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Ce Yast est une description du sort réservé à l’âme du juste (§§ 1-18) et à l’âme du méchant (§§ 19-37) après la mort. Ils passent les trois premières nuits (les sadis ou sidôs ; cf. Commentaire du Vendîdâd, XIII, 55) au milieu des plus hautes jouissances ou douleurs ; ils sont alors accueillis par leur propre conscience sous la forme d’une belle jeune fille céleste (ou d’une vieille femme diabolique [^1330]), et sont conduits en quatre étapes vers le ciel ou vers l’enfer, à travers les trois paradis de la Bonne Pensée, de la Bonne Parole et de la Bonne Action, ou les trois enfers de la Mauvaise Pensée, de la Mauvaise Parole et de la Mauvaise Action : là, ils sont loués et glorifiés par Ahura, ou réprimandés et insultés par Angra Mainyu, et nourris d’ambroisie ou de poison.
Des développements similaires se retrouvent dans Yast XXIV, 53-65 ; Ardâ Vîrâf XVII ; Minokhired II, 123-194.
1. Zarathustra demanda à Ahura Mazda : « Ô Ahura Mazda, Esprit le plus bienfaisant, Créateur du monde matériel, toi le Saint !
« Lorsqu’un fidèle quitte cette vie, où son âme demeure-t-elle cette nuit-là ? »
Ahura Mazda a répondu :
2. « Il prend place près de la tête, chantant l’Ustavaiti Gâtha [^1331] et proclamant le bonheur : « Heureux est-il, heureux l’homme, quel qu’il soit, à qui Ahura Mazda donne le plein accomplissement de ses souhaits ! » Cette nuit-là, son âme goûte [^1332] autant de plaisir que le monde vivant tout entier peut en goûter. » [ p. 315 ] 3. — « La deuxième nuit, où demeure son âme ?
4. Ahura Mazda répondit : « Il prend place près de la tête, chantant l’Ustavaiti Gâtha et proclamant le bonheur : « Heureux celui-là, heureux l’homme, quel qu’il soit, à qui Ahura Mazda donne le plein accomplissement de ses souhaits ! » Cette nuit-là, son âme goûte autant de plaisir que le monde vivant tout entier peut en goûter. »
5. — « La troisième nuit, où demeure son âme ?
6. Ahura Mazda répondit : « Il prend place près de la tête, chantant l’Ustavaiti Gâtha et proclamant le bonheur : « Heureux celui-là, heureux l’homme, quel qu’il soit, à qui Ahura Mazda donne le plein accomplissement de ses souhaits ! » Cette nuit-là, son âme goûte autant de plaisir que le monde vivant tout entier peut en goûter. »
7. À la fin [^1333] de la troisième nuit, quand l’aube apparaît, il semble à l’âme du fidèle qu’elle soit apportée au milieu des plantes et des parfums : il semble qu’un vent souffle de la région du sud, des régions du sud, un vent parfumé, plus parfumé que tout autre vent du monde.
8. Et il semble à l’âme du fidèle qu’il respire ce vent avec ses narines, et il pense : « D’où souffle ce vent, le vent le plus parfumé que j’aie jamais respiré avec mes narines ?
9. Et il lui semble que sa propre conscience s’avance vers lui dans ce vent, sous la forme d’une jeune fille belle, brillante, aux bras blancs, forte, haute de taille, [ p. 316 ] de haute stature, à la poitrine épaisse, belle de corps, noble, d’une semence glorieuse [^1334], de la taille d’une jeune fille de quinze ans, aussi belle que les plus belles choses du monde.
10. Et l’âme du fidèle s’adressa à elle, lui demandant : « Quelle jeune fille es-tu, qui es la plus belle jeune fille que j’aie jamais vue ? »
11. Et elle, étant sa propre conscience, lui répond : « Ô toi, jeune homme aux bonnes pensées, aux bonnes paroles et aux bonnes actions, à la bonne religion, je suis ta propre conscience !
« Tout le monde t’aimait pour cette grandeur, cette bonté, cette justice, ce parfum agréable, cette force victorieuse et cette absence de chagrin dans lesquels tu m’apparais ;
12. « Et toi, ô jeune homme aux bonnes pensées, aux bonnes paroles et aux bonnes actions, à la bonne religion ! Tu m’as aimé pour cette grandeur, cette bonté, cette équité, ce parfum agréable, cette force victorieuse et cette absence de chagrin, dans lesquelles je t’apparais.
13. « Quand tu voyais un homme se moquer [^1335] et commettre des actes d’idolâtrie, ou rejeter [^1336] (les pauvres) et fermer sa porte [^1337], alors tu t’asseyais en chantant les Gâthas et en adorant les bonnes eaux et Âtar, le fils d’Ahura Mazda, et en réjouissant [^1338] les fidèles qui venaient de près ou de loin. [ p. 317 ] 14. « J’étais belle et tu m’as rendue encore plus belle ; j’étais belle et tu m’as rendue encore plus belle ; j’étais désirable et tu m’as rendue encore plus désirable ; j’étais assise à l’avant et tu m’as fait asseoir à la première place, par cette bonne pensée, par cette bonne parole, par cette bonne action de ta part ; et désormais les hommes m’adorent pour avoir longtemps sacrifié et conversé avec Ahura Mazda.
