versets 1 à 6.
Restons ! pleurons, tandis que la mémoire tente de retracer
La demeure entourée de sable de la belle perdue depuis longtemps ;
Bien que les vents violents aient balayé la plaine sablonneuse,
Il reste encore quelques traces légères de cet endroit.
Mes camarades tenaient leurs coursiers à mes côtés,
Et « Ne cédez pas, ne cédez pas au désespoir ! » criaient-ils.
(Les larmes furent ma seule réponse ; mais à quoi bon
Des larmes versées sur le sable, ou des soupirs sur la tempête ?)
« La même fortune, et tes larmes les mêmes,
Quand les brillants Howaira et Rebaba sont arrivés
Pour dire adieu sur le front gonflé de Mosel,
Et t’a laissé en deuil, comme tu le fais maintenant !
« Pensez-vous – ah, pensez-vous que j’oublie le jour
Qui a arraché ces demoiselles de mon âme,
Qui a fait un adieu en quittant ces charmilles,
Doux comme un vent d’est sur les champs de fleurs ? » — Ret. Rev.
v. 18. Le mot thiyáb (vêtements) dans ce couplet est pris par certains commentateurs pour signifier « cœur » ; et c’est dans ce sens qu’il est utilisé dans le Coran : « tes vêtements [c’est-à-dire le cœur] purifient ». Chez les Arabes païens, un divorce consistait en ce que l’homme retirait ses vêtements de sa femme, et la femme retirait les siens de lui. Le poète dit donc en effet : « S’il y a quelque chose en moi qui t’offense, alors retire tes vêtements de mes vêtements, ton cœur du mien. »
v. 23. Les Pléiades. — Il est très habituel dans tous les pays de faire de fréquentes allusions à l’éclat des luminaires célestes qui donnent leur lumière à tous, mais les métaphores qui en sont tirées ont une beauté supplémentaire si nous [374] les considérons comme faites par une nation qui passe la plupart de ses nuits en plein air ou sous des tentes, et voit par conséquent la lune et les étoiles dans leur plus grande splendeur. — Sir W. Jones : Essai sur la poésie des nations orientales.
v. 31. Wejrah est une étape sur la route de La Mecque à El-Basrah, à 40 milles, ou 3 étapes, de la première, et très fréquentée par les vaches sauvages. La mention du regard qu’une vache ou une biche sauvage jette sur son petit, moment où ses yeux sont les plus beaux et les plus tendres, en comparaison avec les yeux d’une belle femme, est courante dans la poésie arabe ancienne. — Lyall. (Voir Lebid. Mo’all. v. 14, et Tarafa’s Mo’all. v. 32.)
versets 22-33.
Une fois à travers les rangs, à l’heure sombre de minuit,
Parmi les tribus hostiles, j’ai cherché le refuge de la jeune fille,
Quand brillaient les Pléiades dans le globe étoilé,
Comme des paillettes d’or sur une robe azur.
Dès que je suis arrivé, j’ai vu sa silhouette penchée
En regardant avec impatience depuis la tente d’ouverture.
« Par le ciel ! » murmura-t-elle en lui tendant la main,
« Je me confierai en toute sécurité à un cœur si courageux ; »
Nous nous sommes levés et, glissant sur la plaine silencieuse,
Elle a balayé nos pas avec sa traîne flottante.
Une plaine que nous avons atteinte sous le nuage de la nuit,
Dont les collines sablonneuses cachaient notre fuite
À l’abri de l’ennemi. Par ses cheveux ondulants
Dans mon cœur tendre j’ai dessiné la belle tremblante :
Enivré, je contemplai sa poitrine polie,
Lisse comme un miroir placé dans son gilet;
Ou comme un œuf d’autruche, d’un blanc nacré,
Laissé dans le sable et à moitié exposé à la vue.
La jeune fille timide détourna son visage,
Les yeux détournés, j’évitais mon étreinte grossière,
Elle leva son cou arqué dans la fierté consciente de sa vertu,
Puis, comme le faon sauvage, il regarda d’un côté à l’autre.
Ses tresses noires de jais s’égaraient sur son épaule,
Comme des dattes en grappes à l’ombre des palmiers.—R. R.
[p. 375]
v. 33. « Ses cheveux, comme des grappes de dattes groupées sur le palmier » — une comparaison favorite des anciens poètes d’Arabie ; également celle des tresses d’une jolie fille avec les branches de la vigne : voir les vers du Roman d’Antar, p. 191 du présent volume.
v. 56. « Comme du henné sur des boucles grises flottantes » — voir v. 15 du Poème du Manteau d’El-Būsīrī, où le poète dit que s’il avait su que ses cheveux gris lui feraient des reproches, il les aurait teints avec du pastel. — Les feuilles de l’arbre à henné (Lawsonia inermis, aussi appelé troène égyptien) sont utilisées par les femmes du Caire pour teindre certaines parties des mains et des pieds. — Lane.
v. 58. Le commentaire de Zauzanî dit que les génisses sauvages sont comparées aux perles du Yémen car leurs extrémités sont noires, tandis que le reste est blanc. Les onyx sur le cou d’un jeune homme qui avait de nombreux oncles des deux côtés de sa famille pour le caresser et le parer seraient d’une qualité supérieure.
v. 73. La comparaison d’un nuage déchargeant son fret sur le désert à un marchand étalant ses riches ballots, doit être considérée comme particulièrement appropriée dans un climat où la pluie tombe comme une bénédiction sur le sol desséché.
v. 74. « Boire tôt un vin généreux. » Le vin du matin est loué par-dessus tout par les poètes anciens. Dans son ouvrage intitulé El-Marj-en-nadir (« le pré vert »), Mohammed ibn Abi Bekr el-Usyûtî dit à propos du sabûh ou breuvage du matin : « Les poètes font mention du vin du matin de préférence au vin bu à d’autres moments, parce que dans les temps anciens les rois et autres avaient l’habitude de préférer boire le matin, et parce que le cœur était alors libre de tout souci ou de toute pensée des obstacles et des calamités de la Fortune ; aussi parce que ceux qui se levaient tôt pour boire devançaient ceux qui blâmaient leurs excès : car c’est la coutume de celui qui blâme un noceur le matin pour ce qu’il a fait la nuit précédente, parce que c’est le moment où il redevient sobre et se remet de son ivresse. » — Lyall : Notes sur le Mo‘all de Lebīd. (cité de Kosegarten : Mo‘all. de ‘Amr Kulth. p. 49).—Voir Tarafa, vv. 46 et 58 ; Lebīd, vv. 60, 61 ; et Note sur Amru, v. 1.