depuis longtemps, et ils étaient souvent aidés par la générosité avec laquelle il les assistait avec joie, à la fois par amitié et par respect pour son défunt père.
À cette époque, il restait tranquille chez lui, mais il rendit visite à ces dames un soir, alors que le temps, après une longue pluie, s’était éclairci. Il conversa avec elles de sujets du passé jusque tard dans la soirée. La lune décroissante projetait sa faible lumière sur les grands arbres du jardin, qui étendaient leurs ombres sur le sol. Parmi eux, un oranger en pleine floraison répandait son doux parfum, et un Hototo-gisu [^104] le survolait en chantant d’une voix enchanteresse.
« Ah ! comme il se souvient de son propre ami ! » dit Genji, et il continua :
« À cette maison de « fleurs qui tombent »,
Les odeurs te ramènent à nouveau,
Et maintenant tu chantes, à l’heure du soir,
Ta lignée fidèle et aimante.
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À cela, la dame la plus âgée répondit :
« Dans la maison où l’on vit, tout tristement seul,
Et l’ombre de l’amitié est rarement projetée,
Ces fleurs atteignent les jours lumineux qui sont passés
Et apporte à notre tristesse les joies du passé.
[paragraphe continue] Et, après une longue et amicale conversation, Genji rentra chez lui. On peut dire que le caractère de Genji était changeant, c’est vrai, mais il faut lui rendre justice pour sa bonté envers ses vieilles connaissances, telles que ces deux sœurs, et c’est apparemment la raison pour laquelle il s’aliénait rarement ceux qu’il appréciait.