« Corbeaux et corneilles », etc. — Le Maître raconta cette histoire dans Jetavana concernant un certain Frère. L’histoire raconte qu’il reçut du Maître les formes de méditation, puis se rendit dans un village frontalier. Là, les gens, satisfaits de son comportement, le nourrirent, lui construisirent une hutte dans les bois et, exigeant une promesse, l’y établirent et lui rendirent de grands honneurs. Mais ils l’abandonnèrent pour les maîtres de la permanence de la matière, abandonnant ensuite ceux-ci pour la secte qui nie l’immortalité, et ceux-là pour la secte des ascètes nus : car des maîtres de toutes ces sectes vinrent tour à tour parmi eux. Il fut donc malheureux [ p. 160 ] parmi ces gens qui ignoraient le bien et le mal, et après les pluies et le pavāraṇa [^98], il retourna auprès du Maître et, à sa demande, lui raconta où il avait séjourné pendant les pluies et qu’il avait été malheureux parmi des gens qui ignoraient le bien et le mal. Le Maître dit : « Les sages d’autrefois, même lorsqu’ils étaient nés sous forme de bêtes, ne sont pas restés un seul jour parmi ceux qui ignoraient le bien et le mal, pourquoi avez-vous agi ainsi ? » et il raconta donc l’histoire.
Il était une fois, alors que Brahmadatta était roi à Bénarès, le Bodhisatta naquit sous la forme d’une oie d’or. Avec son jeune frère [247], il vivait sur la colline de Cittakūṭa et se nourrissait de riz sauvage dans l’Himalaya. Un jour, alors qu’ils retournaient à Cittakūṭa, ils aperçurent la montagne dorée Neru et s’installèrent à son sommet. Autour de la montagne vivent des oiseaux et des bêtes de toutes sortes qui leur servent de nourriture : dès leur arrivée à la montagne, leur éclat les fit revêtir une teinte dorée. Le frère du Bodhisatta vit cela, mais, ignorant la cause, demanda : « Quelle est donc la cause ici ? » S’adressant à son frère, il prononça deux strophes :
Corbeaux et corneilles, et nous les meilleurs oiseaux,
Sur cette montagne, tout semble pareil.
Les chacals méchants rivalisent avec les tigres et leurs seigneurs,
Les lions : quel peut être le nom de la montagne ?
Le Bodhisatta entendant cela prononça la troisième strophe :
La plus noble des montagnes, Neru est sa hauteur,
Tous les animaux sont ici présentés de manière à être bien visibles.
Le plus jeune, entendant cela, prononça les trois strophes restantes :
Là où les bons trouvent peu ou pas d’honneur,
Ou moins que d’autres, ne vivez pas, mais partez.
Obtus et intelligents, courageux et lâches, tous sont honorés de la même manière :
Montagne sans discernement, les hommes de bien ne resteront pas sur toi !
[248] Le meilleur, l’indifférent et le plus méchant Neru ne se sépare pas,
Neru sans discernement, nous devons hélas te laisser tranquille.
Ils s’envolèrent alors tous deux et se rendirent à Cittakūṭa.
Après la leçon, le Maître proclama les Vérités et identifia la Naissance : à la fin des Vérités, ce Frère fut établi dans la réalisation du Premier Chemin : « À cette époque, la plus jeune oie était Ānanda, l’aînée était moi-même. »