[418] « Habileté exceptionnelle. » — Cette histoire fut racontée par le Maître à Jetavana, à propos d’un Frère qui lança et frappa un cygne. On nous dit que ce Frère, issu d’une bonne famille de Sāvatthi, avait acquis une grande habileté à frapper des objets avec des pierres ; et qu’un jour, entendant la Vérité prêchée, il s’y consacra corps et âme et, renonçant au monde, fut admis à la pleine Fraternité. Mais ni dans l’étude ni dans la pratique, il n’excella en tant que Frère. Un jour, avec un jeune Frère, il se rendit à la rivière Aciravatī [^168], et se tenait sur le banc après s’être baigné, lorsqu’il vit deux cygnes blancs voler. Il dit au plus jeune Frère : « Je vais frapper le cygne arrière dans l’œil et le faire tomber. » « Fais-le tomber ! » dit l’autre ; « Tu ne peux pas le toucher. » « Attends un instant. Je vais le frapper dans l’œil de ce côté, à travers l’œil de l’autre. » « Oh, absurdité. » « Très bien ; attends de voir. » Puis il prit une pierre triangulaire et la lança à la poursuite du cygne. « Whiz ! » La pierre fendit les airs et le cygne, soupçonnant un danger, s’arrêta pour écouter. Aussitôt, le Frère saisit une pierre ronde et lisse et, tandis que le cygne, au repos, regardait ailleurs, la frappa en plein œil, de sorte que la pierre entra par un œil et ressortit par l’autre. Avec un grand cri, le cygne tomba à leurs pieds. « C’est une action tout à fait déplacée », dit l’autre Frère, et il l’amena devant le Maître, lui racontant ce qui s’était passé. Après avoir réprimandé le Frère, le Maître dit : « Il avait le même talent, mes frères, autrefois qu’aujourd’hui. » Et il raconta cette histoire du passé.
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Il était une fois, alors que Brahmadatta régnait à Bénarès, le Bodhisatta était l’un des courtisans du roi. Le chapelain royal de l’époque était si bavard et prolixe que, lorsqu’il commençait, personne ne pouvait placer un mot. Le roi chercha donc quelqu’un pour interrompre le chapelain et chercha de tous côtés une personne de ce genre. Or, à cette époque, il y avait à Bénarès un infirme qui était un excellent tireur d’élite. Les garçons le mettaient sur une petite charrette et le tiraient jusqu’aux portes de Bénarès, où se trouve un grand banian ramifié et couvert de feuilles. Là, ils se rassemblaient et lui donnaient un demi-pence en disant : « Fais un éléphant » ou « Fais un cheval ». Et l’infirme lançait pierre sur pierre jusqu’à ce qu’il ait taillé le feuillage aux formes demandées. Et le sol était couvert de feuilles mortes.
En chemin vers sa demeure, le roi revint à lui et tous les garçons s’enfuirent, effrayés par lui, abandonnant l’infirme impuissant. À la vue du tas de feuilles, le roi demanda, en passant dans son char, qui avait coupé les feuilles. On lui répondit que c’était l’infirme qui avait fait cela. Pensant qu’il y avait peut-être un moyen de faire taire le chapelain, le roi demanda où était l’infirme et on le lui montra assis au pied de l’arbre. Le roi le fit alors approcher et, faisant signe à sa suite de se tenir à l’écart, dit à l’infirme : « J’ai un chapelain très bavard. Crois-tu pouvoir le faire taire ? »
« Oui, sire, si j’avais une sarbacane pleine de crottes de chèvre sèches », dit l’infirme. Le roi le fit alors conduire au palais et l’installa avec une sarbacane pleine de crottes de chèvre sèches derrière un rideau fendu, face au siège du chapelain. Lorsque le brahmane vint servir le roi et fut assis sur le siège préparé pour lui, Sa Majesté engagea la conversation. Le chapelain monopolisa aussitôt la conversation, et personne d’autre ne put placer un mot. L’infirme lança alors les boulettes de crottes de chèvre une à une, comme des mouches, à travers la fente du rideau, jusque dans le gosier du chapelain. Et le brahmane les avala au fur et à mesure, comme de l’huile, jusqu’à ce qu’elles aient toutes disparu. Lorsque la sarbacane pleine de boulettes fut logée dans l’estomac du chapelain, elles gonflèrent jusqu’à atteindre la taille d’un demi-becquet ; et le roi, sachant qu’ils étaient tous partis, s’adressa au brahmane en ces termes : « Révérend, vous êtes si bavard que vous avez avalé une sarbacane de crottes de chèvre sans même vous en rendre compte. C’est à peu près tout ce que vous pourrez avaler en une seule fois. Maintenant, rentrez chez vous et prenez une dose de graines de panic et de l’eau en guise d’émétique, et reprenez vos esprits. »
À partir de ce jour, [420] l’aumônier garda la bouche fermée et resta assis, silencieux pendant la conversation, comme si ses lèvres étaient scellées.
« Eh bien, mes oreilles sont redevables à l’infirme pour ce soulagement », dit le roi, et il lui accorda quatre villages, un au nord, un au sud, un à l’ouest et un à l’est, produisant cent mille par an.
Le Bodhisatta s’approcha du Roi et dit : « En ce monde, Seigneur, [ p. 251 ] l’habileté doit être cultivée par le sage. La simple habileté à viser a apporté à cet infirme toute cette prospérité. » Ce disant, il prononça cette strophe :
Prix de compétence, et remarquez que le tireur est boiteux ;
\—Quatre villages récompensent son objectif.
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Sa leçon terminée, le Maître identifia la Naissance en disant : « Ce frère était l’infirme de cette époque, Ananda le roi, et moi le sage courtisan. »