[ p. 273 ]
ABRAHAM ET LA VILLE D’UR.
Les paragraphes que l’auteur des « Trésors des Cavernes » consacre à l’histoire de Térah et d’Abraham jettent un nouvel éclairage sur la vie de ces patriarches et sur leurs conditions de vie dans la ville d’Ur. Ils contiennent de nombreux détails intéressants absents du livre de la Genèse, ainsi que des informations inédites concernant la destruction de la ville d’Ur par le « Déluge ». Il est clair que Térah et Abraham étaient de grands shekhs, puissants et riches, et leurs importants troupeaux de moutons, de chèvres et de chameaux suggèrent qu’ils étaient propriétaires et éleveurs de bétail à grande échelle, et maîtres de caravanes. Les trois cent dix-huit hommes entraînés, nés dans sa maison (Gen. xiv. 14), qu’Abraham arma et envoya au secours de Lot, son neveu, étaient probablement les gardes armés qui marchaient avec ses troupeaux et ses caravanes et les protégeaient. Jusqu’à présent, aucune personne [ p. 274 ] mentionnée dans les inscriptions cunéiformes ne peut être identifiée à Térah ou à Abraham, mais tous les faits mis au jour par les récentes fouilles d’Ur montrent qu’à l’époque d’Abraham, les habitants de la ville s’adonnaient entièrement à l’idolâtrie, leur principal objet de culte étant Nannar, le dieu-Lune. Non seulement Abraham brisa les idoles de son père, mais, sous la direction divine, il se libéra de la coutume d’offrir son premier-né aux démons. De plus, lorsqu’il vit sa ville attaquée par des armées ennemies venues du nord et des basses terres du sud, il ne lui resta plus qu’à émigrer vers le pays que Dieu lui avait promis. L’ensemble des preuves montre clairement qu’Abraham était un grand chef, fort et indépendant en Babylonie, et que son pouvoir s’accrut lorsqu’il s’établit à Harrân. Le sauvetage de Lot montre que ses serviteurs armés formaient une force militaire efficace, et l’étendue de sa puissance et de son influence est attestée par le fait qu’il a contraint Éphron le Hittite à lui vendre la grotte de Macpéla. Le pharaon, roi d’Égypte, qui s’est emparé de Sarah, n’aurait guère écouté les objections d’Abraham s’il n’avait pas su qu’Abraham avait des partisans suffisamment forts pour rendre nécessaire la restitution de Sarah.
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LES FOUILLES D’UR DES CHALDÉES.
Les fouilles menées par M. CL Woolley pour le British Museum et l’Université de Pennsylvanie au cours des cinq dernières années témoignent abondamment de la grandeur et de l’importance politique et commerciale d’Ur en Chaldée. Dans mon petit ouvrage, Babylonian Life and History, Londres, 1925, j’ai brièvement résumé les travaux réalisés jusqu’à la mise sous presse, et il est nécessaire de décrire l’avancement des travaux durant les hivers 1924-1925 et 1925-1926. Ces informations sont tirées des rapports officiels de M. Woolley, publiés dans l’Antiquaries’ Journal, vol. V, n° 4, et vol. VI, n° 4. Comme indiqué précédemment, la ziggourat qui se dresse à l’angle ouest de l’enceinte du Temenos a été dégagée durant l’hiver 1923-1924, et en 1924-1925, les travaux ont débuté sur le Temenos, ou zone sacrée elle-même. Une bonne vue d’ensemble du site déjà fouillé est donnée sur la Planche III. Déjà en 1925, M. Woolley pouvait rapporter ce qui suit : « En résumant nos résultats dans cette partie du terrain, nous pouvons dire que nous disposons désormais d’un plan complet de la ziggourat et de ses environs à l’époque néo-babylonienne après les reconstructions complètes de Nabuchodonosor II et de Nabonide, du plan complet de la période kassite pour trois côtés de la ziggourat, d’une bonne partie du plan des bâtiments de la période de Larsa (2000 av. J.-C.), et de celui de l’ouvrage d’Ur-Engur (c’est-à-dire d’Ur-Nammu) sur un côté de la tour, ainsi que d’une idée générale de ses lignes sur deux des autres côtés. » La ziggourat d’Ur-Nammu fut construite sur une terrasse qui, de ce côté, mesurait 34 mètres de large. Des cônes d’argile cuite, portant la dédicace d’Ur-Nammu à l’édifice E-temen-ni-il, avaient été insérés dans les joints verticaux de la maçonnerie. Pour la première fois, ces cônes furent retrouvés à leur emplacement d’origine. Un spécimen de ces cônes est présenté sur la [Planche IV] (Planches n° 04). Ur-Nammu construisit E-Nannar, ou Temple du Dieu-Lune, sur la terrasse d’E-temen-ni-il. Durant la période de Larsa, les bâtiments d’Ur-Nammu furent reconstruits, et parmi les rois qui menèrent ces travaux, on compte Sinidinnam (2086-2080 av. J.-C.) et Warad Sin (2072-2060 av. J.-C.). Des cônes et d’autres monuments montrent qu’En-an-na-tum, grand prêtre de Nannar, et fils du roi Ishme-Dagan, et Sumu-ilum, qui a construit un temple à Innina, et Silli-Adad, et Kudur Mabug avaient tous travaillé ici.