15. 'Le premier pas que fit l’âme de l’homme fidèle, le plaça dans le Paradis de la Bonne-Pensée [^1339] ;
« Le second pas que fit l’âme de l’homme fidèle, le plaça dans le Paradis du Bon-Verbe [^1340] ;
« Le troisième pas que fit l’âme de l’homme fidèle le plaça dans le Paradis de la Bonne Action [^1341] ;
« Le quatrième pas que fit l’âme de l’homme fidèle le plaça dans les Lumières Infinies [^1342]. »
16. Alors un des fidèles, parti avant lui, lui demanda : « Comment as-tu quitté cette vie, saint homme ? Comment es-tu venu, saint homme ? Des demeures pleines de bétail et de désirs et de jouissances de l’amour ? Du monde matériel au monde de l’esprit ? Du monde en décomposition au monde immuable ? Combien de temps a duré ta félicité ? »
17. Et Ahura Mazda répondit : « Ne lui demande pas ce que tu lui demandes, à lui qui vient de s’en aller par le chemin lugubre [ p. 318 ], plein de peur et de détresse, où le corps et l’âme se séparent.
18. ‘[Qu’il mange] de la nourriture qu’on lui apporte, de l’huile de Zaremaya [^1343] : c’est la nourriture du jeune homme aux bonnes pensées, aux bonnes paroles, aux bonnes actions, à la bonne religion, après avoir quitté cette vie ; c’est la nourriture de la femme sainte, riche en bonnes pensées, en bonnes paroles et en bonnes actions, bien disciplinée et obéissante à son mari, après avoir quitté cette vie.’
19. Zarathustra demanda à Ahura Mazda : « Ô Ahura Mazda, Esprit le plus bienfaisant, Créateur du monde matériel, toi le Saint !
« Quand l’un des méchants périt, où son âme demeure-t-elle cette nuit-là ? »
20. Ahura Mazda répondit : « Il se précipite et s’assoit près du crâne, chantant le Kima [^1344] Gâtha, ô saint Zarathustra !
« Vers quelle terre dois-je me tourner, ô Ahura Mazda ? À qui dois-je m’adresser en priant ? »
« Cette nuit-là, son âme goûte autant de souffrance que le monde vivant tout entier peut en goûter. »
21. — « La deuxième nuit, où demeure son âme ? »
22. Ahura Mazda répondit : « Il se précipite et s’assoit près du crâne, chantant le Kima Gâtha, ô saint [ p. 319 ] Zarathustra ! « Vers quelle terre dois-je me tourner, ô Ahura Mazda ? À qui dois-je aller en priant ? »
« Cette nuit-là, son âme goûte autant de souffrance que le monde vivant tout entier peut en goûter. »
23. — « La troisième nuit, où demeure son âme ? »
24. Ahura Mazda répondit : « Il se précipite et s’assoit près du crâne, chantant le Kima Gâtha, ô saint Zarathustra ! Vers quelle terre dois-je me tourner, ô Ahura Mazda ? À qui dois-je aller en priant ? »
« Cette nuit-là, son âme goûte autant de souffrance que le monde vivant tout entier peut en goûter. »
25. À la fin de la troisième nuit, ô saint Zarathustra ! quand l’aube apparaît, il semble à l’âme de l’infidèle qu’elle soit apportée au milieu de la neige et de la puanteur, et qu’un vent souffle de la région du nord, des régions du nord, un vent nauséabond, le plus nauséabond de tous les vents du monde.
26-32. Et il semble à l’âme du méchant qu’il respire ce vent avec ses narines, et il pense : « D’où souffle ce vent, le vent le plus nauséabond que j’aie jamais respiré avec mes narines [^1345] ? » [ p. 320 ] 33. Le premier pas que fit l’âme du méchant le plaça dans l’Enfer des Mauvaises Pensées ;
Le deuxième pas que fit l’âme du méchant le déposa dans l’Enfer du Mauvais Mot ;
Le troisième pas que fit l’âme du méchant le conduisit dans l’Enfer des Mauvaises Actions ;
Le quatrième pas que fit l’âme du méchant le plongea dans les ténèbres sans fin.
34. Alors l’un des méchants qui s’était éloigné avant lui s’adressa à lui et dit : « Comment as-tu péri, ô méchant ? Comment es-tu passé, ô démon ! des demeures pleines de bétail et pleines de désirs et de jouissances de l’amour ? Du monde matériel au monde de l’Esprit ? Du monde en décomposition à celui qui ne se décompose pas ? Combien de temps a duré ta souffrance ? »
35. Angra Mainyu, le menteur, dit : « Ne lui demande pas ce que tu lui demandes, à lui qui vient de s’en aller sur le chemin lugubre, plein de peur et de détresse, où le corps et l’âme se séparent.
