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KÂO-YÂO était ministre du Crime auprès de Shun et est toujours célébré en Chine comme le modèle de tous les administrateurs de justice. Il existe peu, voire aucun détail fiable sur son histoire. Sze-ma Khien raconte que Yü, lors de son accession au trône, fit de Kâo-yâo son principal ministre, dans l’espoir qu’il lui succède, mais que ce projet fut contrecarré par la mort de Kâo-yâo. Or, si une telle tradition avait existé à l’époque de Mencius, il l’aurait probablement mentionnée en défendant Yü, accusé d’être inférieur à Yâo et Shun, qui cédèrent le trône au plus digne, tandis qu’il le transmettait à son fils. Le nom de Kâo-yâo était Yen, mais ses représentants furent anéantis lorsque la principauté qui leur appartenait fut anéantie sous la dynastie de Kâu par l’ambitieux État de Khû. Il existe encore en Chine une famille portant le nom de Kâo, prétendant descendre de cet ancien digne ; mais Kâo et Yâo doivent être pris ensemble dans le Shû comme son nom.
Les « Conseils » du Livre ne semblent pas adressés directement à Shun, mais se trouvent dans une conversation entre Yü et Kâo-yâo, ce dernier étant l’orateur principal. L’ensemble peut être divisé en quatre chapitres : le premier énonce le principe selon lequel, en matière de gouvernement, l’important pour le dirigeant est de poursuivre sa vertu, ce qui se reflète dans sa connaissance et le choix des hommes à occuper, assurant ainsi le repos du peuple ; le deuxième illustre comment les hommes peuvent être reconnus ; le troisième traite du repos du peuple ; dans le quatrième, l’orateur affirme la justesse de ses sentiments et exprime humblement son désir d’aider le souverain.
1. En examinant l’antiquité, (nous constatons que) Kâo-yâo a dit : « Si (le souverain) poursuit sincèrement la voie de sa vertu, les conseils (qui lui sont offerts) seront intelligents et les aides (d’avertissement qu’il reçoit) seront harmonieuses. » Yü a dit : « Oui, mais explique-toi. » Kâo-yâo a dit : « Oh ! qu’il soit attentif à sa culture personnelle, avec des pensées qui vont loin, et ainsi il produira une bonté généreuse et une observance méticuleuse des distinctions entre les neuf branches de sa parenté. Tous les intelligents (aussi) s’efforceront à son service ; et ainsi, du proche, il atteindra le lointain. » Yü a rendu hommage à ces excellentes paroles et a dit : « Oui. » Kâo-yâo a continué : « Oh ! « Il s’agit de connaître les hommes et de donner le repos au peuple. » Yü dit : « Hélas ! Atteindre ces deux choses pourrait bien être une difficulté même pour le Tî. Quand (le souverain) connaît les hommes, il est sage et peut placer chacun dans la fonction pour laquelle il est digne. Quand il donne le repos au peuple, sa bonté est ressentie, et la race aux cheveux noirs le chérit dans son cœur. Quand il peut être (ainsi) sage et bon, quelle raison aura-t-il de s’inquiéter d’un Hwan-tâu ? Que demander de plus à un seigneur de Miâo ? Que craindre de quiconque aux belles paroles, à l’apparence insinuante et à la grande ruse ? »
2. Kâo-yâo dit : « Oh ! il y a en tout neuf vertus à découvrir dans la conduite, et quand nous disons qu’un homme possède (une) vertu, c’est comme dire qu’il fait telle ou telle chose. » Yü demanda : « Quelles (sont les neuf vertus) ? » Kâo-yâo répondit : « L’affabilité alliée à la dignité ; la douceur alliée à la fermeté ; la franchise alliée au respect ; l’aptitude au gouvernement alliée à une prudence respectueuse ; la docilité alliée à l’audace ; la droiture alliée à la douceur ; une négligence facile alliée à la discrimination ; l’audace alliée à la sincérité ; et la bravoure alliée à la droiture. (Lorsque ces qualités sont) manifestées, et cela continuellement, n’avons-nous pas le bon (officier) ? Lorsqu’il y a un [ p. 55 ] En faisant preuve de trois (de ces) vertus, leur possesseur pouvait, matin et soir, réguler et égayer le clan (dont il était le chef). Lorsqu’il y a une culture quotidienne, sévère et respectueuse de six d’entre elles, leur possesseur pouvait diriger brillamment les affaires de l’État (dont il était investi). Lorsque (ces hommes) seront tous reçus et promus, les possesseurs de ces neuf vertus seront employés au service (public). Les hommes de mille et les hommes de cent seront à leurs fonctions ; les différents ministres s’émuleront les uns les autres ; tous les officiers accompliront leurs devoirs au moment opportun, en observant les cinq saisons (car les différents éléments prédominent en eux), et ainsi leurs divers devoirs seront pleinement accomplis. Que (le Fils du Ciel) ne donne pas aux détenteurs d’États l’exemple de l’indolence ou de la dissolubilité. Qu’il soit prudent et craintif, (se souvenant qu’) en un jour ou deux jours, dix mille sources de choses peuvent se produire. Qu’il n’encombre pas ses différents officiers de leurs postes. L’œuvre appartient au Ciel ; les hommes doivent agir pour elle !
3. Du Ciel viennent les relations (sociales) avec leurs différents devoirs ; nous sommes chargés de (l’application de) ces cinq devoirs ; et voici ! nous avons les cinq lignes de conduite honorables [^64]. Du Ciel viennent les distinctions (sociales) avec leurs différents cérémoniaux ; de nous viennent les observances de ces cinq cérémonies ; et voici ! elles apparaissent dans une pratique régulière [^65]. Lorsque (le souverain et les ministres font preuve) d’une révérence commune et d’un respect unifié pour celles-ci, voici ! la nature morale (du peuple) est harmonieuse. Le Ciel distingue gracieusement les vertueux ; n’y a-t-il pas cinq vêtements, cinq décorations pour eux [1] ? Le Ciel punit les coupables ; n’y a-t-il pas cinq châtiments, destinés à être utilisés séparément à cette fin ? L’affaire du gouvernement ! Ne devrions-nous pas y être sérieux ? Ne devrions-nous pas y être sérieux ?*
« Le Ciel entend et voit comme notre peuple entend et voit ; le Ciel approuve et déploie ses terreurs avec éclat, comme notre peuple l’approuve et voudrait les révérer ; tel est le lien entre les mondes d’en haut et d’en bas. Combien les maîtres des territoires doivent être respectueux ! »
4. Kâo-yâo dit : « Mes paroles sont conformes à la raison et peuvent être mises en pratique. » Yü dit : « Oui, vos paroles peuvent être mises en pratique et couronnées de succès. » Kâo-yâo ajouta : « (Quant à cela) je ne sais pas, mais je souhaite être utile chaque jour. Puisse (le gouvernement) être parfait ! »
55:1 Les cinq devoirs sont ceux qui appartiennent aux cinq relations qui sont les constituants de la société : celles entre mari et femme, père et fils, dirigeant et sujet, frère aîné et cadet, ami et ami. ↩︎