Le principal bâtisseur d’Ur durant la période kassite fut Kuri-Galzu, mais son travail n’était pas des plus remarquables, et comme ses successeurs n’entreprirent aucune réparation sur ses bâtiments, ceux-ci tombèrent en ruine. La porte voûtée qu’il construisit dans le sanctuaire d’E-Dublal-maḫ est représentée sur la Planche IV. Pendant sept cents ans, rien d’important ne fut réalisé concernant les temples d’Ur. Nabuchodonosor II et son petit-fils reconstruisirent pratiquement les bâtiments publics d’Ur. Ils trouvèrent les anciens sanctuaires si irrémédiablement détruits ou si complètement ensevelis qu’ils purent, sur un site traditionnel, employer un nouveau plan ou remodeler radicalement l’ancien, et même déplacer l’emplacement d’un sanctuaire dont seul le nom a peut-être survécu. Sous la domination des Perses, la ville sombra progressivement dans la ruine et le déclin.
Au sud-est de la ziggourat se dressait le temple de Nin-gal, construit par Sinbalatsu-ikbi (voir la base de la porte de ce roi sur la Planche VIII), gouverneur assyrien d’Ur (650 av. J.-C.), et restauré par Nabonide. Les fouilles de M. Woolley ont montré qu’il fut construit sur le site du premier temple de Nin-gal, datant du règne de Kuri-Galzu, au XIVe siècle av. J.-C.
Au sud-est du temple E-Nun-Mah se trouvent le temple E-Dublal-Mah, œuvre de Kuri-Galzu (Planche V), et le E-Gig-Par, construit par Nabonide (Planche VI). Ce dernier bâtiment mesure 95 mètres de long et 50 mètres de large, et est orienté nord-ouest et sud-est. Il ne fait aucun doute qu’il s’agissait du couvent où Bêl-Shalti-Nannar, fille de Nabonide et sœur de Belshazzar, régnait en tant que Dame supérieure des femmes sacrées d’Ur. Français Dans les salles de ce couvent ont été découverts un très grand nombre d’objets petits mais importants, par exemple des socles de portail, des bas-reliefs sculptés, des tablettes d’exercices scolaires, des tablettes d’enseignement, des tablettes marquées de carrés alignés utilisées pour les jeux, etc. Une salle a également été utilisée comme musée, car elle contenait des objets inscrits avec des étiquettes attachées à des fins pédagogiques ! Les vestiges découverts à E-Dublal-Mah comprenaient des portions d’une statue datant de 2800 av. J.-C. ; une plaque de calcaire avec des bas-reliefs représentant le culte de Nannar (Planche XIII, n° 1) ; des portions de la grande stèle d’Ur-Nammu (Planche XI, n° 2) ; des béliers d’albâtre formant les côtés d’un trône (Planche XIII, n° 2) ; etc.
