« Il verrouille le dé. » — Cette histoire a été racontée par le Maître alors qu’il était à Jetavana, à propos de l’utilisation inconsidérée des choses.
La tradition dit que la plupart des Frères de cette époque avaient l’habitude d’utiliser les robes et autres vêtements qui leur étaient donnés de manière irréfléchie. Or, leur utilisation irréfléchie des Quatre Conditions Requises les empêchait généralement d’échapper à la fatalité de la renaissance en enfer et dans le monde animal. Sachant cela, le Maître exposa les leçons de vertu et montra le danger d’une telle utilisation irréfléchie, les exhortant à la prudence dans l’utilisation des Quatre Conditions Requises et énonçant cette règle : « Le Frère réfléchi a un objectif précis en vue lorsqu’il porte une robe : se protéger du froid. » Après avoir établi des règles similaires pour les autres Conditions Requises, il conclut en disant : « Tel est l’usage réfléchi qu’il convient de faire des Quatre Conditions Requises. Les utiliser irréfléchiment, c’est comme absorber un poison mortel ; et il y eut autrefois des gens qui, par inadvertance, absorbèrent du poison, au moment opportun, au détriment de leurs biens. » Ce disant, il raconta cette histoire du passé.
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Un jour, alors que Brahmadatta régnait à Bénarès, le Bodhisatta naquit dans une famille aisée et, en grandissant, devint joueur de dés. Il avait pour compagnon un escroc qui jouait sans relâche tant qu’il gagnait, mais, lorsque la chance tournait, il interrompait la partie en mettant un dé dans sa bouche et en prétendant qu’il était perdu, après quoi il s’éloignait. [380] « Très bien », dit le Bodhisatta [ p. 222 ] lorsqu’il comprit ce qui se passait ; « nous allons voir ça. » Il prit donc des dés, les oignit de poison chez lui, les sécha soigneusement, puis les apporta au escroc, qu’il défia à une partie. L’autre accepta, le plateau de dés fut préparé et la partie commença. À peine le rusé commença-t-il à perdre qu’il mit un dé dans sa bouche. L’observant en train de perdre, le Bodhisatta dit : « Avale-le ; tu découvriras bientôt ce que c’est. » Et il prononça cette strophe de reproche :
Il lance le dé avec audace, ne sachant pas
Quel poison brûlant se cache là-dessus, invisible.
— Oui, fonce, plus fort ! Bientôt, tu brûleras de l’intérieur.
[paragraphe continue] Mais tandis que le Bodhisatta parlait, le poison commença à agir sur le malfaiteur ; il s’évanouit, leva les yeux au ciel et, plié en deux par la douleur, tomba à terre. « Maintenant », dit le Bodhisatta, « je dois sauver la vie de ce vaurien. » Il prépara donc quelques simples et lui administra un émétique jusqu’à ce qu’il vomisse. Puis il lui fit administrer une gorgée de ghee avec du miel, du sucre et d’autres ingrédients, et ainsi il guérit l’individu. Puis il l’exhorta à ne plus recommencer. Après une vie consacrée à la charité et à d’autres bonnes œuvres, le Bodhisatta s’éteignit et vécut selon ses mérites.
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Sa leçon terminée, le Maître dit : « Frères, utiliser les choses sans réfléchir, c’est comme absorber un poison mortel sans réfléchir. » Ce disant, il identifia la Naissance en ces mots : « J’étais moi-même le joueur sage et bon de cette époque. »
(Note en pali. « Aucune mention n’est faite du plus rusé, la raison étant que, ici comme ailleurs, aucune mention n’est faite de personnes dont on ne parle pas à cette date. »)