36. « Qu’il mange de la nourriture qu’on lui apporte, du poison et de la puanteur empoisonnée [^1346] : c’est la nourriture, après qu’il a péri, pour la jeunesse des mauvaises pensées, des mauvaises paroles, des mauvaises actions, de la mauvaise religion après qu’il a péri ; c’est la nourriture de la femme diabolique, riche en mauvaises pensées, en mauvaises paroles et en mauvaises actions, en mauvaise religion, sans principes et désobéissante à son mari.
37 [^1347]. « Nous adorons les Fravashi du saint homme, dont le nom est Asmô-hvanvant [^1348] ; alors j’adorerai les Fravashis des autres saints qui étaient forts de foi [^1349].
38 [^1347]. « Nous adorons la mémoire d’Ahura Mazda, pour garder la Sainte Parole.
« Nous adorons la compréhension d’Ahura Mazda, pour étudier la Sainte Parole.
« Nous adorons la langue d’Ahura Mazda, pour prononcer la Sainte Parole.
« Nous adorons la montagne qui donne l’intelligence, qui préserve l’intelligence ; [nous l’adorons [ p. 322 ]] jour et nuit, avec des offrandes de libations bien acceptées [^1350].
39 [^1351]. « Ô Créateur ! comment les âmes des morts, les Fravashis des saints, se manifestent-elles [^1352] elles-mêmes [^1353] ? »
40. Ahura Mazda répondit : « Ils se manifestent par la bonté de l’esprit et l’excellence de l’esprit [^1354]. »
41 [^1355]. Puis, vers l’aube [^1356], cet oiseau Parôdars [^1357], cet oiseau Karetô-dãsu [^1358] entend la voix du Feu. [ p. 323 ] 42. Ici, le diabolique Bûshyãsta, le long bras, se précipite de la région du nord, des régions du nord, parlant ainsi, mentant ainsi : « Dormez, ô hommes ! Dormez, ô pécheurs ! Dormez et vivez dans le péché. »
[^1400] : 315:1 Thraosta : en Pahlavi rôisman.
[^1404] : 316:4 Aux pauvres :—Urvarô-straya : urvar babâik kart (Pahl. Comm.) : âighshân babâ barâ asrûnast (étoile, attacher, comme dans frastaretem baresma). Cf. Yt. XXIV, 37, 59.
Elle lui parla ainsi : « Je suis tes mauvaises actions, ô jeune homme aux mauvaises pensées, aux mauvaises paroles, aux mauvaises actions, à la mauvaise religion ! C’est à cause de ta volonté et de tes actions que je suis hideuse et vile, inique et malade, pourrie et nauséabonde, malheureuse et affligée, comme il te semble (cf. §§ 11-12).
« Quand tu voyais quelqu’un accomplir les cérémonies du Yazishn et du Drôn, la louange, la prière et le service de Dieu, et préserver et protéger l’eau et le feu, le bétail, les arbres et autres bonnes créatures, tu pratiquais la volonté d’Akharman et des démons, et commettais des actes impurs. Et quand tu voyais quelqu’un qui offrait un accueil hospitalier et donnait quelque chose de mérité en dons et en charité, pour le bien des bons et des méritants, venus de loin comme de près, tu étais avare et tu fermais ta porte » (cf. § 13).
« Et bien que j’aie été impur (c’est-à-dire considéré comme mauvais), je suis rendu plus impur par toi ; et bien que j’aie été effrayant, je suis rendu plus effrayant par toi ; bien que j’aie été tremblant, je suis rendu plus tremblant par toi ; bien que je sois installé dans la région septentrionale des démons, je suis installé plus au nord par toi ; par ces mauvaises pensées, par ces mauvaises paroles et par ces mauvaises actions que tu as pratiquées. Ils me maudissent, longtemps, dans la longue exécration et la mauvaise communion de l’Esprit du Mal (cf. § 14). »
« Ensuite, cette âme du méchant fit le premier pas sur Dûsh-hûmat (le lieu des mauvaises pensées), etc. » (Le Livre d’Ardâ Vîrâf, XVII, 12-27, tel que traduit par Haug).
Et si ce passant lui apporte du bois saintement apporté, ou des fagots de baresma saintement liés…, alors Âtar… le bénira ainsi :
Que des troupeaux de bœufs grandissent pour toi… (Âtash N. 15-16).
Dans la première partie de la nuit, Feu, le fils d’Ahura Mazda, appelle le maître de maison à l’aide en disant :
« Lève-toi ! lève-toi, maître de la maison… » (Vend. XVIII, 18-19).
« Puis vers l’aube de l’aube… » (voir le texte).
[^1424] : 322:7 Cf. Vend. XVIII, 23.