Durant l’hiver 1925-1926, M. Woolley et ses hommes ont fouillé le grand site de Gig-Par-ku à Ur. Les plus anciens bâtiments dont on a retrouvé des ruines remontent à la période de la première dynastie d’Ur (environ 4000-3500 av. J.-C.). En creusant pour retracer les fondations de la troisième dynastie, ils ont découvert une courte section d’un mur construit en briques plano-convexes cuites au four, posées sur une fondation en blocs de calcaire bruts, un mur en tous points identique à celui du temple construit par le roi [ p. 279 ] A-an-nî-pad-da à Al-`Ubêd. Parmi les bâtiments de la troisième dynastie d’Ur (2300 av. J.-C.) figurait le temple d’Ur-Nammu, mais il manque des vestiges de ses murs. Treize socles de porte ont été découverts, portant l’inscription suivante : « Ur-Nammu, l’homme puissant, roi d’Ur, roi de Sumer et d’Akkad, a construit le splendide Gig-Par pour sa dame Nin-Gal » (Planche VII, n° 2 et 3). Sur les ruines du temple d’Ur-Nammu, son petit-fils Bur-Sin construisit un temple qu’il dédia à la déesse Nin-Gal. Un socle de porte gravé de Bur-Sin est visible sur la Planche VIII. Ce temple fut probablement détruit vers 2000 av. J.-C. par les Élamites, qui s’emparèrent de la ville et mirent fin au règne de la troisième dynastie d’Ur.
Le temple suivant qui occupait le site fut construit par En-an-na-tum, fils d’Ishme-Dagan, roi d’Isin. Le bâtiment, de forme rectangulaire, mesurait 79 mètres sur 76,5 mètres, et ses angles étaient orientés selon les points cardinaux. Il était entouré d’un mur massif et comportait deux entrées ; à l’angle est se trouvait une tour-porte. Le bâtiment était divisé en trois parties par le couloir transversal et par un mur parallèle ; il contenait deux temples, plusieurs petits sanctuaires et un nombre considérable de petites pièces où vivaient les prêtres et les prêtresses. Certaines de ces pièces servaient de cuisines et de garde-manger, et d’autres de chambres funéraires où étaient enterrés les corps des prêtres décédés. Une vue de la grande cuisine de Gig Par Ku est donnée sur la Planche IX. Français Le bâtiment fournit un plan complet d’un sanctuaire sumérien ancien, qui avait jusqu’à présent fait défaut. Le temple a prospéré à un degré plus ou moins élevé tout au long du règne d’Hammourabi, et jusqu’à la onzième année du règne de son fils Samsu-iluna ; sa destruction a probablement eu lieu pendant, ou à la suite de, la révolte qui a eu lieu l’année suivante. Parmi les objets importants découverts dans les ruines, on peut citer : 1. Une statuette en diorite de la déesse Eau, la grande « Mère du Monde » (Planche X), réalisée vers 2400 av. J.-C. 2. Une statuette en diorite de la déesse Nin-Gal (vers 2080 av. J.-C.) 3. Une plaque de calcaire sur laquelle sont sculptées des scènes de culte (vers 3000 av. J.-C.) (Planche XI, n° 1). 4. Un modèle en albâtre du disque lunaire dédié à Nannar par la fille de Sargon d’Agade (vers 2630 av. J.-C.). 5. Un bol en granit de Naram-Sin d’Agade (2550 av. J.-C.), qui environ 300 ans plus tard (vers 2250 av. J.-C.) fut offert au temple d’Ur par la fille du roi Dungi (ou Shulgi).
Français Les fouilles du « Site du Palais » ont fourni de nombreuses informations utiles, et l’exploration plus poussée du soi-disant Tumulus a [ p. 281 ] mis à nu les fondations de nombreuses maisons et livré de nombreuses antiquités, tablettes, figurines en terre cuite, sceaux cylindriques, poteries, etc., de petite taille mais intéressantes. Parmi les tablettes, plusieurs dataient de la période de Rim-Sin (1980 av. J.-C.) ; elles étaient gravées d’hymnes et de textes religieux écrits en l’honneur du dieu de la Lune Nannar.
M. CL Woolley reprit le travail à Ur le 28 octobre 1926 et poursuivit les fouilles jusqu’en février 1927, date à laquelle le manque de fonds interrompit ses opérations. Les résultats de ses travaux durant l’hiver dernier sont d’une importance capitale et, grâce à la courtoisie de Sir Frederic Kenyon, directeur du British Museum, et du regretté Dr Byron Gordon, directeur du musée de l’Université de Pennsylvanie à Philadelphie, je suis en mesure de les décrire brièvement dans les pages qui suivent.
