Annexe III. Yü Shû King, ou « Le Classique du Pivot de Jade ». | Page de titre | Annexe V. Analyses de Lin Hsî-kung sur plusieurs livres de Kwang-dze |
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Je n’ai trouvé nulle part mention de l’auteur de cette brève composition, ni de sa date. L’utilisation d’expressions bouddhiques montre qu’elle ne peut avoir une origine très ancienne. Elle appartient à la même catégorie d’écrits taoïstes que le Khing Käng King, qui est le premier de ces appendices. Lî Hsî-yüeh dit : « Le Traité est appelé « Directive du Jour », car il montre que, durant toutes les heures (le Tâo), il ne faut pas l’abandonner un seul instant (cf. les paroles de Confucius au début du Kung Yung). Que le travail soit fait, et le résultat promis sera assuré ; seulement, il faut insister sur la Pureté du corps et de l’esprit. » Dans le deuxième paragraphe, il est dit : « Pendant les douze heures du jour, que les pensées soient constamment fixées sur la Pureté absolue » ; et dans le dernier paragraphe, « Pendant les douze heures, soyez toujours pur et sans tache » ; — montrant ainsi quel est l’enseignement principal du Grand système taoïste, et la place prééminente qu’occupe la Pureté dans le « Directoire d’un jour ». Le style est si clair et si simple que je l’ai laissé sans note ni commentaire.
1. Quant à ce qu’il faut faire dans la journée, une fois le repas et la boisson préparés, qu’on s’assoie droit, la bouche fermée, et qu’aucune pensée ne s’immisce dans son esprit. Qu’on oublie tout et qu’on garde l’esprit fixé sur une résolution. Que ses lèvres soient collées et ses dents fermement serrées. Qu’on ne regarde rien avec les yeux, ni n’écoute un seul son avec les oreilles. Qu’on veille de tout son esprit sur ses sentiments intérieurs. Qu’on inspire profondément et qu’on expire progressivement, sans interruption, semblant tantôt respirer, tantôt ne plus respirer. Ainsi, toute excitation mentale disparaîtra naturellement, l’eau des reins remontera, la salive sera produite dans la bouche, et la véritable efficacité s’ancrera dans le corps. C’est ainsi qu’on acquiert le moyen de prolonger la vie.
Les véritables pouvoirs des cinq éléments s’unissent et forment la coupe de jade, semblable à un bateau (après l’avoir bue), et le corps semble empli d’une délicieuse harmonie. Celle-ci se répand sur la tête comme l’onguent du rite chrismal. En marchant, en se reposant, en s’asseyant, en dormant, l’homme sent son corps souple comme le vent et, dans son ventre, un bruit semblable à celui du tonnerre. Ses oreilles entendent les chants des Immortels, qui n’ont besoin d’aucun instrument ; vocaux sans paroles et résonnants sans tambour. L’esprit et le souffle s’unissent et la fleur de l’enfance renaît. L’homme contemple des scènes se dérouler en lui ; les esprits lui parlent d’eux-mêmes ; il voit les choses du vide et se retrouve en compagnie des Immortels. Il fabrique le Grand Élixir, et son esprit entre et sort à sa guise. Il possède la longévité du ciel et de la terre, et l’éclat du soleil et de la lune. Il a échappé aux affres de la vie et de la mort. [^532]
3. Ne relâchez pas vos efforts. À toute heure du jour, efforcez-vous d’être pur et sans tache. L’esprit est l’enfant du souffle ; le souffle est la mère de l’esprit.
Comme une poule étreint ses œufs, préservez-vous l’esprit et nourrissez-vous le souffle ? Pouvez-vous le faire sans interruption ? Merveilleux ! Merveilleux ! Le mystère devient encore plus profond !
Dans le corps, il y a sept organes précieux, qui servent à enrichir l’État, à procurer le repos aux gens et à faire déborder la force vitale du système. De là viennent le cœur, les reins, le souffle, le sang, le cerveau, le sperme et la moelle. Ce sont les sept organes précieux. Ils ne sont pas dispersés lorsque le corps retourne à la poussière. Raffinés par l’usage de la Grande Médecine, les innombrables esprits s’élèvent parmi les Immortels. [^533]
Annexe III. Yü Shû King, ou « Le Classique du Pivot de Jade ». | Page de titre | Annexe V. Analyses de Lin Hsî-kung sur plusieurs livres de Kwang-dze |
« La coupe de jade en forme de bateau » semble être une traduction satisfaisante des caractères chinois tâo kwei du Texte, qui pourraient être traduits par « couteau et symbole de jade ». Mais Tâo, qui signifie communément « couteau », est utilisé dans le Shih King (I, v ; VII, 2) pour « un petit bateau ». Dans le Thésaurus Khang-hsî, sous cette phrase, nous avons la citation suivante, comme si elle était tirée des Biographies des Immortels de Ko Hung : « Khän Hsî, originaire du territoire de Wû, étudiait le Tâo à Shû, lorsque le maître Lâo lui envoya une belle jeune femme avec un plateau d’or et une coupe de jade remplie de médecine, et le message : « Ceci est l’élixir mystérieux ; celui qui le boit ne mourra pas. » Et sur ce, lui et sa femme prirent chacun un tâo kwei. » Voir le récit dans l’ouvrage de Ko Hung, qui est beaucoup plus diffus.
Dans la mention du « rite chrismal », il y a une référence à ce que le Dr Williams appelle « une sorte de baptême bouddhiste ou d’onction sainte, par aspersion, qui confère la bonté », « administrée aux enfants, aux idoles, etc. » (Voir sous les caractères kwân et ting.)
On a présenté au lecteur un nombre suffisant des meilleurs traités du taoïsme tardif pour lui montrer combien ils diffèrent des écrits de Lâo et de Kwang, et combien ils leur sont inférieurs. On pourrait croire que Kwang-dze, en cessant d’écrire, avait brisé le bâton du taoïsme et l’avait enfoui à plusieurs brasses de profondeur. On ne peut guère s’étonner que des confucianistes, comme Kû Hsî, déclarent : « Ce à quoi la secte du taoïsme s’attache principalement, c’est à préserver le souffle de vie » ; et que des bouddhistes, comme Liû Mî, en disent : « Une longue vie étant acquise, son but est atteint. »