Plusieurs histoires conventionnelles, qui ressemblent à celles que l’on raconte au sujet des patriarches d’Hébron, sont racontées au sujet du prophète David et de son tombeau (En Nebi Daûd) à Jérusalem. En voici quelques exemples :
"Sous le règne du sultan Murad, le gouverneur de Jérusalem, Mahmûd Pacha, était un homme juste et intègre qui favorisait les Juifs. Mais comme à cette époque, les postes gouvernementaux [90] pouvaient être achetés par n’importe qui, un Arabe sans valeur, connu sous le nom d’Ibn Faraj, réussit à obtenir le poste du Pacha de Damas, qui était en même temps gouverneur général de Syrie et de Palestine. Ibn Faraj se révéla extrêmement tyrannique et rapace, et opprima grandement les Juifs de Jérusalem. Un jour de sabbat (Elul II. A.M. 5385, c’est-à-dire 1625 après J.-C.), il attaqua la synagogue pendant les heures du service divin, et fit jeter en prison quinze des Juifs les plus respectables. Ils ne furent libérés qu’après avoir payé 3000 ducats. De tels événements se reproduisaient fréquemment, et les Juifs furent, en conséquence, très appauvris. Beaucoup d’entre eux cherchèrent à fuir, mais en furent empêchés par des gardes spécialement postés à cet effet. Enfin, ils réussirent à informer le sultan de l’état des affaires à Jérusalem. Le Padishah fut très irrité lorsqu’il apprit tout cela et, le 22 Kislev 5386 (décembre 1626), il envoya l’ordre au pacha de Damas de renvoyer l’indigne fonctionnaire. Ibn Faraj, cependant, réussit à corrompre non seulement le gouverneur général, mais aussi l’agha, ou commandant des troupes du château. Il se mit alors en colère sans retenue, et de nombreux juifs languirent en prison parce qu’ils ne pouvaient satisfaire à ses exigences rapaces.
Soudain, le mardi 12 Kislev A.M. 5387, il prit la fuite, car, comme le raconte un document imprimé à Venise l’année suivante et attesté par tous les principaux fonctionnaires de la communauté juive de Jérusalem, un personnage âgé et vénérable, vêtu d’un manteau de pourpre, lui apparut en [91] rêve et allait l’étrangler. Dans sa terreur, il demanda pourquoi ? et on lui répondit « que le roi David voulait venger ses sujets ». Après avoir longtemps et piteusement supplié qu’on lui laisse la vie sauve, on lui accorda la vie sauve, à condition qu’il quitte Jérusalem et la Terre Sainte au lever du soleil le lendemain matin. [1]
Un autre gouverneur musulman de Jérusalem, en visite à En Nebi Daûd, désira vivement voir le tombeau lui-même. Il entra donc dans la pièce située juste au-dessus et regarda à travers un trou dans le sol. Ce faisant, un poignard orné de pierres précieuses glissa de sa ceinture et tomba dans le caveau. Inquiet de cette perte, il fit descendre l’un de ses serviteurs par une corde pour le chercher. Cet homme resta si longtemps en bas que les autres, inquiets, tirèrent sur la corde et remontèrent son corps sans vie. Une deuxième et une troisième tentative pour récupérer le poignard échouèrent de la même manière ; jusqu’à ce que le gouverneur, déterminé à ne pas perdre la belle arme, ordonna au cheikh d’En Neb Daûd lui-même de descendre la chercher.
Le cheikh répondit qu’il était évident que le prophète n’aimait pas que les musulmans entrent dans son tombeau, mais que, comme il était connu pour son affection pour les juifs, le pacha ferait mieux de s’adresser au grand rabbin. Aussitôt un message urgent fut envoyé à ce dignitaire, qui invita aussitôt les juifs à jeûner et à prier pour être délivrés de la colère des musulmans d’une part, et de celle du roi David que les juifs croient « [92] vivant et actif » [2]. Il demanda trois jours de grâce pour trouver une personne disposée à entreprendre une aventure aussi désespérée. Le troisième jour, un juif se porta volontaire pour cette tâche, espérant sauver la communauté.
Ayant purifié son âme et son corps, il fut descendu dans le caveau en présence de tous les notables musulmans de la ville. Presque aussitôt il demanda à être relevé et apparut vivant et en bonne santé, le poignard à la main. En arrivant à terre, il s’était trouvé face à face avec un vieillard d’apparence noble, vêtu d’une robe semblable à du plomb brillant, qui lui avait remis le poignard au moment où ses pieds touchaient terre et, d’un geste, lui avait ordonné de s’éloigner.
Une vieille juive, veuve, pieuse et travailleuse, lavait chez un des cheikhs d’En Nebi Daûd. Un jour qu’elle avait apporté chez lui des vêtements propres, il lui offrit de lui montrer le sépulcre de David, et elle le suivit avec grande joie. Ouvrant la porte d’une chambre, il la fit entrer, puis, fermant la porte à clé, alla droit au cadi et lui dit qu’une juive s’était glissée dans le sanctuaire, laissé ouvert quelques minutes pour aérer, et que lui, découvrant le sacrilège, l’avait enfermée pour qu’elle fût punie formellement, pour l’exemple public.
[p. 93]
Le cadi, avec d’autres musulmans, se rendit aussitôt à En Nebi Daûd, mais quand la chambre fut ouverte, on ne trouva aucune juive. Le cheikh jura solennellement qu’elle était là quand il ferma la porte à clé. « Je la connais bien, dit-il, c’était ma blanchisseuse. » « Ce n’est pas vrai, dit quelqu’un qui était là, car il n’y a pas un quart d’heure, ma servante est allée chez elle avec un paquet de linge et l’a vue en train de travailler. » Les inquisiteurs se rendirent à la maison de la femme. Elle était là, en train de faire sa lessive, prête à jurer qu’elle était là depuis le point du jour.
Convaincu de son sérieux, le cadi accusa le cheikh d’En Nebi Daûd de parjure et le fit punir sévèrement. Ce ne fut qu’à l’approche de sa mort qu’elle raconta le véritable récit de son aventure. Puis, ayant convoqué les anciens de la communauté juive, elle avoua que le cheikh l’avait enfermée dans la chambre obscure, comme il l’avait dit, mais qu’un vieillard d’apparence noble, vêtu d’un vêtement comme de plomb brillant, lui était apparu aussitôt en lui disant : « Ne crains rien, mais suis-moi. » Il l’avait conduite par un sentier qui serpentait au cœur de la terre jusqu’à une porte qui s’ouvrait sur un tas de fumier du Meydân. [3] Là, il lui ordonna de rentrer immédiatement chez elle et de se mettre au travail, et de ne publier sous aucun prétexte ce qui lui était arrivé.
91 : 1 Rabbi Schwartz, « Das Heilige Land », note de bas de page, pp. 402-403. ↩︎
92:1 Dans la prière spéciale pour la bénédiction mensuelle de la lune, ces mots apparaissent : « David Melekh Israël khai va kayam » (David, roi d’Israël, est vivant et actif). ↩︎
93:1 Le Meydân se trouve dans le quartier juif, sur le versant nord-est du traditionnel mont Sion. L’endroit exact où sortait la blanchisseuse était, jusqu’au début de 1905, marqué par une grande pierre octogonale, aujourd’hui disparue. ↩︎