Le premier site choisi pour les travaux durant l’hiver dernier était un tertre élevé à l’extérieur du mur construit par Nabuchodonosor II autour de la Zone Sacrée. Après avoir dégagé un espace de 60 mètres sur 45 mètres, plusieurs pâtés de maisons, séparés par des rues étroites, furent découverts. Jusqu’alors, l’expédition n’avait fouillé que des temples et des fortifications qui, après tout, ne nous disent rien, voire rien, de la vie quotidienne des voisins d’Abraham. Mais M. Woolley estima que le moment était venu pour lui d’explorer les ruines des [ p. 282 ] maisons des marchands et des habitants les plus pauvres d’« Ur en Chaldée », et les résultats obtenus dépassèrent largement ses espérances. Lorsqu’une maison s’effondrait en Babylonie, les ruines étaient nivelées et une autre maison était construite dessus. Sur certains tertres, plusieurs couches de maisons, chacune appartenant à une époque différente, ont été identifiées. Sur le site choisi par M. Woolley, les pluies, les vents et les tempêtes de quatre mille ans avaient détruit toutes les couches de maisons les plus modernes, et il put se mettre immédiatement au travail sur un bel ensemble de maisons qui furent construites vers 2100 av. J.-C. Les murs principaux, construits en briques cuites, étaient en bon état de conservation ; les murs intérieurs étaient en briques crues, posées sur des fondations en briques cuites, qui s’élevaient de soixante à trois mètres au-dessus du sol pavé de briques. Ainsi, les fondations formaient une « couche humide », et l’état des murs montrait que les habitants des maisons n’étaient pas gênés par l’humidité. Le visiteur, en franchissant la porte, pénétrait dans une petite antichambre qui donnait sur la cour ; celle-ci était partiellement recouverte. La salle de réception se trouvait d’un côté, et la cuisine, le garde-manger, etc., de l’autre. Les chambres de la famille se trouvaient à l’étage supérieur, auxquelles on accédait par une galerie en bois faisant le tour de la cour. [ p. 284 ] Près de la porte d’entrée se trouvait l’escalier, dont les marches sont en briques pleines. Les murs de ces maisons mesurent encore environ 6 mètres de haut, et leur plan ainsi que la disposition générale des pièces du rez-de-chaussée et de l’étage se retrouvent encore aujourd’hui dans les maisons des marchands et des gens aisés de Bagdad et de Hillah. Il ne fait aucun doute que c’est dans ce genre de maisons que vécurent Serug, Terah, Nahor et Abraham. Les maisons et leurs cours étaient alignées côte à côte, comme aujourd’hui ; les rues étaient alors, comme aujourd’hui, étroites. Une excellente représentation d’une rue est donnée sur la Planche XII. {Voir page 283 pour un dessin de l’intérieur d’une maison privée.}
À la mort du maître de maison, on l’enterra généralement sous celle-ci, avec son sceau cylindrique en pierre gravée, ses pots et ses tablettes d’argile gravées. Comme on pouvait s’y attendre, aucun meuble, quelle que soit sa forme ou sa nature, ne fut retrouvé dans les maisons, et même les sépultures situées sous celles-ci avaient été pillées. Malgré cela, M. Woolley réussit à recueillir sur le site un nombre considérable de tablettes d’argile gravées de tables de racines carrées et cubiques, d’hymnes et de récits des bâtiments érigés par divers rois d’Ur. Parmi les divers objets découverts, on peut citer une bouteille en verre bleu et noir, probablement originaire de Syrie ; cet objet intéressant a probablement été fabriqué vers 1500 av. J.-C.
