Lü était le nom d’une des tribus primitives de l’ouest, située au-delà des provinces de Kâu. Sa situation ne peut être définie plus précisément. Son peuple, en hommage au roi Wû et impressionné par le sentiment de sa puissance croissante, lui envoya quelques-uns de ses chiens. Après les avoir reçus, ou avoir laissé entendre qu’il le ferait, le Grand-Gardien lui fit des remontrances, lui montrant que recevoir de tels animaux serait contraire aux précédents, dangereux pour la vertu du souverain, et ne constituait pas la meilleure façon de traiter avec les tribus et les nations éloignées. Le Grand-Gardien, suppose-t-on, était le duc de Shâo, auteur de l’Annonce qui constitue le douzième livre de cette partie. Ce livre est l’une des « Instructions » du Shû. [ p. 150 ] 1. Après la conquête de Shang, la voie étant ouverte aux neuf tribus de l’Î [^158] et aux huit de l’Man [^158], la tribu occidentale de Lü envoya en tribut quelques-uns de ses chiens, sur lesquels le Grand-Gardien fit « les Chiens de Lü », en guise d’instruction au roi.
2. Il dit : « Oh ! les rois intelligents prêtaient une attention particulière à leur vertu, et les tribus sauvages de tous bords leur reconnaissaient leur soumission. Les plus proches comme les plus éloignées offraient les produits de leurs pays : robes, nourriture et vaisselle. Les rois exposaient ensuite les biens ainsi obtenus par leur vertu, les distribuant aux princes des États portant des noms différents du leur, pour les encourager à ne pas négliger leurs devoirs. Les objets les plus précieux et les morceaux de jade, ils les distribuaient à leurs oncles à la tête des États, augmentant ainsi leur attachement au trône. Ceux qui les recevaient ne méprisaient pas ces biens, mais y voyaient le pouvoir de la vertu. »
La vertu parfaite ne tolère aucune familiarité méprisante. Lorsqu’un dirigeant traite les hommes supérieurs avec une telle familiarité, il ne peut obtenir qu’ils lui donnent tout leur cœur ; lorsqu’il traite ainsi les hommes inférieurs, il ne peut obtenir qu’ils déploient pour lui toute leur force. Qu’il évite d’être asservi à ses pensées et à ses yeux, et s’efforce d’être correct dans toutes ses actions. En négligeant les relations humaines, il ruine sa vertu ; en s’amusant dans des choses (de simple plaisir), [ p. 151 ] il ruine ses objectifs. Ses objectifs devraient reposer sur ce qui est juste ; il devrait également écouter les paroles dans leur rapport à ce qui est juste.
« Lorsqu’il ne commet pas ce qui est inutile au détriment de ce qui est utile, son mérite peut être complété. Lorsqu’il n’accorde pas plus de valeur aux choses étrangères qu’aux choses utiles, son peuple pourra subvenir à ses besoins. Il n’entretiendra même pas de chiens et de chevaux étrangers à son pays. Il ne nourrira pas non plus de beaux oiseaux ni d’animaux étrangers. Lorsqu’il ne considère pas les choses étrangères comme précieuses, des étrangers viendront à lui ; lorsqu’il y a une valeur réelle qui lui est précieuse, son peuple proche sera en paix. »
« Oh ! Soyez toujours sérieux, matin et soir. Si vous ne prêtez pas une attention jalouse à vos petites actions, votre vertu en souffrira dans les grandes choses ; en élevant un monticule de neuf brasses, l’ouvrage risque d’être inachevé faute d’un seul panier (de terre). Si vous poursuivez réellement cette voie (que je vous indique), le peuple préservera ses biens et le trône se transmettra de génération en génération. »