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Français Les travaux qui ont été effectués après la fin des fouilles des maisons ont jeté beaucoup de lumière sur l’histoire d’Ur dans la première moitié du troisième millénaire avant J.-C. Il n’y a maintenant aucun doute qu’une tour de temple ou ziggourat existait à Ur dès 2800 avant J.-C., car des portions de ses murs en briques de boue plano-convexes ont été trouvées enterrées sous la ziggourat construite par Ur-Nammu 2600 avant J.-C. Sous le temple d’E-nin-makh, un objet très intéressant a été découvert sous la forme du couvercle d’une boîte de toilette en ivoire portant une inscription phénicienne (voir Planche XIV, n° 1), et avec lui se trouvaient plusieurs articles de toilette en ivoire et un peigne magnifiquement gravé. Les vestiges des bâtiments royaux, qui ont été érigés vers 2000 avant J.-C., prouvent que les Sumériens, même à cette époque reculée, étaient capables de construire des salles avec des arches et des toits voûtés. Il est clair que nombre des affirmations formulées par les autorités architecturales il y a deux ou trois générations devront être profondément modifiées à la lumière des découvertes faites à Ur. Dans un grand centre commercial comme Ur, la précision des poids était primordiale, et le magnifique poids-canard en diorite, portant l’inscription du roi Shulgi, montre que des poids étalons étaient déjà utilisés en Babylonie vers 2500 av. J.-C. (voir Planche VII, n° 1). Cet étalon était encore en usage à Babylone deux mille ans plus tard, comme en témoigne une inscription sur un poids de Nabuchodonosor II.
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Français La partie suivante du site sélectionnée pour des fouilles minutieuses était la zone à l’extrémité sud-est, à l’intérieur du mur construit par Nabuchodonosor II, où il n’y avait pas de bâtiments. Une tranchée creusée à travers elle a mis au jour un cimetière ancien, contenant des tombes qui ont été creusées peu après 3000 avant J.-C. Ces tombes ont livré une grande quantité de poterie ; des vases en diorite, pierre dure, albâtre et stéatite, dont beaucoup sont de belle forme et de beau design ; des bols en cuivre, des vases, des pots, des têtes de hache, des herminettes, des lances, des rasoirs, des couteaux et des poignards ; des perles d’or, d’argent et de cornaline ; des épingles en lapis-lazuli avec des têtes d’or ou d’argent ; des sceaux-cylindres magnifiquement gravés ; des sceaux-cylindres en cristal de roche avec des capuchons en cuivre et des noyaux en pâte blanche ou colorée ; Français diadèmes en or, chaînes, bagues, boucles d’oreilles, perles, amulettes, etc. Tout cela montre que les métiers du métallurgiste et du joaillier avaient atteint un très haut degré de perfection lorsque les premiers rois de la Ire dynastie d’Ur commencèrent à régner dans la seconde moitié du IVe millénaire avant J.-C. Lorsque ces tombes furent creusées, elles n’étaient qu’à environ 30 cm sous le niveau du terrain environnant, mais elles reposent aujourd’hui à 4,5 ou 6 mètres sous les décombres accumulés pendant cinquante siècles. Les tombes les plus récentes furent, selon M. Woolley, construites vers 3000 avant J.-C., et les plus anciennes environ 500 ans plus tôt. Parmi les objets trouvés dans la couche la plus basse des tombes se trouvaient deux sceaux-cylindres portant chacun le nom d’un roi d’Ur qui régna sur la ville plusieurs centaines d’années avant le début de son histoire en tant que grand centre commercial. Dans la couche supérieure, les sceaux-cylindres sont inscrits avec les noms des officiers de la maison de la fille de Sargon d’Agade, vers 2600 avant J.-C. Cette princesse était la Grande Prêtresse du dieu-Lune d’Ur.
Les quatre principales méthodes d’enterrement étaient les suivantes : (1) Le corps, vêtu de ses vêtements habituels, était enveloppé dans une natte et déposé sur une natte au fond de la tombe ; les vases, armes, ornements, etc., étaient disposés tout autour. (2) Le corps était placé dans un cercueil en osier, avec les petits objets ; les vases en poterie, en pierre, etc., étaient regroupés autour. (3) Le corps était déposé dans un cercueil en bois, avec les objets destinés à être enterrés avec lui, certains étant enfermés dans de petits coffres. (4) Le corps était déposé dans un cercueil ovale en argile. Dans les tombes les plus anciennes, des traces de crémation partielle ont été retrouvées. Le problème de la façon dont les premiers Sumériens se débarrassaient de leurs morts est maintenant résolu. De même que les Égyptiens enterraient leurs morts sur la rive ouest du Nil, les Sumériens transportaient également les corps de leurs morts à travers le grand canal qui coulait le long du mur ouest de la ville d’Ur, et les enterraient dans le désert occidental.
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Avant la fin de la saison, des sceaux-cylindres portant les noms de cinq premiers rois, dont trois étaient inconnus de l’histoire, ont été découverts. Le sceau-cylindre en lapis-lazuli de la reine Nin-Kur-Nin, au nom de son époux Mes-anni-padda , fondateur de la Ire dynastie d’Ur, a été retrouvé. Plusieurs rois de cette dynastie étaient jusqu’alors considérés comme mythiques.
Sous la couche noire qui recouvre les tombes de la période 3000 av. J.-C., les tombes les plus riches ont été découvertes. On y a découvert des tablettes d’argile, inscrites en écriture semi-pictographique, et des sceaux portant les noms de rois inconnus dans l’histoire. Parmi les autres découvertes importantes, on peut citer : (1) Huit plaques de coquillages décorées de motifs linéaires (voir Planche XV) et de figures animales ; les lignes sont colorées, rouge et noir. (2) Un échiquier royal, composé de 20 plaques de coquillages, décoré de motifs linéaires et d’incrustations de pâte rouge et de lapis-lazuli, et encadré de lapis-lazuli, d’ivoire et de nacre. Il s’agit de l’équivalent sumérien des damiers découverts dans les tombes égyptiennes, et semble indiquer que les Sumériens, tout comme les Égyptiens, croyaient que leurs morts s’amusaient à jouer à un jeu similaire aux échecs dans l’Autre Monde.
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Mais la plus grande découverte fut faite juste avant la fin de la saison. À environ 5,5 mètres sous terre, M. Woolley découvrit un trésor d’outils et d’armes en cuivre. Il s’agissait de jeux de ciseaux et de faisceaux de lourdes pointes de lance, auxquels se trouvaient deux ciseaux et une pointe de lance en or. Des recherches plus poussées mirent au jour d’autres armes en cuivre, des carquois de flèches, des pointes de lance, une masse d’armes, des fers de hache et des pièces d’arc. Autour de ces objets se trouvaient des pendentifs en cornaline, lapis-lazuli et or, le lien d’un arc en or, une herminette en or massif dont le manche en bois était recouvert de plâtre peint en rouge et cerclé d’or fin. Un peu à l’écart se trouvait un baudrier en argent, auquel était attaché un coffret de toilette en filigrane d’or, contenant une pince à épiler, une cuillère et un stylet, tous en or, suspendus à un anneau d’argent. À proximité se trouvait un poignard (voir Planche XIV, n° 2). La poignée est formée d’une seule pièce de lapis-lazuli de couleur profonde, parsemée d’or, et la lame est en or bruni ; le fourreau est en or massif. Le dos de ce dernier est uni, à l’exception de deux lignes de perles simples, mais le devant est entièrement recouvert d’un motif complexe en filigrane. Le poignard et son fourreau sont des merveilles de conception et de fabrication, et comme ils ont été fabriqués il y a au moins cinquante-cinq siècles, ils comptent parmi les plus anciens et les plus beaux exemples d’orfèvrerie au monde.
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Toutes les antiquités les plus importantes, dont les administrateurs du British Museum se sont partagé le patrimoine, sont exposées dans les salles babyloniennes du musée et sont visibles jour et nuit. M. Woolley a rédigé et publié chaque année en octobre dans The Antiquaries’ Journal un rapport détaillé, accompagné d’excellents plans et de nombreuses plaques photographiques, sur les travaux effectués à Ur durant l’hiver précédent. Le lecteur souhaitant des informations plus complètes est prié de s’y référer. Les administrateurs du British Museum ont également décidé de publier un rapport scientifique complet sur les travaux, avec cartes, plans et photographies. Le premier volume de ce rapport, qui traite de la découverte du temple d’A-an-ni-pad-da à Tall al-Ubêd, près d'Ur, par le Dr H.R. Hall, et de l'achèvement de ses fouilles par M. Woolley, est déjà paru. Un ouvrage plus petit sur le temple de Tall al-
Ubêd est en cours de préparation par le Dr HR Hall, et M. CJ Gadd, du British Museum, écrit l’histoire d’Ur depuis l’époque des Sept Rois Mages qui prospérèrent avant le Déluge jusqu’à la chute finale et la décadence de la ville vers 300 avant J.-C.